GENÈVE

Jean-Claude SEGUIN

Genève est le chef-lieu du canton de Genève (Suisse). 

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Les Kinétoscopes de Casimir Sivan (Société des Arts/Rue du commerce, 16 mars-20 avril 1895)

Dès le 8 mars 1895, Le Genevois annonce " l'ouverture de l'exhibition des merveilleux kinétoscopes Edison au 2 rue du Commerce, maison Mandowski  dès le 18 mars à 11 h" et donne le titre de quelques films : Caicedo, Ballers d'enfants, Forgerons (Le Genevois, Genève, 18 avril 1895). C'est Casimir Sivan, agent pour la Suisse des appareils Edison, qui installe les premiers kinétoscopes à Genève, en mars 1895. Dès le 16 mars, une conférence est organisée à la Société des arts :

Réunions-Convocations-Concerts
Samedi 16 mars
[...]
8 h. s. Société des arts (Classe d'industrie et de commerce). Causerie sur le phonographe et le kinétoscope, dernières invention d'Edison, par M. le professeur Dussaud.-Audition du phonographe et exhibition du kinétoscope par M. Casimir Sivan, agent pour la Suisse des appareils Edison.


Le Journal de Genève, Genève, 10 mars 18985, p. 3.

 Quelques jours plus tard, le même journal offre un article assez long qui permet aux Genevois de se faire une idée de la nouveauté que représente le kinétoscope :

Le Kinétoscope d'Edison. — Nous engageons vivement nos lecteurs à rendre nos lecteurs à rendre une visite aux kinétoscopes que M. Sivan, agent pour la Suisse des appareils Edison, vient d'installer, rue du Commerce, nº 2, et qui seront visibles pour le public à partir de demain lundi.
Tout le monde connaît le jouet d'enfant connu sous le nom de phénakisticope, dans lequel une série d'images représentant, dans la suite de leurs principales attitudes successives, un jongleur, un enfant sautant à la corde, une danseuse, un cheval au galop, ou tout autre personnage ou animal en mouvement, passe rapidement sous les yeux du spectateur et lui donne l'illusion d'une seule image animée. Le kinétoscope n'est pas autre chose que cet appareil considérablement perfection- né par l'application des dernières inventions dans le domaine de la photographie instantanée et de l'électricité.
Une scène quelconque est photographiée à raison de quarante-six instantanés à la seconde, soit 2760 à la minute. Les épreuves ainsi obtenues, grandes à peu près comme un timbre-poste, sont fixées sur un long ruban qui se déroule avec la même vitesse dans l'intérieur d'une caisse oblongue d'un mètre de hauteur environ, et viennent passer sous une ouverture garnie d'une lentille qui les grossit jusqu'aux dimensions d'une photographie carte de visite. Un écran en métal, percé d'une étroite ouverture, tourne avec une extrême rapidité entre le ruban et une petite lampe électrique, de sorte que chaque image est vivement éclairée, pendant un temps très court, au moment où elle passe sous l’œil du spectateur. Par suite du phénomène physiologique de la persistance de l'impression sur la rétine, l’œil ne perçoit pas l'intervalle très court qui sépare les images, et l'on croit voir une photographie où tous les personnages agiraient et remueraient comme des êtres vivants.
L'un des appareils exposés à la rue du Commerce nous montre un bar américain. Des consommateurs entrent, se font servir, paient. Une querelle s'élève entre deux d'entre eux. Des gestes on en vient aux coups de poing. Surviennent deux nouveaux personnages qui saisissent les combattants et les expulsent. Un autre kinétoscope nous introduit dans une boutique de coiffeur. Dans le troisième, deux souples et vigoureux gaillards se livrent à la lutte classique, s'empoignent, se soulèvent, se culbutent, jusqu'à ce que l'un d'eux ait touché la terre de la nuque. Cette dernière scène est merveilleuse, et l'œil suit sans aucune peine tous les mouvements des petits personnages.
A tout ce petit monde, il ne manque que la parole, et l'on y viendra lorsqu'on aura trouvé le moyen de combiner le kinétoscope avec le phonographe. M. Sivan en exhibe tout justement dans le même local un excellent, qui sert à ses auditeurs des airs d'opéras, des morceaux d'harmonie et de fanfare, des récitations, des conversations de café. C'est le théâtre, le concert et la vie réelle réunis dans un espace de quelques mètres carrés. 
Bref, le spectacle que nous offre M. Sivan est aussi amusant qu'instructif, et tous les parents voudront y conduire leurs enfants.


Journal de Genève, Genève, 17 mars 1895, p. 3.

Ce que Casimir Sivan vient d'installer à Genève, rue du Commerce, c'est un kinetoscope parlor où plusieurs appareils fonctionnement simultanément en offrant des vues différentes. Si la première partie de l'article est destinée à faire comprendre le fonctionnement du nouvel appareil Edison, la fin décrit un certain nombre de vues Edison parmi les plus classiques : A Bar Room Scene ou New Barber Shop. Les séances se succèdent jusqu'au 20 avril 1895. Casimir Sivan va alors entreprendre une tournée dans la Confédération Helvétique et se rend à La Chaux de Fonds, en mai.

Les kinetoscopes et le kinétophone de Casimir Sivan ([15] septembre-[décembre] 1895)

Casimir Sivan va rouvrir en septembre 1895 son kinetoscope parlor mais en y ajoutant une nouvelle invention d'Edison, le kinétophone, combinaison du kinetoscope et du phonographe :

Kinétophone.- MM. Sivan et Ce viennent de rouvrir, rue du Commerce, 2, leur exposition de kinétoskopes et de phonographes Edison. Ils y ont ajouté un kinétophone, combinaison du phonographe et du kinétoskope, qui permet d'entendre les paroles des personnages mis en scène ou la musique accompagnant des danseuses que le kinétoscope fait évoluer aux yeux des spectateurs.


Le Journal de Genève, Genève, 15 septembre 1895, p. 3.

Le local fait peu parler de lui dans les semaines qui suivent et ça n'est finalement qu'en décembre, après les fêtes de fin d'année, que la fermeture de l'exposition des appareils a lieu (Le Genevois, Genève, 23 décembre 1895).

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