PAULUS

(Jean-Jacques Rousseau/Saint-Esprit, 1845-Saint-Mandé, 1908)

paulus 1899

" Paulus "
Les Coulisses régionales, nº 34, 16 février 1899, p. 1  

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Jean-Claude SEGUIN VERGARA

Père non dénommé et Jeanne-Marie Habans (Espelette-) . Enfants : 

  • Jean-Paulin Habans, dit Paulus (Jean-Jacques Rousseau/Saint-Esprit, 06/02/1845-Saint-Mandé, 01/06/1908)
    • et Justine, Valérie Martin (Bordeaux, [1852]-). Enfant :
      • Henriette Habans (Vincennes, 02/09/1872-Nice, 16/04/1958) épouse (Vincennes, 30/10/1902) Jules Mollard (Cannes, 07/10/1870-)
    • épouse (Paris, 16e, 14/08/1883) Rose Marie Gabrielle, dite " Renault " (Libourne, 26/03/1858-Paris, 03/1932). Séparation de biens (05/01/1886). Divorce (Paris, 26/07/1901). Enfants : 
      • Paula Habans (Vincennes, 27/04/1878-La Flèche, 09/03/1979) épouse (Paris 11e, 06/06/1905) Paul Faure (Bergerac, 31/07/1879-)
      • Paul, Alexandre Habans (Marseille, 17/02/1880-) épouse (23/11/1913) Reine, Marguerite Christiné.
      • Georges, Pierre Habans (Neuilly-sur-Seine, 07/07/1886-) épouse (Paris 18e, 18/08/1930) Louise Blancher
      • Suzanne, Denise Habans (Neuilly-sur-Seine, 09/10/1892-Paris 17e, 14/10/1963) épouse (Paris 17e, 25(09/1919) Edgard Marie Alfred Sinigaglia
      • Louis, Amédée Habans (Paris 16e, 17/06/1896-Saint-Antonin-Noble-Val, 05/02/1971) épouse (Paris 9e, 11/12/1941) Andréa Fleury.

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Jean-Paulin Habans, élevé par sa mère, vit une partie de son enfance à Bordeaux où il fait ses études chez les Frères. Alors qu'il exerce toute une série d'emplois précaires, il est remarqué par un chanteur Lansade qui l'emmène dans une tournée en Bretagne. Il fait des débuts peu concluants, à Paris, à l'Eldorado, en avril 1868. Dès lors il va parcourir la France, de ville et ville et de théâtre en théâtre (Marseille, Lyon, Toulouse, Nîmes...). En novembre 1871, il revient à l'Eldorado où il reste jusqu'en juillet 1878, à la suite d'une très violente altercation avec M. Renard, le directeur de la salle (La France judiciaire, Paris, 1878-1879, p. 652-654). Il est alors une figure connue du caf'conc' et multiplie les tournées tant en France (Marseille, Toulon, Montpellier...) qu'à l'étranger (Bruxelles en 1880, Espagne et Portugal en 1885, Russie en 1890, États-Unis en 1891, Londres en 1892). Ce sont des années fastes. En 1891, il est directeur propriétaire de l'Eldorado de Nice, en 1892, il rachète le Ba-ta-clan de Paris, en 1896, il prend la direction de l'Alhambra-Théâtre de Marseille... Puis, dès 1897, sa situation se détériore : dépenses inconsidérées, frasques, mauvais placements en Bourse, déboires judiciaires (Gil Blas, Paris, 31 janvier 1897, p. 2).

C'est précisément en 1897 que Paulus va tourner quelques films pour Georges Méliès. Si l'on considère le premier catalogue Méliès, globalement chronologique, les vues auraient été tournées entre le cortège du Bœuf-gras (28 février 1897) et le cortège de la Mi-Carême (25/03/1897). Si l'on en croit Paul Gilson ("Georges Méliès, inventeur", La Revue du Cinéma, 1re série, nº 4, 15 octobre 1929, p. 7), Paulus serait venu voir le magicien de Montreuil afin de se faire filmer en interprétant quelques-uns de ses plus grands succès :

Les premiers essais de lumière artificielle que je fis, avec 15 lampes à arc et 15 lampes au mercure, donnèrent, faute de puissance, un résultat médiocre.
Je n'en cinématographiai pas moins, à la lumière, le fameux chanteur Paulus dans sa chanson "En r'venant d'la r'vue". 
Ce fut le premier essai dans le genre et je le réussis puisque le film passa longtemps à Ba-ta-clan avec accompagnement d'orchestre, alors que Paulus, ne pouvant plus chanter, était devenu directeur de cet établissement. Son apparition sur l'écran était saluée chaque soir d'ovations chaleureuses.
Cette vue fut prise au laboratoire du passage de l'Opéra dans un espace de deux mètres carrés.
Georges Méliès, cité dans Madeleine Malthête-Méliès, Méliès l'enchanteur, Lausanne, Editions Ex-Libris, 1973, p. 187-188.

Les souvenirs de Georges Méliès se sont sans doute altérés avec le temps, car à l'époque Paulus chante toujours et connaît encore des moments de succès. Le chanteur souhaite probablement épater le public du Ba-Ta-Clan et cherche à ménager ses effets sur la scène. La chanson qu'évoque le cinéaste ne figure pas au catalogue... peut-être s'agit-il simplement d'une confusion avec un autre titre. Le Petit Parisien est le premier, dans son édition du 11 mars 1897, à annoncer la projection de certaines de ces vues :

En attendant la première de la Tziganie dans les ménages, Ba-Ta-Clan nous offre un programme merveilleux ; d'abord une partie de concert où quatre artistes de valeur, Mmes Rosalba, Stelly, Nancy et Valla, sont venues renforcer l'excellente troupe, puis comme intermèdes : l'Ours lutteur ; ensuite le Kinetograph, qui donne Paulus dans ses chansons, et enfin Les 37 sous de Monsieur Montaudoin, pour finir le spectacle.


Le Petit Parisien, Paris, 11 mars 1897, p. 3.

L'idée de Paulus, ce qui explique sans doute le secret qui a pu entourer le tournage, est de plaquer sa voix sur sa propre image projetée par le kinetograph comme le confirme un autre périodique :

Paulus rival d'Edison ! En effet, on peut voir à Ba-Ta-Clan le Kinetograph, donnant un tableau où l'on voit le chanteur populaire non seulement s'animer, mimer, danser, mais on l'entend aussi chanter à pleine voix ses meilleurs refrains.


L'Intransigeant, Paris, 15 mars 1897, p. 3.

Grâce une autre revue, nous savons que 3 vues au moins sont projetées dans la salle de spectacle, ainsi que quelques autres films tirés du catalogue Méliès :

PARIS LE SOIR,
Ba-ta-clan.- Les représentations de Pavie ont été interrompues en plein succès et le charmant opéra-comique de L. Garnier et J. Clérice fait, à l'heure actuelle, les délices du public marseillais, interprété par les artistes et dans les décors de la création. Toutefois, nous savons que cet exil ne sera pas éternel et que Paulus fera avec Pavie la réouverture de la saison prochaine. Tant mieux pour tout le monde !
Le programme du mois de mars a comporté d'excellents numéros et des attractions sensationnelles. En premier lieu le Kinétographe de M. Vattin, qui a fait passer sous nos yeux, entre autres scènes bien venues : Paulus dans 3 chansons (avec couplets interprétés par le Chanteur populaire s.v.p.) ; une Sortie d'Atelier, une Scène de Pochards, et, pour clôturer, le Défilé du Cortège des fêtes russes dans les Champs-Élysées, du meilleur effet...


L'Écho des Jeunes, Asnières, 1er avril 1897, p. 46.

Trois vues figurent, en effet, dans le catalogue. Par une triste coïncidence, l'auteur de la chanson Derrière l'omnibus, Jules Jouy décède, le 18 mars 1897 (Le Matin, Paris, 18 mars 1897, p. 2), alors que la vue (Paulus : Derrière l'omnibus) est présentée au Ba-Ta-Clan. Les deux autres, Paulus : Coquin de printemps et Paulus : Duelliste marseillais font également partie du spectacle qui ne dure sans doute que quelques jours, puisque Paulus est engagé, peu après, au Parisiana-Concert que les frères Isola viennent de racheter, et fait ses débuts le 27 mars 1897 :

SPECTACLES DIVERS
Paulus vient de faire à Parisiana une rentrée triomphale.
Dès son apparition, le chanteur populaire, qu'on n'avait pas entendu à Paris depuis longtemps, a reconquis son public et retrouvé le colossal succès de ses plus beaux jours. Les spectateurs emballés lui ont redemandé une à une toutes ses joyeuses chansons, ses refrains qu'il a popularisés, et qu'il a lancés avec la maëstria que l'on sait ; il est plus en voix que jamais... 


Gil Blas, Paris, 29 mars 1897, p. 4

Au cours des années suivantes, le succès de Paulus s'estompe et les difficultés personnelles - il divorce en 1901 - assombrissent ses dernières années. En 1900, il chante pour l'Exposition, mais sa situation financière est de plus en plus précaire et, le 19 décembre 1906, un gala est organisé au Théâtre de la Gaîté, au bébéfice du chanteur. Il décède, en 1908, à Saint-Mandé où il est enterré, au cimetière Sud. Il a laissé des mémoires.

Bibliographie

MALTHÊTE-MÉLIÈS Madeleine, Méliès l'enchanteur, Lausanne, Editions Ex-Libris, 1973.

PAULUS, Trente ans de café-concert. Souvenirs recueillis par Octave Pradels, Paris, Société d'édition et de publications 460 p.