- Détails
- Création : 25 mars 2015
- Mis à jour : 27 janvier 2019
- Publication : 25 mars 2015
- Affichages : 4714
CONFLANS
Jean-Claude SEGUIN
Conflans, ville de l'ancien département de Seine-et-Oise (aujourd'hui Yvelines), compte 2701 habitants (1896).
1897
Le Cinématographe de M. Jokin (Place de la gare, <2-[8] août 1897)
L'appareil qui arrive à Conflans dans les tous derniers jours de juillet est la propriété de Louis Jokin qui a présenté, quelques jours plus tôt, un cinématographe à Beauvais. La presse n'aurait peut-être pas parlé de ce que nous pouvons considérer comme la première présentation de vues animées dans la ville sans l'incendie fort limité qui emporte quelques films avec lui. Le terrible drame du Bazar de la Charité est encore très présent dans les mémoires et le journaliste qui rapporte l'incident ne se prive pas de le rappeler :
Commencement d'incendie
La scène se passe dans un cinématographe, mais qu'on se rassure ! il n'y a rien ici qui rappelle les horreurs du Bazar de la Charité.
Lundi soir, la représentation venait de finir, avec son succès habituel, au cinématographe Jokin, installé sur la place de la Gare. L'opérateur, en se relevant pour quitter sa place, fit tomber une lampe à pétrole. En voulant éteindre le liquide enflammé, sa femme se brûla - légèrement d'ailleurs - à la main gauche. Tout le mal se fût borné là si quelques gouttes de pétrole enflammé n'étaient tombées sur un rouleau de bandes cinématographiques, contenues dans un panier d'osier. On sait que ces bandes sont en celluloïd et collodion, matières essentiellement inflammables. Une seconde, un éclair, et les bandes en question se volatilisent : le panier d'osier n'était pas même roussi !
Le malheur, c'est que les bandes en question valaient un millier de francs environ : il y a donc une perte matérielle bien appréciable, mais c'est à cela, fort heureusement, que se borne l'accident.
Le Réveil d'Argenteuil, Saint-Germain, Poissy et Meulan, Paris, 5 août 1897, p. 3.
Il s'agit, somme toute, d'un simple début d'incendie qui n'a que de modestes conséquences financières. Le propriétaire n'a pas annoncé dans la presse l'installation de son cinématographe sur la place de la Gare, sans doute, pour plusieurs raisons. Ce silence peut être dû à l'inutilité de faire des annonces compte tenu des dimensions modestes de Conflans à l'époque, mais aussi parce toute publicité risque aussi d'avoir l'effet inverse que celui qui est escompté. La discrétion est donc de mise, mais l'article du Réveil d'Argenteuil, Saint-Germain, Poissy et Meulan et la tonalité générale de l'article vont mettre le feu aux poudres et déclencher la réaction rapide de Louis Jokin qui fait passer les lignes suivantes dans l'édition du samedi :
Au cinématographe
" Que de bruit, pour une mauvaise lampe renversée " Voilà, en substance, ce que nous écrit M. Jokin, le propriétaire du cinématographe installé sur la place de la Gare.
Il déclare que l'accident dont nous avons parlé ne mérite même pas le nom d'accident, et qu'il n'a pas eu, en tout cas, la moindre gravité :nous n'avons jamais dit autre chose.
Il ajoute que les représentations du cinématographe continuent, ce dont tout le monde se félicite à Conflans. À ce propos, il nous prie de faire savoir à nos lecteurs qu'il donnera dimanche, à deux heures, une représentation extraordinaire. Tous les enfants de Conflans voudront y assister : Mm. Chardon et Modenne ont pris leurs mesures pour qu'ils y trouvent d'agréables surprises.
Il y aura foule dimanche au cinématographe : nous nous en réjouissons pour l'entrepreneur et pour les spectateurs.
Le Réveil d'Argenteuil, Saint-Germain, Poissy et Meulan, Paris, 8 août 1897, p. 4.
Conflans-Sainte-Honorine, La place de la Gare (c. 1908)
On comprend bien qu'entre le journaliste, sans doute à l'affût de la moindre information de ce type, et M. Louis Jokin, dont les intérêts financiers sont directement en jeu, il ne peut y avoir de position commune. Mais nous n'en saurons pas davantage, ni sur le type d'appareil, ni sur les films partis ou non en fumée. Le cinématographe et son propriétaire quittent probablement Conflans avant le 15 août.