- Détails
- Création : 25 mars 2015
- Mis à jour : 9 mai 2023
- Publication : 25 mars 2015
- Affichages : 4577
MEAUX
Jean-Claude SEGUIN
Meaux, commune du département de la Seine-et-Marne (France), compte 12.833 habitants (1894).
1896
Le Cinématographe de M. Delaune (Salle de la Renaissance, 11 octobre 1896)
M. Delaune sillonne les routes de la région, au même titre que M. Armand, avec son cinématographe. Il brûle d'ailleurs la politesse à ce dernier puisqu'il arrive le premier à Meaux. Tourneur lui aussi, il privilégie les projections uniques. Celle qu'il organise ici a lieu dans la salle de la Renaissance, le dimanche 11 octobre 1896 au soir. La presse rappelle, à l'occasion, l'origine de la nouvelle invention et la relation qu'elle entretient avec le kinétoscoscope d'Edison :
Il y a 18 mois environ, tout Paris défilait, au boulevard Montmartre, devant le kinétoscope. Ce merveilleux petit instrument d'optique, inventé par Edison, était la mort du stéréoscope : à l'aide d'une fort ingénieuse combinaison de lentilles devant lesquelles passaient, avec une rapidité vertigineuse, des clichés photographiques à projection, éclairés par la lumière électrique, les spectateurs avaient la véritable illusion du mouvement. Personne de ceux qui l'ont vu n'a perdu le souvenir de la Scène chez le coiffeur, des Danses de la Loïe Fuller, des Exercices de gymnastique de l'homme-poisson, etc. Mais les proportions des objets représentés étaient relativement minimes. La découverte a fait un grand pas dans ces derniers temps, grâce aux travaux d'Edison et de MM. Lumière. Le kinétoscope a fait place au cinématographe. Les vues sont maintenant projetées, en grandeur naturelle, sur un écran, et l'illusion est complète pour les nombreux assistants, qui peuvent, ensemble, jouir du spectacle. Ce spectacle sera offert ce soir, samedi, à la salle de la Renaissance. Nul doute que les amateurs ne soient nombreux qui voudront connaître la merveilleuse invention.
Le Publicateur de l'arrondissement de Meaux, Meaux, 11 octobre 1896.
La salle de la Renaissance, inaugurée en 1889, est une dépendance du Café de l'Hôtel-de-Ville où le propriétaire, Alfred Verrier, organise de nombreux spectacles en tout genre, en particulier des concerts. C'est le Publicateur qui offre un compte rendu, mitigé, de cette séance d'un nouveau type :
La séance annoncée samedi soir, à la salle de la Renaissance, n'a pas conforté peut-être tout le succès sur lequel comptait le public. Il y a eu par-ci par-là de petits accrocs résultant de la rapidité avec laquelle l'expérimentateur, pris par le temps, avait dû procéder à son installation. Néanmoins, l'attention du public ayant été mise en éveil par l'exhibition de cette belle invention, c'est devant une salle comble que, dimanche, les expériences ont recommencé. Et elles ont parfaitement réussi. Chacun est parti émerveillé d'avoir vu, de ses yeux vu, " L'arrivée du tsar au Ranelagh ", et s'être complu aux scènes de " L'arrivée du train à la gare de Vincennes ", du " Mouvement des abords de la gare Saint-Lazare ", de " La Parisienne au bain ", des " lutteurs ", de la " Danse de la 'bourrée' " et de tant d'autres. C'était absolument vivant et, comme disait l'annonce, une autre fois " ceux qui n'ont pas vu voudront voir, ceux qui ont vu voudront revoir. "
Le Publicateur de l'arrondissement de Meaux, Meaux, 14 octobre 1896.
Le programme, curieusement, est assez voisin de celui de M. Armand et les différences restent minimes, peut-être dues simplement à la transcription du journaliste. Ainsi, L'Arrivée du train à la gare de Vincennes pourrait faire penser au film Méliès, mais dans le répertoire de M. Armand. il est question de la gare de Versailles. La prudence est donc de mise, même si certaines vues sont tout à fait identifiables comme Danse de la bourrée ou La Parisienne au bain - cette dernière, oeuvre du photographe Pirou, est commercialisée dans le format "Joly-Normandin" ou "Lumière" chez l'éditeur-revendeur Vitagraphe. Le répertoire est donc peu homogène, ce qui rend l'identification des autres vues plus délicate. Ainsi L'Arrivée du tsar au Ranelagh pourrait être l'une des nombreuses vues prises lors du voyage du Tsar en France et qui a été amplement filmé. Après cette représentation unique, M. Delaune poursuit sa tournée en se rendant à La Ferté-sous-Jouarre.
Répertoire (autres vues) : La Loïe Fuller, L’Entrée du Tzar à Paris avec le splendide défilé des troupes d Afrique et des cuirassiers (Le Journal de Seine-et-Marne, Meaux, 14 octobre 1896, p. 2), Défilé des troupes (L'Avenir de l'Aisne, 16 octobre 1896).
Le Cinématographe de M. Armand (Brasserie parisienne, 18 octobre 1896)
Le tourneur M. Armand vient d'organiser, la veille, une séance à Esbly où le succès a été au rendez-vous. À Meaux, il n'est pas le premier à présenter des vues animées, et son passage, ici encore, est finalement bien furtif. Une seule soirée est ainsi prévue à la Brasserie Parisienne :
M. Armand donnera demain soir, à 8 h 1/2, une séance de cinématographie à la Brasserie parisienne. Nous relevons au programme, indépendamment de l'histoire de Jeanne d'Arc en 30 tableaux de projections lumineuses, les reproductions photographiques animées de : 1. " Scène du déjeuner " ; 2. " Les lutteurs " ; 3. " Le couronnement du tsar " ; " Loïe Fuller " ; 5. " Les chevaux de bois " ; 6. " Le chemin de fer " ; 7. " Une sortie d'usine " ; 8. " Danse auvergnate " ; 9. " Place de la Concorde " ; 10. " La baignade "
Le Publicateur de l'arrondissement de Meaux, Meaux, 18 octobre 1896.
Bien peu d'informations, sauf sur la programmation identique, ou presque, à celles de Lagny ou d'Esbly. D'ailleurs l'autre périodique Le Journal de Seine-et-Marne passe même sous silence cette séance. Comme dans le cas de M. Delaune, qui l'a précédé de quelques jours, les cafés constituent le lieu privilégié pour ces séances cinématographiques. M. Armand poursuit sa tournée dans la Marne, département voisin.
1899
Le Royal Biograph de la Foire de Novembre (Palais des Découvertes scientifiques, novembre 1899)
C'est à l'occasion de la foire de novembre qui commence le 12 novembre et dure dix jours qu'un cinématographe, le Royal Biograph s'installe sur le champ de foire. On y retrouve aussi des habitués comme le théâtre Mathy et le cirque Cordioux :
Le Royal Biograph attire la foule au Palais des Découvertes scientifiques. Les scènes d'actualité, les tableaux les plus comiques défilent sous les yeux des spectateurs émerveillés avec netteté, sans trépidation ni scintillement.
Journal de Seine-et-Marne, Meaux, 15 novembre 1899, p. 2.
Simple entrefilet, comme cela est souvent le cas pour les cinématographes forains.
1900
Le Théâtre Pompadour (Place du Marché, 12-[22] novembre 1900)
Le théâtre Pompadour est une baraque foraine qui organise des séances de cinématographe. La famille Collinet est propriétaire de la loge. Elle s'installe à Meaux sur la Place du Marché à l'occasion de la foire de novembre :
MEAUX
La foire
Ce matin on a planté les derniers clous et chacun a regardé le ciel avec angoisse, en adressant, silencieusement, une petite prière au dieu des éléments.
Aussi bien la foire s’annonce comme très intéressante. Les attractions sont nombreuses et variées et chacun trouvera sa part dans les joies promises.
Il y a des gros sous à dépenser pour qui voudra tout voir.
[...]
Le théâtre des Lilliputiens dont les féeries et les drames pour rire feront la joie des petits comme les grands ; le théâtre Pompadour enfin qui, comme partout, fera merveille.
Journal de Seine-et-Marne, Meaux, 11 novembre 1900, p. 2.
Le succès semble au rendez-vous, en particulier pour le Théâtre Pompadour qui attire les visiteurs :
La Foire
En dépit d'un temps froid, brumeux, maussade, la place du Marché a présenté dimanche, la plus grande animation. Les diverses attractions ont réalisé de bonnes recettes ; notamment, au théâtre Pompadour (cinématographe) il y avait affluence de visiteurs, très satisfaits.
Lundi, dans l'après-midi, il y a eu foule également dans les divers établissements.
Journal de Seine-et-Marne, Meaux, 14 novembre 1900, p. 2.
1901
Le Cinématographe Lumière de M. Giel (Salle de la Renaissance, 1er mars 1901)
M. Giel est un tourneur très actif au cours des années 1900 et 1901 qui parcourt la France en présentant son programme dans de nombreuses villes où il ne reste, en général, qu'un seul jour. Il a un rôle essentiel dans la pénétration du cinématographe dans de petites communes. À Meaux, il donne une séance dans la salle de la Renaissance :
Projections animées
Nous apprenons qu'une séance très intéressante de projections animées au moyen du cinématographe Lumière aura lieu demain soir, vendredi, à 8 heures 1/2 en la salle de la Renaissance, sous la direction Giel.
Le programme comporte 40 tableaux curieux et des scènes comiques.
Les prix des places sont très modérés : un franc, 75 et 50 centimes.
Journal de Seine-et-Marne, Meaux, 1er mars 1901, p. 2
Il arrive le lendemain à La Ferté-sous-Jouarre.
Le Cinématographe de M. Giel (Café de l'Hôtel de Ville, Salle de la Renaissance, 3 août 1901)
Cinématographe
Samedi prochain, à huit heures et demie du soir, salle de la Renaissance (café de l'Hôtel de Ville), la direction Giel donnera une intéressante séance de projections animées avec un programme entièrement nouveau.
Journal de Seine-et-Marne, Meaux, 31 juillet 1901, p. 3.
Le Cinématographe du Professeur Carmelli (Champ-de-foire, [12]-[22] novembre 1901)
À l'occasion de la foire de novembre, le professeur Carmelli, qui vient de Château-Thierry, installe sa baraque foraine et son cinématographe sur le champ-de-foire :
À la Foire
Une température clémente, dite d'été de la Saint-Martin, semble saluer la foire qui s'ouvre aujourd'hui et promet le succès aux attractions variées de la place du Marché.
[...]
Nos confrères de Château-Thierry font grand éloge des exercices surprenants du prestidigitateur Carmelli, qui agrémente ses séances de curieux tableaux cinématographiques.
Journal de Seine-et-Marne, Meaux, 13 novembre 1901, p. 2.
Si le clou du spectacle reste les tours de magie du professeur Carmelli, il s'est adjoint les services d'un cinématographe, mais la presse n'en parle pas :
Cette partie du champ de foire était d’ailleurs particulièrement favorisée puisque tout à côté de ces deux établissements de premier ordre se dressait le fameux théâtre-salon, ou le professeur Carmelli, remarquable prestidigitateur comme dextérité manuelle, donnait une série de représentations dont sortaient émerveillés tous ceux qui avaient eu la bonne idée d’aller passer là quelques instants. Ceux qui ont vu Carmelli au musée Grévin et au théâtre Robert-Houdin, à Paris, où il opéra de 1898 à 1901, ne manqueront point de profiter de la bonne fortune qui l’amène en notre ville et retourneront le voir.
Journal de Seine-et-Marne, Meaux, 15 novembre 1901, p. 1.
1902
Le Biorama Sckramson (Place Lafayette, [17]-[27] mai 1902)
C'est à l'occasion de la foire de la mi-mai, qui commence le troisième samedi de mai et durent dix jours qu'un spectacle cinématographique est annoncé, le Biorama Sckramson, dont le propriétaire est Charles Schram :
Les attractions de la fête
Parmi les établissements qui vont s’installer place Lafayette à l’occasion de la mi-mai, citons le théâtre hollandais, direction Cohen ; la ménagerie Bostock et Wombwell ; un curieux manège de chevaux vivants, dirigé par M. Henrotto et qui offre à ses visiteurs d’alléchantes tombolas ; le Biorama Sckramson ; le musée mécanique Weber.
Il est à remarquer que tous les propriétaires de ces établissements sont d’origine étrangère, sauf Mme veuve Blandin, qui exhibera des phoques parfaitement dressés.
Signalons encore la loterie Potet, les Montagnes russes et un manège de vélocipèdes sans compter les tirs, boîtes à nougats, tombereaux de pain-d’épice, etc.
Il faut espérer que nous aurons, en outre, le... beau temps.
Journal de Seine-et-Marne, Meaux, 11 mai 1902, p. 1.
Quelques jours plus tard, dans une description un peu plus fournie de la foire de la " mi-mai ", le Biorama Sckramson est de nouveau évoqué :
La Mi-Mai
Depuis deux jours déjà de grands mâts défraîchis dressent vers le ciel leurs bras désolés comme pour implorer de sa clémence la faveur de quelques rayons de soleil, mais alors du vrai soleil de printemps au lieu de ce faux soleil, de ce soleil de pacotille qui ne semble pas avoir le courage de son opinion et réchauffe tout juste comme un feu de papier.
Pourvu que le thermomètre veuille bien risquer une petite ascension !
Sur la place Lafayette les carcasses des légers établissements en plein vent se couvrent peu à peu de toiles vertes, jaunes et grises et, déjà dans le déballage épars sur les pelouses se découvrent quelques superbes dorures ; mais les oiseaux en apercevant les orgues de barbarie fuient lâchement devant la concurrence et se réfugient dans le Pré Catelan.
On dit monts et merveilles du Biorama Sckramson qui vient de faire fureur à Melun et Coulommiers. L’établissement est, paraît-il remarquablement monté et partagera, sans aucun doute, avec le théâtre hollandais Cohen la faveur de la foule...
Journal de Seine-et-Marne, Meaux, 16 mai 1902, p. 2.
Il faut attendre encore plusieurs jours pour avoir une description succincte du spectacle :
Place Lafayette
On annonce, pour mardi prochain, la deuxième soirée de gala à l'Hippodrome de Paris, où l’on se divertit eu joyeuse et bonne compagnie.
Le Biorama, d’installation confortable, est très-visité. Ses visions cinématographiques sont d’une remarquable netteté et d'un caractère vraiment artistique. Les charmantes transformations lumineuses de Miss Betsy rappellent celles de Loïe Fuller et sont fort goûtées.
Spectacles variés toute la semaine prochaine.
Souhaitons pour les autres établissements moins favorisés un changement de température dont le besoin se fait tant sentir...
Journal de Seine-et-Marne, Meaux, 25 mai 1902, p. 2.
L'établissement quitte Meaux probablement vers le 27 mai.
1904
Le Grand Cinématographe américain de Lucien Hermand (11 février 1904)
Le Grand Cinématographe Américain de Lucien Hermand s'installe en février :
Cinématographe américain
Ainsi que nous l'avons annoncé, une intéressante séance cinématographique, dont le programme est des plus attrayants, sera donnée samedi soir au théâtre, par le grand cinématographe américain, une exploitation française fonctionnant exclusivement à l’électricité. Le courant est fourni par la voiture automobile du directeur.
On dit le plus grand bien des représentations qui ont été données dans les principales villes de France. La netteté et la fixité de la projection sont absolus.
La durée de la séance est de 2 h. 1/2.
Prix des places : loges, 2 fr. 25 ; pourtour et stalles, 1 fr. 75; baignoires, 1 fr. 25 ; avant scènes, 1 fr. ; galerie et parterre, 0 fr. 75 ; amphithéâtre, 0 fr. 50.
Journal de Seine-et-Marne, Meaux, vendredi 10 février 1904, p. 2.
Lucien Hermand se rend ensuite à Romilly.
1905
Le Théâtre Collinet (Place du Marché, [12]-[22] novembre 1905)
Galeries Parisiennes-Meaux, Meaux-Place Lafayette (c. 1903)
La foire de novembre commence le 12 et finit dix jours plus tard. Gaston Collinet installe son théâtre sur la place du Marché :
A la foire
La place du Marché, assez délaissée le jour, reprend un peu d'animation aux approches de huit heures.
[...]
Au théâtre Collinet, il y a eu hier une matinée exclusivement réservée à la jeunesse des écoles. M. Collinet a émerveillé tous ces enfants et son cinématographe, d'un bon fonctionnement, a continué.
Journal de Seine-et-Marne, Meaux, 17 novembre 1905, p. 2.
Galeries parisiennes, Meaux, Meaux-Place du Marché (c. 1903)