Louis MINIER

(Bourges, 1851-Saint-Jean-de-Luz, 1912)

Jean-Claude SEGUIN 

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Jean-Baptiste Minier. Descendance:

  • Pierre, Joseph Minier (1810-Bourges, 10/08/1866) épouse Louise, Adelaïde Guérin. Descendance:

Autres membres de la famille: 

Solange, Marie, Denise Minier (Cotonou, 1931-Saint-Jean-de-Luz, 29/11/2017) épouse (Saint-Jean-de-Luz, 28/11/1953) Jacques, Louis, Emile Vaujany.

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Les origines (1851-1895)

Fils d'un docteur en médecine, son frère René, de dix ans son aîné, est un capitaine au long cours qui rentre dans des Compagnies de Navigation dans l'océan Indien d'abord puis sur la ligne Bordeaux-Amérique. Il va s'installer, en 1872 à Ascain où il acquiert la maison Harguinenia (Arguinenia) et obtient la Légion d'honneur (1881). Louis Minier suit des études de pharmacie et, sert dans le corps de Santé de la Marine comme aide-pharmacien ou pharmacien de 3e classe (Rochefort, 4 novembre 1874), puis est promu pharmacien de 2e classe (Saint-Pierre-et-Miquelon, 2 novembre 1878) avant de passer dans la réserve (Cherbourg, 14 janvier 1883). Sur cette période, l'on peut consulter le dossier "MINIER Pierre, Louis" de la marine nationale. C'est probablement lors de son séjour à Saint-Pierre-et-Miquelon qu'il fait la rencontre d'Angèle Poulain qu'il épouse en novembre 1880. Il est également, le même jour, l'un des témoins du mariage de son beau-frère Edmond Poulain. Il exerce les fonctions de pharmacien civil à Saint-Pierre où il reprend, en septembre 1880, l'officine créée, en septembre 1875, par Jean-Baptiste Gadot. Au cours de cette première installation à Saint-Pierre, Angèle Poulain, épouse de Louis Minier, donne naissance à trois enfants Charles, Marthe et Jules. Le décès des deux garçons, probablement victimes d'une épidémie, pourrait être la cause du départ du reste de la famille. En effet, en 1887, Louis Minier cède sa pharmacie à Paul de Beaudéan. Il n'a pas pour autant rompu le contact puisqu'il revient à Saint-Pierre par le "Saint-Pierre" le 3 avril 1889, mais il semble installé à Paris (151, rue de Javel, 15e) où va naître, en 1892, sa fille Emma.

Le cinématographe Lumière (1896-1897)

En 1896, Louis Minier est recensé à Lyon (335, avenue de Saxe) avec son épouse et ses trois filles. Cette installation dans la capitale des Gaules n'est peut-être pas étrangère à son intérêt pour le cinématographe. Sa profession de pharmacien le rapproche sans doute d'Auguste Lumière. L'accord signé avec la société Lumière, probablement au début du printemps 1896 fait de lui, et de son complice Louis Pupier, le concessionnaire pour le Canada du cinématographe. La proximité de Saint-Pierre-et-Miquelon a eu, sans aucun doute, un rôle déterminant dans le choix de la concession. Chargé de leur appareil et d'une bonne quantité de vues animées, Louis Minier et Louis Pupier embarquent, au Havre, sur la Bourgogne et arrivent à New York le 1er juin 1896. À peine trois jours plus tard, ils descendent, avec leur respective compagne, à l'hôtel Richelieu de Montréal :

AT THE HOTELS.
The Richelieu—R. J. Zarchall, Halifax; W. Shepherd, Great Falls, Mont.; P. Dupuis, Ottawa, Ont.; C. P. Hall, Boston ; A. Miller, Ogdensburg, N.Y.; A. Lancaster, Toronto; M. Pupier and wife, M. Minier and wife, France.


Montreal Daily Herald, mardi 4 juin 1896, p. 8.

montreal hotel richelieu
Hotel Richelieu. Montreal. Canada

Quelques jours plus tard, ils sont reçus à la Chambre de Commerce Française de Montréal :

Comptes-rendus des Séances de la Chambre de Commerce Française de Montréal.
[...]
SÉANCE DU 10 JUIN 1896.

[...]
M. le président présente aux membres de la Chambre MM. Louis Minier et Louis Pupier, représentants de la maison Lumière de Lyon et de diverses maisons de Lyon et St-Etienne qui viennent faire connaître leurs produits au Canada. Il les assure qu’il leur sera donné avec grand plaisir tous les renseignements qu’ils pourront désirer.


Bulletin mensuel publié par la Chambre de Commerce Française de Montréal, Troisième année, nº 24 [35], Montréal, 15 juin 1896, p. 2.

Les deux collaborateurs vont alors organiser un premier circuit au cours duquel ils parcourent, principalement, la province du Québec. Les premières séances ont lieu à Montréal, à partir du 27 juin. On retrouve le cinématographe à Toronto à l'occasion de l'Exposition Industrielle. Les deux hommes se rendent à Québec, au mois de septembre où ils commencent leurs projections dans la rue Saint-Joseph. Un long article, publié dans la revue Le Monde illustré permet de connaître une part importante de leur répertoire constitué de films Lumière :

LE CINEMATOGRAPHE
Je ne viens pas faire ici une réclame, mais je tiens à attirer l'attention des lectrices du MONDE ILLUSTRÉ sur un spectacle qui peut amuser les enfants, les écoliers, les grandes personnes, et qui mérite d'être vu.
Depuis quelques semaines, nous avons à Québec le cinématographe, qui est exhibé devant salle comble. La vie, la rapidité du mouvement, la réalité qui se dégagent des photographies sont tout simplement du merveilleux, et il faut avoir vu pour croire.
Nous avons applaudi tour à tour aux scènes suivantes:
Le départ.
La dispute dans le jardin.
Démolition d'un mur.
Chaland.
Enfants et jouets.
Dans un bivouac de soldats espagnols.
Bébé à la pêche.
Cortège des dignitaires à Buda Pesth.
La rue Regent à Londres.
La barque quittant le port.
La baignade des nègres.
Mauvaises herbes.
Sortie de l'usine de M. Lumière, l'inventeur du cinématographe.
Cent figures sous un chapeau.
Sortie de la cathédrale de Cologne.
La mer, sur la côte d'Angleterre.
Rocher de la Vierge, à Biarritz.
Pêche aux sardines.
La partie d'écartée entre le père de l'inventeur et son gendre.
Les scènes de la vie maritime sont les mieux réussies. Elles son tellement naturelles que l'on croit entendre le bruit du ressac et les grondements de l'abîme. Les photographies militaires sont envelées et les chevaux admirablement faits.
Si, au lieu de nous donner des scènes du camp espagnol, l'inventeur nous avait présenté le soldat français, avec son allure vive, délurer, le succès aurait été doublé et le plaisir du spectateur plus complet.
On me dit que le cinématographe va passer quelques mois à Montréal. Allez passer une bonne heure à l'étudier, et vous m'en direz des nouvelles.
Faucher de Saint Maurice.


Le Monde illustré, Québec, samedi 5 décembre 1896, p. 6.

Par la suite, les deux hommes se rendent à Trois-Rivières et à  Sherbrooke. À la lecture de la presse, il ne fait pas de doute que le véritable responsable est bien Louis Minier. D'ailleurs le nom de Louis Pupier va vite disparaître. On ignore alors si Louis Minier a un collaborateur. Cela est très probable puisque le fonctionnement d'un cinématographe nécessite deux voire trois personnes. À Saint-Hyacinthe, en avril 1897, apparaît alors le nom de M. Faure. Dans les mois qui suivent, des cinématographes Lumière organisent des projections, mais le nom de Minier a disparu. La concession - limitée dans le temps - prise par ce dernier pour exploiter le cinématographe Lumière au Canada a-t-elle pris fin ? On peut le penser puisque, à peine quelques jours plus tard, d'autres opérateurs présentent le cinématographe. À Montréal, en mai, c'est Félix Mesguich qui projette des vues animées au Palace Théâtre et en septembre, pour l'Exposition, c'est un certain M. Prosper qui est responsable de l'appareil. Ce que l'on sait c'est qu'en juillet 1897, deux appareils Lumière fonctionnent : le premier à Montréal au Palace Théâtre et le second à Québec, 37 rue Saint-Joseph. Qui sont les responsables respectifs de ces projections ? Félix Mesguich qui déclare dans ses mémoires qu'il a organisé des séances à QuébecM. Prosper ou bien Louis Minier ? En décembre, une petite annonce propose, à la vente ou à la location, deux cinématographes français, mais on ignore le nom du vendeur. Toujours est-il que le nom de Louis Minier n'apparaît plus dans la presse québécoise.

Et après... (1898-1912)

Avec la fin de la concession - et sans préjuger de quelques dernières représentations sur le territoire canadien -, Louis Minier va reprendre son existence à Saint-Pierre (Saint-Pierre-et-Miquelon). On sait que le 22 septembre 1899, il rentre à Saint-Pierre par le "Pro Patria" - le steamer postal qui fait l'aller-retour avec Halifax - avec sa femme et l'une de ses filles. Il a alors repris ses activités dans son officine pharmaceutique. Une fois par an, environ, Louis Minier voyage sur le steamer (1900, 1901, 1902) qui lui permet d'embarquer sur un transatlantique pour l'Europe ou, bien sûr, d'en revenir.  Il est décoré, le 5 mai 1904, de l'ordre de l'Etoile Noire (grade de Chevalier) et continue d'exercer son métier de pharmacien.

minier louis pharmacie saint pierre
La pharmacie Minier (rue Nielly). Saint-Pierre.
Collection Dr. Dhoste.

Les années suivantes semblent avoir été marquées par des problèmes d'ordre personnel ou professionnel. Si en novembre 1906, Angèle Poulain rentre d'Europe avec ses deux filles Marthe et Emma et que la famille est recensée, au grand complet, en 1907, rue Nielly - là où se trouve la pharmacie -, en décembre 1910, tel n'est plus le cas en 1911. où seule Angèle et sa fille Emma résident rue Nielly. Dans ce dernier recensement, figure une remarque curieuse : "Habitez-vous dans cette commune: oui malheureusement". Le 5 novembre 1911, Louis Minier, accompagné de sa fille Marthe, quitte, sans doute pour la dernière fois, Saint-Pierre.

minier louis 1911 passager 03
La Vigie, Saint-Pierre, samedi 11 novembre 1911, p. 4.

Alors qu'il est sans doute déjà malade, Louis Minier rejoint Saint-Jean-de-Luz/Ascain où il décède en mars 1912.

Sources

L'Arche Musée et Archives de la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon: https://www.arche-musee-et-archives.net/

GUYOTJEANNIN Charles, "Quelques documents sur le service pharmaceutique aux îles Saint-Pierre-et-Miquelon depuis 1816", Revue d'Histoire de la Pharmacie, nº 268, 1986, p. 50-62

LE CARDUNER Michel, "Gaëtan Hugues Marie Dupuy-Fromy (Saint-Brieuc, 1865-Auteuil, 1930).", décembre 2020.

"MINIER Pierre, Louis" Dossier MV CC7 Alpha 1776. Service historique de la Défense. Centre historique des archives (Ministère des Armées).

Remerciements

Famille Minier.

Service historique de la Défense. Centre historique des archives (Ministère des Armées).

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27/06->10/07/1896 Canada Montréal 78, rue Saint-Laurent Cinématographe Lumière
31/08-12/09/1896 Canada Toronto Industrial Fair Cinématographe Lumière
30/09-[30]/10/1896 Canada Québec 37, rue Saint-Joseph Cinématographe Lumière
31->31/10/1896 Canada Québec Rue d'Auteuil/Bâtisse des Odd Fellows Cinématographe Lumière
17-26/11/1896 Canada Trois-Rivières Rue Notre-Dame Cinématographe Lumière
01->01/12/1896 Canada Sherbrooke Salle des Arts Cinématographe Lumière
15-17/03/1897 Canada Saint-Jean Salle d'opéra Black Cinématographe Lumière
18-20/03/1897 Canada Farnham   Cinématographe Lumière
26-27/03/1897 Canada Waterloo    Cinématographe Lumière
30/03-03/04/1897 Canada Sherbrooke Art Hall Cinématographe Lumière
19-24/04/1897 Canada Saint-Hyacinthe Grande salle de l'Hôtel-de-Ville Cinématographe Lumière