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- Création : 25 mars 2015
- Mis à jour : 21 septembre 2024
- Publication : 25 mars 2015
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NANTES
Jean-Claude SEGUIN
Nantes, chef-lieu du département de Loire inférieure (auj. Loire atlantique) (France), compte 130.000 habitants (1894).
1896
Le Kinétographe des frères Rossi (café Riche, 6 rue du Calvaire, [28] avril-10 mai 1896)
Héliotypie Armoricaine, Nantes, Nantes, rue du Calvaire (début XXe siècle)
Les frères Rossi, marchands ambulants, arrivent à Nantes dans les derniers jours du mois d'avril. Il installe leur kinétographe au premier étage du café Riche, à deux pas de la Belle Jardinière. C'est Le Petit Phare qui, le premier, annonce le spectacle :
La vie à Nantes.- Le Kinétographe : tous les soirs M. Rossi présente au café Riche un très curieux appareil : le kinétographe, appareil d'un modèle perfectionné qui obtient à chaque séance un grand succès. Les séances du kinétographe ont lieu à 9h du soir.
Le Petit phare, Nantes, 28 avril 1896.
Si le nom des exploitants nous est connu, en revanche celui de l'appareil - que l'on trouve orthographié également "kinématographe" ou "cynématographe" - ne nous éclaire guère sur son origine. D'ailleurs, l'article que publie L'Espérance du Peuple presque en même temps, ne fait qu'entretenir la confusion :
Quiconque est allé à Paris ces derniers temps a visité la très curieuse salle où M. Lumière met sous les yeux des Parisiens les images fournies par cet ingénieux instrument Hier soir, nous avons assisté au café Riche aux essais des associés de M. Lumière. Nous avons passer sous nos yeux plusieurs images américaines représentant des "Luttes", "Un duel" ; "Une danseuse" saute sur les planches, se trémousse, vous la voyez danser comme sur la scène. Les Vues françaises nous ont paru mieux réussies que les américaines, on a l'illusion complète du mouvement parisien, c'est extrêmement curieux.
L'Espérance du peuple, Nantes, 28 avril 1896.
Le contenu même de l'article montre bien que les frères Lumière n'ont rien à voir avec ces projections, ni avec des films pour certains d'ailleurs américains. On peut penser toutefois que les titres des vues animées pourraient bien provenir du catalogue Edison pour le kinétoscope. Un autre article offre quelques informations complémentaires, en particulier, sur les horaires des séances :
Le Kinétographe.-Depuis quelques jours, il vient de s'installer dans la salle du premier étage du café Riche un appareil des pus curieux : le Kinétographe ou Cynématographe, reproduisant des scènes vivantes, grandeur naturelle, complètement animées ; c'est le même qui, actuellement, fait courir toute la capitale et a suscité la plus vive curiosité dans les principales villes de France où il est installé.
Nous sommes convaincus que cet appareil obtiendra à Nante le même succès qu'il a partout où il est en ce moment.
Les séances auront lieu comme suit : 1º à 5 h. 1/2; 2e à 6 h 1/2 du soir, puis de 9 heures à 11 heures ; toutes les 1/2 heures.
Entrée principale par le café Riche. Les familles peuvent entrer par le porche, rue du Calvaire, nº6.
Prix d'entrée, 1 fr. ; moitié place pour les enfants. Ces séances scientifiques et instructives seront certainement très recherchées des familles.
M. Rossi, directeur, traite à forfait avec les Pensionnats, Collèges et Sociétés.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 4 mai 1896, p. 3.
Mais le kinétographe des frères Rossi va surtout marquer les esprits des Nantais par un grave incident qui se produit quinze jours environ après son arrivée. Alors que la projection a commencé depuis un moment, un incendie se déclare le 9 mai au soir :
L'INCENDIE DU CAFÉ RICHE
Le feu dans le Kinétographe d'Edison
Depuis une quinzaine de jours, le célèbre Kinétographe d'Edison, invention incroyable, dernier mot de la perfection photographique et des merveilles de l'électricité, s'était installé dans les salons du premier étage du Café Riche, rue du Calvaire.
Tous les jours, un nombreux public se pressait dans ces salons, gracieusement mis à la disposition de MM. Russy frères, directeurs-propriétaires du Kinétographe, par M. Baron, directeur de l'établissement.
Hier soir, à 5 h 55 exactement, MM. Russy frères procédaient à leurs expériences ordinaires et se disposaient à représenter le onzième tableau, lorsque tout-à-coup un accident se produisit, qui faillit avoir de graves conséquences. La bobine située dans la chambre noire de l'appareil et autour de laquelle étaient enroulés les fils électriques prit feu et un commencement d'incendie se déclara immédiatement. Il n'y eut pas d'explosion comme on l'a prétendu tout d'abord.
M. Désiré Russy, 37 ans, et son frère Joseph Russy, 33 ans, qui étaient placés de chaque côté de l'appareil, furent grièvement brûlés à la figure et aux mains et projetés sur le plancher.
Le premier moment de stupeur passé, on s'empressa autour d'eux. On les releva pour les transporter à la pharmacie Moyon, place du Bon-Pasteur, pendant que les spectateurs s'empressaient de descendre au rez-de-chaussé du café et que plusieurs personnes dévouées organisaient les premiers secours.
Le feu s'était communiqué aux tentures et rideaux qui entouraient le cynématographe et menaçait de se communiquer aux boiseries des salons.
Les employés de l'établissement installèrent des tuyaux sur le service d'eau de la Belle Jardinière et le foyer de l'incendie ne tarda pas à être inondé.
Les pompiers, prévenus par téléphone, arrivèrent bientôt sus la conduite de M. le capitaine Boisseau et s'empressèrent de prêter leurs concours dévoué à l'extinction de l'incendie.
À 6 heures 1/2, tout danger avait disparu.
M. Baron, propriétaire du Café Riche, évalue ses pertes à plusieurs milliers de francs. Il est assuré ainsi que le propriétaire de l'immeuble M. Orly, négociant rue Thiers. Malheureusement il n'en est pas de même pour MM. Russy frères, dont les pertes estimées à environ 16.000 fr., ne sont couvertes par aucune assurance.
Une enquête a été ouverte afin de déterminer la cause exacte de cet incendie et sauvegarder les intérêts en cause.
Les frères Russy, après avoir reçu des soins à la pharmacie L. Moyon, ont été transportés à l'Hôtel-Dieu où ils se trouvent actuellement salle 11. Leur état est assez grave. Désiré Russy paraît très fatigué.
Étaient présents sur les lieux du sinistre : MM. les officiers de Pompiers, M. Simon, capitaine de gendarmerie, M. Badon Pascal, directeur de la Compagnie d'Electricité, M. le commissaire de police du quartier, etc.
Un détail : La pendule placée dans la salle où était installé le kinétographe s'est arrêtée exactement à 5 heures 55.
Un certain nombre de vitres des fenêtres donnant sur la rue du Calvaire ont été brisées.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 10 mai 1896, p. 2.
Triste expérience pour les frères Rossi qui semblent avoir renoncé au cinématographe.
Le Kinématographe de MM. Carlet, Hamon et Royé (Cercle Catholique, 13 ru due Chapeau-Rouge (20 mai-20 juin 1896)
Les trois exploitants du kinématographe Carlet, Hamon et Royé - peut-être des personnalités locales - vont présenter au Cercle Catholique, rue du Chapeau-Rouge des vues animées avec leur appareil. Un première séance, réservée aux invités, est organisée le 20 mai au soir :
Le Kinétographe.-Avant de commencer leurs séances publiques, les directeurs du Kinétographe, dont nous avons annoncé l'installation au Cercle catholique, donnaient hier soir une première représentation sur invitations ; la salle de concert du Cercle a été pour la circonstance complètement transformée, à l'aide de draperies, en un coquet salon, de l'aspect le plus confortable.
L'appareil perfectionné qui nous est présenté est bien au point et a donné dès hier les meilleurs résultats. Il obtiendra, certainement, dans notre ville le même succès qu'à Paris.
Les vues qui défilent sous les yeux des spectateurs sont très nettes, très attrayantes. On nous assure même que la série comprendra quelques photographies locales ; la place Royale à différentes heures de la journée, par exemple.
Tout le monde voudra voir ce curieux spectacle.
Le prix d'entrée est fixé à 1 franc. Voir pour les heures aux spectacles et concerts.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 21 mai 1896, p. 3.
L'article présente l'intérêt de nous offrir quelques informations relatives à l’aménagement de la salle et annonce, un peu hâtivement, des vues locales dont plusieurs de la place Royale. Les séances publiques commencent, elles, le 21 mai :
Le kinématographe.-Demain commenceront au Cercle catholique, rue du Chapeau-Rouge, des séances de kinématographe qui auront lieu tous les jours, à 3 h., 4 h., 5 h., 8 h., 9 h. et 10 heures du soir.
Les dimanches et fêtes, outre aux heures ci-dessus mentionnées, le kinématographe sera visible à 10 heures du matin.
Le Progrès de Nantes, Nantes, 20 mai 1896, p. 3.
La présentation de ce nouvel appareil se fait, bien sûr, dans des conditions particulières dans la mesure où le précédent appareil a provoqué un incendie. Les journalistes vont donc s'atteler à désamorcer les inquiétudes en consacrant un long article au fonctionnement dudit appareil. Même si les textes techniques ne sont souvent que des copies des articles publiés, par exemple, dans La Nature, dans le cas présent les remarques sont davantage centrées sur le kinématographe :
Le Cinématographe.- Beaucoup déjà de nos lecteurs ont pu voir fonctionner dernièrement cet appareil au café Riche. Les expériences ont dû être malheureusement interrompues à la suite de l'incendie qui a éclaté dans la salle au cours d'une séance. Il est inutile d'insister sur le vif intérêt excité dans le public par cette exhibition. Mieux vaut donner une description sommaire de ce merveilleux appareil projetant des scènes animées sur un écran et presque en grandeur naturelle. La façon dont est réglé le dispositif de l'appareil est pour beaucoup dans la valeur de la synthèse du mouvement et dans l'effet de saisissement qui s'empare de nous quand nous voyons transportés sur un écran " La mer " avec ses vagues, quand nous assistons, toujours en face du même écran, à " L'arrivée en gare d'un train de voyageurs ", à " L'écroulement d'un mur " que démolissent des maçons au milieu d'un nuage de poussière, si vrai qu'on se prend à épousseter ses vêtements ; à l'" Extinction d'un incendie " où l'eau ruisselle ; aux mouvements si complexes de " La rue " : passants allant et venant, tramways, voitures diverses, et le tout tel qu'on le voit chaque jour. Le cinématographe se divise en 2 parties : l'arrière qui porte tout le mécanisme et l'avant qui porte les oculaires. Les bandes en celluloïd sur lesquelles se trouvent les images sont réunies bout à bout et peuvent permettre de voir successivement toutes ces images ; les oculaires sont montés sur une glissière verticale. Un moteur électrique commande à volonté, au moyen d'un engrenage, l'une ou l'autre bande ; la manœuvre des oculaires par un levier agit du reste en même temps sur un commutateur qui distribue le courant de telle sorte que c'est toujours la bande en face de laquelle se trouvent les oculaires qui le met en marche. Toutes les manœuvres se font au moyen d'un petit tableau placé sur l'arrière de la caisse qui porte le mécanisme à portée de la main de la personne qui exploite l'appareil, et hors de la vue du public ; il suffit de fermer un commutateur et de pousser ensuite un bouton en présentant successivement toutes ces images aux 4 oculaires. Pour représenter une scène durant 1 minute, il faut environ 900 photographies. Mais le déroulement n'est pas uniforme. Afin d'obtenir des images plus nettes et un plus grand éclat dans les projections, le mécanisme est construit de telle sorte que la pellicule reste immobile pendant les deux tiers de chaque 1/15e de seconde et se déplace pendant le troisième tiers ; pendant qu'elle se meut, un écran intercepte les rayons. En résumé, avec le cinématographe, on arrive à l'obtention la plus parfaite qui se puisse rêver de la synthèse d'une série continue d'images prises en mouvement, et donnant la plus complète illusion, à tout un auditoire, de tous les jeux de physionomie, de toutes les attitudes, de tous les mouvements, quels qu'ils soient, d'une série animée. L'application de la photographie à l'étude des mouvements n'est pas seulement intéressante en ce qui concerne les phénomènes qui se passent avec une excessive rapidité ; elle peut également servir à nous renseigner sur ceux des phénomènes qui nous échappent d'ordinaire à cause de leur extrême lenteur. Le cinématographe qui vient d'être réinstallé dans la salle du 13, rue du Chapeau-Rouge, et aux expériences duquel nous assistions hier soir, ne manquera pas d'attirer le public. Admirablement disposé, il permet au spectateur de distinguer nettement les images, tout en étant à distance. On nous annonce pour prochainement une série d'instantanés pris dans les principales "Rues -" et ''Places de Nantes". Cela ne manquera pas d'être fort intéressant.
Le Petit phare, Nantes, 21 mai 1896.
Les titres des vues présentées ne permettent pas d'identifier le ou les éditeurs des photographies animées, en revanche, les dernières lignes - mais ne s'agit-il pas d'une forme de simple publicité ? - annoncent, à nouveau, la projection de quelques vues locales dans les jours à venir. Malheureusement, la presse ne vient pas confirmer ces tournages qui sont peut-être restés à l'état de projet, ni les projections de ces vues. Un nouvel article, publié deux jours plus tard, présente l'intérêt, malgré son imprécision, de mettre les choses au point sur le type d'appareil utilisé :
Le Kinématographe.
Mettons les points sur les i. MM. Carlet, Rayé et Hamon nous prient de faire savoir que l'intéressant appareil qu'ils exploitent, salle du Chapeau-Rouge, n'est pas le même que celui qui explosa récemment au café Riche et que ses propriétaires appelaient kinétographe. Il ne faut pas non plus écrire le nom de l'appareil : « cinématographe », attendu que cette dénomination est la propriété exclusive d'une autre société, dirigée, croyons-nous, par MM. Lumière. En réalité, cinématographe, kinématographe, kinétographe, ne sont que des perfectionnements de l'appareil d'Edison, le kinétoscope. Rendons à César ce qui appartient à César.
Le Petit phare, Nantes, 23 mai 1896.
Le bref entrefilet, tout en nous donnant le noms des propriétaires de l'appareil, tente de clarifier les choses, même si les Lumière n'ont jamais eu l'exclusivité du nom " cinématographe " et que les différents appareils de projection ne sont pas, totalement, des perfectionnements du kinétoscope d'Edison. Les séances prennent fin le 20 juin 1896 :
Le kinématographe, qui a obtenu au Cercle catholique un succès justifié, donnera ses dernières représentations demain samedi, 20 courant, aux heures habituelles.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 20 juin 1896, p. 3.
Le Cinématographe Lumière (6, rue Jean-Jacques-Rousseau, 13 juin-21 juillet 1896)
Le Cinématographe Lumière arrive à Nantes à la mi-juin. Le système des concessions mis en place par les Lyonnais nécessite également la présence d'un opérateur envoyé par la maison de Monplaisir. Les deux responsables du poste, M. Richemond et M. Bernes (ou Bernis) vont installer l'appareil dans la salle où les Nantais ont pu voir le Cosmorama
Le Cinématographe
Le Cinématographe des frères Lumière qui fonctionne à Paris, au Grand Café et dans les principales villes de France et de l'étranger, va faire son apparition à Nantes.
Le succès considérable obtenu par le Cinématographe partout où il fonctionne sera certainement ratifié par le public nantais qui voudra admirer cette étonnante découverte scientifique et amusante.
C'est dans l'ancien local du Cosmorama, 6, rue Jean-Jacques-Rousseau, qu'auront lieu les séances.
Le Progrès de Nantes, Nantes, 11 juin 1896, p. 3.
Collection F. Chapeau, Nantes, Nantes-Rue Jean Jacques Rousseau (début XXe siècle)
Comme cela est souvent l'usage, une séance est réservée aux invités et en particulier à la société nantaise de photographie :
Le Cinématographe Lumière.-Ce soir samedi 13 juin aura lieu devant la presse et sous le patronage de la Société nantaise de photographie la première séance du Cinématographe Lumière.
Demain dimanche et jours suivants, les séances publiques auront lieu la semaine de 2 heures à minuit ; les dimanches et fêtes, de 10 heures du matin à minuit, 6, rue Jean-Jacques-Rousseau. Prix de la séance : 1 fr.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 14 juin 1896, p. 3.
Le compte rendu publié le lendemain permet non seulement de connaître le nom des responsables du cinématographe Lumière, mais également les titres que quelques films du programme :
Le Cinématographe Lumière.-Les directeurs du Cinématographe Lumière qui vient de s'installer rue Jean-Jacques, dans l'ancienne salle du Cosmorama, offraient samedi soir une séance particulière, aux membres de la Société nantaise de photographie et à la presse.
La salle était comble, bien entendu, quand à 9 heures la séance a commencé.
Au nom de la Société de photographie, M. Lorois a pris la parole pour remercier MM. Richemond et Bernes de leur gracieuse attention, leur souhaitant un plein succès à Nantes ; puis, après quelques mots sur les merveilles réalisées depuis quelques années dans la photographie, le défilé des vues a commencé.
Disons de suite que les sujets sont fort heureusement choisis et très variés ; citons la démolition d'un mur par des ouvriers que l'on aperçoit tout à coup enveloppés d'un nuage de poussière : une partie de cartes dans un jardin, et surtout la mer qui vient se briser contre les rochers, retombant en une pluie de gouttelettes.
En somme nous n'hésitons pas à promettre un joli succès au Cinématographe-Lumière à Nantes.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 15 juin 1896, p. 3.
Un second article publié dans Le Petit Phare permet de compléter les informations relatives à cette soirée de présentation, en particulier en évoquant quelques autres films :
Séance d'ouverture.- Un beau succès en perspective.- Hier soir avait lieu, sous le patronage de la Société de photographie la séance d'ouverture du cinématographe Lumière. Cette séance était exclusivement réservée aux membres de la presse et à la Société de patronage. L'ancienne salle du Cosmorama était à peine assez grande pour recevoir les invités. Enfin, tout le monde a pris place et, à 9h, la séance commençait. M. Lorois a pris alors la parole et après avoir souhaité la bienvenue à MM. Richemond et Bernis, il a retracé la marche de la photographie pendant ces dernières années. Après quelques mots sur la photographie des couleurs de Lippmann, il a décrit le cinématographe Lumière, auquel, en terminant, il a souhaité longue existence et bonne chance dans la ville de Nantes. M. Lorois a été chaleureusement applaudi et les expériences ont alors commencé. Il y a toujours un léger tremblement dans les projections ; mais on s'y habitue vite et cela ne gêne vraiment que pour la première épreuve. Félicitons de suite les directeurs du choix heureux de leurs sujets. Il ne suffit pas, en effet, d'avoir un bon appareil, il faut aussi le faire valoir, et cela par le choix des épreuves. Citons, au hasard, celles qui nous ont paru faire le plus plaisir : " Des joueurs de cartes " dans un jardin ; des " Ouvriers démolissant un mur " : on voit tout à coup le mur qui tombe et un nuage de poussière qui enveloppe tous les ouvriers. Enfin, peut-être le plus beau : " Des rochers battus par les vagues " : la mer vient se briser contre les rochers et retombe en gouttelettes, etc., etc. Mais c'est aux Nantais à aller voir le Cinématographe et à se rendre compte par eux-mêmes qu'on ne les a pas trompés en leur disant que l'appareil de M. Lumière est appelé à un véritable succès.
Le Petit phare, 15 juin 1896.
Malgré la qualité annoncée de l'appareil Lumière, il semble que des imperfections soient intervenues qui conduisent à susprendre les séances pour quelques jours :
Le Cinématographe Lumière
Désireux de donner à son installation la perfection souhaitée, le directeur du Cinématographe a dû fermer ses portes mardi.
Tout fonctionne maintenant de façon irréprochable, et les séances qui ont été reprises hier auront lieu sans interruption tous les jours de 2 heures à minuit ; les dimanches et fêtes de 10 heures à minuit.
Le Progrès de Nantes, Nantes, 20 juin 1896, p. 3.
L'interruption est de courte durée, puisque le 22 juin, le public est de retour (Le Petit Phare, Nantes, 23 juin 1896). Le renouvellement des vues est assez limité, malgré les annonces de presse, et, pratique habituelle, quelques jours avant la fermeture, les prix sont revus à la baisse :
Cinématographe Lumière.-Afin de rendre accessible à tous l'entrée du Cinématographe, le directeur a décidé de mettre à partir aujourd'hui 30 juin, l'entrée à 50 centimes.
Séances tous les jours de 2 heures à minuit, 6, rue Jean-Jacques-Rousseau (ancien Cosmorama).
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 1er juillet 1896, p. 3.
Finalement le cinématographe Lumière va fermer ses portes le 20 juillet :
Le Cinématographe Lumière
6, rue Jean-Jacques (ancien Cosmorama)
Par suite de traités antérieurs le Cinématographe Lumière devant quitter Nantes le 20 juillet, le Directeur a l'honneur de prévenir le public qu'il sera donné pendant 8 jours, une série de vues complètement inédites, représentant les scènes du couronnement du Czar Nicolas II, vues dont le succès est si considérable en ce moment à Paris.
Prix d'entrée : 0 fr. 50.
Le Progrès de Nantes, Nantes, 15 juillet 1896, p. 3.
Répertoire (autres titres) : L'Abreuvoir, Cavaliers et Cyclistes, Les Chapeaux, Mauvaises herbes, Bataille enfantine, Gros temps en mer (Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 20 juin 1896, p. 3), Les Champs-Elysées, L'Arrivée en voiture (Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 27 juin 1896, p. 3), 7e Cuirassiers, défilé par escadron, Pont de Buda-Pesth, Montagnes russes aquatiques, Bicyclistes, Ascension d'un ballon, Baignade en mer (Le Progrès de Nantes, Nantes, 5 juillet 1896, p. 2).
Le Cinéphotographe de Raymond Déage (Café Continental, 17-≥ 25 juillet 1896)
Le Cinéphotographe qui s'installe au café Continental à la mi-juillet est présenté par Raymond Déage (ou Diage), une figure inconnue du monde du cinématographe. L'appareil est celui qui est commercialisé par Lépée. La presse n'offre que très peu d'informations :
Le Cinétographe.-Ce soir aura lieu, dans les salons du premier du Café Continental, la première représentation du cinéphotographe, nouvel et intéressant appareil dont on nous dit le plus grand bien. Le propriétaire, M. Raymond Diage, commencera ses expériences à 8 h 1/2. Avis aux amateurs !
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 17 juillet 1896, p. 2.
Le Phare de la Loire publie une dernière annonce le 25 juillet 1896 :
LE CINÉPHOTOGRAPHE (Dernière Nouveauté)
Tous les jours, de 2 h. à 6 h. et de 8 h. à minuit, Café Continental, au premier (entrée spéciale).
Entrée : 50 centimes.
Le Phare de la Loire, Nantes, 25 juillet 1896, p. 3.
Nantes, Place Royale, Café Continental (c. 1900)
Le Cinéphotographe de Lagneau et Vernassier (Place Bretagne, 13-31 décembre 1896) → 1897
Les deux forains, Auguste Lagneau et Louis Vernassier viennent de donner quelques séances de cinéphotographe à Saumur. C'est à l'occasion de la foire d'hiver, qui dure deux mois, qu'ils installent leur théâtre, le Salon des Sciences, sur la place Bretagne qui accueille les baraques pendant les fêtes. L'ouverture a lieu le dimanche 13 décembre :
Sur la place Bretagne
[...]
Le Salon des Sciences.-Plus loin, voici le Salon des Sciences, de MM. Lagneau et Vernassier, autrement dit le Cinéphotographe. On y passe quelques instants agréables. Ces vues animées, telles que la place de la République, à Paris, où l'on voit le défilé des voitures, omnibus et piétons ; la sortie des ouvriers d'une fabrique ; les blanchisseuses ; la sortie du port de deux vapeurs bondés de voyageurs ; l'arrivée d'un train en gare ; le défilé d'un régiment musique en tête, et enfin la célèbre Loïe Fuller ; tous ces tableaux, pris sur le vif, sont absolument stupéfiants et tous les Nantais voudront voir ce spectacle.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 13 décembre 1896, p. 2.
Collection G.I.D. de Nantes, Nantes-La Place Bretagne (début XXe siècle)
Deux jours plus tard, Le Petit Phare cite un certain nombre de vues animées présentées par le cinephotographe des deux collaborateurs :
L'ouverture de la foire.- Les principaux établissements.- Près du Palais des Glaces est le Cinématographe de MM Lagneau et Vernassier. L'établissement est vaste et bien installé. Quant à l'appareil, il est égal, sinon supérieur à ceux que nous avons vus à Nantes. L'avantage que l'on trouve chez M. Lagneau, c'est, grâce à la projection, de voir des personnes de grandeur naturelle. "La sortie d'une usine", "La place de la Concorde", "Le jeu de saute-mouton", "La descente de tramway", "L'arrivée d'un train", "La nuit terrible" (scène très amusante), "Le régiment", "La lutte", "L'arrivée du yacht impérial en rade de Cherbourg", tous ces tableaux sont d'une animation et d'une vérité frappantes. Comme les tableaux représentés sont tous très moraux, M. Lagneau aura certainement la visite de la population nantaise.
Le Petit phare, 15 décembre 1896.
L'origine des vues reste malgré tout incertaine, même si l'on pourrait identifier - grâce à la connaissance de leur répertoire - quelques vues provenant du corpus Normandin. Le temps peu clément ne semble pas avoir d'influence sur le public qui se rend toujours nombreux au spectacle " très moral " que proposent Auguste Lagneau et Louis Vernassier :
Le Cinéphotographe.-Place Bretagne. La foire, cette année, a bien mal débuté, de la pluie, encore de la pluie. Aussi, les promeneurs étaient ils relativement rares. Disons cependant qu'au Cinéphotographe, il n'y paraissait guère. La foule n'a pas cessé d'assiéger la loge. Nous pouvons dire que quiconque a vu les tableaux du Cinéphotographe en est émerveillé, notamment la danse de Loïe Fuller avec sa robe aux couleurs changeantes. En outre, c'est un spectacle très moral qui permet aux familles d'y conduire enfants et jeunes filles.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 20 décembre 1896, p. 3.
Par la suite, les articles - qui sont de simples réclames - continuent de vanter les mérites du cinéphotographe et des vues en couleur :
La Place Bretagne
LE CINÉPHOTOGRAPHE
Nous avons un Cinéphotographe installé place Bretagne.
Ce sont des photographies instantanées qui sont, pour ainsi dire, saisies au passage, au moyen d'un appareil de haute précision accompagné de la fée électricité. Quiconque a vu le cinéphotographe est resté émerveillé, stupéfait.
Un nouveau perfectionnement de l'appareil permet d'annoncer les tableaux en couleurs, ce qui ne s'était pas encore fait, et, une chose qui a son charme, c'est la présentation du tableau dans l'immobilité d'abord, puis animé ensuite, ce qui permet une comparaison. Ces vues animées, telle que la place de la République à Paris, où l'on voit le défilé des voitures, omnibus et piétons ; la sortie des ouvriers d'une fabrique, etc., sans oublier la célèbre Loïe Fuller, tous ces tableaux pris sur le vif sont absolument stupéfiants et tous les Nantais voudront voir ce spectacle.
Le Progrès de Nantes, Nantes, 21 décembre 1896, p. 2.
Un nouvel article, publié à la Noël, surenchérit sans doute pour relancer l'intérêt du public nantais. Mais, là encore, nous avons affaire à une publicité à peine déguisée :
Le Cinéphotographe.-Une des plus belles applications de la photographie c'est certainement celle qui consiste à suivre les objets en mouvement et à conserver l'image des différentes positions de l'objet animé de manière à pouvoir les étudier tranquillement et aussi longtemps qu'on peut le désirer. Toutefois l'objet qui se présente ainsi au regard sous différents aspects s'il est facile à observer, n'offre rien de gracieux ni d'agréable à la vue. Ce qu'il faut, ce que le regard cherche à retrouver, c'est non pas l'objet multiplié plusieurs milliers de fois, c'est l'objet vu une seule fois mais en mouvement et tel qu'il se voit dans la réalité.
La photographie de l'objet animé voilà ce qu'il fallait réaliser et voilà ce qui a été réalisé en effet ; voilà ce que l'on peut voir tous les jours et ce que nous avons vu sur la place Bretagne, au magnifique établissement des Cinéphotographe. Nous engageons tous nos lecteurs à ne pas tarder plus longtemps à se rendre compte par eux-mêmes d'un pareil phénomène. Ils verront défiler devant eux des escadrons de cavalerie marchant en cadence parfaite, des cuirassés se mouvant au milieu des vagues ; ils verront des danseurs et des danseuses opérer les mouvements les plus comiques où les plus gracieux. En un mot ils seront émerveillés et ils retourneront voir ces spectacles aussi intéressants au point de vue scientifique qu'au point de vus amusant.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 25 décembre 1896, p. 2.
Il semble pourtant que dans les jours qui suivent des modifications sont opérées non seulement en ce qui concerne l'appareil, mais également au sujet de la programmation :
La Place Bretagne
Le Cinématographe.-Le Cinématographe de la place Bretagne ne cesse d'être envahi par un public nombreux.
Le spectacle est très attrayant et le succès qu'il obtient est pleinement justifié.
M. Lagneau s'est associé avec M. Vernassier, un mécanicien-électricien distingué, ex-contremaître d'un grand atelier de Paris, qui vient de construire un nouvel appareil perfectionné pour son établissement.
Nous avons vu ce nouvel appareil qui est une merveille de précision.
Voici le titre des tableaux de la nouvelle série : Descente du tramway ; La Ferme ; le Couronnement du Tsar ; la Mer ; le Régiment ; Sortie d'atelier ; la Loïe Fuller et, pour les curieux qui la réclament, la Mondaine au bain.
Le Progrès de Nantes, Nantes, 29 décembre 1896, p 2.
D'une part, on rappelle que Vernassier est un constructeur et qu'il présente un nouvel appareil de son cru, simplement nommé " cinématographe ". D'autre part, le répertoire est renouvelé. À force de répéter que le spectacle offert par le cinéphotographe est particulièrement moral, on pourrait pu finir par le croire... pourtant, les deux forains vont faire quelque entorse à leur moralité en présentant une vue plus audacieuse à deux jours de la fin de l'année 1896. La Mondaine au bain est le titre d'une vue du catalogue Pathé, dont la datation reste difficile à établir. Les séances se prolongent jusqu'à la fin de l'année et au-delà.
Répertoire (autres titres) : La Sortie d'une fabrique, La nuit terrible (où l'on voit un pauvre diable, mangé par les punaises, se dresser sur sa couche, se gratter avec rage, prendre sa lampe, inspecter les rideaux et finalement ne pouvant y résister, enfiler son pantalon et renoncer à dormir) (Le Progrès de Nantes, Nantes, 15 décembre 1896, p. 2).
→ 1897
L'Héliocinégraphe d'Hippolyte Petit Renaud (Photographie du Bon Pasteur, 19, rue de Feltre, 29 décembre 1896-[1897])
Les Agenais Lacroix et Perret ont mis au point un cinématographe qu'ils ont baptisé " héliocinégraphe ". L'un de ces appareils a été acquis par un photographe nantais Hippolyte Petit Renaud. C'est dans son atelier photographique, au 2e étage du 19, rue de Feltre qu'il inaugure ses séances le 29 décembre 1896, pour une soirée sur invitation. Le journaliste du Nouvelliste de l'Ouest n'a qu'une idée approximative du nom de l'appareil :
L'Héliophotographe.-Les multiples systèmes de photographies animées devaient tenter nos praticiens nantais ; l'un d'eux, non des moins habiles, M. Petit-Renaud, vient d'acquérir un Héliophotographe qu'il inaugurait hier en présence de la presse et de quelques amis et qui lui servira à offrir des séances auxquelles ses clients seront conviés à titre gracieux.
L'Héliophotographe de M. Petit-Renaud a une fixité bien supérieure à celle de la plupart des appareils analogues qui sont venus à Nantes ; en outre, il permettra à son propriétaire de prendre lui-même des vues locales, et les clients de M. Petit-Renaud, en allant assister à ses projections, pourront avoir la surprise de se voir eux-mêmes passer sur l'écran, ce qui n'est point banal on en conviendra.
L'Héliophotographe de M. Petit-Renaud est appelé à un vrai succès ; les vues sont intéressantes et mouvementées ; parmi celles qui ont défilé devant nous, citons une partie de campagne, une scène au bord de la mer, où les vagues produisent un bel effet, la place de la République, une sortie d'église, etc. Certaines de ses vues défilant en sens inverse sont très curieuses.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 30 décembre 1896, p. 2.
L'idée de Petit Renaud est surtout de faire plaisir à ses meilleurs clients en leur proposant quelques projections animées, mais il n'est pas question d'exploitation commerciale de l'héliocinégraphe. Les vues évoquées dans l'article ne permettent pas de les identifier. À noter également, les vues " à rebours " qui font toujours la joie des spectateurs. Dans une autre journal local, un autre article, très différent de l'antérieur nous permet d'en savoir davantage :
L'héliocinégraphe.- ll règne une certaine émulation (Scott) parmi les fabricants d'appareils chargés d'enregistrer photographiquement le mouvement et la vie, dans le but de trouver à ces petites machines des noms nouveaux. Tout l'arsenal des étymologies ayant pour aliment les noms grecs du soleil et du mouvement est mis à contribution ; mais le résultat est toujours le même et nous assistons à un défilé trépidant d'images qui semblent être atteintes d'ataxie ou de delirium tremens. L'appareil que nous a fait fonctionner hier soir M Petit-Renaud, l'excellent photographe de la rue de Feltre, « Petit-Renaud, dans le bocage... » comme dit Michonnet dans les Vingt-huit jours de Clairette, cet appareil, dis-je, a sur ceux que j'ai eu l'occasion de voir jusqu'à présent l'avantage de donner aux images des trépidations beaucoup moindres. En outre il permet de prendre à volonté des vues locales qui sont bien autrement intéressantes pour nous que celles prises à Brives-la-Gaillarde ou à Montélimar. M. Petit-Renaud offre à ses clients, les mercredis et samedis de chaque semaine, le spectacle fort intéressant de vues judicieusement choisies, et auxquelles viendront se joindre les différentes vues qu'il se propose de prendre à " Nantes " même. Voilà qui promet au sympathique artiste une grande affluence de visiteurs et d'amis. Hier la soirée s'est terminée par une expérience bien amusante : après avoir fait défiler toutes les scènes dans l'ordre naturel, nous avons repris les rubans de celluloïd par la fin, en sorte que les scènes se sont déroulées à l'envers. Les gens marchaient à reculons ; les voitures, les chevaux retournaient d'où ils étaient venus ; la fumée qui avait été prise sortant des bouches y rentrait en s'amoindrissant ; dans ' 'Une dispute " où les personnages lançaient des assiettes et des bouteilles à toute volée, ces ustensiles se précipitaient dans leurs mains. J'ai espéré un moment que l'on nous montrerait le gouvernement de M. Méline, les opinions des habitants de Carmaux guidés par M. Deschanel, les électeurs de Paris et de Neuilly qui viennent d'élire des opportunistes, la pacification du Tonkin, le développement du commerce français à l'étranger, le défilé des chanteuses légères, dressées et présentées par les frères Martini ; toutes ces choses eussent été là à leur place, puisque, hélas ! elles vont de mal en pis, elles marchent à reculons. Ce sera sans doute pour la prochaine séance.
Porthos.
Le Petit phare, Nantes, 30 décembre 1896.
Le journaliste qui signe " Porthos ", dans un style enlevé qui lui est propre, mêle à la fois les remarques techniques aux situations politiques du moment... mais il signale surtout que Petit Renaud aurait l'intention de tourner quelques vues locales ce qui ne manque pas d'attiser le chauvinisme local du commentateur. Compte tenu de l'usage que le photographe va faire de l'héliocinégraphe, la presse ne fera plus mention de l'appareil, sauf lorsque des soirées particulières ont recours à ce cinématographe.
1897
← 1896 Le Cinéphotographe de Lagneau et Vernassier (Place Bretagne, 1er janvier-15 février 1897)
← 1896
À force de répéter que le spectacle offert par le cinéphotographe est particulièrement moral, on aurait pu finir par le croire... pourtant, les deux forains vont faire quelque entorse à leur moralité en présentant une vue plus audacieuse à deux jours de la fin de l'année 1896. La Mondaine au bain est le titre d'une vue du catalogue Pathé, dont la datation reste difficile à établir.
Avec la nouvelle année, la presse va moins prêter attention au cinéphotographe, à l'exception de quelques articles qui n'apportent guère davantage d'informations et où l'on retrouve, à quelques rares exceptions près, les même titres de vues animées. C'est finalement le 15 février que la clôture du cinéphotographe a lieu :
LE CINÉPHOTOGRAPHE.-Dans quelques jours, MM. Lagneau et Vemassier quitteront notre ville où ils ont obtenu un si grand succès avec leurs tableaux de photographie animée.
On ne pouvait se lasser de voir la partie de cartes, la sortie de manufacture, le régiment, et tous ces tableaux qui nous faisaient dérouler les scènes sous les yeux.
Nous engageons donc le public à profiter des dernières représentations, la clôture ayant lieu le 15 février.
Le Phare de la Loire, Nantes, samedi 13 février 1897, p. 2.
Répertoire (autres titres) : Des places et des boulevards de Paris, L'Entrée du yacht impérial russe à Cherbourg, Des descentes de train (Le Petit Phare, Nantes, 14 janvier 1897), Une partie de cartes, Le Bal d'enfants (Le Petit Phare, Nantes, 23 janvier 1897), La Sortie de manufacture (Le Petit Phare, Nantes, 13 février 1897).
Le cinématographe de Louis Vernassier (Société Le Clou, 17 février 1897)
À peine, la foire est-elle finie et les baraques démontées que Louis Vernassier offre une démonstration de son appareil à la société nantaise " Le Clou ", impasse de la Rosière, mais il n'est pas question de " cinéphotographe ", simplement de cinématographe :
La vie à Nantes.- Au «clou».- Au commencement du monde, Dieu dit: « Que la lumière soit; et en 1894, le Cinématographe Lumière fut » ; et il fit rapidement son chemin. Aujourd'hui on le trouve partout, nous exhibant des scènes prises un peu partout où figurent des gens qui ne se douteront jamais qu'ils ont été ainsi saisis par la photographie et qu'on les promène sur tous les champs de foire. Un monsieur marié, en bonne fortune, descend du train. Il s'empresse, offrant le bras à sa complice, et s'en va en faisant sonner d'un pas vainqueur l'asphalte de la gare. Crac ! il est pris ; il figurera désormais, et jusqu'à extinction, parmi les acteurs du numéro désormais classique de " L'arrivée d'un train en gare ". Imaginez que la femme de cet infortuné tombe, par hasard, sur la série, contenant cette scène révélatrice : « Grand Dieu ! mon mari, s'écriera-t-elle, et avec ma meilleure amie ! » C'est « le scénamatographe » qu'il conviendrait d'appeler ce petit jeu de société, étant données les terribles scènes conjugales qu'il est de nature à faire naître. Rien de tout cela ne s'est produit hier soir au « Clou » où M. Vernassier nous a montré des numéros très réussis. Personne n'a reconnu qui que ce soit des siens dans les personnages qui ont défilé. Il faut dire que ces photographies ont été prises dans une autre partie de la France.
Porthos.
Le Petit phare, Nantes, 17 février 1897.
Le journaliste qui signe sous le pseudonyme Porthos n'hésite pas à broder autour des vues qui sont présentées dans les locaux de la société Le Clou, mais avec quel appareil a-t-il présenté les vues ? Nous savons qu'il a construit un nouvel appareil et que le cinéphotographe est mis en vente, avant même la fin de la foire :
A VENDRE
Cinéphotographe ou photographie animée.-S'adresser à MM. Lagneau et Vernassier. Place Bretagne, Nantes.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 6 février 1897, p. 4.
En tout cas, cela annonce bien la séparation des deux forains, chacun va désormais poursuivre son propre chemin.
LHéliocinégraphe d'Hippolyte Petit Renaud (Salle Gault, 27 mars 1897)
Hippolyte Petit Renaud ne se cantonne pas à présenter des vues animées dans son atelier photographique, il lui arrive de le faire fonctionner pour des soirées, comme celle qu'organise le Vélo-Touriste-Nantais, le samedi 27 mars 1897, pour ses adhérents :
Au Vélo-Touriste-Nantais
L'aimable et joyeuse société du V.-T.-N., que préside de si affable façon le sympathique M. Cassegrain, avait eu l'idée d'offrir samedi aux familles de ses adhérents un charmant concert ; la salle Gault était comble.
[...]
Le Cinématographe de M. Petit-Renaud a été particulièrement apprécié et l'on a justement applaudi le Choral Nantais, qui a chanté plusieurs chœurs avec un ensemble, une justesse irréprochable, ainsi que l'harmonie des Enfants des Ponts qui a exécuté brillamment différents morceaux.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 29 mars 1897, p. 3.
Le Cinématographe des magasins Sans Pareil (Rue du Calvaire, [18] avril-5 mai 1897)
M. Zlotérinski, propriétaire de l'établissement "Au Sans Pareil", situé aux 5 et 10 de la rue du Calvaire, a la bonne idée de proposer des séances de cinématographies - à l'instar des magasins Dufayel à Paris - à sa clientèle. Dans un article assez long, et à caractère publicitaire, on explique la politique commerciale du magasin :
Explications nécessaires
On a beaucoup parlé des étalages du Jeudi-Saint, chaque maison a rivalisé d'empressement, ce qui est bien naturel. Toutes ont prétendu mieux faire que leurs voisines et certaines se sont flattées d'éclipser toutes les autres.
Mais il s'entendre et s'expliquer loyalement sur ces expressions trop prodiguées de " la plus merveilleuse exposition ", " la plus importante de l'Ouest ", etc.
Le magasin le plus important est celui qui possède réellement dans ses rayons le plus de marchandises, celui qui fait le plus gros chiffre d'affaires, celui qui a la plus nombreuse clientèle et cette désignation ne saurait s'appliquer qu'au Sans Pareil.
Le Sans Pareil ne fait pas venir en vue d'un jour d'exposition des articles de choix pour leur faire reprendre le lendemain matin l'express de Paris. Tous les innombrables objets qu'il exposait étaient destinés à la vente, se trouvaient d'avance dans ses comptoirs et s'y renouvellent jour par jour, au fur et à mesure des besoins de la clientèle.
Cette explication était utile, était nécessaire. M. Zlotérinski, directeur des grands magasins du Sans Pareil a créé et développé, à Nantes, cette maison absolument unique et incomparable qui dispense les dames de la région de faire venir quoi que ce soit de Paris. C'est un véritable bienfait dont il faut lui savoir gré et le féliciter.
Rappelons sa dernière innovation qui remporte le plus grand succès. Tout acheteur de cinq francs a droit à une séance de cinématographe (photographies animées). Les séances ont lieu dans les magasins du Sans Pareil.
Le Progrès de Nantes, Nantes, 18 avril 1897, p. 3.
Héliotype Dugas, Nantes, Nantes-La rue du Calvaire (début XXe siècle)
L'usage que fait M. Zlotérinski du cinématographe est très nouveau et son but est parfaitement commercial. Il n'hésite donc pas à renouveler ses acticles dans la presse nantaise afin d'attirer le chaland. Le principe est assez simple : 5 francs d'achat dans les magasins Au Sans Pareil donnent droit à une séance gratuite de cinématographe :
LE CINÉMATOGRAPHE
C'est un appareil vraiment très ingénieux et très intéressant que le Cinématographe. On voit se dérouler une suite de photographies animées qui donnent absolument l'illusion de la réalité.
Il y a de bonnes soirées à passer avec le Cinématographe. Aussi le public a-t-il accueilli avec empressement la nouvelle que des soirées de ce genre allaient lui être offertes pour rien.
C'est la direction des Grands Magasins du Sans Pareil qui a eu cette idée heureuse... et lumineuse.
Quatre jours par semaine, les mardi, mercredi, jeudi et vendredi, les séances ont lieu dans les Magasins mêmes à partir de huit heures du soir. On y est admis sur la simple présentation d'une carte délivrée aux caisses du Sans Pareil a tout acheteur de 5 francs. Ces cartes sont très désirées et très recherchées, et constituent une des grandes attractions de cette maison. Ce soir, vendredi à 8 heures, séance spécialement intéressante avec une série de vues nouvelles.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 24 avril 1897, p. 3.
Quatre jours plus tard, nouvel article tout aussi publicitaire, mais qui n'en dit pas davantage sur le programme des films présentés, ce qui ne semble d'ailleurs pas être l'intérêt principal de ce cinématographe :
GREAT ATTRACTION
L'Agence Havas nous communique l'article suivant :
Le Cinématographe continue à attirer chaque soir une foule nombreuse aux Grands Magasins du Sans Pareil où, comme on sait, les séances sont données gratuitement. Il suffit pour y être admis, d'avoir fait un achat de cinq francs en échange duquel on a droit à une carte d'entrée.
C'est une prime tout-à-fait bien comprise et des pus alléchantes, car le Cinématographe constitue un spectacle fort intéressant. Cet instrument, en déroulant aux regards des spectateurs une série de photographies animées, donne absolument l'illusion du mouvement et de la vie. Il y a là une bonne soirée à passer.
Aussi les nombreux clients et clientes du Sans-Pareil ne manquent-ils pas de se procurer ce plaisir à la fois peu coûteux et si agréable. Les séances ont lieu dans les magasins mêmes du Sans Pareil, 5 et 10, rue du Calvaire, les mardi, mercredi, jeudi et vendredi de chaque semaine à partir de 8 heures du soir.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 28 avril 1897, p. 3.
Sans doute M. Zlotérinski a-t-il rédigé les lignes suivantes avant de connaître le drame du Bazar de la Charité, car il redouble d'imagination pour convaincre les lecteurs de venir faire un tour au Sans Pareil :
SOIRÉE RÉCRÉATION
L'Agence Havas nous communique l'article suivant :
Qui n'a éprouvé l'ennui de ne savoir où passer ses soirées ? Les distractions sont assez rares à Nantes : elles sont surtout peu nouvelles et totalement dépourvues d'intérêts. Du nouveau ? Tout le monde demande du nouveau et il est difficile de s'en procurer. Mais voici un instrument qui résout le problème et qui offre à la curiosité publique des attractions variant à l'infini. C'est le Cinématographe (photographies animées) Rien de si intéressant. Il faut féliciter la direction des Grands Magasins du Sans Pareil d'avoir imaginé pour sa clientèle cette prime d'un nouveau genre.
Grâce au Cinématographe, et pour rien, les Nantais et les Nantaises pourront passer d'agréables soirées. Il suffit pour y être admis d'avoir acheté pour cinq francs de marchandises au Sans Pareil. tout acheteur de cinq francs reçoit une carte d'entrée, carte qui lui donne droit à une soirée le jour qui lui convient. Les séances ont lieu dans les Magasins mêmes, 5 et 10, rue du Calvaire, à partir de 8 heures du soir, les mardi, mercredi, jeudi et vendredi de chaque semaine.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 5 mai 1897, p. 3.
L'incendie de la rue Jean-Goujon va mettre un terme à la publicité intensive de M. Zlotérinski, et peut-être aussi aux séances de cinématographie dont on n'entendra plus parler.
Le Cinématographe de Louis Vernassier (Place Bretagne, <28-31 décembre 1897) → 1898)
Lorsque Louis Vernassier revient à Nantes, pour la foire d'hiver, c'est avec son Palais des Merveilles :
La Place Bretagne
Le Palais des Merveilles
Il y a foule, tous les soirs, dans cet établissement, l'un des plus intéressants à visiter, sur la place Bretagne car il offre un spectacle attrayant au suprême degré.
Ces soirs-ci, les séances sont consacrées au Cinématographe.
Les tableaux, très convenables, sont choisis avec beaucoup d'intelligence, présentant des scènes parfois d'un comique irrésistible, telles les Cauchemars d'un dormeur, ou distrayant agréablement, comme le Prestidigitateur.
Le Progrès de Nantes, Nantes, 28 décembre 1897, p. 3.
Les séances cinématographiques se prolongent dans les premiers jours de janvier.
→ 1898
1898
← 1897 Le Cinématographe de Louis Vernassier (Place Bretagne, 1er janvier 1898)
Les séances se prolongent dans les premiers jours de janvier:
La Place Bretagne
LE THÉÂTRE DES MERVEILLES
Nous avons assisté à plusieurs représentations dans la coquette et confortable loge qui s'appelle le Théâtre des Merveilles, nous sommes franchement obligés de reconnaître que le titre n'est pas menteur, car le spectacle est une merveille.
Nous partageons l'avis des personnes qui en sortaient en disant : " C'est encore un des plus gentils de la foire ", et la meilleure preuve d'ailleurs c'est qu'il y a foule à toutes les représentations.
Allons, c'est encore la science qui détient le record du succès.
Nous avons vu, affichée pour mercredi, une séance comprenant les rayons X ; encore une découverte scientifique qui est bien placée à côté des autres.
Le Progrès de Nantes, Nantes, 4 janvier 1898, p. 3.
Le Cinématographe de Louis Vernassier (Le Clou, 18 janvier 1898)
Comme il l'avait fait l'année précédente, Louis Vernassier donne une soirée pour les membres de la société nantaise Le Clou, le 18 janvier 1898 :
Au Clou:-Hier soir, très intéressante séance au Clou, avec le précieux concours de MM. Vernassier et O'Brien, deux forains fin de siècle, qui sont à la fois des gentlemen et des savants.
C'est ainsi qu'en nous présentant les Rayons X et le Cinématographe, M. Vernassier a montré une connaissance parfait des phénomènes de la physique moderne et a mérité le qualificatif d'électricien distingué, que lui a donnée M. Badon-Pascal dans sa remarquable conférence sur les découvertes du professeur Roentgen.
Quant à M. O'Brien, qui assistait son camarade dans ses expériences, les cloutiers connaissent de longue date sa complaisance et son ingéniosité.
La danse serpentine, exécutée par Mlle O'Brien, a été un des clous de la soirée ; la grâce de la danseuse et la perfection du jeu de lumières lui ont valu un succès à rendre jalouse la Loïe Fuller en personne.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 19 janvier 1898, p. 3.
La soirée est pour le moins variée puisque Vernassier présente, outre le cinématographe, les rayons X dont il sera d'ailleurs victime, sans compter la prestation de Mlle O'Brien, sans doute la fille du forain du même nom.
Le Cinématographe de Louis Vernassier (Place Bretagne, <12-13 février 1898)
À l'occasion de la foire d'hiver, Louis Vernassier installe son cinématographe sur la place Bretagne :
LA FOIRE D'HIVER
La foire touche à sa fin.
[...]
Dimanche, les forains de la place Bretagne, pour la plus grande partie, donneront leurs représentations de clôture.
Parmi les établissements les plus favorisés, à juste tite, citons le Cinématographe de M. Vernassier, et les Rayons X, du même.
Le Phare de la Loire, Nantes, 12 février 1898, p. 2.
1899
Le Royal Viograph d'Edmond Oger (Salle du Chapeau Rouge, 20 janvier-18 février 1899)
En provenance de Tours, le Royal Viograph est annoncé par la presse nantaise à la mi-janvier 1899. Le responsable est Edmond Oger, peut-être accompagné de Constantin Daue :
Le Royal Viograph.-Nos confrères de Bordeaux, de Tours et d'Angers constataient dernièrement le succès qu'avait obtenu le Royal Viograph avec ses projections de tableaux sensationnels. Nous apprenons à l'instant que cette attraction va venir s'installer dans notre ville à brève échéance, ce sera un véritable régal pour nos concitoyens et c'est certainement en foule qu'ils se rendront pour applaudir ce que l'on peut appeler la plus grande merveille du siècle.
Il nous sera présenté dans la même soirée plusieurs tableaux très importants où les personnages seront en grandeur naturelle projetés par la lumière électrique sur un cadre mesurant 8 mètres de hauteur sur 7 mètres de largeur.
Tous les amateurs de progrès, et ils sont nombreux à Nantes, tiendront, nous en sommes certains, à ne pas rester en arrière, et nous prédisons plusieurs salles combles au directeur, M. Edmond Oger, qui est, paraît-il, un de nos compatriotes.
Nous donnerons des détails plus importants dans notre prochain article.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, dimanche 15 janvier 1899, p. 2.
Quelques jours plus tard, un article détaille tout le programme des premiers jours d'installation dans la salle du Chapeau Rouge :
Le Royal Viograph
Nous publions ci-dessous le programme détaillé de la quantité de tableaux que donnera le Royal viograph à chaque soirée. En attendant, nous pouvons annoncer que c'est la salle du Chapeau-Rouge qui a été choisie par le directeur, M. Oger.
On a commencé hier et on continuera demain les travaux d'aménagement électrique pour la production de la lumière et incessamment nous annoncerons la date du jour où doit avoir la première représentation.
Nous ne saurions trop engager nos concitoyens à aller voir ce spectacle de bon goût et très attrayant par la variété des tableaux.
Voici le programme de cet intéressant spectacle pour les 19, 21 et 22 janvier :
PREMIÈRE PARTIE
1º Napoléon aux avant-postes (scène militaire).-2º La Fabrique de saucissons (scène comique).-3º L'Incendie, deux tableaux: I. La maison en flammes. II. Alerte de pompiers.-4ª Arlequin, charbonnier et cuisinière (scène comique).-5º Sentinelle et son amie (scène militaire).-6º Méphistophélès ou la Maison hantée (féerie en deux tableaux: I. Faust et Marguerite. II. Les déboires de Satan.-7º La Bataille des Oreillers (tableau enfantin).-Un quart d'heure d'entracte.
DEUXIÈME PARTIE
1º Le Prestidigitateur (physique amusante).-2º Les dernières cartouches (tableau historique). 3º La Course de taureaux, 5 tableaux: I. Entrée des Toréadors. II. Les Picadors. III Les Banderillos. IV Mort du taureau. V. Enlèvement du taureau.-4º Les Glissoires.-5º Le Derby d'Epsom 1898.-6º Le Désastre de l'Abion (sept tableaux).-Un quart d'heure d'entr'acte.
TROISIÈME PARTIE
1º La Guerre de Cuba prise sur le champ de bataille (dix-sept tableaux).-2º La Tasse de thé (scène enfantine).-3º Charge de hussards russes (évolution équestre).-4º Artiste peintre (scène comique).-5º La Cigale et la Fourmi (tableau dramatique et comique).-6º Le Diamond-Express (voyage de New-York à Chicago en huit tableaux): I. L'arrivée du train. II. Le Défilé de Pampas. III. Le tunnel. IV. Passage de quatre trains express. V. Arrivée à Chicago. VI. Débarquement des voyageurs. VII. Embarquement des voyageurs. VIII Départ du train.
Tous les tableaux au " Viograph " seront accompagnés par l'orchestre, sous la direction de M. René.
Prix d'entrée: Un franc.-Les bureaux ouvriront à 7 h 3/4; le rideau à 8 h 1/4.-La durée de la représentation sera de deux heures entr'actes compris.
Le Progrès de Nantes, Nantes, mercredi 18 janvier 1899, p. 3.
Les vues proposées appartiennent, pour partie, aux catalogues de la Biograph et Méliès. La première qui a eu lieu le vendredi 21 janvier est manifestement un succès si l'on en croit Le Nouvelliste de l'Ouest :
Le Royal Viograph.-Après la soirée d'hier, il ne nous est pas difficile de prédire un gros succès au Royal Viograph qui a donné sa première représentation devant une salle absolument bondée ; les applaudissements chaleureux et quasi enthousiastes ont témoigné le plaisir que tous prenaient au défilé des tableaux présentés.
Disons d'abord que le Royal Viograph présente des scènes véritablement vécues; les personnages évoluent, vont, viennent, entrent, sortent sur l'écran comme dans la réalité; on voit même, par exemple dans Méphistophélès, fonctionner les trucs les plus ingénieux.
Parmi les numéros les plus applaudis, citons aussi la Course de Taureaux, en 5 tableaux, certains épisodes de la guerre de Cuba; la charge des Hussards Russes, et enfin le Diamond-Express, où le spectateur à l'illusion qu'il est dans un train, traversant les pays les plus divers et les plus variés.
Compliments à l'orchestre invisible qui charme les oreilles pendant que les tableaux qui se succèdent récréent la vue.
Demain samedi, 2e représentation, qui attirera certainement un public encore plus nombreux.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, samedi 21 janvier 1899, p. 3.
Afin de répondre à la demande, les responsables du Royal Viograph vont multiplier les séances :
Le Royal-Viograph à la salle du Chapeau-Rouge.-M. Edmond Oger, notre compatriote, ayant reçu une quantité considérable de lettres lui demandant une matinée pour demain dimanche, nous prie d'annoncer qu'il est très heureux de donner satisfaction à toutes ces demandes et qu'il y aura une matinée demain à 2 heures précises; le soir également, il y aura représentation à 8 h. 1/2.
Nous engageons nos lecteurs à assister en masse aux représentations du Royal-Viograph, car M. Oger n'a rien négligé pour donner à cette attraction l'éclat qui lui est dû et nous lui prédisons à nouveau que Tout Nantes défilera dans la salle du Chapeau-Rouge, ce qui fera mentir une fois de plus ce proverbe qui dit "nul n'est prophète dans son pays".
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, dimanche 22 janvier 1899, p. 3.
Mais cela suffit à peine à satisfaire le très nombreux public qui vient voir le Royal Viograph et les séances sont prolongées d'une semaine :
LE ROYAL VIOGRAPH. — Nous avions prédit un grand succès à M. Edmond Oger, notre compatriote pour la représentation de son Royal Viograph et nous ne nous sommes pas trompés, car samedi, dimanche en matinée et dimanche soir, plus de 500 personnes se sont vues refuser l’entrée, mais que ces personnes se rassurent, en présence de ce triomphe sans précédent clans ce genre, M. Oger a décidé de donner à nouveau six représentations cette semaine. Ces dites représentations auront lieu mardi 21, jeudi 20, en matinée et en soirée samedi 28, et dimanche 29 matinée et soirée également. Nous approuvons cette décision fini permettra à tous ceux qui n’ont pas vu cette merveilleuse attraction d'y assister.
Le Phare de la Loire, Nantes, mardi 24 janvier 1899, p. 3.
La dernière semaine a véritablement été un succès puisque plus de 4 000 personnes ont pu voir les images animées, mais cela n'a pas suffi. Comme cela est très souvent le cas, les projections ont droit à un accompagnement musical :
Le Royal Viograph
Plus de 4.000 personnes se sont rendues la semaine dernière salle du Chapeau-Rouge pour admirer cette merveille qu'on appelle le Royal Viograph.
Dimanche, à la matinée, on a refusé plus de 200 personnes. Aussi M. Edmond, en imprésario bien avisé et expert, a-t-il décidé de donner six représentations au cours desquelles sera représentée pour la première fois la Passion, d'Oberamergau, drame sacré en 12 tableaux avec musique d'orchestre sous la direction de M. René, de Nantes.
Assister à des projections qui durent plus de 20 minutes, voilà ce qui constitue une attraction qui sort de l'ordinaire. Certainement, demain mardi, pour la première, la salle du Chapeau-Rouge sera trop petite.
Jeudi, également, la Passion en matinée et en soirée.
Le Progrès de Nantes, Nantes, mardi 31 janvier 1899, p. 3.
C'est finalement à la mi-février que les responsables du Royal Viograph annonce leur prochain départ :
Le Royal Viograph
Par suite du traité passé dans d'autres localités, l'attraction merveilleuse du Chapeau-Rouge va s'arrêter en plein succès car les dernières représentations arrivent à leur terme, aussi conseillons-nous à nos lecteurs de se presser pour voir les nouveaux tableaux qui ont été ajoutés cette semaine et qui ont remporté le même succès que les précédents.
Depuis 8 h 1/2 jusqu'à 10 h. 1/2 on est véritablement sous le charme en voyant défiler toutes ces belles choses et malheureusement il n'y a plus en tout que cinq représentations: jeudi 16, en matinée et soirée, vendredi 17, le soir seulement, et samedi 18, en matinée et en soirée.
Les matinées auront lieu à 2 heures précises. Qu'on se le dise !
Le Progrès de Nantes, Nantes, jeudi 16 février 1899, p. 2.
Le Théâtre des Merveilles de Louis Vernassier (Place de Bretagne, <13->24 septembre 1899)
C'est à l'occasion de la foire de septembre que Louis Vernassier installe son Théâtre des Merveilles:
Théâtre des Merveilles
Le Théâre des Merveilles nous revient, paraît-il, avec des nouveautés sensationnelles.
Cette année, les effets de scènes seront produits par une installation électrique de 20 chevaux.
Le Théâtre des Merveilles a acquis une bonne renommée à Nantes. Espérons qu'il va continuer.
Le Progrès de Nantes, Nantes, 13 septembre 1899, p. 3.
Un autre journal complète l'information:
Théâtre des Merveilles.- Nous apprenons avec plaisir que le Théâtre des Merveilles, qui obtint un si grand succès à l'avant-dernière foire d'hiver, nous arrive, place Bretagne, avec des nouveautés électriques, produites par un moteur de 20 chevaux. Son succès est certainement assuré. Il débutera jeudi.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 13 septembre 1899, p. 3.
Quelques jours plus tard, ce même périodique consacre un article un peu plus détaillé:
FÊTES & SPECTACLES
Théâtre des Merveilles.-Dans le joli lot des attractions que nous a amenées, cette année, la foire de septembre, il faut marquer une place à part au Théâtre des Merveilles, dirigé par M. Vernassier.
Le titre n'a rien d'exagéré. ne sont-ce pas, en effet, des merveilles que les applications des rayons X, du cinématographe et du biograph - son complément obligé - dont M. Vernassier nous donne le spectacle chaque soir ?
Les expériences des rayons X..., d'un intérêt particulièrement scientifique, obtiennent aux soirées de gala des lundi, mercredi et vendredi un très gros succès, ainsi que les délicates et irréprochables Visions d'art, particulièrement appréciées.
Toutes ces expériences sont d'ailleurs faites avec le plus grand soin et dans des conditions qui ne laissent rien à désirer.
La soirée se termine par une danse Loïe Fuller, avec des projections magnifiques de dessins et de fleurs.
En voilà pus qu'il n'en faut pour assurer au Théâtre des Merveilles un des plus beaux succès que verra, cette année, la foire de septembre.
Le Nouvelliste de l'Ouest, Nantes, 22 septembre 1899, p. 2.
Quant au Progrès de Nantes, il décrit avec précision le spectacle de Louis Vernassier:
PLACE BRETAGNE
Au Théâtre des Merveilles
Depuis que le Théâtre des Merveilles est installé sur la place Bretagne, les autres spectacles forains ont peine à retenir le public.
C'est qu'au Théâtre des Merveilles on ne va pas voir un spectacle forain ordinaire, mais on y va pour assister à une soirée vraiment scientifique, qui devient absolument amusante dans la seconde et la troisième partie.
M. le directeur Vernassier commence par donner l'explication des mystérieux Rayons X, l'un des plus étonnantes inventions de la fin du siècle. Puis il procède à une longue série d'expériences qui démontrent l'incroyable puissance de pénétration de ces rayons qui traversent les corps les plus épais et les plus opaques et y font découvrir les objets les plus soigneusement cachés.
On sait quel parti la médecine et la chirurgie tirent déjà de l'invention du docteur Roentgen qui leur permet d'explorer l'intérieur du corps humain sans fouiller avec la sonde ou le scalpel.
Tout en procédant très sérieusement à ses intéressantes expériences, M. Vernassier trouve moyen de lancer à ses auditeurs des saillies humoristiques qui dérident les plus graves personnages.
La seconde partie du programme se compose des visions d'art à l'aide d'un procédé de projection encore inconnu.
Sur un écran isolé au milieu de la scène, on voit apparaître le buste animé d'une personne vivante en double grandeur naturelle.
Les nuances du visage et des vêtements sont scrupuleusement rendues : l'effet est saisissant.
Puis c'est la série absolument amusante des scènes reproduites par le Biographe. Les sujets les plus divers se succèdent presque sans interruption. On passerait volontiers sa nuit devant ce spectacle abracadabrant, devant ces scènes magiques, voire même devant cette Lune qui avale ou vomit des humains, ou les métamorphose en roulant ses gros yeux.
Et ces voyages en chemin de fer qui vous laissent l'illusion des paysages se déroulant devant vous ou fuyant derrière, à mesure que vous avancez.
La dernière partie du spectacle est consacrée à une danse serpentine peu ordinaire que l'on peut appeler la danse des fleurs et qui, après vous avoir longtemps éblouis par les coloris les plus surprenants se termine par la danse du feu, qui vous donne l'illusion de la combustion par les flammes.
Et lorsque vous sortez du Théâtre des Merveilles, trop étroit pour contenir la foule qui s'y presse, vous avez un nouvel étonnement en regardant votre montre, c'est d'avoir passé là deux heures et de trouver la place Bretagne presque déserte.
Tous les soirs il y a représentation ; mais c'est le lundi, le mercredi et le vendredi qui sont plus particulièrement consacrés aux grandes soirées.
Le Progrès de Nantes, Nantes, 24 septembre 1899, p. 3.
Le Bioscope Universel (Rue du Chapeau-Rouge/Salle du Cercle Catholique, 9-31 décembre 1899) →1900
Dès la fin du mois de novembre, on annonce l'arrivée prochaine du Bioscope Universel:
LE BiOSCOPE UNIVERSEL ANIMÉ.- Nous avons le plaisir d’annoncer à nos lecteurs la prochaine arrivée dans notre ville du Bioscope Universel animé, présenté par la Direction Faval et Cie.
Le Bioscope Universel animé a obtenu à Paris et dans les principales villes de France un succès considérable. Nul doute qu'il ne soit très favorablement accueilli par nos concitoyens qui vont avoir l'occasion d'apprécier un spectacle nouveau et sensationnel.
Les représentations auront lieu tous les mardis. jeudis, samedis et dimanches, à 8 h. 1/2 du soir, dans la grande salle de la rue du Chapeau-Rouge. Des matinées spéciales seront données chaque jeudi et chaque dimanche, à 2 h. 1/2.
Dans un prochain numéro, nous donnerons des détails complémentaires ainsi que la composition du programme.
Le Phare de la Loire, Nantes, jeudi 30 novembre 1899, p. 2.
Au début du mois de décembre, le Bioscope Universel s'installe rue du Chapeau-Rouge :
LE BIOSCOPE UNIVERSEL ANIMÉ. —
Nous apprenons que l'ouverture du Bioscope Universel animé aura lieu samedi prochain, à 8 heures 1/2 du soir, dans la grande salle de la rue du Chapeau-Rouge.
Voici le programme des tableaux :
Première partie. — Baignade des chevaux. — Descente des voyageurs d’un pont à New-York.—Défilé de Cosaques. — Bal des Sablaises. — Félix Faure en Russie. — Pas de cinq (ballet de Flora).
Deuxième partie. — Projections fixes concernant l'expédition Andrée au pôle Nord.
3e partie. — Exercice au sabre. — Promenade sur la Loire. — Jeu de piquet. — Le professeur Léo et son bateau magique. — Menuet Louis XV — Automobile fleuri.
4e partie. — Grand carrousel militaire de l’Ecole de Saumur, en 20 tableaux : Les ailes du moulin. — Demi-tour par pelotons.— Changement de main. — Doublement dans Ia largeur. — Les quatre géantes cercles. — Les huit grands cercles. — Mêlée avec mousqueterie. — Charge finale. — Artillerie du carrousel (feu des deux pièces). — Course de têtes. — Saut de Ia haie en masse. — Appui par six. — Appui par quatre. Appui par quatre au galop. — Marche par douze. Doublés par six. — Les quatre carrés. — Croisement. — Doublement en profondeur. — Les douze petits cercles (finale).
Le Phare de la Loire, Nantes, vendredi 8 décembre 1899, p. 2.
Un compte rendu est publié quelques jours après :
LE BIOSCOPE UNIVERSEL ANIMÉ. — Samedi et dimanche soir ont eu lieu, dans la salle du Cercle catholique, rue du Chapeau-Rouge, les premières représentations du Bioscope universel animé, dont nous avons parlé la semaine dernière à plusieurs reprises.
Le Bioscope n'est autre chose qu’un cinématographe perfectionné qui fait, défiler devant les yeux des spectateurs toute une série de scènes, les une instructives, les autres amusantes — toutes fort intéressantes.
On a particulièrement applaudi le défilé des Cosaques, le bal des Sablaises, le pas de cinq (ballet de Flora), la promenade sur la Loire, le menuet Louis XV et l’Automobile fleuri.
Il nous faut donner une mention spéciale aux magnifiques projections fixes concernant l'Expédition Andrée au Pôle Nord. Tout le monde voudra voir ces projections, rappelant le départ du vaillant explorateur, qui a dû trouver la mort dans de lointaines régions jusqu’alors inexplorées.
Pour terminer la soirée, la direction offre au public une série de vues représentant le grand Carrousel militaire de l'Ecole de Saumur. Cette partie du programme n’est pas la moins curieuse. Le publie, charmé, applaudit.
Au résumé, le Bioscope Universel animé constitue un spectacle nouveau et intéressant, qui se recommande à l’attention du publie nantais.
Les séances se prolongent en décembre :
Le Bioscope animé
Dimanche dernier, matinée avec grand succès du Bioscope universel animé. Dans une salle agréablement chaude, était réunie une société nombreuse et distinguée qui promet un avenir fructueux à la direction du Bioscope. Avis aux enfants et aux personnes aimant les choses amusantes, sans que le bon goût soit choqué ni la morale froissée. Nos compliments au professeur Léo.
Le grand carrousel militaire de l’école de Saumur a été particulièrement brillant. Jamais il ne nous a été donné d'admirer une actualité de cette importance ; c'est une attraction inédite. Avis donc aux amateurs des belles choses qu’il ne sera pas longtemps permis de voir.
Séances mardi, jeudi et dimanche. Jeudi et dimanche, matinée à 2 h. 1/2. Entrée, 1 franc; enfants et militaires non gradés, 50 centimes.
Le Phare de la Loire, Nantes, mercredi 20 décembre 1899, p. 2.
De nouvelles vues sont proposées au public nantais, alors que l'on annonce la prochaine clôture :
Le Bioscope Universel animé
Le Bioscope Universel animé continue le cours de ses brillantes représentations. Dans quelques jours aura lieu la dernière représentation. C’est donc pour nos concitoyens le moment de se presser s'ils veulent voir un spectacle agréable, intéressant et instructif tout à la fois. Avis surtout aux familles qui veulent distraire leurs enfants.
Mentionnons les tableaux nouveaux comme : Papa — Saut de Mouton — le Rêve de Pierrot — le Bateau magique et ses transformations, sans oublier le grand et merveilleux Carrousel militaire.
Demain dimanche, Grande Matinée à 2 heures 1/2. Le soir, à 8 heures, Brillante représentation. — Entrée, 1 fr. ; enfants, 0 fr. 50.
Le Phare de la Loire, Nantes, 25 décembre 1899,, p. 2.
Les séances se prolongent jusqu'à la fin de l'année.
→ 1900
Le Théâtre des Merveilles de Louis Vernassier (Place de Bretagne, >15-31 décembre 1899) → 1900
Louis Vernassier est de retour, à l'occasion de la foire d'hiver, avec son Théâtre des Merveilles:
LA FOIRE D'HIVER
SUR LA PLACE BRETAGNE
[...]
Signalons encore le Théâtre des Merveilles, direction Vernassier, trop connu pour que nous ayons à en faire l'éloge.
M. Vernassier dans un spectacle exclusivement scientifique, se propose de faire des expériences très intéressantes, entre autres, celles concernant la " Télégraphie ".
Le Progrès de Nantes, Nantes, 15 décembre 1899, p. 2.
Le Progrès de Nantes consacre un long article au Théâtre des Merveilles:
LE THÉÂTRE DES MERVEILLES
M. Vernassier, directeur du Théâtre des Merveilles, installé place Bretagne, offrait, vendredi soir, à un certain nombre de personnes notables de notre ville une grande soirée de gala par invitation.
Nous avions pu trouver une place dans la coquette loge, très confortablement installée, et nous devons dire tout de suite que, somme tous les autres spectateurs, nous avons été absolument émerveillé des nouveautés que comporte le programme.
M. Vernassier est un chercheur, un ouvrier savant et c'est en un véritable palais de l'électricité qu'il a transformé son théâtre.
Se tenant toujours au courant des dernières découvertes, il est autre chose qu'un forain, il est un vulgarisateur et, à ce titre, il a droit à toutes les félicitations et à tous les encouragements.
Passant rapidement sur les exercices de prestidigitation du roi des illusionnistes Bénévole, disciple de Robert Houdin, très adroit, très amusant en particulier dans ses trucs de la boîte mystérieuse et de l'alliance franco russe, nous en arriverons tout de suite aux expériences si intéressantes faites par M. Vernassier lui-même.
L'ingénieux ouvrier, avec un appareil très complet : bobine Ruhmkorff, ampoule de Croocks, écran fluorescent, après en avoir indiqué sommairement la théorie, montre à son public les rayons X et leurs curieux effets.
C'est d'abord le contenu d'un sac en cuir que l'on peut voir projeté sur l'écran, le sac lui-même restant invisible ; puis la monture en fer d'un parapluie dont la couverture disparaît ; une pièce de monnaie placée entre les feuillets d'un dictionnaire ; le squelette de la main de l'opérateur lui-même.
Les rayons Roentgen sont déjà très connus du public ; la télégraphie sans fil m'est beaucoup moins, la découverte de Marconi étant infiniment plus récente.
M. Vernassier a cependant construit un fort intéressant appareil de démonstration. Les étincelles électriques formées par le courant qui passe dans la bobine Ruhmkorff jaillissent entre plusieurs sphères, les ondes électriques s'étendent et trouvent à l'appareil récepteur un collecteur qui n'est plus une longue tige, mais une simple plaque de métal ; elles vont influencer le tube qui contient la limaille et le rendant ainsi conducteur, font agir une sonnerie.
La démonstration, faite d'un bout de la salle à l'autre, a été des plus concluante.
Un nouveau truc scientifique crée par M. Vernassier est le truc des peintures vivantes, véritables portraits animés projetés sur un écran avec toutes leurs couleurs.
Il nous a été donné de voir l'installation faite pour ces projections d'un effet charmant et très artistique.
La personne dont le buste est reproduit sur l'écran est placée au centre d'un foyer lumineux fourni par une force électrique de vingt chevaux.
C'est plus qu'éblouissant. Les contours et les couleurs si chaudement éclairés sont renvoyés par un système de lentilles et de miroirs savamment combiné.
Cette partie du spectacle constitue à elle seule une suffisante attraction pour attirer la foule au Théâtre des Merveilles.
Mais il y a mieux.
Sans compter le Royal Vitograph, cinématographe perfectionné dans lequel les trépidations ont été considérablement diminuées, il y a surtout les danses des fleurs et du feu exécutées par miss Kelly.
Cela, c'est comme une véritable vision de rêve. La longue robe enveloppante qui prend successivement toutes les couleurs, le vert tendre succédant au violet pâle, comme la flamme d'un punch immense, devient pour la danse des fleurs un écran où se projettent, en un assemblage délicieux, toutes les fleurs de la création ; puis ce sont des dessins bizarres comme ceux des cachemires ; puis enfin, pour la danse du feu de longues flammes rouges d'un effet saisissant.
Nous le répétons, le spectacle est autre chose que ce qu'on est habitué à voir dans les théâtres de foire ; c'est véritablement artistique et c'est superbe. Nos lecteurs qui iront voir le Théâtre des Merveilles partageront certainement notre enthousiasme.
E.B.
Le Progrès de Nantes, Nantes, 17 décembre 1899, p. 2-3.
La presse recueille également un incident:
AUTRES DÉGATS
Hier après-midi, une pierre a été lancée sur le Théâtre des Merveilles par un de ces individus malfaisants qui rôdent sur la place Bretagne ; elle a brisé le tableau des rayons X et a causé de ce fait, à M. Vernassier, directeur, un préjudice de 200 francs environ.
Un individu, poursuivi par M. Vernassier, comme l'un des auteurs des dégâts, a été arrêté et conduit au commissariat du 1er canton.
Le Progrès de Nantes, Nantes, 27 décembre 1899, p. 3.
Les séances se prolongent jusqu'à la fin de l'année et au-delà.
→ 1900
1900
← 1899 Le Bioscope Universel (Rue du Chapeau-Rouge/Salle du Cercle Catholique, 1er->5 janvier 1900
← 1899
Au cours des premiers jours de l'année, le Bioscope Universel organise encore quelques séances :
BIOSCOPE UNIVERSEL ANIMÉ. Aujourd'hui jeudi, rue du Chapeau-Rouge, grande matinée à 2 h. 1/2. Le soir, à 8 h. 1/2. nouveaux tableaux.
Dimanche dernier, le lBioscope a obtenu un grand succès pour ses trois nouveaux tableaux très amusants : Automaboulisme et Vérité; Une Nuit terrible, et une Sortie sans permission.
Le publie s'est beaucoup amusé el il a fréquemment applaudi les différentes scènes.
Demain, il y aura foule en matinée pour applaudir à nouveau un spectacle amusant et intéressant au possible.
Il faut se hâter, parce que le Bioscope ne donnera plus que deux ou trois représentations.
Le Phare de la Loire, Nantes, vendredi 5 janvier 1900, p. 2.
← 1899 Le Théâtre des Merveilles de Louis Vernassier (Place de Bretagne, 1º->3 janvier 1900
← 1899
Les séances se prolongent quelques jours en janvier:
Bris de clôture
Georges Leroux, 12 ans, demeurant rue du Port Communeau, 10, a été arrêté par la police comme étant l'auteur du bris d'un appareil dont a été victime, il y a quelques jours, M. Vernassier, directeur du Théâtre des Merveilles, place Bretagne.
Le Progrès de Nantes, Nantes, 3 janvier 1900, p. 2.
L'American Biograph (Ancien musée de peinture, 24 mars- [3] mai 1900)
L'American biograph s'installe à Nantes dans l'ancien musée de peinture, rue de Feltre. La première a lieu le samedi 24 mars :
L' " American Biograph " commencera samedi prochain le cours de ses représentations dans I'ancien musée de peinture, rue de Feltre.
Voici un aperçu du programme :
1re et 2e partie. — Ces deux premières parties étant souvent, renouvelées, il est impossible de donner la désignation des tableaux au nombre de 2.000. Ces tableaux, absolument inédits, sont d'une beauté incomparable et merveilleusement artistique.
3e partie. — 1. En roule pour Rome. — 2. Vue panoramique. — 3. Le Tibre. — 4. Un couvent de Moines capucins. — 5. Place Saint-Marc a Venise. — 6. Moines arméniens. — 7. Un enterrement à Rome. — Procession du Corpus Christi.
4e partie. — S.S. le pape Léon XIII. — 1. Portrait de S. S. le pape Léon XIII. —2. Sortie de la basilique de Saint-Pierre après la cérémonie du jubilé (24 décembre 1899). —3. Garde militaire du Vatican, commandée par le compte Pecci, neveu de Sa Sainteté. — 4. Sa Sainteté, dans une chaise à porteurs, traversant la loggia du Vatican en revenant de la chapelle Sixtine. — 5. Sa Sainteté se reposant avant de se revire à sa villa d'été. — 6. Sa Sainteté se promenant dans les jardins du Vatican. — 7. Sa Sainteté, escortée de la garde noble, traversant en voilure les jardins du Vatican. — 8. Sa Sainteté, entourée des prélats de sa maison et de gardes-suisses, donnant sa bénédiction.
Le Phare de la Loire, Nantes, mardi 20 mars 1900, p. 2.
Un entrefilet nous permet de connaître les horaires et les prix pratiqués :
AMERICAN BIOGRAPH
Musée de Feltre
Tous les jours, représentations à 4 h. 1/2 et à 8 h. 1/2. Matinées jeudis, dimanches et fêtes, à 2 heures. Prix d’entrée, 1 fr. ; places réservées, 2 fr.
Le Phare de la Loire, Nantes, 2 avril 1900, p. 2.
Les itinérants ont pour habitude d'organiser des représentations de bienfaisance autant par altruisme que pour se faire de la publicité. C'est ainsi que l'American Biograph en prévoit une pour les jeudis :
American Biograph
L"American Biograph, qui continue, devant un public de jour en jour plus nombreux, les merveilleuses exhibitions des vues animées de Léon XIII et des vues panoramiques, historiques, etc., nous annonce qu'il organisera, chaque jeudi, des représentations au profit de bonnes oeuvres.
La première de ces séances aura lieu jeudi prochain, à deux heures et demie.
Le Phare de la Loire, Nantes, 4 avril 1900, p. 2.
On remarque, comme pour bien des représentations de vues animées, qu'un accompagnement musical est prévue, alors que le programme est quelque peu renouvelé :
L'American Biograph Le succès de l’American Biograph va en grandissant chaque jour, et de nombreuses familles se rendent à l'ancien musée de Feltre, pour y admirer les vues animées du Pape, prises au Vatican, et les scènes de merveilleux panoramas.
On nous annonce pour mardi de nouveaux tableaux ; entre autres, des scènes de la guerre du Transvaal.
Le succès, cette fois, sera complet. L'orgue et le piano sont habilement tenus par Mme Millet. professeur.
Nous pouvons prédire au sympathique directeur de l’American Biograph un grand succès, et nous sommes persuadés que le public nantais se rendra en foule à l’ancien musée de Feltre.
Le Phare de la Loire, Nantes, 9 avril 1900, p. 2.
Les vues de la guerre du Transvaal intéresse le public de l'époque et la presse donne quelques précisions sur le programme :
L’ « American Biograph »
L'Administration de l'American Biograph a présenté au public une nouvelle série de vues cinématographiques du plus grand intérêt.
Il s’agit de tableaux pris au Transvaal par l’un des agents de la Société.
Le camp boër, l’alerte au camp écossais, l’attaque d'un convoi par l’infanterie montée, le défilé des Boërs, sont autant de vues passionnantes.
Citons encore, dans un autre ordre d'idées, une vue du port de New-York, le départ d'un train de chemin de fer, etc.
La séance se termine toujours par la série prise au Vatican.
Souhaitons bonne continuation de succès à l'aimable directeur de l'American Biograph.
Le Phare de la Loire, Nantes, 13 avril 1900, p. 2.
Le Progrès de Nantes et de la Loire-inférieure du 15 avril 1900 (p. 3) signale que les "vues animées de la dernière actualité [...] sont des scènes prises par M. Dickson, sur la guerre du Transvaal : une alerte au camp orangiste ; l'attaque d'un convoi ; la réfection d'un pont détruit par les Boërs. " La clôture est annoncée pour le jeudi 3 mai 1900 :
American Biograph
L'administration de l'American Biograph nous prie d’informer le public que, par suite d'engagements avec l’Exposition, la clôture irrévocable des représentations données au Musée de Feltre est fixée à jeudi prochain.
Rappelons que pour les dernières représentations, le prix des places est fixé à 1 fr. et à 50 cent.
Le Phare de la Loire, Nantes, mercredi 2 mai 1900, p. 2.
Il semble pourtant que l'American Biograph soit resté un peu plus longtemps (Le Phare de la Loire, Nantes, vendredi 5 mai 1900, p. 3)... mais il pourrait s'agir également d'un simple effet de rémanence.
1904
Le Royal Bioscope (Rue Paré, nº 1, 23 novembre 1904)
Vers la fin du mois de novembre, des séances sont données avec le Royal Bioscope de Charles Urban au salon des Familles :
La Vie à Nantes
SPECTACLE DE FAMILLE.-Nous annonçons à nos lecteurs l’ouverture ce soir du Salon spectacle de famille, rue Paré, nº1, avec un programme choisi et inédit par le Royal Bioscope de Charles Urban de Londres.
Prix des places : Premières, 4 franc. — Deuxièmes, 0 fr. 50.— Ouverture à 8 heures.
Le Phare de la Loire, Nantes, mercredi 23 novembre 1904, p. 5.
Dans un autre article, on donne le titre de quelques vues cinématographiques :
AU SALON DES FAMILLES — Demain dimanche, au Salon des Familles, rue Paré, 1, matinée à 2 heures et à 4 heures, avec un programme très choisi et inédit, par le Royol-Bioscope, de Charles Urban, de Londres. Nous recommandons particulièrement : Un drame dans les airs, tableau inédit et sensationnel. Passage du ballon sur la mer. La vue d’un cuirassé de 120 m. La mer au lointain. L’orage. La chute des aéronautes à la mer. Le sauvetage. Le général Kouropatkine, passant en revue le 1er régiment des chasseurs sibériens. — Le transport des munitions par l’armée russe à travers le lac Baïkal, etc., etc.
Prix d’entrée : Premières, 1 fr. ; deuxième, 0 fr. 50.
Les billets pris en location donnent droit aux Timbres Nantais.
Le Phare de la Loire, Nantes, dimanche 27 novembre 1904, p. 3.
1905
Le Salon Cinématographique (1 rue Paré, <26> mars 1905)
Le salon cinématographique propose des vues animées à partir de la fin du mois de mars :
SALON CINÉMATOGRAPHIQUE (1, rue Paré). — Dimanche, matinée avec des vues nouvelles à partir de 2 heures.
Aperçu du programme : Les Soubrettes (modernes acrobates), par Lydia et Lili, du Cirque d’Hiver ; Voyageur peu gêné ; Clowns Sydney ; Fiancé ensorcelé ; Indiens et Cow-Boys (grande pièce en 6 tableaux) ; Paravent mystérieux ; Métamorphose du papillon (en couleur) ; Une nuit épouvantable ; Le règne de Louis XIV (grande pièce en 6 tableaux), reconstitué par permission spéciale dans le parc de Versailles.
Entrée 1 fr. et 0 fr. 50.
Le Phare de la Loire, Nantes, 26 mars 1905, p. 5.
Le Cinéma-Phonographe (<15 mai- >6 novembre 1905)
Le Cinéma-phonographe du journal Le Phare de la Loire est annoncé à partir du mois de mai. En juin, un programme de films est publié dans la presse :
NOTRE CINÉMA-PHONOGRAPHE
Notre Cinéma-Phonographe donnera ce soir de nouvelles vues animées : Erreur de Poivrot, Monnaie de lapin. — L’Aveugle fin de siècle. —Vue prise d’un train en marche. Le cocher de fiacre en endormi.—La mouche. — Les Souverains italiens à la revue de Vincennes. — L’ascension de l’aerostat Lebaudy. — La course d’Automobiles pour la coupe Gordon Bennett. — La course royale de taureaux aux arènes de Madrid.
Plus un programme très varié de morceaux de chant et de musique exécutés par le Phonographe géant Columbia, de la maison Paban.
Demain dimanche et jours suivants, changement de programme et grandes variations dans les vues animées.
Le Phare de la Loire, Nantes, dimanche 25 juin 1905, p. 2.
Il est toujours annoncé en novembre :
NOTRE CINÉMA-PHONOGRAPHE
Ce soir, notre cinéma-phonographe, dont le succès a été si grand auprès du public nantais, inaugurera de nouvelles projections et de nouveaux morceaux de musique.
La foule, toujours plus nombreuse, faut-il dire, après chaque séance a fait le plus flatteur accueil à nos vues fixes et animées.
Aussi, soucieux de le remercier de son intérêt, nous avons essayé de varier le spectacle aussi bien que le concert de chaque soir.
On ne verra pas sans plaisir l'illusionniste, la course de taureaux, la coupe Gordon-Bennett, le voleur sacrilège, la pipe de Pierrot, envoi d'une paire de chaussures par le télégraphe, etc., etc.
Quand aux morceaux de musique, ce sont des fantaisies variées à grand orchestre, des soli de piston, des chants célèbres, des monologues désopilants.
Malgré le mauvais temps, jamais nos fidèles n'ont déserté la place et nous espérons que, ce soir, et tous les soirs qui suivront, nos habitués conserveront l'habitude qui leur procure chaque fois un bon moment.
Le Phare de la Loire, Nantes, lundi 6 novembre 1905, p. 4.