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- Mis à jour : 4 décembre 2024
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PARIS
Jean-Claude SEGUIN
Paris, chef-lieu du département de la Seine et capitale de la France, compte 2.536.834 habitantes (c. 1894).
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Le kinetoscope (20 boulevard Montmartre/Le Petit Parisien, 16 juillet 1894->30 janvier 1895)
À Paris, le premier kinetoscope est inauguré à la mi-juillet dans la salle des dépêches du Petit Parisien:
Photographies Animées
Depuis deux jours, une invention nouvelle, d'un rare intérêt, est présentée au public dans la Salle des Dépêches du Petit Parisien.
Toutes les revues scientifiques ont signalé déjà, mais sans le connaître encore, le fameux kinétoscope d'Edison, un instrument qui enregistre des images animées et les reproduit sous nos yeux avec une merveilleuse précision.
Ce kinétoscope, sorti tout récemment du laboratoire de Menlo-Park, n'a pu être exhibé à Chicago qu'après la fermeture de l'Exposition, et c'est la première fois qu'il franchit l'Océan. On ne l'a vu jusqu'ici ni à Londres, ni à Berlin, ni dans aucune autre ville d'Europe. Par l'intermédiaire de notre Salle des Dépêches, le boulevard Montmartre en a la primeur.
Aussi les visiteurs sont-il nombreux. Ders savants, des professeurs du Collège de France, des hommes du monde se mêlent déjà aux curieux. Hier, M. Marey, membre de l'Institut, quittait la séance de l'Académie pour venir voir cette invention qui intéresse au plus haut point la stations physiologique du Bois de Boulogne où, comme on le sait, de profondes études sont faites des fonctions musculaires de l'homme et des animaux et où l'on est arrivé à photographier le vol des oiseaux et des insectes.
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On dispose en ce moment, dans l'établissement scientifique du Parc des Princes, d'un chronophotographe permettant de reproduire cent douze fois en une seconde l'Image d'un objet en mouvement, an moyen d'une pellicule sensible qui défile dans l'appareil, enroulée autour de deux bobines.
- Une image d'insecte en plein vol, se détachant sur le soleil, est prise par nos instruments en un vingt-cinq millième de seconde, nous disait M. Marey.
Lors de son passage à Paris, M. Edison n'a pas manqué de visiter le laboratoire de l'émlnent physiologiste, où il a pu étudier ces instruments enregistreurs dont la conception première est due à l'Américain Muybridge, le savant qui, il y a deux ans, nous offrait le curieux spectacle de projections photographiques animées dans la grande salle de la Société de géographie.
M. Edison a perfectionné cos instruments. Il s'est préoccupé surtout de tirer parti, pour le kinétoscope, des documents photographique recueillis par le kinétographe.
Le kinétographe ou chronophotographe sert à prendre d'un objet en mouvement ou d'une scène animée une série de photographies rapides se succédant à intervalles réguliers et fixant avec précision toutes les flexions, tous les mouvements dont se compose une attitude ou une action. Nous avons vu chez M. Marey la photographie d'un coup de marteau comprenant soixante images exécutées en une seconde. Le pas d'un cheval peut être analysé par le kinétographe en dix images prises en un tiers de seconde.
Le kinétoscope, lui, utilise ces documents pour nous en présenter la synthèse. Il reconstitue, rassemble sous notre regard, les mouvements analysés et décomposés. Il prend les images successives du kinétographe, leur imprime une rotation accélérée et, par un effet d'optique qui est le même que celui dont l'application charme les enfants dans le zootrope ou praxinoscope, un jouet mis à la mode il y a plus de vingt ans, nous voyons se mouvoir les objets photographiés tels qu'ils passaient devant l'objectif. Le cheval marche, l'oiseau vole, le clown fait son saut périlleux, C'est la reproduction exacte, mathématique, du mouvement.
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Voilà l'instrument que le Petit Parisien présente au public dans sa Salle des Dépêches.
Qu'on se figure, insérée sous le couvercle d'un petit meuble à hauteur d'appui et aperçue à travers un oculaire, une photographie représentant une scène quelconque dont tous les personnages gesticulent, marchent, travaillent, non point en automates qu'un mécanisme dirige, mais au naturel et avec tout l'imprévu, tout l'abandon ou toute la résolution des mouvements de la vie réelle.
Si la scène représentée est un magasin de coiffure, on remarque le client qui s'assied sur un fauteuil et les garçons qui s'empressent autour de lui, procédant à leurs manipulations habituelles, jusqu'à ce qu'il s'en aille, rasé, poudré, calamistré selon les règles du métier et fasse place à un autre client.
Voici une danseuse exécutant un pas espagnol. Pas un clignement de ses yeux, un sourire de ses lèvres, un plissement de sa jupe tourbillonnante ne nous échappe. Telle elle apparue vivante à Edison dans son hall de Menlo-Park, telle nous la revoyons, sautillante, infatigable, à demi pâmée. Ses pirouettes, ses renversements ne se sont nullement matérialisés durant leur enregistrement par le kinétographe, et le klnétoscope les reproduit dans toute leur grâce souple et aérienne.
Huit autres scènes seront ajoutées à celles-ci, ces jours prochains, dans le merveilleux instrument. Elles peuvent se multiplier à l'infini, au gré de l'inventeur. Un ruban nouveau est enroulé chaque matin autour de dix-huit bobines qu'actionne un petit dynamo appuyé par une batterie d'accumulateurs. Cela demande quelques minutes de préparation et l'appareil fonctionne.
Sur le ruban, qui est en gélatine transparente et dont la longueur est de douze mètres, la largeur étant de trois centimètres et demi, sont disposées plus de deux cent cinquante pellicules photographiques de deux centimètres chacune. Ce ruban, entraîné par une roue dentelée, passe avec une grande rapidité entre une lampe électrique pourvue de son réflecteur et l'oculaire inséré dans le couvercle du meuble.
***
On voit qu'au fond c'est le praxinoscope agrémenté d'un mécanisme perfectionné. Les fentes que l'on remarque dans les parois du jouet de ce nom et à travers lesquelles l'enfant observe le défilé des images, se retrouvent également dans le kinétoscope. Mais elles ne sont pas apparentes ; l'inventeur les a cachées dans le meuble. En effet, sous l 'oculaire et au-dessus du ruban de gélatine, passe, avec une vitesse de 260 tours à la minute, une mince roue métallique, plate, peinte en noir, d'un diamètre de trente centimètres environ. Une fente étroite, de trois centimètres de long, est ménagée sur ses bords.
C'est à travers cette fente que I'œil reçoit sur sa rétine, vivement projetée par la lumière électrique, l'image de chaque fraction de mouvement que représente chaque photographie.
Dans le kinétoscope d'Edison, l'œil est frappé ainsi de deux cent soixante projections par minute lui transmettant l'image exacte, du mouvement et de la vie.
L'utilité d'un pareil instrument n'est pas difficile à démontrer. Si, avec le kinétographe M. Marey a pu étudier, pour l'armée, los effets de la gymnastique, la longueur et la fréquence des pas, la limite des charges que l'homme doit porter suivant la vitesse de la marche, le rythme du pas correspondant à la charge portée et au terrain, - avec le kinétoscope nous disposons d'un appareil, complément du premier, toujours prêt à reconstituer une scène choisie.
Le kinétoscope peut nous servir à conserver à perpétuité l'Image animée d'une action historique, d'un événement politique ou familier, d'une journée glorieuse ou néfaste, de scènes quelconques témoignant de nos usages et de nos mœurs.
Qui sait si bientôt nous ne verrons pas la publicité des exécutions capitales assurée seulement par le kinétoscope, sans qu'il n'y ait plus lieu de recourir à la malséante représentation donnée, au petit jour, place de la Roquette, devant le public restreint que l'on connaît !
Le Petit Parisien, Paris, mercredi 18 juillet 1894, p. 2.
Un bref entrefilé permet de connaître le nom de l'importateur de l'appareil :
Un électricien qui a travaillé pendant deux ans dans le laboratoire d'Édison à Orange (New-Jersey), M. Georgiadeo [sic], vient d'apporter à Paris un kinétoscope; c'est le premier dont on signale l'apparition en Europe.
Henri Flamans, “Le Kinétoscope d’Edison”, Le Magasin pittoresque, Paris, 1er août 1894, p. 247-248.
Le kinetoscope est présenté par George Malamakis, collaborateur de George Tragidis et George Georgiades:
Aujourd'hui le doute n'est plus permis, le kinétoscope Edison est arrivé à Paris : un certain nombre d'exemplaires y fonctionnent régulièrement depuis quelque temps déjà, dans plusieurs endroits publics, où chacun peut les voir, moyennant une rétribution, qui n'a rien d'effrayant même pour les gens les plus économes. Je viens d'aller voir celui qui fonctionne dans la salle des dépêches du journal le Petit Parisien, 20, boulevard Montmartre. Grâce à l'obligeance de M. G. Malamakis, j'ai pu l'étudier dans ses détails et examiner son mécanisme intérieur. Cette visite m'a réellement enthousiasmé, moi, le sceptique du mois de juillet, et je m'empresse de vous raconter ce que j'ai vu.
Au fond dé la salle est une espèce de boîte en chêne ayant la forme d'un pupitre à écrire debout et d'une hauteur de 1 mètre 30 environ. Sur le couvercle est une ouverture de forme oblongue, qui est l'entrée d'un appareil d'optique plongeant verticalement au-dessous du couvercle. Vous commencez, formalité indispensable! par donner vingt-cinq centimes et vous mettez l'œil à la lunette. Vous ne voyez rien d'abord: tout est noir et vous êtes tenté de vous demander si vous en aurez pour votre argent. Mais bientôt l'employé appuie sur un bouton et voilà le champ de la lunette qui s'illumine et dans le champ vous voyez apparaître le spectacle attendu.
Un jour ce sont des lutteurs en maillot. Ils sont à une petite distance l'un de l'autre; ils se mesurent de l'œil, puis se font les salutations, qui sont la politesse de l'escrime et de la lutte. Ils avancent l'un vers l'autre, reculent de deux pas, et revenant d'un mouvement rapide, se saisissent avec force et à bras-le-corps. La lutte est commencée : l'un des lutteurs soulève son adversaire et cherche à le renverser. Mais celui-ci parvient à se dégager et s'éloigne. Nouvelle marche à la rencontre, nouveau corps à corps. On voit les muscles se tendre, se découpler et la lutte continuer avec énergie. A un moment, l'un des lutteurs paraît faiblir, il va loucher le sol des deux épaules. Mais, se dégageant d'un mouvement rapide, il se renverse sur son adversaire et, cabriolant au-dessus de lui, va retomber sur ses pieds. Il revient brusquement, passe entre ses jambes et le saisissant de nouveau, le soulève avec violence et le renverse sur le sol. On se croirait dans une baraque de la foire de Neuilly et il ne manque à l'illusion que les applaudissements et les bravos de la foule. On resterait là indéfiniment, tant le spectacle est surprenant, on ne voudrait pas quitter celte lorgnette magique. Mais tout d'un coup la lampe s'éteint, tout retombe dans l'obscurité. La scène a duré quarante-cinq secondes, pendant lesquelles les détails de la lutte se sont reproduits deux fois.
Un autre jour, le spectacle est plus gracieux. C'est une danseuse qui s'avance sur la scène d'un théâtre. Arrivée à la rampe, elle envoie aux spectateurs ses baisers les plus tendres et se met à exécuter tous les pas de son répertoire. Au fond de la scène, on voit les violonistes qui l'accompagnent et l'on suit les mouvements des archets. La danseuse s'anime de plus en plus, ses mouvements n'ont peut-être plus la correction qui, à l'Opéra, est la règle du corps de ballet, car la danse devient frénétique et la rivale de la Goulue termine en lançant sa jambe à une hauteur que l'on me dispensera d'apprécier. On voit le tourbillonnement des jupes de gaze et l'on croit en entendre le froufrou.
Une autre fois on se trouve transporté aux Folies-Bergère et l'on voit la Loïe Fuller, ou quelque rivale, exécuter cette danse serpentine qui a fait courir tout Paris. Elle voltige avec légèreté sur la scène, ouvrant et fermant les bras pour faire évoluer l'étoffe qui l'enveloppe. La lumière se joue à travers les plis de cette étoffe; les ombres se déplacent avec une fidélité parfaite cl. produisent les reliefs les plus gracieux.
Ici c'est l'intérieur d'un bar avec toute son animation. Devant le comptoir, des consommateurs se tiennent debout: on voit la femme de service se retourner, prendre une bouteille et emplir le verre d'un des clients, qui le porte à ses lèvres et le vide. Dans un coin une discussion s'engage. Est-elle politique? je n'en sais rien. Mais les adversaires se menacent du geste, bientôt les coups de poing pleuvent plus drus que des bénédictions, jusqu'au moment où le maître de céans vient jeter à la porte ces clients trop irascibles.
Une autre série d'épreuves représente l'intérieur d'un salon de coiffure; un monsieur y entre et vient se faire raser. Il dépose son chapeau, retire son veston et s'assied: on lui apporte un journal qu'il se met à lire, en attendant que son tour vienne. Pendant ce temps, on rase un autre client: le coiffeur promène sur son visage le blaireau traditionnel; puis c'est le rasoir qui fait son office et court d'un mouvement ménagé sur la figure du patient. C'est la nature même prise une fois de plus sur le vif.
Vous n'attendez pas de moi que je passe en revue tout le répertoire du kinétoscope; il peut être sans limites. J'ai voulu seulement vous donner une idée de tout l'intérêt qu'il présente. Croyez-moi, allez au boulevard Montmartre. Mais je ne veux pas vous prendre en traître, quand vous y aurez été une fois, vous y retournerez, désireux de voir chaque jour un nouveau spectacle. C'est ce qui m'est arrivé.
[...]
P-POIRÉ.
L'Univers illustré, Paris, 15 décembre 1894, p. 790.
Le kinetoscope continue à fonctionner dans les premières semaines de l'année 1895:
Un spectacle vraiment rare est celui que les visiteurs de notre Salle des Dépêches peuvent avoir à bon compte. Le "kinétoscope" d'Edison constitue une invention qui tient de la magie. Grâce à un long ruban de photographies mû par l'électricité, le "kinetoscope" donne la sensation de l'image animée ete procure une illusion égale à un prodige.
Le Petit Parisien, Paris, 30 janvier 1895, p. 3.
Le kinetoscope des frères Werner (20 boulevard Poissonnière, <21 octobre 1894->16 février 1895)
Les frères Werner ouvrent un kinetoscope Parlor sur le boulevard Poissonnière à partir du mois d'octobre :
Le Kinétographe, ce merveilleux appareil dû à Edison et dans lequel on voit défiler toutes les scènes de la vie par des personnages qu'on croirait vivants, vient d'être installé 20, boulevard Poissonnière.
Gil Blas, Paris, 21 octobre 1894, p. 3.
On doit à Henri de Parville, le célèbre chroniqueur scientifique, une description du kinetoscope parlor parisien dans le long article qu'il consacre à la nouvelle invention de Thomas A. Edison. Il offre une brève vignette de ce nouveau local :
À Paris, 20, boulevard Poissonnière, entre neuf heures et dix heures du soir. Une simple boutique toute étincelante de lumière électrique. Dehors, l'œil collé à la vitrine, un rassemblement de passants et de flâneurs. "Qu'y a-t-il ? Que voit-on ici ?" demandent les curieux en se rapprochant.
-Que voit-on ? Regardez. On voit tout bonnement à l'intérieur quelques grandes boîtes de 1 m 50 de hauteur complètement fermées ; et devant chacune d'elles un monsieur ou une dame observent gravement par un oculaire ce qui se passe dans les boîtes. Entrez, payez 25 centimes et l'on vous installera devant la première boîte libre. Singulier spectacle qui est destiné à faire salle comble d'ici la fin de l'année.
La boîte silencieuse, c'est le kinétoscope d'Edison. Nous nous plaignions, en esquissant l'appareil il y a quelques mois, de ne jamais voir les inventions d'Edison franchir l'Atlantique. Le kinétoscope l'a franchi, et il en existe déjà des exemplaires multiples à Paris...
Henri de Parville.
Journal des débats politiques et littéraires, Paris, 14 novembre 1894, p. 1.
Dans un autre périodique, on dispose d'informations complémentaires :
Dans le magasin de M. Werner (20, boulevard Poissonnière), sont installés une demi-douzaine de kinétoscopes que tout le monde peut faire fonctionner moyennant un prix très minime, et où l'on voit des scènes extrêmement variées: un combat de coqs tellement vrai, que les plumes arrachées volent autour des combattants; des forgerons frappant une pièce de fer, et s'arrêtant de temps à autre pour vider une bouteille; une rixe dans un bar; une Loîe Fuller, etc., etc.
Le Courrier de Paris, Paris, 26 novembre 1894, p. 2.
Il reste difficile de connaître le réel impact populaire du kinetoscope au cours des mois d'exploitation par Michel Werner. Ce dernier fait passer régulièrement des encarts publicitaires dans la presse nationale et étrangère dans les mois qui suivent.
Journal des débats politiques et littéraires, Paris, 8 décembre 1894, p. 4 | L’Industriel forain, nº 288, 10-16 février 1895 |
Le kinétoscope de L'Éclair (Salle des Dépêches/176, rue Montmartre, <4->4 janvier 1895)
Dans la salle des dépêches du journal L'Éclair, fonctionne un kinétoscope dès les premiers jours de l'année 1895:
NOTRE SALLE DE DÉPÊCHES
Nous continuons l’exposition des œuvres en céramique d’art de Carrier-Belleuse dans notre Salle de de Dépêches, 176, rue Montmartre.
Nos lecteurs trouveront dans les salons du premier étage une suite de l’exposition du rez de-chaussée.
Nous attendons ces jours-ci de nouvelles œuvres du maître complètement inédites, notamment la Danse, le Retour des Champs, etc.
Nous avons le plaisir de prévenir nos lecteurs que nous venons d’installer dans notre Salle de Dépêches un kinétoscope, la dernière invention d’Edison.
Cette merveilleuse machine reproduit des photographies animées et vivantes d'expression où les différents sujets représentés font les gestes et les mouvements naturels. Des apparitions surprenantes donnent l’illusion de la réalité.
Tous les jours il y aura un changement de tableaux.
Nous nous imposons le sacrifice, à titre de haute attraction pour les visiteurs de notre Salle des Dépêches, de prélever seulement 0.15 centimes par audition.
L'Éclair, Paris, 4 janvier 1895, p. 3.
L'Éclair continue à évoquer le kinétoscope dont un exemplaire est disponible pour les installations à la demande :
NOTRE SALLE DE DÉPÊCHES
[...]
Nous avons installé dans notre Salle de dépêches la plus curieuse des inventions d’Edison, le kinétoscope : ce merveilleux appareil, dont les tableaux changent tous les jours, représente par des photographies animées et vivantes des scènes comiques ou burlesques du plus curieux effet. Nos lecteurs et visiteurs nous sauront gré de cette haute attraction, surtout en présence du prix de 0 fr. 15 centimes que nous demandons seulement.
Tout le monde voudra voir le tableau d’aujourd'hui : Les Lutteurs, lutte à main plate.
Dimanche nous donnerons Une scène burlesque dans un bar, à cinq personnages.
Nous avons pris nos mesures pour tenir à la disposition des personnes qui le désireraient, un Kinétoscope, à domicile, pour soirées, etc.
L'Éclair, Paris, 6 janvier 1895, p. 3.
Répertoire (autres titres): Amélie, femme acrobate excentrique (L'Éclair, Paris, 10 janvier 1895, p. 3).
Le kinétoscope (Palais de Glace, 7 février 1895)
Au Palais de Glace, on installe un kinétoscope au début du mois de février:
Aujourd'hui jeudi, à 2 heures, au Palais de Glace, grande matinée enfantine avec ourses, distribution de jouets, exhibitions nouvelles du kinétoscope et divertissements de toute sorte.
L'idée de donner un pendant aux galas du soir en organisant des fêtes de jour pour les familles est une très heureuse innovation et il n'est pas douteux qu'elle réussisse.
Le Figaro, Paris, jeudi 7 février 1895, p. 4.
Le cinématographe Lumière (Société d'Encouragement pour l'Industrie Nationale, 22 mars 1895)
Bulletin de la Société d’encouragement, vol. 137, 1923, p. 687.
Au cours de l'année 1895, les frères Lumière vont multiplier les présentations de leur cinématographe. À Paris, l'appareil va ainsi être présenté à plusieurs reprises au cours de réunions à caractère scientifique, avant la première publique dans le salon Indien du Grand Café. Les inventeurs cherchent, dans un premier temps, l'approbation du monde intellectuel et les lieux choisis pour ces démonstrations sont judicieusement choisis, afin d'assurer leur réputation de scientifiques, mais aussi d'industriels.
À peine cinq semaines après le dépôt du brevet (nº 245.032) pour un " appareil servant à l'obtention et à la vision des épreuves chronophotographiques par Messieurs Auguste et Louis Lumière ", une première conférence est organisée à la Société d'Encouragement pour l'Industrie Nationale, créée en 1801 et qui jouit d'un grand prestige. Elle est alors présidée par Éleuthère Mascart (1837-1908), proche de Léon Gaumont, qui porte un intérêt tout particulier à la photographie. C'est ce dernier qui a proposé aux Lumière de présenter leur " kinétoscope de projections " (Bulletin de la Société d'Encouragement pour l'Industrie Nationale, Paris. 94e année, tome X, avril 1895, p. 413). La conférence a lieu le 22 mars 1895. C'est le Bulletin du Photo-club qui offre le compte rendu le plus détaillé :
Conférence de M. Louis Lumière à la Société d'Encouragement pour l’Industrie nationale
A la demande de M. Mascart, président de la Société d'Encouragement, M. Louis Lumière a fait, le 22 mars dernier, une conférence des plus intéressantes sur l’Industrie photographique et plus spécialement sur les ateliers et produits industriels de la Société anonyme des plaques Lumière, dont le siège est à Lyon.
M. Louis Lumière, pour rendre son exposé plus clair et plus attrayant, a projeté des vues de l'intérieur des ateliers où il a montré, en action, toutes les productions des plaques sensibles au gélatinobromure, la fabrication du papier sensible au citrate d'argent. Plus de deux cents ouvriers et ouvrières sont employés dans cette usine, dont une vue d'ensemble a montré la vaste étendue. A l'aide d'un kinétoscope de son invention, il a projeté une scène des plus curieuses : la sortie du personnel des ateliers à l'heure du déjeuner. Cette vue animée, montrant en plein mouvement tout ce monde se hâtant vers la rue, a produit l'effet le plus saisissant, aussi une répétition de cette projection a-t-elle été redemandée par tout l'auditoire émerveillé. Cette scène, dont le déroulement ne dure qu'une minute environ, ne comprend pas moins de huit cents vues successives ; il y a là de tout : un chien allant et venant, des vélocipédistes, des chevaux, une voiture au grand trot, etc.
Pour terminer cette conférence, M. Louis Lumière a montré à son public d'élite quelques épreuves en couleurs obtenues par la méthode de M. Lippmann. Notre savant collègue, présent à la séance, a été l'objet d'une ovation sympathique et chaleureuse de la part des assistants, surtout après que l'on a connu, par un avis de M. Mascart, la grande récompense décernée par la Société d'Encouragement à l'Illustre inventeur du moyen de reproduire les couleurs par la photographie.
Les Lumière ne disposent alors que d'un seul film, Sortie d'usine dont aucun élément filmique ne subsiste aujourd'hui, et dont on ne connaît que les quatre remakes. Il faut comprendre que le cinématographe n'est qu'un élément - la photographie en couleurs en est un autre - qui donne à voir le dynamisme des Lumière et de leur usine de Monplaisir (Lyon). La vue animée en est une sorte de matérialisation.
Vue Générale des Usines LUMIÈRE pour la fabrication des plaques et papiers photographiques à LYON-MONPLAISIR
Agenda Lumière 1906, Lyon/Paris, Société Anonyme des Plaques et Papiers Photographiques A. Lumière et ses Fils/Librairie Gauthiers-Villars
Le succès de cette première présentation encourage les Lyonnais a renouveler l'expérience, dès que l'occasion se présente.
Le cinématographe Lumière (Exposition de la Société Française de Physique, 16-17 avril 1895)
Profitant sans doute de sa présence à Paris, Louis Lumière organise une nouvelle présentation - moins connue - dans le cadre de l'Exposition de la Société Française de Physique qui se tient, les 16 et 17 avril à la Société d'Encouragement :
Tous les ans, la Société française de physique organise, le mardi et le mercredi de Pâques, dans les salles de la Société d'Encouragement, une exposition qui attire un grand nombre de savants s'intéressant à la physique.
[...]
La maison A. Lumière et ses fils, de Lyon, avait envoyé de magnifiques et grandioses agrandissements qui ornaient fort à propos les diverses salles de l'exposition, et un ingénieux appareil, le cinématographe, destiné à prendre des épreuves photographiques en séries.
La Science Française, Paris, 1895, 1er semestre p. 210-211.
En revanche, il semble que cette présentation ne soit pas accompagnée de projections animées, comme les précédentes. Toujours est-il que les Lumière occupent le terrain et ne perdent pas une occasion de faire connaître le cinématographe.
Les projections Lumière (Congrès des Sociétés Savantes, samedi 17 avril 1895)
Le Congrès des Sociétés Savantes de Paris ete des Départements s'ouvre le mardi 16 avril 1895. La sous-section de photographie est réunie dans l'amphi provisoire de la vieille Sorbonne (Bulletin de la Société française de photographie, nº 12, 2e série, Tome XI, p. 299)Au cours de cette séance, Louis et Auguste Lumière présentent une communication sur l'orthochormatisme.
Le Congrès des Sociétés savantes s'est ouvert le 16 avril, à 2 heures, dans le grand amphithéâtre de la nouvelle Sorbonne.
La sous-section de photographie a tenu trois séances bien remplies au cours desquelles il a été étudié plusieurs questions portées au programme et fait diverses communications des plus intéressantes
[...]
M. Lumière a projeté une belle série d'épreuves en couleurs obtenues par la méthode de M. Lippmann, ainsi que des clichés en couleurs par le procédé de Ducos du Hauron, à l'aide de trois couches colorées superposées.
Il a également projeté une scène animée, comptant de près de neuf cents vues fournies par le Cinématographe de sa construction et qui lui a valu un succès égal à celui qu'il avait obtenu à la conférence dont nous avons rendu compte dans notre dernier numéro.
Bulletin du Photo-club de Paris, Paris, nº 52, mai 1895, p. 158.
Ça n'est que le lendemain samedi 17 avril qu'Auguste Lumière p´resente le cinématographe :
M. AUGUSTE LUMIÈRE projette, aux applaudissements de l'assemblée: 1º les épreuves de son cinématographe (objets en mouvement), 2º les épreuves en couleurs obtenues par la méthode de M. le professeur Lippman.
Bulleetin de la Société Française de Photographie, 2e série, Tome XI, nº 12, Paris, 1895, p. 304.
Comme cela s'est déjà produit antérieurement, la projection cinématographique apparaît comme une sorte de "performance ", comme si après les choses sérieuses - la photographie des couleurs - on s'accordait une courte récréation. Nous ignorons la vue qui est projetée, peut-être la même Sortie d'usine, présentée un mois plus tôt. On pourrait le penser à la lecture de ce nouvel article qui évoque une projection, sans doute celle du 17 avril si l'on se fie à la proximité des dates :
On annonce qu’une Société, à un capital assez élevé, serait en formation pour exploiter les reproductions photographiques donnant l’illusion du mouvement. Nous devons faire remarquer que la Société américaine qui exploite en France le Kinétoscope Edison ne présente que des scènes dont un ou deux personnages au plus exécutent des séries de mouvements qui se renouvellent comme dans le isotrope; l’appareil le plus simple que nous ayons vu est celui imaginé par M. Demeny, ancien préparateur du Dr Marey, mais le record (pour employer une expression consacrée) de la Photographie du mouvement est détenu par MM. Lumière fils, les fabricants de l’excellente plaque photographique que l’on connaît: ils ont réussi à présenter non pas une impression zootropique de mouvements visible pour une seule personne à la fois, mais c’est à un auditoire composé d’un grand nombre de personnes que ces ingénieux savants procurent l'illusion du mouvement d’une série de sujets qui se suivent sans interruption. Ils projettent d’abord sur l’écran la porte d’entrée de leur fabrique de Lyon, elle est ouverte et sans personnage, puis, instantanément, une personne se présente et sort en se dirigeant à droite, une qui suit va vers la gauche, l'unité de personnages se double, puis se triple, enfin la foule d’ouvriers et d'ouvrières arrive, les sortants se succèdent, à pied, en bicyclette, en voiture, à cheval... ; lorsque nous aurons dit : que plus de 100 personnages ou groupes animés passent en cinquante secondes dans cette porte projetée sur l’écran, que pour cette vue mouvementée, comme jamais on n'en a encore produit, il n’a pas fallu moins de 800 clichés, on comprendra qu’une Société se fonde, sa réussite est, probablement certaine, car ceux qui ont ressenti l'impression que nous avons éprouvée dernièrement devant l'image fantastique des petits personnages agiles de MM. Lumière doivent désirer voir et revoir cette curieuse application de la Photographie dite instantanée, et si le million de voyageurs riches qui traversent Paris passe devant ce tableau anime, il laissera une somme ronde dans les caisses de la Société. OCégé.
Le Moniteur de la photographie, Paris, 1er mai 1895, p. 19.
Toujours est-il que les Lumière ne semble avoir guère le choix. Le Congrès est clôturé, le 20 avril, par M. Poincaré, ministre de l'Instruction Publique.
Le cinématographe Lumière (Revue Générale des Sciences, 11 juillet 1895)
C'est au mois de juillet, cette fois-ci dans les locaux de La Revue Générale des Sciences, que plusieurs vues cinématographiques sont présentées. Henri de Parville, divulgateur des nouveautés scientifiques, va consacrer un court article à cette séance, encore une fois, destinée à un public éclairé :
Une bien jolie nouveauté qui fera courir tout Paris après les vacances. M. Olivier, directeur de la Revue générale des sciences, avait convié, jeudi dernier, le dessus du panier du monde savant à une soirée particulièrement intéressante. Au programme, le cinématographe de MM. Auguste et Louis Lumière. C’était de l’inédit. Tout le monde se rappelle le kinétoscope d’Edison, que tous les Parisiens ont admiré. Eh bien ! Le cinématographe est encore autrement merveilleux. Les tableaux animés du kinétoscope étaient presque microscopiques. Ceux de MM. Lumière sont plus grands, ce sont, en effet, des agrandissements photographiques. L’illusion de relief et de mouvement est extraordinaire. Le dispositif employé est nouveau. La place nous ferait défaut pour l’esquisser aujourd’hui. Qu’il nous suffise de dire que l’appareil, très condensé, permet facilement la projection des images successives qui donnent l’illusion du mouvement sur un écran avec un agrandissement de cent fois en diamètre. Alors, un grand nombre de personnes peuvent assister à ce spectacle charmant. Que de scènes applaudies avec enthousiasme et presque avec délire ! Le jardinier et sa lance qui arrose les plates-bandes, le cavalier qui apprend à monter à cheval, le bébé qui cherche les poissons rouges dans leur bocal, l’incendie, les pompiers, l’eau, la fumée, le dîner de Bébé avec les arbres du jardin agités par le grand vent. C’est d’une vérité telle qu’on se demande si l’on y est. Et la descente des passagers sur le ponton des bateaux de la Seine ? C’est inénarrable. Et la sortie des ateliers de femmes par la grande porte avec les voitures, les bicyclettes, les porteurs de marchandises. Quel mouvement et quel naturel ! Mais le chef-d’œuvre, c’est le boulevard avec les cafés, les piétons, les omnibus, etc., tout cela, c’est si bien le boulevard, qu’on a envie de se garer des voitures. Il apparaît à certain moment une tapissière qui vient droit sur les spectateurs. Ma voisine était si bien sous le charme qu’elle se leva brusquement d’un bond et ne se rassit que lorsque la voiture tourna et disparut. Puissance de l’illusion ! Le cinématographe étonnera bien des personnes. C’est inimaginable de vérité. MM. Lumière sont décidément de grands magiciens !
Henri de Parville, " Revue des sciences ", Journal des débats politiques et littéraires, Paris, 17 juillet 1895, p. 2.
Une nouvelle fois, nous nous trouvons face à une sorte de contradiction. D'une part, le lieu est choisi avec précision, pour cibler un public d'initiés. D'autre part, le cinématographe s'offre avant tout comme un spectacle et Henri de Parville lui-même surenchérit lorsqu'il termine son article en faisant des savants lyonnais de " grands magiciens ". Les Lumière ont eu le temps, au cours de la période estivale, de tourner quelques scènes ce qui permet désormais de présenter un petit programme. On assiste, avec cette séance, à la naissance d'une formule qui deviendra canonique.
Le cinématographe Lumière (Sorbonne, Faculté des Sciences, 16 novembre 1895)
C'est à l'automne que Louis Lumière va présenter une dernière fois, à Paris, son cinématographe dans un contexte toujours aussi " scientifique ". Il revient à la Sorbonne, à l'occasion de la rentrée de la Faculté des Sciences, le 16 novembre 1895. Une séance solennelle est organisée à cette occasion et elle a lieu dans le grand amphithéâtre de chimie. La revue La Photographie est l'une des seules à rapporter l'événement :
LA PHOTOGRAPHIE EN SORBONNE
La Faculté des Sciences de Paris, à l'exemple de sa voisine, la Faculté des Lettres, a ouvert ses cours par une séance solennelle, le samedi 16 novembre, dans l'amphithéâtre de la Sorbonne. Après une allocution de l'éminent doyen, M. Darboux, et la présentation, par M. Troost, de tubes de Geissler, renfermant de l'argon et de l'hélium, M. C. Lippmann nous a montré les dernières photographies en couleurs qu'il a obtenues par son ingénieux procédé : c'était d'abord le spectre de l'hélium, photographié deux fois avant la séance, des vitraux, des fleurs, etc., ainsi que quelques-uns des beaux clichés de M. Lumière. Inutile de dire qu'une salve d'applaudissements accueillait chaque nouvelle projection ; puis, il nous a été donné d'admirer sur l'écran les beaux résultats obtenus par MM. Lumière, avec le cinématographe de leur invention, qui laisse loin derrière lui le kinétoscope d'Edison. Le mouvement de « la Sortie des ateliers Lumière », du « Débarquement des membres de la dernière réunion de l'Union internationale de photographie », des scènes diverses ont fait l'admiration de l'auditoire, réellement émerveillé.
La Photographie, 30 novembre 1895 (Perrot, 1924, 43).
La presse espagnole va rendre également compte de cette nouvelle présentation du cinématographe, en apportant quelques précisions complémentaires :
El kinematógrafo
Ante una Asamblea de hombres de ciencia verificada en el anfiteatro de Gerson, en la Sorbona, el Sr. Lumiers (hijo) hizo interesantísimas experiencias presentando el maravilloso aparato que se llama el kinematógrafo.
Sobre un extenso muro se proyecta una fotografía por medio de la luz eléctrica, de modo que aparezca la perfecta ilusión de la grandeza natural. Los personajes de la fotografía no están inmóviles, sino que se agitan, desenvolviendo con sorprendente realidad una escena de la vida durante un minuto.
El Sr. Lumiere hizo gustar sucesivamente el espectáculo de la plaza Bellecour con los innumerables tranvías que se detienen, los viajeros que suben y bajan, etc., etc.
No es, pues, la imagen sola la que aparece, sino también la actividad y la vida.
Un solo aparato sirve para 300 vistas instantáneas que reproducen los movimientos hechos durante un minuto, produciéndose así en la retina la imagen del movimiento continuado.
La Unión católica, Madrid, 27 novembre 1895, p. 1.
Un nouvel article complète l'information :
CHRONIQUE SCIENTIFIQUE
A la Sorbonne des sciences.-C'était lundi, 18 novembre, [sic] ouverture solennelle des cours à la Faculté des sciences. Au moment où la cérémonie commence, toute la Faculté, en habit, est au grand complet; l'amphithéâtre est littéralement bondé d'étudiants et de notabilités scientifiques.
[...]
MM. Lumière et fils ont eu l'excellente idée de venir présenter un appareil nouveau de leur invention, une vraie merveille d'optique: le kinétoscope à projection. Sur l'écran s'agitent des personnages vivants, c'est la reproduction de la vie. La vue de la mer avec son vaste horizon et l'argent de ses lames présente surtout un effet saisissant.
Revue de l'enseignement primaire et primaire supérieur, 8 décembre 1895, p. 171.
Grâce à ces trois articles, nous connaissons une partie du programme proposé à la Sorbonne en ce 16 novembre 1895. En cinq présentations, il s'est agi de lancer les bases d'une future exploitation du cinématographe. On s'assure d'une part du soutien de la communauté scientifique, et d'autre part, on " teste " l'effet produit sur le public. Il ne faut pas oublier que d'autres villes que Paris, découvrent aussi le cinématographe, et tout particulièrement Lyon. Par ailleurs, il faut laisser le temps de mettre au point les appareils qui iront sur différents postes, dès la fin de l'année 1895. Indiscutablement, les Lumière ont compris l'effet que le cinématographe peut produire sur les spectateurs et ces séances distillées tout au long de l'année 1895 servent à mettre en place ce qui devient, en 1896, le système des concessions.
Tout est donc prêt pour organiser la célèbre séance du 28 décembre 1895...
Le cinématographe Lumière du Grand Café (14 boulevard des Capucines, 28-31 décembre 1895) → 1896
L'homme clé de la première présentation publique du cinématographe est Antoine Lumière. Il s'intéresse depuis 1894 au kinetoscope Edison et il est celui qui pense que le cinématographe a un avenir commercial. Ses deux fils vont donc laisser le soin à leur père de faire les démarches nécessaires pour lancer l'exploitation commerciale de leur invention. Afin de mener à bien l'opération, Antoine Lumière prend contact avec Clément Maurice, l'un de ses anciens collaborateurs aux usines de Monplaisir :
L'exploitation de cette merveille sourit au brave Maurice qui, plein de confiance, accepte de liquider son atelier et de prendre en mains les destinées de l'invention des frères Lumière. Vainement les deux amis interrogent les agences de la place de la République à la Madeleine, comme ils questionnent les commerçants. Fatigués par des courses pénibles ils vont désespérer quand ils aperçoivent un groupe de déménageurs sortant des meubles d'un sous-sol ; le local où siégeait jusque-là une académie de billards est vide !
G. Michel Coissac, " Le Cinématographe est né en France en 1895 " dans Hommage à Louis Lumière, Ville de Paris, Musée Galliéra, 1935.
RÉVEILLONNONS ! [...] En arrivant au coin de la rue Scribe et du boulevard des Capucines apparaît le Grand-Café. À mon avis (je m'y connais) le Grand-Café est non seulement l'établissement le plus grandiose de Paris, mais du monde entier. Une transformation heureuse vient de s'y faire dernièrement. Le salon du restaurant où les soupeurs se réuniront pour réveillonner est une reproduction textuelle de l'Alhambra de Grenade. Là, pendant le souper, les Lautars roumains joueront, comme tous les soirs, leurs morceaux, empreints d'une originalité si exquise. En ce qui concerne le restaurant, la direction en a été confiée aux anciens maîtres d'hôtel du café de Paris : Auguste et Joseph. J'ajouterai, ce que tout monde sait, que le Grand-CCafé appartient à M. Volpini, le directeur des bals de l'Opéra, qui nous donnera de ce fait de brillants soupers cet hiver. Noblesse oblige ! [...] Albert Cellarius. |
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L'Orchestre, Paris, 4 mars 1890, p. 1 | Gil Blas, Paris, 25 décembre 1894, p. 2 |
Grand Café, 14, boulevard des Capucines (1er édifice à gauche) (c. 1895) [D.R.] |
Grand Café, 14 boulevard des Capucines (1er édifice à gauche) (c. 1895) [D.R.] |
Paul, Joseph Volpini ([Garateo, Pavie], [1853]-Nice, 30/12/1910) est une figure connue depuis les années 1880. Déjà propriétaire du Grand Café depuis au moins 1887, il en a fait un lieu essentiel du boulevard des Capucines, à la fois restaurant, café, mais aussi salle de jeu avec ses billards. Grâce au témoignage de Clément Maurice, nous avons des informations sur les circonstances de l'ouverture du Salon Indien, aménagé pour accueillir le cinématographe Lumière :
Nous avons ouvert cette salle au Grand Café, avec M. Lumière père, dit M. Clément Maurice, loin de nous douter du succès rapide de ces démonstrations. La salle contenait à peine une centaine de personnes ; le prix d'entrée était de 1 franc.
La première journée, j'ai fait une recette de 33 francs ; c'était maigre ! Mais le succès fut si rapide que trois semaines après l'ouverture, les entrées se chiffraient par 2.000 et 2.500 francs par jour, sans aucune réclame faite dans les journaux.
M. Volpini, propriétaire du Grand Café, avec lequel nous avions passé un bail d'un an pour son sous-sol, avait préféré aux 20 % sur la recette que nous lui avions offerts, 30 francs par jour pour le loyer. Celui-là n'avait guère confiance dans la réussite de cette affaire.
La projection des huit ou dix films durait environ vingt minutes ; la salle était aussitôt vidée et remplie à nouveau. Quelques semaines après, j'ai dû faire établir un service d'ordre par les agents pour empêcher les bousculades et quelquefois les batailles à l'entrée du sous-sol.
L'ouverture a eu lieu en 1895, la dernière semaine de l'année, entre Noël et le Jour de l'an. Je ne puis préciser la date exacte.
Ce qui m'est resté le plus typique, c'est la tête du passant arrêté devant l'entrée, cherchant ce que Cinématographe Lumière signifiait ; ceux qui se décidaient à entrer sortaient un peu ahuris ; on en voyait bientôt revenir, amenant avec eux toutes les personnes de connaissance qu'ils avaient pu rencontrer sur le boulevard.
Dans l'après-midi, le public formait une queue qui s'étendait souvent jusqu'à la rue Caumartin.
Pendant plusieurs mois, le programme ne fut guère changé ; les films de résistance, d'une longueur de 12 à 13 mètres, étaient les suivants :
La sortie des ouvriers de l'usine Lumière ;
L'Arroseur ;
Le goûter de bébé ;
La pêche aux poissons rouges ;
Un gros temps en mer ;
Le Forgeron ;
L'arrivée d'un train en gare ;
Soldats au manège ;
M. Lumière et le jongleur Trewey jouant aux cartes ;
La démolition d'un mur.
PERROT, 1924, 39.
L'un des premiers témoins de cette séance historique est Joseph Demaria qu'il évoque brièvement :
Le 28 de cette même année, j'assistai à la première représentation publique et payante d'images animées. Quant à l'appareil avec lequel opérait mon vieil ami Clément Maurice dont je suis heureux de rappeler le nom, il était simple, mais précis, sans réembobinage automatique, le film se déroulait dans un sac et un ballon en verre rempli d'eau faisait à la fois office de cuve et de condensateur.
Conseil Municipal de Paris, 1926: 1995.
Pourtant, la presse ne va guère s'intéresser à la séance du 28 décembre. Dans la capitale, seuls deux quotidiens consacrent des articles à l'événement : Le Radical et La Poste. Le 1er janvier, Le Gaulois ne lui consacre qu'une simple ligne
LE CINÉMATOGRAPHE Merveilleuse invention.-Soirée offerte à la Presse.-La photographie vivante. MM. Lumière père et fils, de Lyon, avaient hier soir convié la presse à l'inauguration d'un spectacle vraiment étrange et nouveau, dont la primeur a été réservé au public parisien. [...] Ils ont installé leur ingénieux appareil dans l'élégant sous-sol du Grand Café, boulevard des Capucines. Les résultats obtenus ont produit, tout d'abord, une sorte de stupeur dans l'assistance d'élite invitée à cette sorte de " vernissage ". On avait vu déjà, à travers des verres grossissants, en se penchant sur des boîtes, des images mouvantes, qui rappelaient, avec une perfection supérieure, il faut l'avouer, les zootropes chers à nos premiers ans. Mais l'appareil de MM. Lumière, tout différent, produit des effets bien plus surprenants. Figurez-vous un écran, placé au fond d'une salle aussi grande qu'on peut l'imaginer. Cet écran est visible à une foule. Sur l'écran apparaît une projection photographique. Jusqu'ici rien de nouveau. Mais tout à coup, l'image de grandeur naturelle, ou réduite, suivant la dimension de la scène, s'anime et devient vivante. C'est une porte d'atelier qui s'ouvre et laisse échapper un flot d'ouvriers et d'ouvrières, avec des bicyclettes, des chiens qui courent, des voitures ; tout cela s'agite et grouille. C'est la vie même, c'est le mouvement pris sur le vif. Ou bien, c'est une scène intime ; une famille réunie autour d'une table. Bébé laisse échapper de ses lèvres une bouillie que lui administre le père, tandis que la mère sourit. Dans le lointain, les arbres s'agitent ; on voit venir le coup de vent qui soulève la collerette de l'enfant. Voici la vaste Méditerranée. Elle est encore immobile, comme dans un tableau. Un jeune homme, debout sur une poutre, s'apprête à s'élancer dans les flots. Vous admirez ce gracieux paysage. A un signal, les vagues s'avancent en écumant, le baigneur pique une tête, il est suivi par d'autres qui courent plonger dans la mer. L'eau jaillit de leur chute, le flot se brise sur leur tête ; ils sont renversés par le brisant, ils glissent sur les rochers. Mais nous ne voulons pas déflorer la surprise et le plaisir du spectateur.[...] La Poste, Paris, 30 décembre 1895. |
LE CINEMATOGRAPHE Une merveille photographique Une nouvelle invention, qui est certainement une des choses les plus curieuses de notre époque, cependant si fertile, a été produite hier soir, 14, boulevard des Capucines, devant un public de savants, de professeurs et de photographes. Il s'agit de la reproduction, par projections, de scènes vécues et photographiées par des séries d'épreuves instantanées. Quelle que soit la scène ainsi prise et si grand que soit le nombre des personnages ainsi surpris dans les actes de leur vie, vous les revoyez, en grandeur naturelle, avec les couleurs, la perspective, les ciels lointains, les maisons, les rues, avec toute l'illusion de la vie réelle. Il y a par exemple la scène des forgerons. L'un fait fonctionner la soufflerie, la fumée s'échappe du foyer; l'autre prend le fer, le frappe sur l'enclume, le plonge dans l'eau, d'où monte une large colonne de vapeur blanche. La vue d'une rue de Lyon avec tout son mouvement de tramways, de voitures, de passants, de promeneurs, est plus étonnante encore ; mais ce qui a le plus excité l'enthousiasme, c'est la baignade en mer; cette mer est si vraie, si vague, si colorée, si remuante, ces baigneurs et ces plongeurs qui remontent, courent sur la plateforme, piquent des têtes, sont d'une vérité merveilleuse. A signaler encore spécialement la sortie de tout le personnel, voitures, etc., des ateliers de la maison où a été inventé le nouvel appareil auquel on a donné le nom un peu rébarbatif de cinématographe. Le directeur de la maison, M. Lumière, s'en est d'ailleurs excusé. Les inventeurs sont ses deux fils, MM Auguste et Louis Lumière, qui ont recueilli hier les applaudissements les plus mérités. Leur œuvre sera une véritable merveille s'ils arrivent à atténuer, sinon à supprimer, ce qui ne paraît guère possible, les trépidations qui se produisent dans les premiers plans. On recueillait déjà et l'on reproduisait la parole, on recueille maintenant et l'on reproduit la vié. On pourra, par exemple, revoir agir les siens longtemps après qu'on les aura perdus. Le Radical, Paris, 31 décembre 1895, p. 2. |
Si l'on peut raisonnablement penser que la séance comporte - comme cela sera le cas par la suite - dix vues différentes, la liste reste délicate à établir. Les deux articles de journaux donnent les titres suivants : La sortie de l'usine Lumière à Lyon, Le Repas, La Mer, Les Forgerons et La Place des Cordeliers à Lyon. Il faudrait y ajouter Discussion évoqué par Le Siècle (6 janvier 1896, p. 2). Certes Clément-Maurice donne une liste précise de dix titres, mais ce témoignage près de trente ans après reste sujet à caution.
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1896
← 1895 Le cinématographe Lumière du Grand Café (1er janvier-31 décembre 1896) → 1897
Dès les premiers jours de l'année, la presse va se rattraper et nombreux sont les quotidiens qui se font l'écho du succès obtenu par le cinématographe Lumière. Sans doute l'un des plus intéressants est celui publié par Le Siècle et signé " G.L. ", car il établit des comparaisons entre le kinétoscope et le nouveau cinématographe dont il décrit non seulement les qualités, mais pour lequel il crée une véritable atmosphère visuelle et sonore tout en multipliant les informations relatives au local :
LE CINÉMATOGRAPHE
Il serait difficile de rencontrer un Parisien qui ne se soit rendu à l'appel du doigt articulé d'Edison, celui qui fait pstt ! pstt ! sur le boulevard, presque au coin de la rue Rougemont. Alors je ne dirai pas notre émerveillement devant le kinétoscope, auquel on a ajouté maintenant un phonographe, ce qui nous reconstitue en même temps le rythme par les sons de l'orchestre et par le pas de la gitana sur la scène.
Mais j'ai hâte de signaler les séances dont on jouit chaque soir au sous-sol du Grand-Café, près de la rue. Scribe. Là, tranquillement enfoncé dans son fauteuil, ce ne sont pas des ombres chinoises qu'on attend sur le cadre de toile blanche du petit théâtre en nattes et bambou décoré de fausses trompes d'éléphant ; on attend que du fond de la salle soit projetée par le cinématographe une scène animée dont certains personnages sont de grandeur naturelle. Le piano à queue peut se taire ; nous sommes suffisamment captivés, jusqu'à l'angoisse, par le pugilat de deux gentlemen en querelle à propos d'un entrefilet de journal. Comment ne pas rire avec conviction aussi à cette farce d'un arroseur trempé et décoiffé en examinant son tuyau qu'un gamin, derrière lui, avait écrasé du pied ?
On devient très sentimental, je vous assure, à regarder bébé qui chasse au poisson rouge dans un bocal ou qui prend la becquée de papa et de maman. Et les joyeux plongeons des baigneurs roulés par la vague ; le travail des forgerons, comme dans Siegfried ; les mouvements de foule dans la rue, au débarcadère du bateau, tout un grouillement de gens à pied, à bicyclette, en voiture, se coudoyant sous nos yeux, s’interpellant avec tant de netteté qu'un sourd-muet lirait les paroles sur leurs lèvres, - tout cela défile devant nous, muets de stupéfaction.
Je ne vois pas trop ce que les peintres feront de leurs pinceaux le jour où la photographie de couleurs concourra à cette reconstitution exacte de la vie visible. Il ne leur restera qu'à déformer les objets par caricature (Caran d'Ache) ou amour du fantastique (Carriès). À preuve le joli sentiment qui se dégage, des paysages accrochés au mur de la salle du cinématographe de MM. Lumière ; ce sont de simples photographies de Clément Maurice. Il n'y aura même plus que des loisirs pour la critique d'art ! - G.L.
Le Siècle, Paris, 6 janvier 1896, p. 2.
Une première affichette conservée semble dater des derniers jours de décembre 1895 ou des premières semaines de janvier 1896.
Le Cinématographe (1895-1896)
Reproduit : PERROT, 1939 : 12.
C'est grâce au bouche-à-oreille que les Parisiens vont se rendre de plus en plus nombreux pour assister aux séances du cinématographe Lumière au Grand Café. Le succès est tel que les responsables du poste décident d'organiser des projections supplémentaires, le matin :
En raison du succès énorme qui a accueilli l'exhibition du Cinématographe, cette prodigieuse invention de MM Auguste et Louis Lumière, des séances supplémentaires seront données, afin d'éviter l'encombrement, le matin de 10 heures à midi à partir de demain.
Rappelons que ce merveilleux appareil fonctionne toutes les demi-heures, 14, boulevard des Capucines, de 2 h. à 6 h 1/2 et de 8 heures à 1 1 h, le soir.
Le Figaro, Paris, 5 février 1896, p. 3.
Un long article publié dans Le Journal de Rouen offre une description précise de la salle et de quelques vues animées :
Cinématographe ! Kinétoscope ! vilains noms. Il était si simple de dire "lanterne magique" ave l'air des Pompiers de Nanterre.
Au Grand-Café, à Paris.
On se presse à l'entrée d'une petit escalier et l'on descend... dans une cave, où l'on jouait autrefois au billard. Point de guichet, un tourniquet, et l'on pénètre dans une petite salle éclairée à l'électricité, où l'on tient bien deux cents, rangés sur des banquettes confortables.
La scène : un simple transparent.
Le public : de tout un peu. Ça ne coûte qu'un franc ; ouvriers, bourgeois, membres des cercles et femmes élégantes, accompagnées de vieux messieurs qui expliquent. S'ils n'expliquaient pas, que feraient-ils ?
On commence à l'heure et à la demie ; deux représentations par heure, et ça ne désemplit pas du matin au soir.
-Mais alors on a fait une réclame énorme à cette affaire ?
-Point. Pas une ligne, pas une affiche. Rien que la réclame parlée de ceux qui ont déjà vu. La meilleure de toutes les réclames.
Mais, chut ! La lumière s'éteint. On commence.
Le transparent s'éclaire et nous voyons la foule, dans la rue. C'est bien cela : les personnages vivent, marchent, s'animent, causent. C'est la fourmilière humaine.
Cric. Tout disparaît et la salle s'éclaire. À peine le temps de manifester son admiration et la scène change.
C'est un jardinier qui arrose avec une lance d'arrosage. Un gamin arrive sournoisement derrière lui et met le pied sur le conduit de toile. L'eau ne jaillit plus; le jardinier s'étonne, et, comme il regarde sa lance, l'eau lui jaillit au nez. Le gamin a levé le pied !
Puis c'est un incendie, avec les premiers seaux d'eau, la pompe, la manœuvre et la fumée qui monte, épaissit et tourbillonne.
C'est un train qui arrive et s'arrête, les voyageurs qui descendent et s'étirent. Une grande rue avec le tramway qui passe, des piétons, un va-et-vient en tous sens et des charrettes dont les roues tournent et dont les chevaux marchent en dodelinant de la tête.
Voici la mer avec ses vagues qui déferlent et accourent vers le rivage, jetant l'écume au vent. Des baigneurs courent sur une planche en tremplin et s'élancent dans les vagues, tombant pile ou face, reviennent en nageant, escaladent les rochers et plongent de nouveau.
Tout cela est merveilleux, c'est le mouvement, c'est la vie elle-même. Il n'y manque que le bruit et la voix, le phonographe. On y songe. Edison y travaille.
Et quand on aura fait la concordance du cinématographe, du phonographe, des rayons cathodiques, du kinétoscope, du télescope, du télégraphe et de tous les graphes à venir, il n'y aura plus rien de caché, plus de distance, plus de temps.
Le Journal de Rouen, Rouen, samedi 15 février 1896, p. 3.
Les derniers lignes de l'article sont particulièrement lucides sur le devenir du cinématographe, mais également de tous les progrès de la technologie. Le succès de la nouvelle invention, dû au simple bouche-à-oreille, est tel qu'il devient impossible de contenir la foule qui se précipite pour voir le cinématographe du Grand Café et les responsables sont conduits à recruter d'anciens militaires pour régler le flux des spectateurs :
Anciens militaires, grands et forts, sont demandés pour service d'ordre. S'adresser au Cinématographe, 14, boulevard des Capucines.
Le Petit Parisien, Paris, mercredi 19 février 1896, p. 3.
Un journaliste de la revue helvète Bibliothèque universelle et Revue suisse, écrit dans le numéro du mois de mars 1896 - écrit par conséquent au plus tard en février - un article sur l'une des premières séances du cinématographe au Grand-Café :
[...] Un cinématographe est installé en ce moment à Paris dans une cave du Grand-Café, et de 10 heures du matin à minuit la cave ne désemplit pas. Toutes les vingt minutes, 250 personnes sortent et 250 viennent prendre leur place, d'où l'on peut conclure que l'affaire, considérée financièrement, ne doit point être mauvaise. Et ces vingt minutes valent certainement les vingt sous qu'on paie. Sur un écran blanc, au fond de la salle obscurcie, toute une série de scènes se déroule. C'est une rue de Lyon : les piétons passent, lents ou affairés, les voitures défilent avec les voyageurs, les tramways circulent, et une voiture d'épicier semble devoir entrer dans la salle, tant elle a frôlé de près l'appareil photographique. C'est une scène de deux bébés qui jouent ensemble, et, à voir l'un d'eux s'asseoir, s'installer, puis se relever avec des gestes compliqués et gauches, on croirait se trouver en présence d'enfants en chair et en os. C'est ensuite un forgeron qui travaille un fer chaud, et la vapeur d'eau qui se dégage quand il plonge son fer dans l'eau est une merveille de réalisme. Les plus extraordinaires peut-on sont la sortie de l'usine, l'arrivée du train, le déjeuner de bébé et la plage. La première est la représentation de la sortie des ouvrières d’une usine quelconque : on les voit déboucher en groupes serrés, au nombre 100 ou 200, se diriger à droite, à gauche, causer, marcher, courir, etc. L’une d’elles est bien amusante ; on ne l’a point prévenue, et elle a marché droit sur l’objectif : son effarement et sa fuite précipitée, lorsqu’elle s’aperçoit de ce qui se passe, sont aussi plaisants que naturels. L'arrivée du train, qui grossit démesurément, s'arrête, se vide et se remplit, les voyageurs courant de ci de là, est une scène familière qui ne manque jamais de provoquer les applaudissements. Dans le déjeune de bébé, -en plein air, - notez les mouvements des branches et du feuillage agités par le vent. Pour la plage, avec les vagues qui avancent, déferlent et écument, s'en vont, puis reviennent, c'est un pur chef-d'œuvre. Tout cela est la nature même, car la photographie ne ment pas; c'est le mouvement exact, c'est la vie. Il n'y a qu'une réserve à faire: le tremblotement dû aux mouvements alternatifs du volet est quelque peu désagréable à l'œil. C'est comme si l'on regardait une scène de théâtre dont l'ensemble serait animé d'une légère trépidation. Mais qu'est-ce que cela auprès du reste ? Et le soleil lui-même n'a-t-il pas des taches ?
Bibliothèque universelle et Revue suisse, mars 1896, p. 661
Presque contemporain, le supplément illustrée du journal antisémite de Drumont, La Libre Parole consacre un long article au cinématographe :
Le cinématographe. - Donne au théâtre. - . Une anecdote parisienne.
Les journaux n'ont pas fait grand bruit autour du cinématographe que MM. Lumière et Cie, les grands photographes lyonnais au nom prédestiné ont installé dans les sous-sols garnis de bambous qui règnent sous le Grand-Café, au coin de la rue Scribe. Mais le public se porte en foule vers l'invention nouvelle et les spectateurs sortent ravis des tableaux qu'on fait défiler sous les yeux.
Le nom de l'appareil est un peu rébarbatif étant dérivé du grec ; la cinématique est une partie de la mécanique ; le cinématographe est un enregistreur du mouvement. J'étais enfant lorsque le zootrope (encore du grec), fit fureur Le zootrope est un cylindre en canon percé de fenêtres étroites et longues. On déroule à l'intérieur et l'on applique contre les parois, au-dessous des fentes latérales, une bande en papier ornée de personnages qui sont dans les attitudes successives d'un mouvement décomposé. Le sauteur initial à la jambe à peine levée, le sauteur complet franchit l'obstacle, les sauteurs intermédiaires passent par les positions diverses qui relient les deux extrêmes. Si maintenant, comme disent les mathématiciens, on imprime au zootrope un mouvement de rotation et si l'on regarde par les fentes, on croit voir le personnage s'animer, se mouvoir, exécuter le saut. Le principe de ce phénomène amusant, c'est la persistance de l'impression visuelle sur la rétine ; l'image consécutive3 se présente avant que la première soit effacée, nous avons la sensation de la continuité, du mouvement.
Edison avait fondé sur ce principe son kinetoscope (du grec toujours, appareil destiné à faire voir le mouvement) ; les progrès de la photographie instantanée qui permet de prendre dans les nuances les plus délicates toutes les phases successives d'un mouvement ont conduit Lumière au cinématographe.
Avec une vitesse et une régularité combinées d'avance avec soin, les attitudes qui se suivent et se complètent pour recomposer le mouvement passent devant nos yeux sur l'écran blanc destiné à recevoir la projection lumineuse. Peut-être ferais-je sourire Lumière par cette description sommaire de leur admirable lanterne magique ; je pane de ces choses comme un chroniqueur épris de merveilles, mais au bagage scientifique léger, comme un lecteur plus instruit des lettres que de la nature, comme un témoin heureux de voir tomber un à un les voiles qui, au fond du sanctuaire, cachent la statue impénétrable et jalouse de la Vérité.
Les scènes animées de Lumière, - leurs tableaux vivants, - sont des trompe-l’œil adorables. Un léger papillotement trouble encore la netteté de l'apparition sur l'écran ; peut-être, la vitesse avec laquelle les plaques se succèdent n'est-elle pas encore assez exactement calculée. Mais il est permis d'espérer qu'un prompt perfectionnement fera disparaître ce défaut. Les résultats acquis tiennent déjà du prodige.
Voici la " sortie des ateliers ". Ces ateliers ce sont ceux que possèdent les inventeurs. Au moment où le faisceau de lumière est projeté, nous voyons la photographie très ordinaire qui représente la porte d'un grand bâtiment avec des groupes qui stationnent sous le porche. Mais on met en mouvement les plaques, elles défilent ; voici que les groupes s'animent ; le flot des ouvriers sort et se sépare ; un grand garçon monte sur sa bicyclette ; un surveillant paraît derrière une porte ; un contremaitre jovial, son journal à la main, fait une agacerie amicale à une rieuse commère ; la voiture de l'établissement, avec ses deux chevaux attelés, s'ébranle et sort... C'est la vie vous dis-je, la vie intense et variée qui tient dans un carré de toile, et la photographie implacable reproduit avec une fidélité sans défaillance, les gestes, les sourires, les grimaces familières, l'allure vive ou pesante, le va et vient des gens ; ils nous regardent ; ils se meurent, ils respirent, le stéréoscope donne les reliefs, le cinématographe donne l'être à l'image ; c'est la photographie en action.
L'épisode le plus mouvementé, c'est le train. Au début de la projection, j'allais dire au lever du rideau, la gare est vide, les rails s'allongent vers le lointain horizon. Mais le train arrive, la locomotive grossit rapidement, le chef de gare accourt, des bras passent, les portières s'ouvrent, les voyageurs descendent ; un grand garçon s'élance du compartiment sur le marchepied et sur le quai, là il hésite et se secoue, puis reste les bras ballants. Ceux qui vont partir accourent avec des sacs, des valises, et l'on s'intéresse encore à cette mise en scène de la vie réelle que déjà la vision s'efface, le photographe a épuisé son rouleau.
Molle, déferlant en vagues indolentes, la Mer, dont nous suivons les moindres ondulations se montre à nous, ici creuse, là renflée, venant étaler sur la plage la nappe de ses lames épuisées. A gauche des baigneurs arrivent, parcourent la planche qui sert de tremplin, plongent ; l'eau jaillit, les têtes reparaissent. Avec les gestes gauches de l'homme qui marche dans l'eau, ces intrépides amateurs reprennent pied et reviennent au rivage pour recommencer leurs exploits.
Vous décrirai-je encore... Mais non, je m'aperçois que la prose est pâle pour célébrer les mérites du cinématographe ; vous l'irez voir.
La Libre Parole illustrée, Paris, samedi 29 février 1896, p. 1.
Le Cinématographe Lumière (c. janvier-février 1896)
Source: Bibliothèque historique de la ville de Paris (4-DEP-004-095)
Au cours de ces premières semaines, le renouvellement des vues est très limité. Il faut attendre presque la fin du mois de février pour que de nouvelles photographies animées, dont on ignore le titre, soient incluses au programme :
Au Cinématographe de nouvelles scènes projetées depuis quelques jours, obtiennent le même succès que les précédentes.
On a cependant conservé au programme les scènes qui, comme le Train, la Place des Cordeliers et la Mer, sont constamment redemandées et excitent au plus haut point l’admiration de tous.
Le Journal, Paris, dimanche 23 février 1896, p. 4.
Le cinématographe Lumière (c. mars 1896)
Reproducctions : COISSAC, 1925: 189.
Tout au long du premiere trimestre la salle ne désemplit pas :
Tout Parisien qui se respecte ne peut pas ne pas avoir vu le Cinématographe Lumière. C'est la grande vogue du jour. On fait queue à la salle du boulevard des Capucines pour admirer les projections animées de ce merveilleux appareil.
Le Journal, Paris, lundi 9 mars 1896, p. 4.
Il arrive que parfois quelques figures en vue de l'époque se rendent au cinématographe pour voir défiler les vues, comme c'est le cas pour le Prince Henri d'Orléans qui, après avoir déjeuné " au cercle royaliste de la Poule-au-Pot, chez Durand [...] est allée voir ensuite le Cinématographe. " (La Gazette de France, Paris, 24 février 1896, p. 3) ou le Prince de Galles qui " a beaucoup admiré la prodigieuse invention de MM. Lumière " (Le Petit Parisien, Paris, 10 mars 1896, p. 3). Il en est de même de certaines confréries, comme celle de la Croûte qui finit son quarante-sixième dîner, en se rendant " au Grand Café, où M. Lumière leur a donné la primeur des nouvelles épreuves de son merveilleux Cinématographe (L'Intransigeant, Paris, 12 mars 1896, p. 3). Le succès du cinématographe Lumière est tel que la décision est prise d'ouvrir une nouvelle salle :
La salle du Grand-Café ne pouvant plus suffire, en raison de l'affluence toujours croissante des visiteurs, l'administration du Cinématographe Lumière va ouvrir d'ici quelques jours une salle-annexe au premier étage de l'Olympia.
Les projections animées auront lieu simultanément dans les deux salles.
Le Petit Parisien, Paris, 14 mars 1896, p. 3.
Alors que deux autres cinématographes Lumière tournent simultanément à Paris à la fin du mois de mars, un entrefilet ne manque pas d'attirer l'attention. La maison Lumière met en garde contre les imitations. En creux, cela indique bien que la " résistance " s'organise face au monopole exclusif du cinématographe :
L'immense et légitime succès du cinématographe Lumière va naturellement faire surgir des imitateurs. C'est au public à ne pas s'y tromper et à bien s'assurer du nom.
La merveilleuse invention de MM. Lumière fonctionne au 14 du boulevard des Capucines, ainsi qu'à l'Olympia, sous la direction de M. Lumière lui-même.
Le Gaulois, Paris, 29 mars 1896, p. 2.
Bientôt Paris sera couvert de nombreux autres appareils qui engageront une claire concurrence avec celui des frères Lumière. La répercussion est telle au cours de ces premiers mois de l'année 1896 que le cinématographe Lumière est même instrumentalisé pour servir des fins anticléricales. C'est sous la plume de " Pierre Veber " que l'on peut découvrir une " Introduction à la vie dévote "- malicieusement attribuée à l'abbé Constantin - adressée à mademoiselle Cléo de Mérode, la célèbre demi-mondaine. Le plus surprenant, c'est que le journaliste, dont le moins que l'on puisse dire c'est qu'il est visionnaire, écrit les lignes suivantes :
Je suis à même de vous donner un renseignement : la maison Lumière a exécuté, d'après les minutieuses illustrations du peintre Tissot, une série cinématographique de la Passion ; c'est le Chemin de Croix animé : autant de stations, autant de tableaux. M. Brunetière ne se plaindra pas : la Science se met au service de la Foi. L'affaire est excellente ; on refusera du monde.
Gil Blas, Paris, 30 mars 1896, p. 1.
Il faudra pourtant attendre plusieurs mois encore pour que la première passion, celle de Léar de mars-avril 1897, soit tournée... Et pour Lumière, il faudra encore patienté un peu plus encore... Et en 1906, Alice Guy s'inspirera bien des dessins de Tissot pour sa Passion... Avec le printemps, et sans doute les premières chaleurs, la maison Lumière s'organise :
L'administration du Cinématographe-Lumière a fait installer dans toutes ses salles des systèmes d'aération perfectionnés. Les spectateurs n'ont donc pas à redouter l'excès de chaleur, pas plus dans le sous-sol et au premier étage du boulevard des Capucines qu'au rez-de-chaussée du boulevard Saint-Denis.
Quant à la salle des fêtes des Grands magasins Dufayel, où fonctionne également un cinématographe, elle est suffisamment vaste et aérée pour qu'on n'ait pas besoin de système spécial.
Adolphe Mayer.
Le Journal, Paris, 18 mai 1896, p. 4.
Cinématographe Lumière. Grand Café (c. décembre 1896)
Le cinématographe (Opéra/foyer de la danse, 11-[31] janvier 1896)
Avec une rapidité tout à fait surprenante, à peine une semaine après les premières séances de l'appareil Lumière, la direction des Bals de l'Opéra fait passer une note dans la presse où elle indique que des séances de photographies animées vont être organisées au Foyer de la Danse :
La direction des bals de l'Opéra offrira cette année la primeur d'une nouvelle découverte qui fera sensation, le cinématographe.
Les séances de ces photographies animées auront lieu au foyer de la danse, spécialement aménagé à cet effet, au bal du samedi11 janvier.
Il y aura certainement foule pour assister à ces projections, aussi curieuses qu'intéressantes, puisque toutes les loges sont déjà retenues, et cette première fête du Carnaval s'annonce comme devant être très brillante.
Le Journal, Paris, 4 janvier 1896, p. 6.
Les projections - sous la mention "attraction nouvelle" - sont encore signalées en janvier:
Au foyer de la danse, attraction nouvelle.
Paris, Paris, vendredi 10 janvier 1896 p. 4.
Annonce reprise à la fin du mois :
Au foyer de la danse, attraction nouvelle.
Paris, Paris, vendredi 31 janvier ; 1896 p. 4.
Nous n'aurons plus d'information sur l'appareil utilisé, ni sur le programme proposé...
Le cinématographe Lumière chez Antonin Mercié (10 février 1896)
Dès les origines, le cinématographe va multiplier ses lieux de projections. L'un d'eux est celui des salons sur lesquels, il n'y a que très peu de traces. Aussi la soirée offerte par Antonin Mercié, le célèbre sculpteur, le 10 février 1896, est-elle remarquable, également par sa précocité :
Très belle soirée chez notre grand statuaire Antonin Mercié. Parmi les invités qui assistaient aux expériences de cinématographe Lumière :
M. et Mme Poubelle, vicomte et vicomtesse d'Arjuzon, comtesse de Soltyk, marquise de Chaponay, comte et comtesse de Guerne, baron et baronne Le Vavasseur, comte H. de Ségur, général Gervais, un grand nombre de membres de l'Institut, M. Ch. Gérôme, Detaille, Jean-Paul Laurens, Olivier Merson, Bouguereau, M. et Mme Paladilhe, M.et Mme de Saint-Marceaux, M. Philippe Gille. M. Osiris, M. et Mme Dubufe, M. et Mme Pierné, Mme Roger-Miclos, Mme et Mlle Moréno, M. et Mme Maspero, M. et Mme Maignan, etc. etc.
La soirée était présidée avec une grâce exquise par la charmante Mme Antonin Mercié, née Simard de Pitray, qui par ses relations aristocratiques et artistiques fait les honneurs d'un des salons les plus recherchés de Paris.
Le Figaro, Paris, 11 février 1896, p. 2.
Ça n'est pas seulement l'aristocratie, mais aussi la crème de la peinture académique de la fin du XIXe siècle qui s'est retrouvée pour admirer le cinématographe Lumière. On peut souligner également, tout l'intérêt que soulève la nouvelle invention auprès du monde artistique représenté lors de cette soirée.
Antonin Mercié (1845-1916)
Il faut dire que le public du cinématographe est sans doute très divers, et que l'une des cibles clairement désignées est celle du " Tout-Paris " comme le souligne ce bref entrefilet qui fait écho au succès de l'invention des Lumière :
Les séances du Cinématographe sont devenues le rendez-vous de la haute société parisienne. Donner la liste des notabilités qui se sont extasiées devant l'invention de MM. Lumière est impossible, autant reproduire le Tout-Paris.
Devant l'affluence toujours croissante des visiteurs, dans l’après-midi et le soir, nous conseillons aux personnes qui ne veulent pas être bousculées de choisir de préférence les séances du matin.
Le Figaro, Paris, 11 février 1896, p. 4.
Le cinématographe Lumière au Cercle de l'Union artistique (1er mars 1896)
C'est à nouveau dans un cadre semi-privé que le cinématographe Lumière est présenté. Cette fois-ci, c'est une soirée organisée par le Cercle de l'Union artistique, fondé en 1860, attire une partie du gratin des artistes parisiens. Une soirée est organisée par le cercle le premier jour du mois de mars :
La soirée de Menus Plaisirs, que nous avons annoncée à ce cercle, sera donnée dimanche prochain à neuf heures et demie.
Le programme se compose d'abord de diverses chansons dites ou chantées, de quelques-uns des poètes chansonniers du Chien Noir, MM. Delmet, Ferny, Moy. Ensuite on verra une double séance de photographie, l’une à travers les corps opaques avec projections, l'autre le cinématographe avec numéros inédits.
La soirée se terminera par les danses anciennes qui ont eu un si grand succès aux concerts de l'Opéra et qui seront exécutées par des danseuses du corps de ballet de l'Académie nationale de musique.
Le Gaulois, Paris, 27 février 1896, p. 2.
La soirée a lieu dans la salle des fêtes de l'hôtel de la rue Boissy-d'Anglas (Le Figaro, Paris, 2 mars 1896, p. 2). Sans doute s'agit-il de l'une des toutes premières fois où le cinématographe partage la vedette avec les rayons Röntgen, autrement dit, les rayons X dont la découverte est presque simultanée de celle de l'appareil de photographies animées. Le succès de l'appareil Lumière ne se mesure pas uniquement au nombre des spectateurs qui font la queue sur le boulevard Capucines, mais également aux soirées privées qui s'organisent à Paris :
Le grand succès de la saison est décidément au Cinématographe Lumière. Non seulement on voit, chaque jour, une foule énorme assiéger l'entrée de la salle du boulevard des Capucines, mais encore on s'arrache dans les salons le merveilleux appareil.
Il n'est pas de belle soirée, aujourd'hui, sans voir figurer au programme les projections animées de MM. Lumière.
Le Gaulois, Paris, 9 mars 1896, p. 3.
Le Phototachygraphe (Grand-Hôtel, 9 mars 1896)
Un présentation du phototachygraphe a lieu lors d'un dîner de "La Croûte" :
Le prochain dîner de la Croûte aura lieu lundi prochain au Grand-Hôtel à 7 h. 1/2.
Au programme de la soirée qui suivra le diner :
Le Divorce de Pierrot, de M. Lenéka, joué par Mlle Créhange et M. Duthilloy; Paris-Flirt, revue de M. F. Oudot, joué par Mlle Stephani, MM. Dubosc et Carbogni ; les Lettres de faire part et Expériences inédites sur le Phototachygraphe.
Le XIXe siècle, Paris, mercredi 4 mars 1896, p. 4.
Le cinématographe Lumière (Société Française de Photographie, 9 mars 1896)
Les relations entre les Lumière et les sociétés de photographie sont extrêmement fréquentes et on les trouve souvent parmi les membres d'honneur. La Société Française de Photographie organise, dans la Salle d'Horticulture de la rue de Grenette, une fête photographique et musicale :
Au programme : le cinématographe de MM. Lumière avec ses scènes animées ; une photo-revue instantanée de M. Augé de Lassus, musique de M. Auzende, adaptée aux projections des principaux événements de l'année ; puis une série de projections du plus haut intérêt, parmi lesquelles nous devons citer en premier lieu, les paysages de M. Demachy et les portraits et instantanés de M. Carle de Mazibourg, c'est-à-dire de M. le comte Desmazières dont c'est le pseudonyme.
Le Figaro, Paris, 10 mars 1896, p. 4.
Le cinématographe Lumière de l'Olympia (22 mars 1896-[juillet] 1896)
Le succès du cinématographe Lumière au boulevard des Capucines est tel que depuis plusieurs semaines on annonce la prochaine ouverture d'une nouvelle salle. Dès la fin février, il est question d'installer un cinématographe dans la salle :
A l'Olympia, d'ici quelques jours, en plus du spectacle déjà si attrayant, on pourra assister aux séances du cinématographe, qui depuis quelque temps fait courir tout Paris.
On peut donc dire que M. de Lagoanère réunit dans son hall toutes les attractions aimées du public.
Le Gaulois, Paris, 26 février 1896, p. 4.
Il faudra malgré tout attendre presque un mois avant que le cinématographe Lumière ne s'installe au premier étage du célèbre théâtre :
Complètement débordée par la foule des visiteurs, l'administration du Cinématographe Lumière s'est décidés à installer dans une nouvelle salle-annexe ses projections animées. C'est à l'Olympia, au 1er étage, qu'auront lieu ces séances, sans préjudice de celles qui ont lieu au 14, boulevard des capucines, lesquelles continueront régulièrement comme par le passé.
Jules Huret.
Le Figaro, Paris, 15 mars 1896, p. 4.
On peut penser que la mise en place du projet a été plus compliqué que prévu et que les Lumière ont dû repousser de quelques semaines le jour de l'inauguration :
Aujourd'hui dimanche, à deux heures, ouverture, au premier étage de l'Olympia, de la nouvelle salle du Cinématographe Lumière.
Les projections animées continueront, en même temps, dans la salle du Grand-Café.
Le Journal, Paris, 22 mars 1896, p. 3.
Un bail a été signé entre Antoine Lumière et Clément-Maurice, en avril 1896, pour une durée de quatre mois (Archives de Paris, série DP4)
Par la suite, les informations se font très rares et, à l'exception de la rubrique des théâtres, aucun article ne vient compléter les informations. Il faut attendre les beaux jours pour que l'administration Lumière donne enfin quelques informations :
L'administration du Cinématographe-Lumière a fait installer dans toutes ses salles des systèmes d'aération perfectionnés. Les spectateurs n'ont donc pas à redouter l'excès de chaleur, pas plus dans le sous-sol et au premier étage du boulevard des Capucines qu'au rez-de-chaussée du boulevard Saint-Denis.
Quant à la salle des fêtes des Grands magasins Dufayel, où fonctionne également un cinématographe, elle est suffisamment vaste et aérée pour qu'on n'ait pas besoin de système spécial.
Adolphe Mayer.
sLe Journal, Paris, 18 mai 1896, p. 4.
Répertoire (autres films) : Les Fêtes du Couronnement du Tsar à Moscou : La cérémonie du Sacre ; Le général de Boisdeffre se rendant au Kremlin ; Le Défilé des chefs asiatiques ; L'Impératrice mère se rendant à l'église de l'Assomption ; plusieurs vues des Fêtes du Millénaire à Budapest (Le Figaro, Paris, 2 juillet 1896, p. 3).
Le cinématographe Lumière de l'Association des Journalistes Parisiens (Grand-Hôtel, 22 mars 1896)
Une fois encore, le cinématographe Lumière est appelé pour une réunion choisie. L'Association des Journalistes se réunit, au Grand-Hotel, sous la présidence de M. Mézières, de l'Académie française, président de l'Association. De nombreux invités s'y retrouvent dont Léon Bourgeois, président du Conseil. Tout va se terminer en musique et en images animées :
Un superbe concert a suivi ce banquet. Il a été ouvert par quelques projections du Cinématographe-Lumière auxquelles l'assistance a fait un très gros succès.
Le Figaro, Paris, 23 mars 1896, p. 1.
C'est Antoine Lumière qui est aux manettes. Une fois encore cela confirme que les Lumière tout en exploitant le cinématographe cherchent aussi à se gagner les faveurs de la meilleure bourgeoisie parisienne. De cette soirée exceptionnelle, Adolphe Brisson nous offre une description détaillée du cinématograph et de son opérateur :
PROMENADES ET VISITES
M. LUMIÈRE
C’était au Grand Hôtel, l’autre soir... L’Association des journalistes parisiens, célébrant sa fête annuelle, avait fait venir le cinématographe afin de réjouir ses invités. Au moment où les projections allaient commencer, on remarqua que l’obscurité n’était pas assez complète ; il fallut éteindre un lustre qui répandait dans la salle une vague lueur. Et comme le public, manifestait, quelque impatience de ce retard, on entendit une voix cordiale qui s’écriait :
— Mes enfants ! quand le père Lumière est là, il faut que ça marche !
Et, en effet, tout marcha très bien. Le cinématographe obtint son succès habituel. J’avais l’honneur d’être placé dans le voisinage de M. Léon Bourgeois, président du conseil, et je pus recueillir les mots qui tombaient de sa lèvre auguste... M. le président paraissait émerveillé.
— Avec cet appareil, disait-il, on pourrait reproduire le mouvement des batailles, saisir et reconstituer la physionomie des armées en marche.
Napoléon, qui nourrissait des pensées belliqueuses, n’eut pas considéré le cinématographe à un autre point de vue.
Sa tâche terminée, le « père Lumière », ayant reçu de l’assistance l’ovation qu’il méritait, s’en alla s’asseoir sur une banquette et s’apprêta à savourer les chansons de Mlle Yvette Guibert. Je pus le con sidérer à loisir.[...]
Le Temps, Paris, 7 avril 1896, p. 2.
Sur Paris, Antoine Lumière est l'une des figures essentielles de la diffusion du cinématographe. Il a la confiance de ses enfants et il suit de près les salles où l'on présente l'appareil. On peut penser qu'il est également intervenu lors de soirées similaires.
Le cinématographe Lumière de l'Eldorado (26 mars 1896-[1er mai 1896])
C'est maintenant dans le cadre d'un spectacle présenté à l'Eldorado, Le Royaume des femmes, une opérettte d'un auteur à la mode, Gaston Serpette, que le cinématographe Lumière va s'installer pendant quelques semaines :
Pour une bonne idée, voilà une bonne idée : Tous les soirs, à partir d'aujourd'hui, jeudi, le 2e acte du Royaume des Femmes, le gros succès de l'Eldorado, sera enrichi du cinématographe de lumière qui fera défiler devant les yeux du public stupéfait huit tableaux-animés d'une extrême originalité. Nous avons assisté, hier, à la répétition générale de ce « numéro » sensationnel, et nous serions bien surpris qu'il ne fît pas courir tout Paris à l'Eldorado. Pour obtenir l'exploitation dans son théâtre du cinématographe, M. Marchand a semé l'or sans compter. C'est là une semence dont la récolte sera enviable.
Le Journal, Paris, 26 mars 1896, p. 1.
Curieusement, la presse de façon insistante va parler d'un " cinématographe de Lumière ". S'agit-il d'un jeu de mot sur le nom " Lumière " ?
L'Eldorado, Paris, c. 1900 | Alfred Choubrac, Théâtre de l'Eldorado, Royaume des femmes, 1896 © Musée Carnavalet |
Même s'il ne s'agit pas, à proprement parler, de combiner la scène et l'image animée, il y a là la première association de cet ordre que l'on va retrouver souvent dans les années à venir. Le cinématographe dans le cas présent vient prendre place en plein milieu d la pièce sans qu'il y ait un lien précis entre le spectacle et les vues animées :
La première représentation au théâtre de l'Eldorado du cinématographe de Lumière a été hier soir un véritable triomphe.
Les vues - au nombre de huit - qui ont défilé au troisième tableau du Royaume des femmes, ont littéralement soulevé la salle.
Le Mur qui s'écroule et la Plage de la Ciotat, notamment, ont provoqué des tonnerres d'applaudissements.
Le Gaulois, Paris, 27 mars 1896, p. 3.
Faut-il y voir un effet " cinématographe " ? Toujours est-il que l'Eldorado est conduit à organiser des séances en matinée afin de satisfaire un public très nombreux :
Pour donner satisfaction aux demandes renouvelées des familles, la direction du théâtre de l'Eldorado donnera aujourd'hui une matinée composée de son gros succès : Le Royaume des Femmes, avec, au deuxième acte, le Cinématographe de Lumière, cette merveille de la science moderne qui fait courir tout Paris à l'Eldorado où, soit dit en passant, on a dû refuser hier soir plus de trois cents personnes.O. Ridot.
La Libre Parole, Paris, 29 mars 1896, p. 3.
Comme souvent le succès attire les fausses nouvelles et la rumeur va vite gonfler à propos des prix pratiqués par l'Eldorado depuis que le cinématographe Lumière est installé et qu'il a fait bondir les recettes :
On a fait courir le bruit que, depuis l'installation du cinématographe de Lumière au deuxième acte du Royaume des femmes, le prix des places au théâtre de l'Eldorado était augmenté.
M. Marchand nous prie de démentir cette nouvelle. Le prix des places est toujours le même.
Le Gaulois, Paris, 30 mars 1896, p. 3.
Nous ne disposons que de rares informations sur les vues animées qui sont présentées au cours des spectacles, mais parfois la presse fournit de nouveaux titres :
À la matinée qui aura lieu aujourd'hui, à l'Eldorado, le Cinématographe déploiera un nouveau tableau, le bassin des Tuileries que M. Lumière a fait exclusivement pour le coquet théâtre du boulevard de Strasbourg et que les Parisiens ne pourront voir nulle autre part.
Le Gaulois, Paris, 6 avril 1896, p. 3.
Quelques jours plus tard de nouvelles vues sont proposées aux spectateurs, ce qui confirme bien le rôle essentiel du cinématographe dont la presse indique désormais qu'il est présenté, en matinée, à 10 h :
À la matinée qui aura lieu aujourd'hui à l'Eldorado, le cinématographe fera défiler, au deuxième acte du Royaume des femmes, trois tableaux inédits : le Régiment en marche, les Mauvaises herbes, les Pêcheurs de sardines, composés exclusivement pour le public de ce théâtre.
Le Gaulois, Paris, 12 avril 1896, p. 3.
Il est sans doute quelque peu exagéré de parler d'exclusivité, puisque les films ont déjà été présentés, pour la plupart, à Lyon, mais il est possible que les vues, à Paris, ne soient offertes qu'à l'Eldorado... Toujours est-il que le succès grandit continuellement et ça n'est pas le Royaume des Femmes qui en est le principal responsable puisque la direciton de l'Eldorado va finalement organiser des séances uniquement composées de projections cinématographiques :
Pour satisfaire à la demande d’un grand nombre d’habitants du dixième arrondissement qui lui ont adressé une pétition, la direction de l’Eldorado a décidé de donner quotidiennement, de deux heures à six heures, des représentations de cinématographe Lumière. La première de ces représentations, qui se continueront chaque jour, aura lieu jeudi prochain. Le prix d’entrée est fixé à 1 franc. Ces représentations ne changeront rien au programme du soir de l’Eldorado, qui continuera à offrir à son nombreux public son désopilant spectacle : la Royaume des Femmes avec, au deuxième acte, le Cinématographe Lumière.
La Libre Parole, Paris, 14 avril 1896, p. 4.
Il est par ailleurs difficile de mesure le succès du cinématographe en se basant sur les seuls articles de presse. Toutefois, on peut accorder un certain crédit lorsque des chiffres plus précis sont offerts au lecteur. Ainsi l'entrefilet suivant offre des informations nouvelles :
Les après-midi de l'ELDORADO avec le Cinématographe Lumière attirent au coquet théâtre du boulevard de Strasbourg la foule des grands et des petits.
Dans le seul après-midi d'hier, de deux heures à six heures, le contrôle a enregistré plus de douze cents entrées à un franc.
La Justice, Paris, 24 avril 1896, p. 3.
Quelques jours plus tard, le 1er mai 1896, la presse annonce pour la dernière fois le cinématographe Lumière à l'Eldorado.
Le cinématographe Lumière des Grands Magasins Dufayel (13, boulevard Barbès, 29 mars-31 décembre 1896) → 1897
Salle du cinématographe et des attractions (Dufayel)
© collection Grimh
Les Grands Magasins Dufayel, fondés en 1856, boulevard Barbès, se consacrent, surtout, à la vente à crédit d'articles d'ameublement et d'équipement de la maison. Ils vont accueillir, pour la première fois fin mars 1896, le quatrième cinématographe Lumière de la capitale. Une séance exceptionnelle à lieu le dimanche 29 mars :
DIMANCHE 29 Mars, à 2h., Concert-Promenade, orchestre de 105 musiciens. Séance du Cinématographe-Lumière. Exposition de mobiliers par centaines dans les GRANDS MAGASINS DUFAYEL.-Entrée libre.
Le Figaro, Paris, 28 mars 1896, p. 3.
L'appareil est-il déjà installé à demeure ou bien s'agit-il d'une présentation exceptionnelle ? Toujours est-il que le cinématographe est à nouveau présent aux Grands Magasins Dufayel, le 8 avril 1896 et désormais les séances sont quotidiennes :
Salle des Fêtes des GRANDS MAGASINS DUFAYEL. Tous les jours, le CINÉMATOGRAPHE. Exposition de mobiliers par centaines.
Le Figaro, Paris, 8 avril 1896, p. 3.
Les séances sont annoncées avec une certaine fréquence :
Le Cinématographe Lumière devient de plus en plus le divertissement à la mode. Un des meilleurs endroits pour bien voir, sans attendre, ces merveilleuses projections animées est, sans contredit, la salle des fêtes des Grands Magasins Dufayel, où un local vaste, bien aéré et confortable est mis à la disposition des spectateurs.
Jules Huret.
Le Figaro, Paris, 7 juin 1896, p. 3.
De tous les appareils Lumière présentés dans la capitale, celui des magasins Dufayel est celui qui fait le plus parler de lui. Dans la plupart des cas, ce ne sont que des articles strictement publicitaires sans grand intérêt, mais parfois, des informations nouvelles apparaissent :
Les bicyclistes qui désirent voir les merveilleuses projections animées du Cinématographe Lumière, dans la salle des fêtes des grands magasins Dufayel, peuvent se rendre boulevard Barbès avec leur machine.
On vient de faire installer à leur intention un garage absolument gratuit et avec garantie.
Le XIXe siècle, Paris, 12 juin 1896, p. 3.
Cette initiative est tout à fait nouvelle et souligne que les Grands Magasins ont des stratégies commerciaux pour le moins modernes. Un autre argument publicitaire est aussi étonnant :
Encore une innovation aux Grands Magasins Dufayel. Non content de faire entendre, le jeudi, d'excellente musique aux visiteurs, M. Dufayel fera offrir à toute personne assistant aux séances du Cinématographe Lumière un flacon de l'excellente Bénédictine de l'Abbaye de Fécamp.
Le Figaro, Paris, 4 novembre 1896, p. 3.
Une nouveauté d'une autre nature, mais qui est particulièrement moderne va consister à "doubler" les films présentés :
Encore une nouvelle attraction aux grands magasins Dufayel. Les projections du Cinématographe Lumière sont complétées par des dialogues tenus par les personnages des tableaux. L'effet est des plus curieux. Demain, concert de 3 à 6 heures. Entrée libre. Il sera offert à toute personne assistant à une séance du Cinématographe un flacon de Bénédictine de l'Abbaye de Fécamp et un étui de biscuits suprême Pernot. On voit que M. Dufayel cherche à faire plaisir à tous ses visiteurs grands et petits. Les tableaux du Cinématographe sont changés tous les lundis.
Le Figaro, Paris, 18 novembre 1896, p. 3.
Les annonces se poursuivent jusqu'à la fin de l'année :
Il y aura foule demain dans les magasins Dufayel où aura lieu, de 3 heures à 6 heures, le concert hebdomadaire par une sélection de l'harmonie de cette importante administration. Les séances du cinématographe sont toujours très suivies, non seulement parce que les sujets sont intéressants, mais aussi parce que, grâce à un système nouveau, les personnages parlent. Il sera offert à toute personne entrant au cinématographe Lumière un flacon de Bénédictine et l'abbaye de Fécamp et un étui de suprêmes Pernot.
Le Figaro, Paris, 30 décembre 1896, p. 3.
Répertoire : La Course des automobiles, Le Retour du régiment (Le Journal, Paris, 18 juin 1896, p. 4), La Cérémonie du Sacre, Le Général de Boisdeffre se rendant au Kremlin, Le Défilé des chefs asiatiques, L'Impératrice mère se rendant à l'église de l'Assomption, plusieurs vues des " Fêtes du Millénaire à Budapest " (Le Figaro, Paris, 2 juillet 1896, p. 3), L'Arrivée des souverains dans l'arsenal de Cherbourg, Leur réception par le Président de la République, le défilé à Paris des spahis et des chasseurs, le cortège impérial sur la place de la Concorde, [prochainement] la revue de Châlons (Le Figaro, Paris, 17 octobre 1896, p. 3).
→ 1897
La Photographie vivante du Théâtre Isola (39 boulevard des Capucines, 1er avril 1896-10 juin 1896)
C'est en 1892 que les frères Isola, de retour d'Algérie, vont ouvrir les Capucines, sur le boulevard du même nom. En réalité, le lieu est vite connu comme le Théâtre Isola. Situé au nº 39, il n'est pas loin du Grand Café, situé au 14, où le succès du cinématographe ne se démentit pas depuis le 28 décembre 1895. Les deux impresarios vont vite comprendre tout l'intérêt qu'il y a à tenter de se procurer un appareil pour projeter des " photographies vivantes ". On peut même lire entre les lignes un entrefilet publié au début du mois de mars qui trahit quelque peu l'état d'esprit des deux frères :
En ce moment où les inventions prodigieuses se succèdent coup sur coup, il devient de plus en plus difficile d'étonner un peu le monde. Aussi faut-il que les frères Isola soient des enchanteurs bien habiles pour arriver encore à émerveiller leurs nombreux spectateurs. Rien n'explique mieux leur vogue toujours croissante.
Le Gaulois, Paris, 2 mars 1896, p. 3.
Finalement la première a lieu le 1er avril 1896 :
La merveilleuse découverte de la photographie vivante, grandeur naturelle et en couleurs, sera visible au théâtre Isola à partir de demain, tous les jours de deux heures à six heures. Vu la vogue des attractions des frères Isola, cette exhibition n’aura lieu qu’en matinée.
La Libre Parole, Paris, 31 mars 1896, p. 4.
Les programmes ne sont pas toujours connus et, dans le cas présent, la seule vue dont il est question dans les premiers jours est Loïe Fuller, une bande de chez Pathé comme le disent les frères Isola dans leur mémoires :
Très curieuses les photographies vivantes en couleurs que montrent les frères Isola. Cette ingénieuse application donne l'illusion complète et réelle de la vie. Il y a notamment une Loïe Fuller dont on bisse à chaque séance la danse serpentine.
L'Intransigeant, Paris, 7 avril 1896, p. 3.
Les " photographies vivantes " des frères Isola ont-elles rencontré le succès escompté. On pourrait le croire en lisant le suivant entrefilet :
On peut se rendre compte du succès sans précédent obtenu par la " Photographie vivante ", l'innovation des frères Isola, par la foule qui se presse, à la porte de leur théâtre. On refuse du monde chaque soir.
Le Gaulois, Paris, 18 avril 1896, p. 4.
Mais voilà, d'autres journaux parisiens publient le même texte... autant dire que ce sont les frères Isola qui font passer l'annonce. Un dernier article est publié le 25 avril et, même s'il est signé, il est également présent, sans signature, dans d'autres périodiques :
Grâce à l'ingénieuse idée qu'ils ont eue d'appliquer les couleurs à leurs projections animées, les frères Isola ont réalisé l'illusion complète de la vie, la véritable et merveilleuse Photographie vivante que tout Paris veut voir et admirer.
Adolphe Mayer.
Le Journal, Paris, 25 avril 1896, p. 6.
De brèves annonces continuent à être publiées dans les semaines suivantes :
Pour les fêtes de la Pentecôte, il y aura des séances extraordinaires dimanche, lundi eet mardi au théâtre Isola; le programme de ces matinées comprendra les nouvelles attractions à succès: les Poupées américaines et la Photographie vivante.
Le Gaulois, Paris, samedi 23 mai 1896, p. 4.
Une dernière annonce est publiée le 10 juin :
Au théâtre Isola, gros succès pour les Poupées Américaines et la Photographie vivante, qui complètent un programme des plus attrayants. C'est un des plus agréables spectacles d'été.
Le Journal, Paris 10 juin 1896, p. 4.
Le Kinetograph/Kinétographe du Théâtre Robert-Houdin (8 boulevard des Italiens, [2] avril-17 mai/31 décembre 1896) → 1897
Le théâtre Robert-Houdin de Georges Méliès va proposer des vues animées dès les premiers jours du mois d'avril avec un "kinétographe" de son cru :
À l'occasion des fêtes de Pâques, le théâtre Robert-Houdin donnera des matinées tous les jours de la semaine, du 5 au 12 avril.
À toutes les représentations, le « Kinetograph » (photographies grandeur naturelle), appareil américain perfectionné, sans aucune trépidation. Le Miracle du Brahmine, le Pilori, Tom Old Boot.
Distribution de jouets, etc.
Le Journal, Paris, 2 avril 1896, p. 3.
Le vues animées du kinetograph, dont on ignore les titres, partagent la vedette avec des numéros de prestidigitation bien rodés de Méliès.
L'Orchestre, Paris, 18 avril 1896.
Le kinetograph ne figure que comme l'un des numéros du spectacle au même titre que "Le Miracle du Brahmine" ou "Le Pilori", mais les annonces restent silencieuses sur les titres des vues animées :
Au théâtre Robert-Houdin, le Kinétographe obtient un énorme succès. Cet appareil américain perfectionné produit les photographies animées grandeur naturelle sans aucune trépidation, et la longue série de tableaux présentée chaque séance est uniquement composée de sujets choisis avec le plus grand soin et d'un effet merveilleux. Les rayons Rœntgen, le Miracle du Brahmine, le Pilori et le Rêve de Coppélius complètent le spectacle qui est en ce moment des plus brillants.
Le Journal, Paris, 12 mai 1896, p. 4.
Paris, Boulevard des Italiens (c. 1900)
(à droite, deuxième édifice le théâtre Robert-Houdin) [D.R.]
Si les séances s'annoncent quotidiennement, aucune nouvelle information dans les semaines suivantes, si ce n'est que les matinées sont parfois supprimées. Au cours de la seconde quinzaine du mois de juillet, le théâtre ferme ses portes :
Robert-Houdin.-Le théâtre Robert-Houdin fera sa clôture du 14 au 31 juillet. Réouverture le 1er août.
L'Album théâtral, nº 27, 1er juillet 1896, p. 3.
C'est en effet le 1er août que le théâtre ouvre à nouveau ses portes :
Le théâtre Robert-Houdin reprend, à partir d'aujourd'hui, ses séances de prestidigitation, d'attractions sensationneles et de Kinétograph.
Le Journal, Paris, 1er août 1896, p. 6.
Il faut attendre le mois de septembre pour qu'un petit article revienne sur l'appareil sans pour autant apporter plus d'informations :
Le théâtre Robert-Houdin tient un grand succès avec les Photographies animées du " Kinetograph ", le Rêve de Coppelius, le Bramine et le Pilori.
M. Meliès, le directeur de ce théâtre, est l'inventeur du " Kinetograph " qui a cette supériorité sur les appareils similaires de supprimer les trépidations si gênantes pour les yeux.
L'Écho de Paris, Paris, 17 septembre 1896, p. 3.
Quelques jours plus tôt, Georges Méliès a breveté un appareil pour la prise de vue et la projection. Il maintient la confusion, peut-être aussi pour ne pas troubler les spectateurs, et conserve le même nom. Enfin, on va pouvoir découvrir les vues prises par lui-même et Lucien Reulos :
MM. Méliès et Reulos ont réalisé le rêve de tous les Parisiens : revoir encore quelques instants le tsar et la gracieuse tsarine. Depuis hier soir, on peut voir au Kinétographe du théâtre Robert-Houdin le passage du tsar avenue du Bois et le départ pour Versailles en poste.
L'Écho de Paris, Paris, lundi 12 octobre 1896, p. 3.
Les matinées sont particulièrement destinées au jeune public :
Les charmantes matinées du théâtre Robert-Houdin, spécialement composées pour les enfants, obtiennent un vif succès. Indépendamment des nouveautés présentées par M. Duperrey, de nombreuses scènes comiques, spéciales pour le jeune auditoire, sont projetées à l'aide du "kinétographe", et c'est plaisir d'entendre les joyeux éclats de rire des spectateurs, petits et grands.
Le Journal, Paris, lundi 19 octobre 1896, p. 4.
Dans la presse angevine, on publie un article relatif aux projections du Robert-Houdin :
Chez Robert Houdin, hier soir, je jouissais de la joie de tout ce petit monde au défilé du Cinématographe : l’arrivée du train, la sortie de l’atelier, l’arrosoir, puis les fêtes russes, les généraux, les arabes aux brillants costumes, le président, le char, la clarine et ce sont des applaudissements gentils de toutes ces petites mains. Mais où la joie est débordante, où les cris sont les plus joyeux, c’est au passage de Montjarretl Vive Montjarret ! et celui-ci, la casquette à la main, salue avec un touchant sourire de doux alcoolique—superlativement digne pourtant— Vive Montjarret !
Car il faut bien l’avouer, de toute cette gloire, de toute cette joie, de tous ces lampions, de tous ces cris, la part la plus grande a été pour ce brave Montjarret... pour cet homme unique, tout dolé, doucement abruti et un peu méprisant tout de même pour notre faste démocratique — tel un larbin du « faubourg » tombé chez un transitoire ministre.
Oui, certes, il fut glorieux, cet homme, en ces trois journées qu’il traversa comme dans une apothéose ! Paune fantocle. Anachronisme puéril, vestige suranné et ridicule des gloires passées, dont la vue mettait en l'esprit le faste des royautés défuntes... et aussi Mangin.
Pierre Divonne.Le Petit Courrier, Angers, 8 décembre 1896, p. 2.
Les séances se prolongent jusqu'à la fin de l'année.
Paris, Paris, jeudi 31 décembre 1896, p. 4.
Grâce au Bulletin de statistique du ministère des finances, qui publie le tableau des recettes brutes de théâtres et cafés-concerts pendant l'année 1896, nous avons que les recettes du Robert-Houdin s'élèvent à 51,290, 75 francs.
→ 1897
Le cinématographe du Théâtre Julius (Foire au Pain d'Épice, 5-8 avril 1896)
Alors que l'on pense que les forains ne se sont intéressés au cinématographe que quelques mois plus tard, la Foire au Pain d'Épice qui ouvre ses portes le 5 avril 1896 accueille, parmi ses nombreuses attractions, un cinématographe :
La Foire au pain d'épice
Fera-t-il beau, pleuvra-t-il ? Telle est la question que se posaient samedi soir plusieurs milliers de personnes. Les marchands, saltimbanques et forains de toute sorte d'abord, qui, installés sur la place du Trône — pardon, de la Nation — consultaient le ciel avec anxiété, car du temps du dimanche, jour de l'ouverture de la Foire au pain d'épice, dépendait la richesse ou la détresse ; les badauds parisiens ensuite, pour qui la promenade à cette grande kermesse annuelle, le jour de Pâques, est une tradition de rigueur.
Il a plu le matin, de bonne heure. Puis, le ciel s'est rasséréné, et c'est par un soleil, un peu pâle peut-être, mais néanmoins très encourageant que la foire s'est ouverte.
Aussi l'affluence a-t-elle été considérable.
[…]
Dernier détail pour montrer combien la Foire au pain d’épice est « dans le mouvement » : le cinématographe y a déjà fait sa première apparition.
Le Figaro, Paris, 6 avril 1896, p. 4.
L'établissement qui présente l'appareil est le "Théâtre Julius" (La Petite République, Paris, 8 avril 1896, p. 1) dont on ne sait rien d'autre.
Le cinématographe Lumière au Congrès des Sociétés Savantes (7 avril 1896)
C'est dans le cadre du Congrès des Sociétés Savantes, qui se tient à la Sorbonne, qu'une nouvelle démonstration de l'appareil Lumière va avoir lieu. Les Lyonnais ne sont pas là et c'est donc M. Cousin de la SFP qui est chargé de présenter le cinématographe :
Le cinématographe.-M. Cousin, secrétaire de la Société française de photographie, présente au nom de MM. Lumière, de Lyon, empêchés, le cinématographe que ces savants constructeurs ont imaginé et donne quelques renseignements sur le fonctionnement de ce remarquable instrument, bien connu des Parisiens, qui fait à l'heure actuelle l'admiration de tous.
Le président adresse à MM. Lumière tous les remerciements de la section.
Le Temps, Paris, 10 avril 1896, p. 3.
Ce que ne dit pas l'entrefilet c'est si la présentation a été accompagnée de projections cinématographiques...
Le Cinématographe Lumière (6, Boulevard Saint-Denis (<2 mai-31 décembre 1896) → 1897
Le Cinématographe Lumière de la Porte Saint-Martin
© B. Chardère, Institut Lumière
Antoine Lumière va signer, le 2 février 1896, un bail avec la propriétaire du 6, boulevard Saint-Denis, Eugénie-Célina Duplaquet. Le document décrit ainsi le local :
Une grande boutique occupant toute la façade de la maison sur le boulevard depuis le mur mitoyen de droite jusqu'à celui de la porte cochère et s'étendant en outre pour partie jusqu'au fond de la maison côté droit.
L'ouverture est repoussée, même si la presse évoque l'ouverture d'une salle en avril :
Le Cinématographe-Lumière projette depuis quelques jours de nouvelles scènes tout à fait réussies. Aussi la vogue de cette merveilleuse invention, déjà fort grande cependant, s'est-elle encore accrue. Les deux salle où ont lieu des projections animées, au 14 et au 28 du boulevard des Capucines, n'étant déjà plus suffisantes pour recevoir la foule des visiteurs, on s'occupe activement de nouvelles installations.
Jules Huret.Le Figaro, Paris, 18 avril 1896, p. 4.
La salle est finalement dans les derniers jours du mois d'avril si l'on en croit l'annonce suivante :
L'administration du Cinématographe-Lumière vient d'inaugurer avec succès une nouvelle salle. C'est près de la Porte-Saint-Martin, dans un quartier très fréquenté, qu'elle a été installée. Afin de rendre populaire cette merveilleuse invention, le prix d'entrée a été fixé à 50 centimes pour une série scènes.
Le Petit Journal, Paris, 2 mai 1896, p. 4.
Peu d'informations, mais la réduction du prix se combine avec une réduction également du nombre de vues offertes au public.
Pour des raisons obscures - faut-il y voir le traitement particulier accordé à cette salle installée dans une zone populaire ? - cette salle n'apparaît que très rarement dans la presse. Autant dire que les rares entrefilets sont précieux pour en connaître le fonctionnement :
Le nouveau local où fonctionne un. cinématographe Lumière, boulevard Saint-Denis, 6, est aussi confortablement aménagé que possible. Une sortie spéciale et spacieuse permet d'évacuer la salle en peu de temps.
Dans ces conditions, les séances pouvant être fréquemment renouvelées, le public, bien que fort nombreux, n'a pas l'inconvénient d'attendre.
Le Petit Parisien, Paris, 12 mai 1896, p. 3.
C'est encore du local dont il va être question dans l'information suivante. On apprécie sans aucun doute la bonne idée que l'administration Lumière a eu en aménageant ses différents lieux de projection pour se prémunir des fortes chaleurs. Dès le printemps, on peu lire en effet dans la presse l'annonce suivante :
L'administration du Cinématographe-Lumière a fait installer dans toutes ses salles des systèmes d'aération perfectionnés. Les spectateurs n'ont donc pas à redouter l'excès de chaleur, pas plus dans le sous-sol et au premier étage du boulevard des Capucines qu'au rez-de-chaussée du boulevard Saint-Denis.
Quant à la salle des fêtes des Grands magasins Dufayel, où fonctionne également un cinématographe, elle est suffisamment vaste et aérée pour qu'on n'ait pas besoin de système spécial.
Adolphe Mayer.
Le Journal, Paris, 18 mai 1896, p. 4.
→ 1897
Le cinématographe Lumière (La Sabretache (1er juin 1896)
La Sabretache est une société d'études historiques qui réunit les collectionneurs de figurines et les amis de l'histoire militaire. Lors du dîner du 1er juin 1896, un cinématographe Lumière agrémente la soirée, mais on ignore le nom de l'opérateur :
Le dîner de la Sabretache. — M. Edouard Détaille a présidé hier le dîner trimestriel de la Société amicale qui réunissait chez Marguery plus de cent convives appartenant à l’armée, aux lettres ou à l’art. Il avait à sa droite le général Davout, duc d’Auerstædt, à sa gauche l’amiral Duperré. Parmi les convives nous citerons les généraux Loizillon, ancien ministre de la guerre, de Monard, Laveuve, de Torcy, ancien chef d’état-major à Madagascar, Kirgener de Planta, de Launay, Gonse, sous-chef d’état-major général, etc. ; les colonels et lieutenants-colonels Meunier, de l’état-major général, Allaire, Monteil, l’explorateur du Soudan, de Coubertin, Duhousset, Dessirier, les peintres Meissonier fils, Couturier, Morel et Poilpot ; MM. Norberg, trésorier de la Sabretache ; le prince de la Moskova, capitaine Berthaut, fils de l’ancien ministre de la guerre et secrétaire du duc d’Aumale ; Francis Thomé, comte Beugnot, capitaine d’Harcourt, Bertin, René de Boisdeffre, etc., etc.
Au dessert, M. Détaillé a donné la parole à M. Germain Bapst, qui a raconté d’intéressants souvenirs sur le général Canrobert.
Après le dîner, MM. Lumière ont donné une intéressante représentation de leur cinématographe, en grande partie consacrée à l’armée. Des scènes de pansage à la caserne de la Part-Dieu à Lyon, des exercices et des charges de cuirassiers ont soulevé les applaudissements de ce public d’élite dont faisaient partie tant de brillants officiers de cavalerie.
Le Temps, Paris, 3 juin 1896, p. 3.
Parmi les vues évoquées - toutes, logiquement, consacrées à la chose militaire -, certaines sont identifiables, mais elles ne figurent pas toutes au catalogue Lumière. Cette soirée confirme bien que les Lumière continue de jouer la carte des séances privées qui réunissent très souvent des figures en vue de l'époque.
Le Cinématographe perfectionné de l'Exposition de la Lumière (Champ-de-Mars 15 juin 1896)
L'Exposition de la Lumière, des Industries chimiques et de la Traction automobiles s'ouvre à la Galerie des Machines (Champ-de-Mars) le 15 juin 1896, même si l'inauguration n'a lieu que le 1er juillet. C'est dans ce cadre qu'un cinématographe est installé :
Parmi les attractions inédites que nous ménage l'Exposition de la lumière, au Champ-de-Mars, et à côté de curiosités scientifiques telles que le piano électrique, le fourneau de cuisine électrique, la photographie directe en couleurs, le cinématographe perfectionné, etc., etc., figurera une reproduction en miniature d'une mine d'or au Transvaal, avec l'exposé complet des divers procédés d'extraction. Le public pourra y suivre en détail et comme sur le terrain même le travail mystérieux de ces fameuses entreprises sudafricaines.
Le Matin, 19 juin 1896, p. 2.
Il est difficile de savoir de quel appareil il s'agit, sans doute pas un Lumière. Il pourrait, en revanche, s'agir d'un cinématographe Joly-Normandin, car ces derniers usent souvent de l'expression " cinématographe perfectionné ". Mais nous n'en saurons pas davantage.
Le cinématographe Lumière (Automobile-Club, 16 juin 1896)
C'est encore le cinématographe Lumière qui est appelé à la rescousse pour agrémenter la soirée que donne l'Automobile-Club, le 16 juin 1896. S'il est assez rare que l'on connaisse l'opérateur - l'utilisation de la formule " MM. Lumière " ne doit pas être prise au pied de la lettre dans la plupart des présentations de cinématographe -, dans le cas présent, c'est une figure essentielle dans le dispositif des Lyonnais à Paris : Clément Maurice.
La fête donnée par l’Automobile-Club pour l’inauguration de sa villa au bois de Boulogne a été favorisée par un temps merveilleux.
Dès sept heures, une file interminable de voitures amenait les nombreuses personnalités du monde parisien qui avaient répondu à l’aimable invitation du comité.
La fête, qui a commencé par un élégant dîner sous une tente, par petites tables, aux sons d'un excellent orchestre de tziganes, a été des plus réussis.
Après le dîner, on a été émerveillé par les tableaux du cinématographe-Lumière, par M. Clément Maurice ; puis le désopilant Félix Galipaux a dit avec la verve qu'on lui connait un monologue de circonstance, Pour conduire une automobile, et Fordyce a dit avec beaucoup de succès un autre monologue de circonstance, l’Anglais qui est venu à Paris pour conduire une automobile.
Le concert dans les jardins par l'excellente harmonie Dufayl a été fort applaudi ; elle a fait entendre les meilleurs morceaux de son brillant répertoire.
A dix heures, splendide feu d'artifice tiré par Ruggieri, et l'on a terminé par la charmante revue à la vapeur de M. Jacques Redetsperger : Paris-Biblelot, qui a été applaudie d'enthousiasme par un auditoire d'élite […]
Le Gaulois, Paris, mercredi 17 juin 1896, p. 2.
Une fois encore, les Lumière soignent leur image et multiplient les présentations dans le " monde parisien ".
Le Cinématographe Lumière dans les salons du Figaro (24 juin 1896)
Toujours avec la volonté d'occuper coûte que coûte le terrain, le cinématographe Lumière va proposer, dès le 24 juin, dans les salons du quotidien Le Figaro, une séance exceptionnelle où sont offerts au public choisi les vues des fêtes du Couronnement. C'est Camille Cerf, de retour de Russie, qui assure la présentation et Gabriel Veyre qui est à la manœuvre :
Le tsar à Paris
Les Parisiens n'avaient eu jusqu'ici, pour les renseigner sur les prodigieux spectacles qu'offrit, le mois dernier, Moscou à ses visiteurs, que les descriptions forcément un peu hâtives du journal et de l'image. Ils ont depuis hier mieux que cela : ils ont la vie même de ces événements présente à leurs yeux.
C'est au cinématographe, comme on l'a déjà deviné, que nous devons ces prodiges. Un de nos confrères, M. C. Cerf, installé à Moscou pendant les dernières fêtes du Couronnement, a eu la très heureuse idée - d’accord avec MM. Lumière - "d’enregistrer”, sur le passage des cortèges, ou en présence des scènes multiples de plein air dont il a été témoin, une série d’instantanés du plus curieux caractère, et qui, grâce au génial procédé de la reproduction cinématographique, recréent devant nous le mouvement, la vie de ces épisodes inoubliables.
MM. Lumière avaient bien voulu offrir au Figaro la primeur de cette extraordinaire exhibition. C'est donc au Figaro même, dans notre petit salon du premier étage, aménagé en chambre obscure, que s'est hier accompli, devant une quarantaine de spectateurs émerveillés, le défilé vivant des scènes rapportées de Moscou sur trois ou quatre kilomètres de rubans de papier...
La présentation de ces documents nous était faite par M. C. Cerf, obligeamment assisté de M. Gabriel Veyre, opérateur. Dix-huit projections se sont succédé sur la toile de fond, parmi les frénétiques applaudissements d'une assistance où figuraient, à côté des rédacteurs du Figaro, une vingtaine d'invités à peine : la mission japonaise, ayant à sa tête S.A.I. le prince Fushimi, qu'accompagnaient le marquis Tokugawa, grand maître des cérémonies ; le comte Hishamatsu, aide de camp, et le capitaine de Labry ; plusieurs membres de l'ambassade et du consultat de Russie, et quelques officiers français - dont plusieurs eurent l'amusement de se reconnaître eux-mêmes au nombre des personnages que le cinématographe faisait défiler devant nous !
Les instantanés du Couronnement nous montrent l’agitation amusante du peuple dans les rues, le va-et-vient des soldats, des badauds en promenade autour de la fameuse cloche et du canon légendaire du Kremlin ; le défilé du personnel de l’ambassade de France et de la Mission, quittant le palais Cheremetiew pour se rendre aux cérémonies.
Puis ce sont les scènes de procession, l’arrivée de la famille impériale dans Moscou, un défilé de cosaques, de délégations asiatiques - un musée d’ethnographie en marche ! - puis une revue passée par les souverains.
Et de tout cela, pas un détail n'est perdu : le soleil brûle, allonge les ombres sur le sol blanc, fait miroiter l'acier des armes ; la brise secoue les panaches des casques ; la poussière s'élève, en nuages diaphanes, sous le sabot des chevaux... on la touche, et on la sent.
Mais les scènes les plus impressionnantes sont celles qui précèdent et suivent le Sacre : le passage de l’Impératrice mère, le défilé des dames d’honneur se rendant à la cathédrale de l’Assomption ; ensuite le Tsar, passant à son tour, la Tsarine appuyée à son bras, tous deux répondant par de légers saluts de la tête aux acclamations de la foule ; et enfin, la cérémonie finie, les souverains, revêtus du manteau impérial, coiffés de la couronne souveraine - réapparaissant dans un défilé d’une solennelle majesté, puis gagnant l’immense dais à panaches qui s’ébranle doucement, et les ramène au palais, à travers une foule qu’on sent vivre, grouiller, frémir - dont l’intense émotion semble s’exprimer dans les mouvements mêmes de l’image.
Jamais la science ne nous avait fait assister à plus prodigieuse féerie, et que voilà d'amusants trésors pour les historiens de l'avenir !
Émile Berr
Le Figaro, Paris, 25 juin 1896, p. 1.
Tout est fait pour ne pas laisser la concurrence s'installer, et le système Lumière fonctionne à plein au cours de ce premier semestre 1896. En outre, la présentation des vues d'actualité constituent indéniablement un " coup " publicitaire pour la maison lyonnaise.
Le Kinématographe du café Frontin (juillet 1896)
Les projections organisées au café Frontin, en juillet 1896, restent un mystère. Le propriétaire du café se nomme Pelletier et son gérant, Morlaix, mais l'on ignore qui est réellement le responsable du cinématographe. On ne sait d'ailleurs strictement rien jusqu'au 17 juillet 1896 où le feu prend à la suite d'un probable faux-contact :
Le Feu
Un commencement d'incendie, qui a causé un moment de panique sur le boulevard, s'est déclaré hier soir à six heures au café Frontin. Dans une des salles affectées au cinématographe, des fils électriques ont mis le feu aux tentures et une fumée épaisse se dégageait jusque sur le trottoir.
Les pompiers de la caserne du Château-d'Eau se sont rendus maîtres du feu après une demi-heure de travail.
Le Petit Journal, Paris, 18 juillet 1896, p. 3.
Le rapport rédigé par le sapeur pompier de la Brigade de Paris (caserne Masséna, 3, rue Darmesteter, Paris 13e) apporte quelques informations complémentaires :
[...] le feu était dans une salle de conférence située au sous-sol, un court-circuit d'une installation à projections lumineuses dont les fils s'étaient rougis et avaient mis le feu à des tentures disposées sur un bâti en bois et protégeant ladite installation [...] Les dégâts consistent en : tentures en draperies et plusieurs rouleaux de films brûlés, un lambris et un bâti en bois carbonisé. La perte est évaluée à 1500F...
Archives de la Brigade de sapeurs pompiers de Paris, caserne Masséna, 3, rue Darmesteter, Paris 13e. (Cité par Meusy, 1995, 496.)
Les séances ont-elles pris fin ou le cinématographe a-t-il poursuivi ses projections ? Aucune information ne vient apporter de réponse... Toutefois, une annonce publiée peu de temps après jette un peu de lumière sur le café Frontin et l'appareil de projections.
Le Petit Parisien, Paris, 6 août 1896, p. 4
Or Hubert Trouillet, qui n'a pas semble-t-il, déposé de brevet, est le constructeur d'un " kinématographe " dont le nom a été enregistré le 28 mai 1896. Il semble bien que les relations entre lui et le café Frontin remontent déjà à quelque temps.
Le Cinématophone de Marco Mendoza (119, boulevard Saint-Germain/Café du Cercle, 23 juillet 1896)
Marco Mendoza présente un Cinématophone au café du Cercle :
Ce soir, à huit heures et demie, au café du Cercle, 119, boulevard Saint-Germain, inauguration du Cinématophone-photographie animée-sous l'habile direction de M. Marco Mendoza.
Les intéressants tableaux du Cinématophone représenteront des scènes historiques, théâtrales et humoristiques, etc, etc.
Entrée: 50 centimes.
L'Intransigeant, Paris, jeudi 23 juillet 1896, p. 3.
Le Cinématographe Joly (Exposition du Théâtre et de la Musique, Palais de l'Industrie, 29 juillet-25 novembre 1896)
L'ouverture de l'Exposition du Théâtre et de la Musique prévue pour le 25 juillet doit être reportée au 29 juillet, car la clôture de l'exposition des plans du Palais de 1900 est repoussée de quelques jours. Parmi les attractions, figure le Cinématographe perfectionné breveté par Henri Joly, une première apparition publique à laquelle sont associés Ernest Normandin et Louis Doignon.
Exposition du Théâtre et de la Musique, 1896 © Musée Carnavalet |
Exposition du Théâtre et de la Musique, Catalogue officiel de l'Exposition, 1896, p. 124. |
Le cinématographe semble avoir rencontré un réel succès auprès du public, comme en témoigne cet entrefilet :
Exposition du Théâtre et de la Musique
Les vendredis attirent une foule élégante à l'Exposition du Théâtre et de la Musique au Palais de l'Industrie. La Tabarinade, nous pourrions plutôt dire la petie revue de M. J. Hoche, a du succès grâce à la rentrée de M. Depas dans le rôle de Tabarin. M. Martel (Grattelard), Mlle Frédérick (Isabelle), Mlle Blanche Deneige (Guillemette). Dans la partie concert, entre tous les artistes, se sont fait applaudir principalement M. Raivac, qui s'est composé un brillant répertoire, M. Monsy.
La salle des séances de Cinématographe Joly est toujours archi bondée.
Tous les jeudis, auditions de musique.
ANDRÉ ENER.
L'Echo des jeunes, 1 octobre 1896, p. 188.
Les projections vont se poursuivre pendant quatre mois. Du répertoire, un seul titre, qui figure sur l'affiche du 23 octobre, nous est connu, Entrée du tsar à Paris.
Le kinétographe du Palais du Travail (13 rue de Belleville, 15->15 août 1896)
Paris. Le Palais du Travail, rue de Belleville (<1906)
Aujourd’hui samedi, à 1 heure de l'après-midi, aura lieu l’inauguration du Palais du Travail, 13, rue de Belleville.
C’est une exposition permanente des œuvres de petits façonniers et des ouvriers en chambre qui fabriquent l’article de Paris. Une série d’attractions diverses, fêtes artistiques, concerts, séances de Kinétographe, concours de tir, viendront rehausser l’intérêt de cette œuvre éminemment utile et à la quelle nombre de hautes personnalités ont donné leur adhésion.
Le Petit Caporal, dimanche 16 août 1896, p. 3.
Le Cinématographe-Kaiser perfectionné (12 boulevard des Italiens/33 passage de l'Opéra, [août]-[décembre 1896)
Dans ses souvenirs, Gabriel Kaiser indique qu'il ouvre la salle du passage de l'Opéra en août 1896. Une affiche conservée semble indiquer que le cinématographe-Kaiser fonctionne en octobre grâce à la vue présentée, Arrivée des Souverains Russes à Paris accompagnés de leur brillant cortège (en couleur)
Cinématographe-Kaiser perfectionné (c. octobre 1896)
Source: Bibliothèque Historique de la Ville de Paris (2-DEP-004-006)
Dans la presse, les premières annonces consultés datent du mois de décembre :
Le Cinématographe-Kaiser
12, boulevard des Italiens, obtient chaque jeudi et chaque dimanche un grand succès ; il vend ses merveilleux appareils ainsi qu'un très grand choix de filins, sujets de tous pays et pour tous les goûts, 27, rue du Château-d'Eau.
La Presse, Paris, 13 décembre 1896, p. 3.
Les séances se prolongent, au moins, jusqu'à la fin de l'année :
Le Cinématographe-Kaiser
12, boulevard des Italiens, 33, passage de l'Opéra, a ses bureaux de vente pour les appareils et films scènes de tous pays, 27, rue du Château-d'Eau.
La Presse, Paris, 20 décembre 1896, p. 3
Le Cinéphotographe (Boulevard des Italiens, 15/Inventions Nouvelles, <01 octobre-31 décembre 1896) →1897
Au 15, rue de la République, est installé un local où l'on a présenté antérieurement des expériences publiques de "Lumières". Dès le 1er octobre, un cinéphotographe, appareil commercialisé par Gabriel Lépée, fonctionne au 15, boulevard des Italiens.
Gil Blas, Paris, 1er octobre 1896, p. 4.
Cette annonce est toujours pubiée à la fin de l'année.
→ 1897
Le Cinématographe d'Eugène Pirou (Boulevard des Capucines, 12/Grand Café de la Paix, 11 octobre-31 décembre 1896) → 1897
Le Grand Café de la Paix (Paris, c. 1896)
Le Panorama. Paris s'amuse, Paris, Ludovic Baschet editeur, 1897.
C'est au mois d'octobre que le Grand Café de la Paix commence à proposer des projections animées avec la complicité d'Eugène Pirou :
Aujourd'hui dimanche, pour la première fois, projections du cortège impérial et autres sujets choisis au cinématographe Eug. Pirou, Café de la Paix, boulevard des Capucines. Ce sera une compensation pour ceux qui n'ont pas eu la bonne fortune d'assister aux fêtes bien placés.
JANCOURT.
Gil Blas, Paris, 11 octobre 1896, p. 2.
Grand Café de la Paix, Cinématographe E. Pirou, octobre 1896
© Collection particulière
Le succès du cinématographe Pirou est immédiat et des célébrités sont au nombre des spectateurs:
Le cinématographe Pirou fait fureur au café de la Paix.
Parmi les visiteurs, hier, on, cite le roi de Grèce et le prince Henri d'Orléans.
Le Gaulois, Paris, 13 octobre 1896, p. 3.
Un nouvel entrefilet signale de nouvelles personnes célèbres:
Les projections du cinématographe Eugène Pirou, au café de la Paix, attirent chaque jour un public des plus élégants et les personnalités les plus en vue.
Reconnu, ces jours derniers, dans la salle : S. A. I. le grand-duc Wladimir, le duc de Leuchtenberg, le baron de Mohrenheim, le comte Hendrikoff, grand-maréchal de la Cour de Russie; le prince Bariatinsky, qui ont fort applaudi l'éblouissant spectacle du défilé du cortège impérial, lequel dure, seul, six minutes.
Le Gaulois, Paris, 25 octobre 1896, p. 3.
Dans les premiers jours de novembre, un programme de vues en couleurs est proposé au public:
Aujourd'hui, samedi, pour la première fois, projections de toutes les vues en couleur au cinématographe Eug. Pirou, au café de la Paix. Parmi les sujets les plus saillants de cet éblouissant spectacle, à citer le menuet Louis XV au point de vue de la vérité de la reconstitution des costumes. Les souverains se rendant à l'église russe. Arrivée de M. le président de la République à l'ambassade. Départ des souverains russes pour Versailles et le merveilleux défilé complet du cortège impérial, qui a une durée à lui seul de six minutes.
Les projections en couleur donnent l'illusion complète de la vie réelle.
Le Gaulois, Paris, samedi 7 novembre 1896, p. 2.
Les informations sont assez rares :
Aujourd'hui, jeudi, au cinématographe Eug. Pirou, au café de la Paix, changement de spectacle. On admirera surtout les manœuvres et charges diverses exécutées avec une furia toute française par nos dragons.
Gil Blas, Paris, jeudi 19 novembre 1896, p. 1.
Il arrive que des programmes soient annoncés :
A partir de ce soir, le cinématographe Eugène Pirou, au café de la Paix, ne projettera plus seulement des vues ou de simples tableaux de la rue; les spectateurs assisteront à de véritables saynètes, dans lesquelles on verra revivre des légendes, des scènes de la vie familiale, des sujets de la vie moderne, etc., etc., tels que la Tentation de saint Antoine, el Noël en Alsace, avec ses costumes et son décor, Pioupiou et Nounou, Farce dans une chambre à la caserne, véritables comédies sans parole qui ne peuvent manquer de désopiler le spectateur par l'exactitude et la vérité de la reproduction.
Le Journal, Paris, jeudi 24 décembre 1896, p. 3.
→ 1897
Le Cinématographe Lumière de l'Automobile Club de France (4, place l'Opéra, 20 novembre 1896)
L'Automobile Club de France organise, le 20 novembre une réunion dans ses salons Clément-Maurice, proche collaborateur des frères Lumière, et concessionnaire du cinématographe pour Paris, organise à plusieurs reprises des projections pour l'Automobile-Club de France.
C'est le cas à la mi-novembre comme l'atteste le courrier suivant.
Le Président de l'Aumobile-Club de France, Lettre à Messieurs Lumière, Paris, 20 novembre 1896. © Fonds Génard [D.R.] |
Projet de diffusion du cinématographe en Amérique du Sud (Huygens, >6> décembre 1896)
Dans les premiers jours de décembre, Huygens est à la recherche d'un associé pour exploiter un cinématographe et un phonographe en Amérique du Sud:
América del Sur
Se desea un socio con un capital de 10.000 francos y con conocimientos prácticos de electricidad o de fotografía, para explotar durante un año, en diferentes ciudades de América, el cinematógrafo y el fonógrafo nuevo modelo, como también para hacer el comercio de las vistas para los diversos aparatos que reproducen la fotografía en movimiento. Carta a Huygens, 54, Boulevard Tour Maubour, París.
El heraldo de Madrid, Madrid, dimanche 6 décembre 1896, p. 4.
Le Cinématographe du Salon du Cycle (Palais de l'Industrie, 12-27 décembre 1896)
Dans le cadre du 4e Salon du Cycle, des attractions sont proposées dont un cinématographe:
Une visite au Salon du Cycle
L'exposition de vélocipédie et d'automobilisme qui vient de fermer ses portes, n'a-t-elle pas sa raison d'être, tout comme celle d'horticulture, ou de produits alimentaires ? Assurément si, et chaque année, une foule compacte se presse pour admirer les merveilleuses machines que les constructeurs perfectionnent à l'envi.
[...]
La quatrième exposition internationale de vélocipédie s'est ouverte samedi 12 décembre, au Palais de l'Industrie, pour se ferme le 27 décembre. Deux salons, ceux de 1894 et de 1895, se sont déjà tenus au palais de l'Industrie.
[...]
A cette exposition, le comité d'organisation avait multiplié les attractions. Pour ceux qui seraient las de ne voir que des cycles, on avait créé un véritable théâtre, où l'on voyait des acrobates, des clowns, des chanteurs et des danseurs de corde, divertissant agréablement même les plus moroses. En face, on avait installé un cinématographe qui reproduisait dans ses photographies animées des courses de vélocipèdes, bicyclettes et machines multiples, courses d'automobiles, séances de boxe, de gymnastique, de bâton, de danse, etc.
L'Abeille de Fontainebleau, Fontainebleau, vendredi 1er janvier 1897, p. 2.
Le Cinématographe Robert-Houdin (Manège Humber/77 avenue de la Grande-Armée, 12 décembre 1896)
À l'occasion de la soirée du Manège Humber, à laquelle assistent Charles Charlemont et son père Joseph, des vues animées sont proposées, mais l'on ignore si elles ont quelque chose à voir avec la boxe :
LA SOIRÉE DU MANÈGE HUMBER
Le gala du manège Humber a été un succès éclatant pour les organisateurs. Trois cents personnes étaient venues assister aux assauts de boxe et de lutte donnés sous le patronage de l’Omnium.
Parmi les spectateurs : Charlemont père et fils, Monbiot, Leclerc, Leveillé, Legrand, Levallois et Laborie, des spécialistes du coup de poing et du chausson [...]
La fête a commencé par des projections cinématographiques. Puis est venue la partie sportive.
Le Vélo, Paris, dimanche 13 décembre 1896, p. 1.
Grâce à un autre article, nous savons que c'est l'appareil de Georges Méliès qui présente des vues animées :
BOXE ET LUTTE
La soirée de gala du manège Humber, organisée sous le patronage du Cercle de l'Omnium, a très bien réussi. [...]
Après des épreuves de cinématographe par Robert-Houdin, nous avons assisté à une belle séance de lutte entre Crest et Nizam.
Le Jockey, Paris, lundi 14 décembre 1896, p. 3.
1897
← 1896 Le Cinématographe Lumière (14 boulevard des Capucines (1er janvier-31 décembre 1897) → 1898
← 1896
Dans le programme, on introduit des vues présentées à l'envers :
La Vie à l'envers.-Aucune expression ne saurait mieux qualifier les merveilleuses scènes animées, dites "à l'envers", qui sont actuellement visibles au Cinématographe Lumière du Grand Café, boulevard des Capucines. Il s'agit de vues animées dans lesquelles les lois de la pesanteur et de l'équilibre sont entièrement perturbées et donnent lieu à des effets absolument nouveaux. Ainsi, un mur ayant été démoli, on voit tous les débris de ce mur se livrer à une cours comique, se ressouder entre eux, puis l'édifice se redresser subitement sans aucune intervention spirite. C'est une merveille de plus à l'actif du Cinématographe Lumière !
Le Figaro, Paris, samedi 6 mars 1897, p. 4.
Les articles annoncent parfois les titres des films :
Le carnaval de Nice, qui a été si brillant cette année, a donné l'occasion au Cinématographe Lumière de prendre des scènes visibles à partir d'aujourd'hui dans la coquette salle du Grand-Café, boulevard des Capucines. Ces superbes tableaux, qui donnent l'illusion la plus complète des magnifiques fêtes de Niche, figurent au milieu de vues nouvelles qui, avec une scène de la Vie à l'envers, forment un programme vraiment remarquable.
Julie Huret.
Le Figaro, Paris, samedi 20 mars 1897, p. 4.
Quelques jours plus tard, d'autres films sont annoncés:
Le public se porte en foule, comme aux premiers jours, au Cinématographe Lumière du Grand-Café, boulevard des Capucines et fait un véritable succès aux vues si intéressantes qui composent le nouveau programme. Les admirables scènes telles que: le Carnaval de Nice, le défilé des chasseurs alpins, l'arrivée du cuirassé le Brennus, les sauts d'obstacles par les dragons autrichiens, les lanciers de la reine d'Espagne, etc., et ne peuvent manquer de faire apprécier la perfection de l'appareil de MM. Lumière.
Jules Huret.
Le Figaro, Paris, samedi 27 mars 1897, p. 4.
En avril, une réorganisation des programmes est prévue afin de proposer des séances plus longues :
Les surprises que nous réserve le cinématographe Lumière du boulevard des Capucines, 14, au Grand-Café, vont toujours croissant. Par une nouvelle organisation, les projections animées seront plus grandes, les tableaux plus longs, et de plus en plus intéressants. Plusieurs vues de cette semaine sont redemandées et seront reproduites plus complètes. On aura ainsi la satisfaction de faire un voyage à travers la Tunisie, par de nombreuses vues d'un aspect des plus pittoresques. L'empereur de Russie, très amateur de cette merveilleuse invention, vient d'envoyer la grand'croix de Sainte-Anne, à M. L. Lumière.
Jules Huret.
Le Figaro, Paris, mardi 6 avril 1897, p. 4.
Le drame du Bazar de la Charité (4 mai) explique que le responsable de la salle fasse passer l'article suivant :
A la suite des tristes événements qui viennent de se produire, l'administration du Cinématographe Lumière croit devoir porter à la connaissance du public qu'elle s'est toujours refusée à employer, pour ses projections animées, d'autre moyen d'éclairage que l'électricité, et que toutes les mesures de sécurité sont assurées, tant dans les salles de séance que dans ses installations passagères dans les salons. On peut, d'ailleurs, constater que, bien que fonctionnant depuis beaucoup plus longtemps qu'aucun autre, il n'est jamais arrivé d'accident d'aucune sorte avec le Cinématographe Lumière.
Le Figaro, Paris, 10 mai 1897, p. 5.
Répertoire (autres titres) : Défilé des chasseurs alpins, Sauts d'obstacles par les dragons autrichiens, le cuirassé Le Brennus, Promenade au Jardin d'Acclimatation, Arroseur, Poissons rouges, Débarquement à Nice, Bains à Milan à l'envers (Le Figaro, Paris, 28 mars 1897, p. 4), Place de l'Opéra, Rochers en mer, Polka des bébés, Armée italienne, Cascade en Suisse (et à l'envers), Vues de Rome (gd tableau), Descente de voyageurs au pont de Brooklyn (et à l'envers), Duel au pistolet, Bains à Milan (et à l'env.) (Le Figaro, Paris, 11 avril 1897, p. 5), Un voyage à Venise (soixante mètre de longueur), Les cuirassiers, boute-selle, mêlée et charge, Le départ des transatlantiques (Le Figaro, Paris, 17 avril 1897, p. 3), Policemen à Chicago, Repas du chien et du chat, Danse au bivouac (Espagne); Bataille de neige, Départ de transatlantiques, Bébés aux jouets, Voyage à Venise, Cuirassiers, départ, mêlée et charge, l'Arroseur (et à l'envers) (Le Figaro, Paris, 19 avril 1897, p. 6), Puerta del Sol, Salut d'assaut, Concours de bébés, Croisement de trains à Brooklyn, Cortège du Tsar, Défilé de Sociétés à Stuttgard, Bourricots sous les palmiers (Egypte), Dragons traversant la Saône, Défilé des Alpins (Le Figaro, Paris, 26 avril 1897, p. 6), Haute école, Concours de boule, Cascade et retour à l'étable, Prestidigitateur, cyclistes et cavaliers, Panorama à Jérusalem, Pyramides d'Egypte, Escorte du khédive, Défilé de lanciers espagnols, Alpins en exercice. (Le Figaro, Paris, 3 mai 1897, p. 6), Marché à Marseille, Repas du bébé, Sauts périlleux, Fontaine Tréno à Rome, Défilé et danse, Garde royale d'Espagne, Débarquement et cortège du Président (Vendée), Débarquement et bal des Sablaises, Bains à Milan (Le Figaro, Paris, 19 mai 1897, p. 4), Cottage en Suisse, Le Char du Cycle (Carnaval à Paris), Mexicain sur cheval rétif, Danse au Tyrol, Exercices de gymnastes, Brûleurs d'herbes, Toilette et repas de négrillons, Dragons traversant la Saône à la nage (Le Figaro, Paris, 24 mai 1897, p. 6), Boute-selle et mêlée de cuirassiers (Le Gaulois, Paris, 25 mai 1897, p. 4).
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← 1896 Le cinématographe Lumière (Grands Magasins Dufayel, 1er janvier-31 décembre 1897) → 1898
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Les séances se prolongent dès les premiers jours de l'année:
Les concerts qui ont lieu tous les jeudis dans la salle des fêtes des grands magasins Dufayel sont de plus en plus suivis. Demain, de trois heures à six heures, a lieu le 20e concert de la saison. Pendant les entr'actes, il est tout indiqué d'assister à une séance du cinématographe Lumière Non seulement on assiste à un spectacle intéressant, mais on emporte un souvenir utile et surtout agréable. Il est, en effet, offert à toute personne entrant au cinématographe un flacon de bénédictine de l'abbaye de Fécamp et un étui de suprêmes Pernot.
Le Figaro, Paris, 6 janvier 1897, p. 3.
Dès le mois de février, les magasins Dufayel intègrent au spectacle Lucien Darthenay, un auteur connu des salons parisiens dans le but de réaliser des "scènes parlées":
Demain jeudi, de trois heures à six heures, concert dans la Salle des Fêtes des Grands Magasins Dufayel. Séances du cinématographe Lumière. Scènes parlées par M. Darthenay et audition du chanteur automate, une nouveauté des plus intéressantes, dont M. Dufayel s'est assuré la vente exclusive. Il sera, en outre, distribué aux assistants, à titre de souvenir, un étui de Suprêmes Pernot et un flacon de Coca des Incas.
Le Gaulois, Paris, 3 février 1897, p. 3.
Les projections continuent pendant des mois :
EXPOSITIONS.-Exposition de mobiliers complets par milliers, d'articles de chauffage, ménage, éclairage, tapis et tapisserie, aux grands magasins Dufayel. Projections de cinématographe Lumière : vues du voyage du Président de la République en Russie: l'Arrivée à Saint-Pétersbourg, Défilé de la garde d'honneur, Réception à Peterhof, Charge des hussards à la revue de Krasnoïé. Conférences et expériences sur les rayons X et la lorgnette humaine de l'ingénieur Séguy.
Le Figaro, Paris, 21 septembre 1897, p. 3.
Le cinématographe est toujours annoncé en novembre :
GRANDS MAGASINS DUFAYEL.-Exposition de mobiliers complets, par milliers, toujours prêts à être livrés. Grand choix de couronnes mortuaires. Aujourd'hui lundi, il sera offert un souvenir à toute personne assistant à une séance du cinématographe Lumière, suivie de conférences et d'expériences sur les rayons X, au moyen de la lorgnette humaine de l'ingénieur Séguy.
Le Figaro, Paris, 1er novembre 1897, p. 4.
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← 1896 Le Cinématographe Lumière (6, Boulevard Saint-Denis (1er janvier-31 décembre 1897) → 1898
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Les séances cinématographiques continuent dès les premiers jours de l'année:
CINÉMATOGRAPHE LUMIÈRE.-6, boulevard Saint-Denis, 50c.
Le Petit Journal,, Paris, jeudi 14 janvier 1897, p. 4.
Le succès est toujours au rendez-vous :
Rien n'a pu, jusqu'à présent, égaler le Cinématographe-Lumière. Il est assez juste, d'ailleurs, que la faveur du public aille de préférence aux créateurs qu'aux imitateurs d'une invention quelconque. Le succès sans précédent des séances, qui ont lieu dans l'après-midi et dans la soirée, 6, boulevard Saint-Denis, est justifié par les améliorations journalières apportées par la direction, qui s'ingénie à varier les nombreux tableaux dont le programme est renouvelé toutes les semaines.
Le Journal, Paris, 4 février 1897, p. 4.
Une des nouveautés consiste à présenter les vues à l'envers :
Rien n'est plus divertissant que les vues cinématographiques passées à l'envers. On obtient ainsi des effets inattendus de l'effet le plus comique.
Ces vues obtiennent un énorme succès, à la salle du boulevard Saint-Denis nº 6, où il y a toujours foule pour les admirer, ainsi que les autres scènes et pittoresquement rendues par ce merveilleux appareil : le Cinématographe Lumière.
Le Petit Parisien, Paris, 12 mars 1897, p. 3.
Parfois la presse évoque quelques titres :
La salle du Cinématographe-Lumière (6, boulevard Saint-Denis) peut à peine contenir la foule depuis que le programme a subi de si heureuses transformations.
Le merveilleux appareil projette en ce moment, entre autres scènes des mieux venues, le Cortège du Boeuf-Gras, les Chasseurs alpins, une admirable Charge de cuirassiers et les Bains à Milan. Plusieurs scènes sont repassées à l'envers, ce qui produit toujours un effet du plus haut comique.
Le Journal, Paris, 23 mars 1897, p. 4.
De nouvelles vues sont annoncées quelques jours plus tard :
Les séances de cinématographe Lumière qui se donnent, 6, boulevard Saint-Denis, sont particulièrement intéressantes cette semaine. Entre autres clous, il faut citer les scènes de la vie militaire qui ont toujours le don d'attirer le public. Les manœuvres les défilés sont toujours accueillis chaleureusement par les spectateurs enthousiasmés.
Le Petit Journal, Paris, jeudi 1er avril 1897, p. 3.
Un public de jeunes spectateurs afflue pendant les vacances scolaires :
La période des vacances scolaires va, comme d'habitude, amener une foule de jeunes spectateurs aux intéressantes séances du cinématographe Lumière.
Dans la collection unique au monde des scènes si pittoresques, on a choisi spécialement pour eux les tableaux les plus amusants et instructifs à la fois.
On peut donc être certain de trouver à la salle du boulevard Saint-Denis, nº 6, un spectacle merveilleux comme il n'en existe nulle part ailleurs.
Le Petit Journal, Paris, mercredi 14 avril 1897, p. 3.
La drame du Bazar de la Charité (4 mai) explique que le directeur de la salle fasse passer le message suivant :
Dans les établissements:
S'il est une invention qui ait fait courir le monde entier, c'est bien le cinématographe Lumière. Or, malgré la cohue, malgré surtout la fréquence des séances qu'imposait la vogue colossale de ce spectacle, les millions de curieux qui se sont succédé dans la salle du cinématographe Lumière, 6, boulevard Saint-Denis, ont pu constater qu'il ne s'y est jamais produit le moindre fait anormal capable d'inquiéter le public. C'est ce souci constant de la sécurité des spectateurs en même temps que le perfectionnement continuel des appareils qui fera que le cinématographe Lumière conservera malgré tout la faveur générale.
Victor Roger.
Le Petit Journal, Paris, lundi 7 juin 1897, p. 3.
Par la suite, les annonces sont publiées avec une certaine parcimonie :
Les revues au théâtre ou au café-concert ont toujours le don d'attirer le public, qui aime bien revoir défiler devant ses yeux les principaux fiats de l'année.
Les projections animées du Cinématographe Lumière constituent une véritable revue, où l'on retrouve tous les événements exactement comme ils se sont passés. C'est pour cela qu'il y a toujours foule pour admirer ce spectacle merveilleux, que ce soit 6, boulevard Saint-Denis, ou au 14 du boulevard des Capucines.
L'Intransigeant, Paris, 20 juin 1897, p. 3.
Le cinématographe reste annoncé dans la rubrique des spectacles :
SPECTACLES DU 17 DÉCEMBRE
THEATRES
[...]
8 h 1/2 Cinématographe Lumière, 6, bould St-Denis.
Le Petit Parisien, Paris, 17 décembre 1897, p . 4.
Répertoire (autres titres) : Pêche à l'épervier, Arrivée des toréadors, Melbourne: arrivée d'un train, Bataille de neige, Roi et reine d'Italie, Pigeons de la place St-Marc, Duel au pistolet, Polka des bébés, [Vues à l'envers]: Démolition d'un mur, Bains à Milan (Le Figaro, Paris, vendredi 12 mars 1897, p. 5), Le Carnaval à Nice, La Charge de Cuirassiers, Bains à Milan (Le Petit Parisien, Paris, mercredi 17 mars 1897, p. 3).
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← 1896 Le Kinétographe du Théâtre Robert-Houdin (8 boulevard des Italiens, 1er janvier-31 décembre 1897) → 1898
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Les séances du Kinétographs se prolongent dès le début de l'année, mais la presse reste très discrète sur les titres du film. En février, à l'occasion des "jours gras", un brève annonce est publiée où figure enfin l'un d'eux :
Le théâtre Robert-Houdin donnera, à l'occasion des jours gras, trois matinées, les dimanche 28 février, lundi 1er et mardi 2 mars, avec le Mystère de Memphis, la Cage d'or et le Kinétographe. M. Meliès, toujours infatigable, présente une nouvelle série de projections animées, parmi lesquelles nous relevons le Château hanté, d'un genre absolument inédit et du plus grand effet.
Le Figaro, Paris, mardi 23 février 1897, p. 4.
Peu après, un autre journal dévoile quelques autres titres :
Le théâtre Robert-Houdin donnera, à l'occasion des jours gras, trois matinées, les dimanche 28 février, lundi 1er et mardi 2 mars, avec la Cage d'Or et le Mystère de Memphis.
M. Méliès renouvelle continuellement les vues qu'il fait projeter par le kinétographe. A citer, parmi les dernières parues : le Château hanté, Chez le dentiste, le Cauchemar, du plus saisissant effet.
Le Journal, Paris, vendredi 26 février 1897, p. 4.
Un entrefilet permet de savoir que le spectacle du théâtre Robert-Houdin intervient également dans les soirées privées organisés par les différents salons parisiens :
Le théâtre Rohert-Houdin a été très démandé dans les salons pendant les jours gras. C'est que les maîtresses de maison sont toujours sûres, en s'adressait à ce théâtre, d'avoir des artistes de valeur. On s'occupe déjà des prochaines séances à donner pour la mi-carême. En outre de la prestidigitation, le théâtre Robert-Houdin donne également en ville des séances de kinétographe, photographies animées.
Le Figaro, Paris, lundi 8 mars 1897, p. 5.
Toujours aussi peu d'informations sur les programmes présentés par le kinétographe. En revanche, l'article indique que les commandes passent par le magasin du passage de l'Opéra :
Parmi les attractions si nombreuses du théâtre Robert-Houdin, le Kinetograph n'est pas une des moins intéressantes. M. Méliès présente continuellement des scènes nouvelles d'un genre absolument inédit et qui obtiennent un grand succès, car il reçoit de nombreuses commandes à son magasin du passage de l'Opéra.
Le Figaro, Paris, lundi 22 mars 1897, p. 4.
L'un des articles les plus longs trouvés dans la presse cette année se consacre surtout à décrire certains numéros du spectacle et évoque brièvement le kinétographe :
THEATRES
M. Méliès, le sympathique directeur du théâtre Robert-Hoùdin. vient d’ajouter quelbues attractions nouvelles aux soirées si intéressantes offertes aux amateurs de prestidigitation.
Parmi les numéros les plus remarquables, signalons particulièrement :
L’automate jouant aux échecs, aux dominos, aux cartes avec un spectateur; un véritable chef-d’œuvre mécanique ;
Le mystère de Memphis : un sarcophage est placé sur des supports au milieu de la scène, absolument isolé de tous côtés; on y renferme une momie et, en moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire, cette momie disparaît et fait place à la gracieuse J. d'Arcyl qui, à son tour, s’enfuit comme une ombre:
La cage d’or — énigme Louis XV dit le programme. — Comment expliquer, en effet, l’apparition instantanée, dans une chaise à porteur, d’un gentil marquis et sa disparition non moins instantanée de la cage d'or dans laquelle on l’a renfermé.
Le kinétographe obtient le plus vif succès dans ses reproductions de scènes d’actualité ou de tableaux fantastiques où la transformation et la disparition des personnages s’opèrent beaucoup plus rapidement que dans les féeries les mieux machinées.
Enfin, le spirituel professeur Arnould, causeur plein d’humour, sait tenir le public en haleine et réalise le type du parlait prestidigitateur de salon.
Hâtons-nous d’ajouter que si Méliès et ses complices habituels Rainaly, Arnould et Rheur étaient venus au inonde quelques centaines d’années plus tôt, ils auraient couru grand risque de faire connaissance avec les bûchers de l’inquisition.
La France militaire, Paris, samedi 3 avril 1897, p. 4.
Pendant de longs mois, de très brèves annonces sont publiées, avant la fermeture estivale :
Le théâtre Robert-houdin fermera ses portes du 1er au 3I juillet inclus. Pour la réouverture, M. Méliès, le sympathique directeur, prépare de nouvelles expériences appelées â un grand succès.
Le Parisien, Paris, mercredi 23 juin 1897, p. 2.
En septembre la réouverture est annoncée :
Le théâtre Robert-Houdin reprend ses ma tinées à partir de dimanche. A l'avenir, les séances de prestidigitation n'auront plus lieu qu'en matinée, les, jeudis, dimanches et fêtes. M. Meliès, directeur de Robert-Houdin est, en même temps, fabricant de sujets cinématographiques. Ses vues artistiques et fantastiques, exhibées depuis deux mois à Robert-Houdin, ont remporté un si vif succès qu'il a décidé d'en continuer tous les soirs l'exhibition. D'autres attractions compléteront le spectacle.
Intérim.
Le Figaro, Paris, vendredi 3 septembre 1897, p. 4-5.
En octobre, quelques nouveaux titres sont annoncés :
Viennent de paraître, au « Kinetograph » du théâtre Robert-Houdin, cinq scènes nouvelles à transformations des plus étranges : Figaro et l'Auvergnat, Arlequin et le Charbonnier, l'Hôtel ensorcelé, le Magnétiseur et le Laboratoire de Méphistophélès. Ces nouveautés obtiennent un gros succès, ainsi que les matinées de prestidigitation du dimanche et du jeudi.
Le Journal, Paris, dimanche 3 octobre 1897, p. 5.
Un dernier article de 1897 permet de savoir que le théâtre et le kinétographe rencontrent un franc succès :
On a refusé plus de deux cents personnes à la matinée de dimanche au théâtre Robert-Houdin. La vogue des matinées du dimanche et du jeudi va toujours grandissant, et c'est justice car le spectacle est des mieux réussis.
Le Kinetograph est toujours donné en exhibition tous les soirs.
Le Figaro, Paris, mercredi 10 novembre 1897, p. 4
Répertoire (autres titres): Le Musulman en visite (Le Gaulois, Paris, lundi 5 avril 1897, p. 3).
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Dès les premiers jours de l'année, le cinéphotographe fonctionne toujours au 15, boulevard des Italiens.
Gil Blas, Paris, 2 janvier 1897, p. 4.
Cette annonce est publiée jusqu'au lundi 22 février 1897.
→ 1897
← 1896 Le Cinématographe d'Eugène Pirou (Boulevard des Capucines 12/Grand Café de la Paix, 1er janvier->8 mars 1897)
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Dans les premiers jours de l'année, un incendie sans gravité se déclare:
Comme beaucoup d'établissements du même genre, le Café de la Paix a aménagé une de ses salles pour y donner des représentations du cinématographe.
Hier soir à onze heures, au moment où la séance finissait et alors qu'il ne restait plus qu'une dizaine de personnes dans la salle, une étincelle de charbon de la lampe électrique qui éclaire le réflecteur est tombée sur les pellicules photographiques à base de celluloïd. Une gerbe de flammes s'est aussitôt élevée et a communiqué le feu aux tentures.
Grâce au sang-froid de l'employé qui faisait jouer le cinématographe, la flamme a été étouffée immédiatement avec un pardessus jeté sur l'appareil, et le feu ne se propageant qu'assez lentement dans les tentures, les pompiers ont eu le temps d'arriver et de noyer le commencement d'incendie.
Il n'y a eu du reste aucun accident de personnes. Les spectateurs restés dans la salle ont pu s'enfuir sans difficulté et on avait fait évacuer sur-le-champ le café dont on avait fermé l'électricité.
Le Petit Journal, Paris, lundi 18 janvier 1897, p. 2.
Parmi les vues les plus remarquées que propose le cinématographe au début de l'année 1897, on trouve celles de Pini et Kirchhoffer:
LE CINÉMATOGRAPHE PIROU.-Les projections de la "leçon d'armes" et de l'assaut Pini-Kirchhoffer, qui ont été hier soir les clous de la séance cinématographique donnée par M. E. Pirou au Figaro, seront reproduites à partir d'aujourd'hui au Café de la Paix, l'habile photographe a installé son cinématographe.
Tout Paris pourra défiler ainsi devant les deux fameux champions !
Le Figaro, Paris, samedi 13 février 1897, p. 3.
En mars, des vues du Carnaval de Nice sont projetées au Café de la Paix:
CINÉMATOGRAPHIE.-Le Cinématographe Eug. Pirou, au café de la Paix, nous donne à partir d'aujourd'hui de très curieuses projections des vues du carnaval de Nice. Bataille de fleurs, corso vélocipédique, cortège carnavalesque, etc., défileront devant les yeux des spectateurs qui auront l'illusion d'assister, du fond d'un salon parisien, aux éblouissantes fêtes de la Côte d'Azur.
Chaque séance se terminera sur le défilé de la cavalcade du Bœuf gras.
Le Figaro, Paris, lundi 8 mars 1897, p. 4.
Le Cinématographe (Café Riche, 1er janvier- 1897)
Dès le début de l'année, le cinématographe du Café Riche continue à fonctionner :
AVANTAGES MATÉRIELS
SERVICE DES THEATRES
Nouvelles Réductions et Modifications
[...]
Cinématographe du Café Riche: 50%.
L'Université de Paris, Paris, 1er janvier 1897, p. 17.
Le Cinématographe Lumière (Théâtre de la Bodinière, [04] janvier 1897)
Dans le cadre su spectacle Paris-Gala, un cinématographe Lumière fonctionne :
A la Bodinière a eu lieu, avec un succès très grand et très mérité, la seconde représentation de Paris-Gala, cette toute spirituelle et étincelante revue de MM. J. P. Ethem et Meudrot.
Elle est jouée à merveille par M. Tarride, par Mlle Marguerite Deval, -mais surtout par le cinématographe Lumière.
Les couplets sont tout à fait amusants, d'un esprit vif et du meilleur aloi. Il en est -comme ceux sur l'officier russe et les danseuses-qui sont vraiment impayables.
L'Événement, Paris, 5 janvier 1897, p. 4.
Le kinétographe du Ba-Ta-Clan (17->17 janvier 1897)
A Ba-Ta-Clan, pour satisfaire le nombreux public du quartier, qui revient sans cesse voir à nouveau les Protocoleries de l'année, les auteurs, MM. Gavault et de Cottens, ne cessent d'ajouter des scènes ou des attractions nouvelles. Ainsi, la semaine dernière, nom avons eu la primeur d'une parodie tordante de Chand d'habits; cette semaine, nous avons le kinétographe, dont les tableaux sont d'une actualité étonnante.
Signalons la rentrée des Bodson's, acrobates d'une force inouïe.
Le Journal, Paris, dimanche 17 janvier 1897, p. 3.
Le kinematographe du théâtre Déjazet (3-[21] février 1897)
À l'occasion de la présentation des pièces Une Fille encombrante et Madame la Maréchal, le théâtre Déjazet organise des projections cinématographiques avec le "kinématographe" de Méliès et Reulos :
THÉATRE DEJAZET
[...]
KINÉMATOGRAPHE
Vues de MM. G. Méliès et Reulos, présentées par MM. Gondeau [sic] et Vatin.
1. Le train.
2. Pêche à la ligne.
3. Dessinateur
4. Nuit terrible.
5. Escamotage d'une femme.
6. Trouville.
7. Le Tsar au Bois de Boulogne.
8. Le régiment qui passe.
La Scène, Paris, [février] 1897, p. 2.
Il semble que les projections s'interrompent vers le 21 février.
Le Cinématographe Lumière du Touring-Club (Société de Géographie, 11 février 1897)
Le responsable du cinématographe Lumière pour Paris, Clément-Maurice, est souvent appelé pour donner des projections dans le cadre de soirée ou de conférence. Celle qui est organisée par la Société de Géographie pour les amateurs de la " petite reine " a lieu le 11 février et elle est due au professeur Gabriel :
Une conférence, ayant pour titre " les Désidérata du cyclisme ", sera faite le jeudi 11 février prochain, à huit heures et demie du soir, à la salle de la Société de géographie, boulevard Saint-Germain, 184, par le professeur Gabriel, membre du conseil du T. C. F.: des projections animées, du cinématographe-lumière, seront faites par M. Clément Maurice.
Le Rappel, Paris, 6 février 1897, p. 3.
Le compte rendu de la réunion, paru quelques jours plus tard, n'apporte pas d'informations particulières sur les projections effectuées par Clément Maurice :
Avant-hier soir à la Société de Géographie, boulevard Saint-Germain, le professeur Gariel, membre de l’Académie de médecine, a fait la conférence que nous avions annoncée et dont le sujet était : " Les desiderata du cycliste ".
Salle comble, ou à peu près, malgré la pluie indiscontinue de la soirée. Sur l’estrade ont pris place MM. Ballif, président du T.C.F. : Max Vincent, conseiller municipal : les docteurs Léon Petit, Lucas Championnière, Briand, et MM. Duchesne et Vieillard.
La conférence terminée : 1. M. Ballif a annoncé la prochaine, celle que fera M. Lefort, le 11 mars, sur la Tunisie, avec projections de Molteni, toujours à la Société de Géographie : 2. M. Clément Maurice a amusé l’auditoire, pardon l'oculitoire (hum !) par des projections cinématographiques remarquables.
La France, Paris, 14 février 1897, p. 3.
On imagine, malgré tout, que quelques vues Lumière dont le sujet est la bicyclette ont été servies en conclusion de cette soirée.
Le cinographoscope (Musée Oller, <20 février 1897)
Dès les premières semaines de l'année 1897, un cinographoscope de la maison Pipon fonctionne dans le Musée Oller:
Le Musée Oller possédait déjà nombre d'attractions, figures de cire, scènes d'actualités, cinographoscope, etc. Cela ne suffisait pas au plus habile de nos managers qui a établi en outre dans le vaste sous-sol de l'Olympia un cyclodrome où se mesureront à partir de demain dimanche, les coureurs cyclistes les plus en renom.
Le vélo, Paris, 20 février 1897, p. 2.
Le Cinématographe Joly-Normandin (Parisiana, <28> février 1897)
Le Parisiana est un café-concert, situé au 27 boulevard Poissonnière et inauguré le 9 septembre 1894, sous la direction d'Alexis-Charles Debasta. Ce dernier est également responsable de deux salles, l'Horloge et les Champs-Élysées. C'est à la fin du mois de février que l'on annonce des séances de cinématographe :
Parisiana, le luxueux en [sic] confortable théâtre-concert du boulevard Poissonnière dont les soirées si attrayantes obtiennent une faveur de plus en plus marquée, grâce aux efforts et aux sacrifices de son intelligente direction, vient de prendre une initiative particulièrement heureuse.
M. Ch. Debasta a eu, en effet, l'excellente idée d'organiser tous les jours, de 3 à 6 heures, des répétitions publiques qui apporteront une véritable révolution au café-concert. Pour le modeste prix de sa consommation, chacun peut passer son après-midi à Parisiana, en entendant dire par les artistes les plus aimés du public, les nouveautés du répertoire.
Ces matinées sont agrémentées de séances de cinématographie, séances merveilleuses où le système de cinématographe Joly se révèle comme le plus perfectionné et le plus artistique.
Gil Blas, Paris, 28 février 1897, p. 4.
Le cinématographe du Parisiana continue à figurer dans les programmes des spectacles au cours des semaines suivantes. Pourtant, les affaires ne marchent guère et Debasta accepte l'offre de rachat des frères Isola. Ces derniers conservent le cinématographe pour les matinées dès l'inauguration qui a lieu le 3 avril, mais les informations sur les proyections disparaissent vite de la presse. Là-dessus, l'incendie du Bazar de la Charité conduit aussi les propriétaires de cinématographes à devenir plus discrets. À une époque indéterminée, le cinématographe est placé dans un petit local situé au-dessus du Parisiana. Aucune information cependant jusqu'au 22 août, date à laquelle se déclare un incendie mineur qui va cependant soulever l'émoi, car le souvenir de la tragédie de la rue Jean-Goujon est encore très présent dans les mémoires :
Le cinématographe vient encore de faire des siennes.
Dans un local du premier étage donnant sur le boulevard Poissonnière et attenant à la salle de Parisiana-Concert, est installé depuis plusieurs mois déjà un cinématographe qu'actionne l'électricité.
Hier soir, à neuf heures, au cours d'une représentation à laquelle assistaient une dizaine de personnes, un commencement d'incendie provoqué par un court-circuit se déclara tout à coup. Deux fils électriques s'étaient rencontrés et avaient enflammé des pellicules. Le feu se communiquait déjà aux tentures, mais l'opérateur, M. Joubert, sans perdre son sang-froid, arracha les fils rougis à blanc et éteignit les flammes à l'aide d'un seau d'eau.
Toutefois les spectateurs pris de panique s'enfuirent affolés, jetant l'alarme qui provoqua un vif moment d'émotion dans la salle du concert. Mais l'émoi ne fut que de courte durée. En effet, quand arrivèrent les pompes des casernes Jean-Jacques-Rousseau, du Marché-Saint-Honoré et de la rue du Château-d’Eau, tout danger avait déjà disparu. Elles n'eurent donc pas à fonctionner.
Cet accident avait provoqué sur le boulevard un rassemblement considérable que les gardiens de la paix ont eu beaucoup de peine à dissiper.
M. Joubert a été brûlé à la main droite, mais ses blessures ne présentent aucune gravité.
Le Figaro, Paris, 23 août 1897, p. 4.
Mais plus aucune information ne figure dans la presse des semaines suivantes. Probablement faut-il penser que l'incendie et surtout sa répercussion ont conduit à la suspension des projections.
Le kinématographe de Mme Leclère (32, Boulevard Poissonnière, février-mai 1897)
C'est vers la fin du mois de février que commencent, dans un salon du 32, boulevard Poissonnière, des projections cinématographiques :
Ce cinématographe, ou plutôt ce kinématographe, puisque c'est ainsi qu'il s'appelait, était installé dans une boutique, au numéro 32 du boulevard Montmartre [sic], presque au coin du faubourg, depuis trois mois environ.
Le Radical, Paris, 26 mai 1897, p. 3.
La propriétaire du bail est Mme Leclère. Pourtant de ce cinématographe nous ne savons rien du tout jusqu'au 25 mai, jour où un incendie mineur se déclare :
Le feu dans un Cinématographe
Un commencement d'incendie, qui a provoqué une certaine panique, s'est déclaré hier soir vers six heures, au numéro 32 du boulevard Poissonnière, dans une petite boutique où était installé un cinématographe.
Au moment où le feu s'est déclaré, il y avait environ quinze personnes dans la salle. Aussitôt que l'alerte fut donnée, les spectateurs s'enfuirent rapidement, et l'on n'a à déplorer que des dégâts matériels, peu importants du reste.
En effet, les pompiers se sont rendus bientôt maîtres du feu. En mettant une pompe en batterie, un tuyau rempli d'eau a crevé sous la pression et les nombreux curieux qui se pressaient autour de la boutique ont été inondés.
M. Archer, commissaire de police, a averti par dépêche la Préfecture de police, et M. Girard, chef du Laboratoire municipal, est venu dans la soirée procéder à une expertise.
Nous avons vu M. Léon Roussin, employé au cinématographe, et il nous a raconté ce qui suit :
Alors que je mettais an point, le verre grossissant a fait lentille sur le celluloïd qui a pris feu et a enflammé la boîte entière.
Les pellicules du celluloïd se déroulaient trop lentement à mon gré, mais je ne puis être rendu responsable de ce qui est arrivé. Il se produit quelquefois dans les plaques des trous causés par des étincelles, mais la rapidité avec laquelle l'appareil fonctionne empêche l'accident de se manifester.
Au moment où le feu a pris dans la botte, le dernier tableau du cinématographe représentait la « Scène du cauchemar ». Cette coïncidence est bizarre.
M. Archer assistait à l'enquête faite sur place par M. Girard. Le magistrat a reçu les déclarations techniques de M. Léon Roussin qu'il avait interrogé déjà, aussitôt après l'accident.
Les débris de l'appareil ont été mis sous scellés.
Le Petit Parisien, Paris, 26 mai 1897, p. 3.
Plus de peur que de mal, et l'incident serait sans doute passé inaperçu s'il ne s'était pas produit après l'incendie tragique du Bazar de la Charité (4 mai 1897). C'est d'ailleurs ce que déclare l'opérateur :
[...] " Un accident comme celui d'hier, continue-t-il, n'a aucune importance il s'est produit vingt fois ; et, passé toujours inaperçu, ou presque inaperçu, avant la catastrophe de la rue Jean-Goujon.
Maintenant, il n'y a plus qu'à fermer boutique, de tels accidents arriveront encore souvent, et, pour les éviter, il n'y a plus qu'un moyen, supprimer les cinématographes.
Mme Leclerq, ma patronne, était à sa fin de bail, elle ne renouvellera pas. C'est une industrie finie. Pour moi, advienne que pourra. "
Et Louis Roussin se promène de long en large devant la devanture fermée, atttendant l'enquête.
La Justice, Paris, 27 mai 1897, p. 3.
L'incendie marque ainsi la fin de l'exploitation de ce cinématographe dont on ne connaît pas le constructeur. En revanche, le film dont il est question, Le Cauchemar, fait partie du catalogue Méliès.
Le Cinématographe Joly-Normandin (Théâtre de la République, 4 avril 1897)
Les affaires du cinématographe Joly-Normandin sont au beau fixe en ce mois d'avril 1897, et Ernest Normandin peut se permettre même de prêter un appareil pour une œuvre de bienfaisance en faveur des blessés grecs qui a lieu le 4 avril 1897, au théâtre de la République :
GRANDE MATINÉE ARTISTIQUE
AU THÉATRE DE LA RÉPUBLIQUE
Le Dimanche 4 avril, à deux heures
Voici, à quelques noms près, le programme complet de cette matinée, qui promet d'être à la fois des plus brillantes et des plus fructueuses, étant donnés le nom et la valeur des artistes avec laquelle les places s'enlèvent dans nos bureaux et au Théâtre de la République :
[...]
Nous croyons pouvoir faire à nos amis une surprise, celle du :
CINÉMATOGRAPHE
qu'un des inventeurs, M. Normandin, met gracieusement à notre disposition avec des vues appropriées.
La Presse, Paris, 1er avril 1897, p. 3.
Parmi les très nombreux artistes - chanteurs, musiciens, comiques... - ont relève le nom de Polin, le comique troupier qui tournera quelques années plus tard de nombreux films. Par ailleurs, cette participation gracieuse se situe juste un mois avant la catastrophe du Bazar de la Charité /4 mai 1897) où un appareil Joly-Normandin sera, indirectement, responsable de l'incendie.
Le Cinématographe Joly-Normandin du Concert de l'Association amicale des anciens élèves du lycée Buffon (Salle des Sociétés Savantes, 13 avril 1897)
Il est fréquent que pour une soirée les services d'un cinématographe soient loués. C'est ce qui se produit à l'occasion du concert qu'organise l'Association amicale des anciens élèves du lycée Buffon dans la salle des Sociétés Savantes :
Le concert annuel que donne l'Association amicale des anciens élèves du lycée Buffon a été particulièrement brillant cette année. La salle des Sociétés savantes où il a eu lieu, hier soir, était archi-comble. Gros succès pour Mlles Blanche de Neige, de la Roulotte ; Wissocq, de l'Odéon ; Miette, Bob Walter, dans ses chansons de bergères du dix-huitième siècle ; M. Chambon, de l'Opéra ; Jacques Monis, du Chien-Noir ; Darras, de l'Odéon ; M. Choinet, violoncelliste-solo, des concerts Colonne.
Mlle Amélie Massé, une jeune et jolie diva que tout Paris s'arrachera bientôt, a obtenu un triple rappel de bravos avec le répertoire Yann-Nibor. M. Charles Bernardel, le très distingué accompagnateur, tenait le piano.
N'oublions pas le cinématographe Jolly [sic], qui, par des vues très pittorresques et très nouvelles, a égayé vivement l'auditoire.
Journal des débats politiques et littéraires, Paris, 14 avril 1897, p. 3.
Que du beau monde pour cette soirée où le cinématographe Joly occupe une place de choix. Mais nous ignorons le nom de l'opérateur et le titre des vues.
Le Cinématographe Joly-Normandin (Dames de France, [avril] 1897)
Une simple allusion nous indique qu'un appareil Joly-Normandin organise des projections aux Dames de France - probablement la Société caritatives des Dames de France, rue Gaillon - dans les semaines qui précèdent le drame du Bazar de la Charité :
Le Cinématographe
L'appareil cinématographique installé par la maison E. Normandin, 9, rue Soufflot, au grand Bazar de Charité, était un appareil du système Jolly, ayant déjà plusieurs fois fonctionné dans différentes séances données à l'asile de Villejuif, chez les dames de France, chez Mme Cazaubon, institutrice rue Soufflot, etc., etc., et qui devait servir hier pour une représentation à donner par Mme la comtesse de Puységur, au 51 de la rue de l'Université, chez des amis de cette dame.
Le Radical, Paris, 7 mai 1897, p. 2.
Aucune autre information n'a pu être trouvée.
Le Cinématographe Joly-Normandin (Mme Cazaubon, [avril 1897])
Une simple allusion nous indique qu'un appareil Joly-Normandin organise des projections chez Mme Cazaudon, institutrice, rue Soufflot... précisément dans la même rue où se trouve Ernest Normandin, dans les semaines qui précèdent le drame du Bazar de la Charité :
Le Cinématographe
L'appareil cinématographique installé par la maison E. Normandin, 9, rue Soufflot, au grand Bazar de Charité, était un appareil du système Jolly, ayant déjà plusieurs fois fonctionné dans différentes séances données à l'asile de Villejuif, chez les dames de France, chez Mme Cazaubon, institutrice rue Soufflot, etc., etc., et qui devait servir hier pour une représentation à donner par Mme la comtesse de Puységur, au 51 de la rue de l'Université, chez des amis de cette dame.
Le Radical, Paris, 7 mai 1897, p. 2.
Aucune autre information n'a pu être trouvée.
Le cinématographe du théâtre de Belleville (Rue de Belleville, <18> avril 1897)
Théâtre de Belleville (XXe)
Des séances de cinématographie ont lieu au théâtre de Belleville :
Théâtre de Belleville, 8 h. 1/2.-Le Pauvre idiot.-Séance du cinématographe.
L'Intransigeant, Paris, dimanche 18 avril 1897, p. 4.
Le Cinématographe Joly-Normandin (Bazar de la Charité, 4 mai 1897)
Le Bazar de la Charité est une activité de bienfaisance qui a été créé en 1885, par M. Henri Blount. Son président est le baron de Mackau. Il a changé plusieurs fois de local au fil des ans. Au cours des six dernières années, il a été en face du numéro 108 de la rue de La Boëtie. Finalement, en 1897, il s'installe, rue Jean-Goujon, dans une sorte de hangar rectangulaire d'une largeur de vingt mètres. Pour l'aménagement, on va utiliser la " rue du vieux Paris ", l'une des principales attractions de l'Exposition du Théâtre et de la Musique qui s'est tenue, l'année précédente, au palais de l'Industrie et où, précisément, un cinématographe Joly proposait des vues animées. Prévenu trop tard, le cinématographe Joly ne s'installe que le 4 mai, lendemain de l'inauguration. C'est Victor Baïlac, responsable du secteur " représentation ", qui est à la manœuvre. Grégoire Bagrachow, responsable du secteur " photographie ", est venu aussi, mais simplement pour découvrir le Bazar de la Charité. De deux heures et demi à quatre, le cinématographe a déjà proposé quatre séances et tout s'est déroulé sans anicroche. C'est au cours de la cinquième qu'une mésentente entre les deux hommes provoque le terrible incendie.
Vue d'ensemble du Bazar de la Charité avant l'installation des comptoirs. | L'Incendie attaquant la façade : 4 heures 35 |
L'Illustration, Paris, n° 2828, 8 Mai 1897 | Jules Huret, La Catastrophe du Bazar de la Charité (4 mai 1897), Paris, Juven Ed., 1897, p. 7 et 16. |
Il était 4 heures 20. Tout à coup, du fond à gauche, à l'endroit où, derrière les boutiques, était installé le cinématographe, des flammes jaillirent ; en moins de trois minutes elles gagnèrent les frises des décors, courant dans les toiles peintes avec la rapidité de la foudre et mettant le feu à la fois à tout le bâtiment.
Ce fut une panique inimaginable.
Le plancher du bazar de la Charité était légèrement exhaussé ; il fallait franchir trois marches pour pénétrer dans le hall par deux petites portes situées aux deux extrémités de la construction. On entrait tout d'abord dans une sorte de salon-vestibule où se tenaient les sœurs quêteuses appartenant à diverses congrégations, puis on gagnait le bazar proprement dit. Au centre du spacieux pavillon, on avait bien ménagé une large porte à deux battants qui, hélas, s'ouvraient intérieurement et seulement au moment de la sortie.
Quand la panique s'est déclarée - le fait s'était déjà produit lors de l'incendie de l'Opéra-Comique - il a été impossible aux malheureux bloqués par les flammes d'utiliser ces issues, qui auraient été pour eux le salut immédiat.
En proie à un affolement subit, les douze cents personnes qui se trouvaient à ce moment au bazar de la Charité se ruèrent vers la sortie, se bousculant, s'écrasant, tombant en tas les unes sur les autres, et formant ainsi d'infranchissables barricades de corps humains amoncelés, qui fermaient le chemin du salut aux malheureux restés derrière.
Un grand nombre de personnes, les plus rapprochées des deux portes, avaient pu cependant s'enfuir, les unes indemnes, d'autres avec des brûlures plus ou moins graves.
Jules Huret, La Catastrophe du Bazar de la Charité (4 mai 1897), Paris, F. Juven Éditeur, [1897], p. 9-10.
Le bilan de cette catastrophe est terrible. On dénombre, au moins, 120 victimes, presque toutes des femmes, et pour une bonne part, membre de l'aristocratie comme la duchesse d'Alençon.
Le drame de la rue Jean-Goujon va porter un coup très dur à Ernest Normandin en particulier, mais va avoir de très sérieuses conséquences sur la diffusion du cinématographe, au moins pendant quelques mois.
Le kinétoscope (Hall du Petit Parisien, <4> septembre 1897)
Dans le hall du journal Le Petit Parisien, fonctionne un kinétoscope:
A propos de la charmante ballerine, nous n'avons pas été médiocrement surpris, l'autre soir, d'entendre annoncer par le montreur d'un kinétoscope, situé dans le hall du Petit Parisien: "Le bain de la Parisienne et le désabillé [sic] du modèle, par Mlle de Mérode de l'Opéra."
Inutile de dire que la jeune personne qui a posé pour ces deux tableaux animés n'est nullement la gracieuse artiste de l'Académie de musique.
La Liberté, Paris, samedi soir 4 septembre 1897, p. 4.
The American Biograph (Casino de Paris, 1er novembre-31 décembre 1897) → 1898
La société américaine The American Mutoscope Co s'intéresse au marché européen en général, et français en particulier. Elle envoie l'un de ses collaborateurs, le français Eugène Lauste, pour mettre en place The American Biograph qui est annoncé dans la presse parisienne à partir du 1er novembre 1897 :
CASINO DE PARIS
The American Biograph.-Mlle And. Viviane.-Le prince O'KA-BE et sa suite. Les Sœurs Merkel's. Sans-Puits-House, ballet pant.
Le Journal, Paris, 1er novembre 1897, p. 4.
Dès le lendemain, une soirée de gala est annoncée pour le jeudi 4 novembre 1897 :
Grande soirée de gala, jeudi, au Casino de Paris. A l'occasion de cette fête, et pour la première fois, The American Biograph présentera les nouveaux tableaux français parisiens et militaires, que la direction a pu prendre aux dernières manœuvres.
A cette même soirée débutera le prince japonais O-Ka-Bé, avec sa suite, et la charmante Andhrée Viviane fera sa rentrée.
La France, Paris, 2 novembre 1897, p. 3.
Alfred Choubrac, Casino de Paris, The American Biograph. La Bataille des oreillers, (ATeliers Choubrac, à Colombes, Seine). Signée à gauche, 55 x 75. couleur, [1897-1898] [D.R.]
Habituellement, The American Biograph propose une série de 16 tableaux (Le Constitutionnel, Paris, 29 décembre 1897, p. 4).
Casino de Paris, American Biograph, Vue depuis la scène [1897-1898] © Smithsonian Institution- National Museum of American History |
Casino de Paris, American Biograph Vue depuis la salle [1897-1898] [D.R.] |
→ 1898
The American Biograph (Concert-Parisien, 37, faubourg Saint-Denis, 2-30 novembre 1897)
The American Biograph est annoncé aux Concert-Parisien à partir du 2 novembre 1897 :
CONCERT-PARISIEN, 37, faubourg Saint-Denis.-The American Biographe, Mlle Andhrée viviane, Miss Herrey, trio Mandroux. Le prince O'Ka-Be et sa suite, exercices japonais. Les sœurs Merkel's. Sans Puits House, ballet pantomime.
Le Petit Caporal, Paris, 2 novembre 1897, p. 4.
La presse publie les dernières annonces à la fin du mois de novembre :
CONCERT-PARISIEN, 37, faubourg Saint-Denis.-The American Biogaph, Mlle Andhrée viviane, Miss Herrey, trio Mandroux. Le prince O'Ka-Be et sa suite, exercices japonais. Les sœurs Merkel's. Sans Puits House, balle pantomime.
Le Constitutionnel, Paris, 30 novembre 1897, p. 4.
Le cinématographe Lumière (Palais des Glace, [24]-31 décembre 1897) → 1898
A la fin de l'année, un cinématographe Lumière fonctionne au Palais de Glace :
Les membres du Scottish Bandy Club de Glasgow, qui doivent ce soir se livrer au jeu de hockey sur la piste du Palais de Glace, feront tous les jours une partie à six heures et à dix heures, jusqu'au 30 courant. Egalement aujourd'hui débuts de Borgh, patineur norvégien, et du Cinématographe Lumière à longue portée.
Demain samedi, arbres de Noël avec jouets pour les jeunes patineurs.
Le Figaro, Paris, 24 décembre 1897, p. 1.
→ 1898
1898
← 1897 Le cinématographe Lumière (14 boulevard des Capucines, 1er janvier-31 décembre 1898) → 1899
← 1897
Les séances se prolongent dès le début de l'année:
Le Japon, ce pays si étrange, si pittoresque, avec ses coutumes bizarres, ses mœurs particulières, a toujours exercé une attraction énorme sur l'imagination de tous. Il n'était malheureusement pas donné à beaucoup de gens de satisfaire leur curiosité.
Le Cinématographe Lumière vient de résoudre ce problème, jusqu'ici insoluble, de transporter en plein Paris, 14, boulevard des Capucines, ce pays étonnant, en plusieurs séances d'une saisissante réalité, plus captivantes les unes que les autres, et que tout le monde voudra voir.
Le Figaro, Paris, dimanche 13 février 1898).
Parfois la presse évoque quelques titres à succès :
Buffalo Bill, dont il est beaucoup parlé en ce moment à propos de la guerre hispano-américaine, figure, avec ses fantasias extraordinaires, parmi les tableaux les plus applaudis du Cinématographe Lumière, 14, boulevard des Capucines.
Très goûtés également les tableaux de la revue de la garde républicaine, aux Invalides, et les défilés de la mi-carême.
Mais le gros succès reste les courses de taureaux, qui comptent toujours, quoi qu'on en dise, de nombreux amateurs à Paris.
Le Figaro, Paris, 29 avril 1898, p. 5.
Cinématographe Lumière. Grand Café, Programme, 22-29 octobre 1898
Source: Bibliothèque Historique de la ville de Paris (4-DEP-004-095)
En novembre, des photographies en couleurs sont également projetées :
La direction du Cinématographe Lumière du Grand Café, 14, boulevard des Capucines, vient d'adjoindre à ses vues les projections de photographies des couleurs naturelles sans retouches de la maison Lumière de Lyon. Tout Paris ira voir ces tableaux merveilleux.
A. Mercklein.
Le Figaro, Paris, 26 novembre 1898, p. 4.
Cinématographe Lumière. Grand Café, Programme, 3-10 décembre 1898
Source: Bibliothèque Historique de la ville de Paris (4-DEP-004-095)
Répertoire (autres titres): Régiment des alpins français (Le Peuple français, Paris, 25 mai 1898, p. 4.
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← 1897 Le cinématographe Lumière (Grands Magasins Dufayel, 1er janvier-31 décembre 1898) → 1899
← 1897
Dès le début de l'année, les séances continuent aux Magasins Dufayel :
[...] Tous les jours, séances du cinématographe Lumière, suivies de conférences et expériences sur les rayons X, au moyen de la lorgnette humaine de l'ingénieur Séguy.
Le Figaro, Paris, 11 janvier 1898, p. 4.
À l'occasion de la présentation de vues japonaises, une conférence est donnée par Maurice Lefevre. Les vues présentées sont accompagnées de bruits divers :
Demain samedi, à 3 heures et 5 heures, séance extraordinaire du cinématographe Lumière (scènes animées et parlées, imitation du bruit de l'eau, du pas des hommes et des chevaux, du roulement des attelages, etc.) dans la salle des fêtes des grands magasins Dufayel. "Scènes de la vie du Japon" avec projections animées, et causerie anecdotique par M. Maurice Lefevre. La séance se complétera de vues instantanées de scènes de la vie parisienne avec commentaire humoristiques.
Le Figaro, Paris, vendredi 4 mars 1898, p. 3.
En septembre, une nouvelle attraction est annoncée :
Signalons une nouvelle attraction dans les grands magasins Dufayel, où les visiteurs de plus en plus nombreux, peuvent voir tous les jours, en plus des rayons X et du cinématographe Lumière, l'automate dessinateur Gill'O qui exécute, à chaque séance, des portraits de personnages célèbres et celui d'un spectateur auquel il est remis gratuitement comme souvenir.
Le Figaro, Paris, vendredi 23 septembre 1898, p. 3.
→ 1899
← 1897 Le cinématographe Lumière (6, Boulevard Saint-Denis (1er janvier-31 décembre 1898) → 1899
← 1897
Les séances se prolongent tout au long de l'année :
Dans les établissements :
Les tableaux militaires ont toujours la faveur populaire. C'est ainsi qu'on redemande chaque jour au Cinématographe Lumière de la Porte-Saint-Martin (6, boulevard Saint-Denis) les merveilleux tableaux des cuirassiers avec la charge d'une illusion saisissante.
Très goûtés aussi le pèlerinage de Lourdes avec son grouillement de pèlerins et son panorama admirable.
Le Petit Journal, Paris, 13 mai 1898, p. 3.
De nouvelles vues sont présentées dans les jours suivants:
Où est la flotte espagnole ? telle est la question que tout le monde se posait il y a quelques jours seulement. Tout le monde peut voir aujourd'hui les cuirassés espagnols devenus célèbres : il suffit de se rendre, 6, boulevard Saint-Denis, au Cinématographe Lumière de la Porte-Saint-Martin.
Le Petit Journal, Paris, vendredi 3 juin 1898, p. 3.
Les annonces se font plus rares :
CINÉMATOGRAPHE LUMIÈRE DE LA PORTE SAINT-MARTIN, 6, boulevard Saint-Denis.-Vues animées, 50 centimes.
Le Petit Journal, Paris, dimanche 31 juillet 1898, p. 4.
Répertoire (autres titres): La charge des cuirassiers français, Les charges des hussards anglais, La charge des lanciers espagnols, La charge des dragons russes (Le Petit Journal, Paris, 28 mai 1898, p. 3).
→ 1899
← 1897 Le Kinétographe du Théâtre Robert-Houdin (8 boulevard des Italiens, 1er janvier-31 décembre 1898) → 1899
← 1897
Si la rubrique des spectacles continue à annoncer les programmes du théâtre Robert-Houdin de Georges Méliès, ce ne sont que des notes très brèves où ne figurent ni aucun commentaire, ni aucun titre.À la fin du mois de janvier, un article évoque un rééquilibrage dans les spectacles :
Le théâtre Robert Houdin reprend ses Soirées de Prestidigitation à partir du 1er février, sauf le dimanche soir qui reste consacré au Cinématographe.
La direction donne ainsi satisfaction aux amateurs de prestidigitation, de même qu’elle permet aux fervents du Cinématographe de venir applaudir les étonnantes vues de M Méliès.
Le Nord, Paris, jeudi 27 janvier 1898, p. 3.
L'utilisation du terme cinématographe commence également à s'imposer. En avril, de nouvelles vues cinématogaphiques sont annoncées :
Le théâtre Robert Houdin vient de faire paraître deux nouvelles vues cinématographiques, la Magie diaboliques et les Rayons Rœntgen, du plus étonnant effet.
M. Méliès s’est fait une place bien à part dans la photographie du mouvement par l'originalité de ses créations. Toutes ses vues, soit fantastiques, soit comiques, obtiennent toujours le plus vif succès.
Le théâtre Robert-houdin annonce des matinées pour tous les jours de la semaine de Pâques, du 10 au 17 avril inclus.
Le Petit Moniteur universel, Paris, 1er avril 1898, p. 5.
Quelques semaines plus tard de nouvelles vues sont annoncées:
De nouvelles Vues Cinématographiques toutes d’actualité viennent de paraître au Théâtre Robert-Houdin. Elles se rapportent à l'explosion du Maine. Le tableau représentant la visite de l’épave par les scaphandriers est notamment du plus vif intérêt. A partir du 1er mai prochain, le Théâtre Robert-Houdin reprendra ses Soirées du Cinématographe, mais en conservant, pendant tout le mois de mai, les matinées de Prestidigitation.
Le Triboulet, Paris, dimanche 1er mai 1898, p. 14.
L'information se prolonge jusquau 27 octobre, puis plus rien ne figure ne serait-ce qu'à la rubrique des spectacles :
Robert-Houdin.-Magie. Tous les soirs, séance de physique amusante. Le Kinétographe.
La Justice, Paris, jeudi 27 octobre 1898, p. 4.
Les annonces disparaissent pratiquement jusqu'à la fin de l'année.
→ 1899
← 1897 The American Biograph (Casino de Paris, 16, rue de Clichy, 1er janvier-30 mars 1898)
← 1897
Les séances de l'American Biograph se prolonge en 1898 :
CASINO DE PARIS Don Juan aux Enfers, grand ballet pantomime en 5 tableaux, Mlle Angèle Héraud, Mlle Clémence de Pibrac, The American Biograph, 16 tableaux. Dimanche et fêtes, matinées.
Le Constitutionnel, Paris, 1er janvier 1898, p. 4
Ce n'est qu'à l'occasion de la 200e de l'American Biograph que la presse glisse un entrefilet :
Samedi prochain, la direction du Casino de Paris, donnera une soirée de gala afin de fêter dignement la 200e exhibition de l'American Biograph.
À cette occasion, et ce soir-là seulement, il sera donné une séance extraordinaire de trente tableaux. Et M. E. Lauste, ex-assistant du célèbre inventeur T.-A. Edison de New-York, exécutera lui-même les projections monstres du Biograph.
La Fronde, Paris, 9 mars 1898, p. 4.
Dans un autre journal, une article donne quelques précisions complémentaires :
Comme le temps passe !
On la fait souvent, très souvent, cette réflexion, et à force, elle est devenue banale. Pourtant, tous les Parisiens l'ont trouvée justifiée, avant-hier matin, en lisant dans le Journal la deux centième exhibition du Biographe, et la soirée de gala annoncée pour samedi, c'est-à-dire pour demain,- au Casino.
Ainsi, depuis plus de six mois, le Biographe charme le public, et celui-ci reste, comme au premier soir, enthousiaste de l'appareil merveilleux. Avez-vous vu le Biographe ? Avez-vous vu ses nouveaux tableaux ? Voyez-les… revoyez-les... On n'entend que cela, partout.
Demain, et pour fêter la deux centième, séance extraordinaire : trente tableaux présentés par M. Lauste, qui fut l'un des meilleurs lieutenants d'Edison.
Le Journal, Paris, 11 mars 1898, p. 1
Eugène Lauste est le représentant de L'American Mutoscope & Biograph Company, pour l'exploitation de l'American Biograph. À la fin mars, la prense publie les dernières annonces :
Casino de Paris.-Tous les soirs, spectacle varié.-Don Juan aux Enfers, grand ballet-pantomime en 5 tableaux.-Mlles Angèle Héraud, Clémence de Pibrac, American Biograph, 16 tableaux. Matinées.
La Nation, Paris, 30 mars 1896, p. 4.
← 1897 Le cinématographe Lumière (Palais des Glaces, (1er janvier-31 mars 1898)
← 1897
Au Palais de Glace, les séances se prolongent au début du mois de janvier:
Le cinématographe Lumière n'est pas un des moindres attraits du Palais de Glace et ses projections constituent un agréable intermède aux exercices de patinage.
Parmi les tableaux qui ont le plus de succès, il convient de citer: la "Bataille de neige", une charge de cuirassiers, le défilé d'infanterie, l'assaut d'une mur par les Alpins, etc., etc.
Le Figaro, Paris, vendredi 7 janvier 1898, p. 5.
Les séances ont encore lieu dans les semaines qui suivent :
Aujourd'hui jeudi, à cinq heures, au Palais de glace des Champs-Elysées, pendant la séance de patinage, le cinématographe Lumière donnera une série de nouvelles vues. Le cinématographe fonctionne au Palais de glace tous les soirs, à dix heures, et les lundis, mercredis, jeudis, samedis et dimanches à cinq heures.
Le Figaro, Paris, jeudi 3 février 1898, p. 5.
La clôture est annoncée pour le jeudi 31 mars :
Ce soir jeudi, pour la clôture de la saison, grande fête de nuit au Palais de Glace des Champs-Elysées, avec concours de valse sur la glace. Trois prix seront réservés aux dames. Intermèdes de Miss Mary Walker, patineuse anglaise, et de Borg, champion suédois. Dernière représentation avec vues spéciale et nouvelles du Cinématographe Lumière, et jeu du Hockey par les membres du Bandy Club du Palais de Glace. Orchestre et Chœurs sous la direction de Félix Desgranges.
Le Figaro, Paris, jeudi 31 mars 1898, p. 1.
Le cinématographe Lumière (Restaurant coopératif des chantiers des Champs-Elysées, 9-10 et 14 janvier 1898)
Le commissaire général de l'Exposition offre plusieurs banquets aux ouvriers qui travaillent sur le chantier :
C'est ce soir que doit avoir lieu, au restaurant coopératif des chantiers des Champs-Elysées, le premier des deux banquets offerts aux ouvriers de l'Exposition. Ce banquet comprendra 600 convives, celui de demain 799.
Pendant le repas, une musique militaire se fera entendre. Après les liqueurs, une séance du cinématographe Lumière sera donnée aux convives.
Le Figaro, Paris, samedi 8 janvier 1898, p. 1.
Quelques jour plus tard un nouveau banquet est offrets aux travailleurs :
102.-Le commissaire général de l'Exposition a eu la louable idée d'offrir à ses ouvriers une série de banquets, au restaurant coopératif des chantiers des Champs-Élysées. Celui de vendredi dernier, dont nous donnons une vue, comprenait les travailleurs du pont Alexandre III, des bâtiments d'administration de l'avenue Rapp et des chantiers de démolition du Champs de Mars, 636 convives en tout. La vaste salle était décorée de drapeaux et de panoplies d'outils de toutes sortes. MM. Picard, commissaire généra; Bouvard, directeur des services d'architecture; Chardon, secrétaire général, et Legrand, secrétaire particulier, qui étaient arrivés avant l'heure fixée et avaient examiné l'organisation du banquet, parfaite du reste, ont longtemps circulé entre les tables. A six heures et demie, l'excellente musique du 104e de ligne, placée au milieu de la salle, entame les premières mesures de la Marseillaise. Les convives se lèvent et écoutent, tête nue, l'hymne national, qu'ils acclament frénétiquement. Puis le service commence. Une séance de cinématographe a suivi le dîner et terminé cette petite fête, au cours de laquelle, suivant la formule, la plus franche cordialité n'a cessé de régner.
L'Instantané, nº 8, Paris, 22 janvier 1898.
Le cinématographe Lumière (Automobile-Club de France, 27 janvier 1898)
Très peu d'informations sur la soirée organisée par l'Automobile-Club de France au cours de laquelle des vues animées sont proposés aux membres présents :
Hier au soir, grande soirée à l'Automobile-Club de France. M. Clément Maurice a donné une séance de cinématographe très réussie. De son côté, le professeur Jacob a émerveillé l'assistance par ses tours fort curieux.
L'Écho de Paris, Paris, 28 janvier 1898, p. 4.
L'intérêt pour l'automobile, dès les premières vues Lumière, laisse à penser que quelques unes ont peut-être été proposées.
The Royal Biograph des frères Normandin (Théâtre Moncey, juin-juillet 1898)
Après les déboires qu'il a connus avec son cinématographe "système Joly", Ernest Normandin se relance avec une nouvelle version qu'il baptise " The Royal Biograph ". C'est probablement au Théâtre Moncey qu'il est proposé pour la première fois au public. L'inauguration a lieu le 25 juin 1898 :
A partir de ce soir samedi, le théâtre Moncey commence les représentations de Bébé avec une partie de l'interprétation de Déjazet. Le spectacle sera complété par les nouvelles expériences du Royal Biograph de M.M. Normandin.
Le Petit Parisien, Paris, 25 juin 1898, p. 3.
Il est probable que désormais ce sont les deux frères Ernest et Edgard Normandin qui sont à la manœuvre. Un programme a été conservé qui nous permet de connaître le répertoire des films présentés.
V.C., Paris, Le Théâtre Moncey (début XXe siècle) | Théâtre Moncey, Programme, 25 juin-1er juillet 1898 © Collection Maurice Gianati |
La liste des vues animées est la suivante : L'Arroseur arrosé, L'Arrivée d'un train, Farce de chambrée, Sortie de N.-D. des Victoires, Scène de la Passion, Bataille de Fleurs, Garden-party à Londres, Charge de dragons, Deux minutes en ch. de fer, Quadrille des gommeux, Repas des phoques, Déjeuner de Pierrot, Marche au Calvaire, Arrivée du Président à l'Ambassade de Russie, Le Supplice, Courses d'automobiles, Cavalcade des étudiants, Assaut d'armes Pini-Kirschoffer, Charge oblique de cavalerie, Bain de la parisienne. Il existe une homogénéité dans la programmation puisque l'on retrouve les films de la collection Joly-Normandin. Le programme par ailleurs signale bien que seules 6 séances sont prévues. Ce qui coïncide d'ailleurs avec la dernière annonce publiée dans la presse (L'Intransigeant, Paris, 2 juillet 1898, p. 4..
The Royal Biograph (Le Trianon, août 1898)
C'est au cours de l'été 1898 - la presse n'offre qu'une seule information - que The Royal Biograph est présenté dans le jardin du Trianon pendant les entractes de la revue Allons-y.
Voulez-vous, par ces fortes chaleurs, passer une fraîche soirée ? En ce cas, rendez-vous au Trianon, où Allons-y ! la revue centenaire, se joue dans le plus délicieux jardin que l'on puisse imaginer. C'est évidemment là l'endroit où l'on respire le mieux à Paris, sous les grands arbres en pleine frondaison ; aussi le public élégant a-t-il adopté Trianon au nombre de ses lieux de réunion favoris. Pendant les entr'actes, gros succès pour le "Royal biograph", un nouvel appareil américain beaucoup plus puissant et plus net que ce qui a été fait jusqu'à présent en ce genre. |
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Gil Blas, Paris, 24 août 1898, p. 4. |
René Péan, Théâtre Trianon, Allons-y ! Revue à grand spectacle, 1898, imp. Chaix |
La revue connaît un très grand succès et le Royal Biograph ne semble avoir été rajouté, au spectacle, qu'en août pour quelques jours. Par ailleurs, rien de plus. Ni les films projetés, ni le nom de l'opérateur.
The Royal Biograph (Casino de Paris, septembre 1898-31 décembre 1898) → 1899
The Royal Biograph des frères Normandin va faire une nouvelle apparition - bien plus longue - au Casino de Paris à l'occasion d'un renouvellement du programme, le 1er octobre 1898. L'appareil va présenter, annonce-t-on, douze vues inédites :
Ce soir, au Casino de Paris, débuts :
A.-Joueurs de Polo à bicyclette, par le capitaine Gorhams et son équipe.
B. Royal Biograph, douze tableaux inédits : les brûleurs d'herbe ; un bateau en pleine mer ; l'ascension du sommet du Diable ; une tempête en mer ; un voyage en chemin de fer dans les Alpes ; les policemen à Chicago ; une bataille entre femmes ; combat de coqs ; abattage d'un arbre ; les laveuses : les pigeons de Venise sur la place Saint-Marc ; un voyage sur le Nil.
C.-Mlle Larive dans son répertoire.
Gil Blas, Paris, 1er octobre 1898, p. 4.
Même s'il est question de " douze tableaux inédits ", on a du mal à ne pas retrouver de façon homogène des films Lumière qui datent déjà, pour certains de 1896. Le public a-t-il déjà oublié ces vues qui sont passées dans de nombreux cinématographes ? Toujours est-il que les vues des inventeurs lyonnais circulent encore. À l'occasion d'un nouvel article, on apprend le renouvellement des vues et certains titres, ici encore, rappellent ceux des films Lumière :
Pour la grande fête de nuit de ce soir, au Casino de Paris, il y aura renouvellement complet des tableaux du Royal Biograph.
Et parmi les principaux, les plus sensationnels, nous pouvons d'ores et déjà citer :
Le débarquement à Santiago ; les Pyramides d'Egypte ; le Lancement d'un navire ; les Fardiers, etc., etc.
Je le répète, c'est la vie même que nous sert, par tranches, le Royal Biograph.
Ensuite nous aurons la lutte acharnée des joueurs de polo, les deux teams s'efforcent chacun d'enchaîner la victoire. Le capitaine Gorhams et ses compagnons passionnent la foule une fois de plus.
Enfin les Russes, la troupe de Mme Ivanowa pour laquelle il faut se hâter, si on veut l'entendre à nouveau avant son prochain départ.
Gil Blas, Paris, 22 octobre 1898, p. 4.
Le Royal Biograph ne constitue malgré tout qu'un adjuvant aux autres spectacles et l'on peut constater que sur l'affiche qui annonce le ballet-pantomime d'Angèle Héraud, seul figure par ailleurs le " Polo à Bicyclette "
Le match de samedi dernier au Casino de Paris, entre les deux teams du cap. Gorhams et du cap. Jacks, a réussi au-delà de toute espérance, et les plus difficiles sportsmen se sont déclarés tout à fait satisfaits. De la part du public, c'a été le plus fol enthousiasme, au point que peu s'en est fallu que les cyclistes ne fussent portés en triomphe à l'issue de la lutte. Devant ce succès, la direction du Casino a résolu d'organiser pour demain mercredi, un second match, lequel ne peut manquer d'offrir autant d'intérêt que celui de samedi dernier. Incessamment, le Royal Biograph donnera la représentation d'une scène sportive susceptible de provoquer le plus vif engouement. Il ne s'agit pas cette fois de cyclisme, mais d'un aute sport qui compte tout autant de fidèles. Enfin, un troisième sport, le plus galant de tous, consiste à applaudir les jolies interprètes, Angèle Héraud en tête, du ballet Madame Malbourck, un bijou... |
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Plumerau, Casino de Paris. Madame Malbrouck, grand ballet-pantomime en 4 tableaux. Angèle Héraud. Tous les soirs le polo à bicyclette, octobre 1898 © BNF |
Gil Blas, Paris, 22 novembre 1898, p. 4. |
The Royal Biograph, même s'il apparaît toujours dans les semaines et les mois qui suivent, ne va plus guère faire parler de lui. On doute d'ailleurs de la variété des vues puisque en novembre on peut lire : " Donner, nettement reproduites, les rives du Nil et les abords de Fachoda, la rencontre, à Péterhof, du czar Nicolas et du président Faure, le carrousel de Saumur avec le cadre noir. tel est le prodige que réalise tous les soirs, au Casino de Paris, le Royal Biographe. Il est vrai que l'enthousiasme du public, toujours grandissant, vient récompenser le zèle des opérateurs. " (Gil Blas, Paris, 8 novembre 1898, p. 4). Les séances se poursuivent jusqu'à la fin de l'année et au-delà.
→ 1899
L'American Biograph (Folies-Bergère, 4 octobre-31 décembre 1898) → 1899
Le dynamique Édouard Marchand va installer un appareil cinématographique, l'American Biograph, diffusé par l'American Mutoscope & Biograph Company dont le responsable, en France, est Eugène Lauste :
M. Marchand trouvait sans doute que le programme des Folies-Bergère, déjà si complet, n'était pas encore comme il le rêvait, car il vient d'y ajouter un numéro sensationnel : c'est l'"American biograph", qui.eut un si prodigieux succès sur une autre scène parisienne.
Perfectionné encore, sans trépidations ni vibrations, l' "American biograph" présentera, dès mardi prochain, au public des Folies-Bergère, une série de tableaux, parmi lesquels une reproduction fidèle des épisodes de la guerre hispano-américaine, avec les flottes des deux nations se livrant un suprême combat.
Le Figaro, Paris, vendredi 30 septembre 1898, p. 4.
La presse précise quelques jours plus tard le contenu du programme :
Le gros succès de l'American Biograph, unanimement constaté par la critique, est confirmé chaque soir par nombreux public des Folies-Bergère qui se délecte littéralement aux tableaux émouvants ou comiques qui défilent sous ses yeux. Tous sont parfaits ; mais l'un d'eux doit être mis hors de pair, c'est le Débarquement des troupes américaines à Cuba, d'un effet d'autant plus saisissant qu'il est la reproduction même du plus grave et du plus sanglant événement de la guerre hispano-américaine. Ce tableau vaut à lui seul une promenade aux Folies-Bergère.
Le Petit Parisien, Paris, 14 octobre 1898, p. 3.
Les annonces concernant les films proposées restent assez limitées et n'offrent que peu d'informations :
[...] C'est aussi demain que l' "American Biograph" présentera ses tableaux nouveaux ; on dit que le branle-bas de combat à bord du Viscaya et l'Incendie d'une ferme sont du plus saisissant effet.
Gil Blas, Paris, 17 décembre 1898, p. 4.
Les séances se prolongent jusqu'à la fin de l'année et au-delà.
→ 1899
Le Cinématographe du Dr Doyen (Hôtel des Sociétés savantes, 21 octobre 1898)
Le docteur Eugène Doyen, célèbre chirurgien controversé, a eu l'idée de faire filmer ses opérations par un cinématographe. Ce sont Clément-Maurice et Ambroise-François Parnaland qui. quelques mois au préalable, ont tourné les premiers vues de ce type. C'est à l'Hôtel des Sociétés Savantes, que Doyen donne sans doute sa première conférence en France. Le Petit Journal en fait un compte rendu remarquable que nous transcrivons, dans son intégralité, ci-après :
La chirurgie au cinématographe
Le docteur Doyen faisait à Paris, hier soir, en l'hôtel des Sociétés savantes, rue Serpente, une conférence sur " l'Enseignement de la chirurgie ", avec projections cinématographiques. La grande salle des conférences avait été envahie dès cinq heures, et pour entendre l'éminent praticien, il n'y avait pas que des professionnels et des étudiants mais aussi tout un groupe de mondains et d'élégantes attirés par cette mise en scène nouvelle du drame d'amphithéâtre.
Au milieu de la salle est installé le projecteur du cinématographe ; quand le professeur Doyen prend la parole, toutes les lumières s'éteignent; seules les deux lampes électriques du projecteur brûlent devant le conférencier, mais le professeur reste dans la pénombre et sa voix semble ainsi plus nette; plus incisive; dans le silence respectueux de l'auditoire attentif.
Après un rapide exposé de quelques découvertes chirurgicales récentes, le professeur Doyen parle d'opérations délicates, exceptionnelles, qu'il a dû faire, et tandis qu'il parle, soudain, sur un écran, des images apparaissent. Agrandies, devenues énormes sur l'écran, les mains habiles du chirurgien taillent, pincent, cousent, écrasent des chairs. Ce ne sont encore que des reproductions partielles, fixes.
Voici qu'il est question d'une opération grave, réputée, il y a peu de temps, impraticable, et tandis que la voix décrit le siège et la gravité du mal, explique les difficultés à vaincre, sur l'écran se fixe la scène de l'opération : le docteur Doyen examine la patiente, ses aides sont là et dans le fond deux religieuses immobiles. Et le cinématographe mis en mouvement, subitement toute l'opération se déroule ; les profanes sont haletants, saisis d'admiration aussi pour la sûreté, la rapidité d'exécution.
Le spectacle est d'autant troublant que, par instants, la parole du conférencier suit le geste reproduit, le commente, , et donne une vie complète à l'image photographique.
A un moment donné l'opérateur ne trouve pas sous sa main une aiguille à suture, dont il a besoin et qu'on a négligé, de lui préparer.
Le cinématographe reproduit un mouvement d'impatience ; on devine l'exclamation qui doit sortir.de la bouche du professeur : le conférencier ne la reproduit pas ; il déclare ne pas vouloir s'en souvenir, mais l'image est si vivante que, sur les lèvres, les assistants ont vu le juron échappé au praticien.
Toute cette conférence a produit une profonde impression et cette application nouvelle du cinématographe va aider puissamment à la propagation du haut enseignement scientifique.
Le Petit Journal, Paris, 22 octobre 1898, p. 1.
Nous avons là une description précise qui nous permet d'avoir une idée exacte du projet pédagogique du docteur Doyen.
Les salons de mutoscopes (1, boulevard des Capucines/27, boulevard Poissonnière/9, boulevard Saint-Denis/100, boulevard Richelieu, <12 novembre->29 décembre 1898)
De façon simultanée, plusieurs salons de mutoscocopes fonctionnent en différents lieux de la capitale : 1, boulevard des Capucines 27, boulevard Poissonnière, 9, boulevard Saint-Denis et 100, boulevard Richelieu. Ces appareils américains - qu'il ne faut pas confondre avec des cinématographe - permettent à un spectateur unique de voir défiler des vues qui s'animent grâce à un système de rotation. L'un de ces salons au moins, celui qui est situé 9, boulevard Saint-Denis, est directement lié à l'American Mutoscope and Biograph Company :
Des nombreuses attractions qui sillonnent nos grands boulevards, il en est une qui surpasse l'idéal et mérite par son succès considérable l'attention de nos lecteurs, nous voulons parler du « mutoscope », de l'inventeur américain M. Hermann Cassler [sic], qui fonctionne déjà dans les plus grandes villes de l’Amérique, l'attraction est tellement irrésistible qu'il faut réellement s'en rendre compte soi-même pour le croire, le spectateur voit défiler successivement devant lui des centaines de photographies prises pendant des fractions de seconde et qui sont reproduites avec une telle fidélité qu'il croit ne voir que la continuité d'une seule et même scène. Aussi peut-on y conduire les bébés qui verront se dérouler sous leurs yeux les merveilles du « Mutoscope » dont les appareils sont installés 1, boulevard des Capucines, 27 boulevard Poissonnière, 9 boulevard Saint-Denis, 100 rue Richelieu.Le Matin, Paris, 12 novembre 1898, p. 3.
Le Matin, Paris, 12 novembre 1898, p. 3.
Les salons à peine ouverts, un long article est consacré à la nouveauté. Le journaliste Eugène Tavernier propose une longue réflexion dont la première partie permet d'avoir une idée des vues proposées dans les mutoscopes et l'ambiance qui entoure les lieux. Pour le reste, dans sa seconde partie, il s'agit d'un discours moralisateur et excessif d'un intérêt tout relatif :
LE MUTOSCOPE
L'appareil désigné par ce nom latino-grec est simple d'aspect et de construction. On dirait plus ou moins la boîte métallique d'un compteur à gaz. En arrière, une ouverture y fait pénétrer l'éclairage ; en avant, deux verres grossissants permettent d'observer l'intérieur où des photographies instantanées se succèdent rapidement comme s'effeuille un cahier de papier sous la pression de l'ongle. La manivelle placée au dehors et que tourne chaque spectateur met en marche le mécanisme, rendu libre par la chute d'une pièce de dix centimes. On a, pendant une minute, la vue d'une scène animée.
Très animée même, selon la formule inscrite à l'extérieur, sous une photographie qui indique le caractère du sujet représenté. Le titre est imprimé, non seulement en français, mais aussi en anglais. D'avance, l'amateur de curiosités est sûr d'en avoir largement pour ses deux sous.
Plus de vingt boîtes sont ainsi disposées dans une salle grande ouverte sur le trottoir. Il y a bien deux ou trois sujets qui n'ont rien d'inconvenant. Les autres s'appellent le cabinet particulier, le dortoir des jeunes filles, une partie de jambes, le peintre du nu, etc. On y voit les femmes en chemise qui font le poirier. Gaudriole, polissonnerie, déshabillage, pornographie, chahut, ce grand chahut qui est le triomphe de nos cafés-concerts et qui met en fièvre le public hennissant.
Mais ici, pas de clameurs. Les gens, qui stationnent devant le mutoscope ne sont pas des habitués des lieux où s'épanouit la bête de luxure. La plupart sont entrés à l'improviste, interrompant un moment leur course. Hier, jour de promenade, des familles qui n'avaient eu d'abord que l'idée de prendre l'air étaient attirées par l'encombrement et venaient voir ce que d'autres curieux regardaient. Tout au plus, on entendait, de loin en loin, l'éclat de rire aigu ou bien rauque qui décèle chez la femme la sensation malsaine, à la fois honteuse et hardie. L'impression de la foule en disait bien plus que les titres des photographies animées. Le regard brillant, les joues rouges, des jeunes femmes et des fillettes passaient d'un appareil à l'autre. Parfois, le mari ou le père, goguenard, gêné ou stupide, protégeait ce va-et-vient, mais beaucoup de spectatrices circulaient seules. Des gamins et des gamines se hissaient sur la pointe des pieds et s'accrochaient par les mains pour avoir leur part du divertissement.
Invention récente, le cinématographe est tombé très vite dans l'obscénité. C'était d'abord un plaisir original, grâce à la rapide succession des images qui met en relief certains détails souvent inaperçus dans la vie réelle. L'arrivée d'un train, une partie de cartes, le défilé d'une troupe, un exercice d'agilité ou le simple grouillement de la foule frappaient l'esprit comme les yeux. Bientôt les entrepreneurs de spectacles ont pratiqué les exhibitions suspectes. Ils ont adopté les couchers, mis à la mode sur de sales tréteaux. Par le mutoscope, cet attrait est installé presque dans la rue.
Sans doute, nos rues sont de plus en plus livrées aux débauches des dessinateurs. Après les paysages coloriés, dont certains étaient des œuvres d'art, le tableau parlant et hurlant s'est étalé comme un triomphateur. Toutes les murailles utilisées pour l'affichage présentent une invraisemblable collection de chahuteuses. L'autre jour, on a placardé un immense papier où s'épanouit une ivrognesse qui semble sortir du lupanar. Le crime prend ses ébats en plein jour. Le vice s'en donne au point de ne plus savoir quelle audace imaginer.
Est-ce que c'est décidément l'art français et la moralité française ? Nous allons droit aux habitudes pompéiennes. Les explorateurs s'exclamaient de surprise et de confusion en découvrant sous la cendre, les fresques et les bijoux qui proclamaient les turpitudes d'une population déchue. Est-ce que nous acceptons cette honte suprême ? Est-ce que les objets jusqu'ici, enfermés dans les musées secrets ont conquis leur place au soleil ? Est-ce que le lupanar a pris définitivement possession de la rue ?
Les vieux Romains, qui n'étaient cependant pas très susceptibles, se sont attristés, devant les insolences de la débauche. Tacite a rappelé avec tristesse les temps primitifs où les enfants, gardés par la mère ou par une vieille parente, n'apprenaient rien de honteux, rien qui pût blesser l'honneur : coram qua neque dicere fas erat quod turpe dictu, neque facere quod inhonestum factu videretur.
Horace, pourtant peu exigeant, s'est senti attristé par la corruption qui atteint l'âme de la jeune fille :
Molus doceri gaudet Ionicos
Matura virgo et fïngitur artibus.
Voici deux ou trois ans, M. Clémenceau, sortant d'un café-concert et témoin de la vogue qu'ont prise sur la scène les danses de femmes en chemise, concluait que " nous nous enfonçons dans le crétinisme le plus abject ". Parfois, M. Sarcey lui-même a des révoltes.
Ne peut-on protester contre la frénésie de luxure sans s'attirer l'hypocrite raillerie empruntée de Molière :
Par de pareils objets les âmes sont blessées
Et cela fait venir de coupables pensées.
C'est Tartuffe qui le dit, mais le public, comme Molière, a bien compris l'avantage, que le vice peut tirer d'une attitude ridicule donnée à la pudeur. Il n'y a pas que Tartuffe qui soit hypocrite ; et bien des gens qui le condamnent n'ont d'autre désir que de mettre à l'aise leurs instincts sous le nom d'une prétendue franchise, plus perfide encore.
Sinon, qu'on l'avoue, puisqu'on invoque la franchise. Que la police cesse de saisir... tous les trois ou quatre ans, les photographies obscènes et les cartes transparentes ; qu'il soit entendu que le café-concert, capable de dégoûter MM. Sarcey et Clémenceau, offre le type de la morale sociale et doit régner dans la rue, attirant pour deux sous, par ses portes grandes ouvertes, la curiosité des jeunes filles et des enfants. Quant aux suites d'un tel enseignement, il n'y à pas besoin de rien décider: elles viendront toutes seules.
Eugène TAVERNIER. L'Univers, Paris, 16 novembre 1898, p. 1.
Quelques semaines plus tard, le chroniqueur scientifique, Henri de Parville, va consacrer un long article, bien plus mesuré et technique, à cet appareil qui s'installe à Paris :
On trouve en ce moment sur les boulevards, au milieu des boutiques du jour de l'An, de petits appareils sur lesquels apparaît le mot « Mutoscope ». On met 10 centimes dans la fente du mutoscope, on tourne une manivelle située sur le côté et l'on met les yeux aux oculaires. Qu'est-ce qu'on voit ? C'est amusant, puisque le public s'arrête et tourne la manivelle avec entrain.
Le mutoscope, c'est tout bonnement un cinématographe populaire réduit à sa plus simple expression et qui, pourtant, donne très bien l'illusion du mouvement. On assiste à des scènes comiques ou autres, tout comme avec le kinétoscope d'Edison, bien oublié déjà, ou avec le cinématographe, si perfectionné depuis quelques années.
Le résultat est obtenu par des moyens très simplifiés. Ce n'est plus une bande pelliculaire qui, ici, se déroule devant les yeux. On se souvient, sans doute, du cinématographe de poche vendu en 1897 par les camelots. Il s'agissait d'un petit livre, sur chaque, feuillet duquel était représentée une image. Il suffisait de faire défiler rapidement, d'un coup de pouce, les feuillets, pour voir un enfant sauter à la corde, un scieur do bois couper des cotrets, une danseuse pirouetter à perte d'haleine, etc. On a repris l'idée en Amérique, en perfectionnant le système. On a groupé, non plus une cinquantaine de feuillets, mais bien un millier, autour d'un axe horizontal. C’est une roue de feuillets, sur lesquels sont dessinés des objets ou personnages dans toutes les différentes phases successives du mouvement : par exemple, deux amateurs faisant des armes. Ces feuillets sont enfermés dans une boîte ronde ; l'axe qui les porte sort de la boîte et il n'y a qu'à faire tourner la manivelle pour obtenir l'illusion du mouvement. Le spectateur regarde par deux ouvertures correspondantes à ses yeux, et il aperçoit les deux escrimeurs ferrailler, tromper le contre, dédoubler, parer en quarte, etc. Les différents mouvements sont vraiment très bien reproduits.
On pourra ensuite ; sans grand effort d'imagination, faire du mutoscope un très joli jouet de salon. Tel qu'il apparaît en ce moment sur les boulevards, il est un peu plus complexe, parce qu'il doit recevoir de l'argent et ne se mettre en marche que lorsqu'il a été payé. Le mécanisme rappelle celui de tous les distributeurs automatiques. Quand la pièce de 10 centimes tombe dans l'appareil, elle fait trébucher un doigt qui déplace un levier, lequel déclenche une crosse engagée dans une encoche ; cette crosse empêchait le système de fonctionner. Aussitôt dégagé, l'axe des feuilles est libre de tourner et la manivelle l'entraîne. Le défilé commence. Quand c'est fini et que l’on a vu toute la série des images, la crosse, qui avilit suivi le mouvement sur une rainure circulaire, se retrouve à son point de départ et retombe dans l'encoche. La manivelle tourne à vide ; on en a pour ses 10 centimes. Ce mutoscope a du bon par sa simplicité même. C'est une des nouveautés de l'année qui s'en va. Il convient d'ajouter qu'il pourra être utilisé dans l'enseignement, parce que, comme on est relativement maître de faire tourner la manivelle plus ou moins vite, on peut s'arrêter, aller doucement et étudier la genèse des mouvements, les analyser et bien se rendre compte des effets produits : utile dulci.
Journal des débats politiques et littéraires, Paris, 29 décembre 1898, p. 2.
Il est très probable que ces appareils fonctionnent pendant de longs mois.
Le Cinématographe (Eglise Saint-Germain-des-Près, 26 novembre 1898)
À l'occasion d'une projection organisée pour des élèves dans l'enceinte de l'église Saint-Germain-des-Près :
LE CINÉMATOGRAPHE
Paris, 26 nov.-A l'occasion de la Sainte-Catherine, une centaine de fillettes, accompagnées par des religieuses et des maîtresses de divers pensionnats, étaient réunies, cette après-midi, dans l'enceinte de l'église Saint-Germain-des-Prés, à Paris, pour assister à une séance de cinématographe.
Au cours de la représentation, la lampe dont se servait l'opérateur s'est éteinte. Une légère panique s'ensuivit.
Malgré les exhortations des maîtresses de pension, les enfants se bousculèrent pour sortir; une fillette de douze ans tomba et fut foulée aux pieds par ses compagnes. Quand on la releva, on constata qu'elle n'avait heureusement ni blessures ni contusions.
Le Patriote des Pyrénées, Pau, dimanche-lundi 27-28 novembre 1898, p. 1.
La conférence du docteur Léon Bonnet (Faculté de Médecine, 17 décembre 1898)
Entre le docteur Doyen et le docteur Bonnet, une claire rivalité s'est instaurée au cours de l'année 1898. Chacun revendiquant son rôle dans l'utilisation du cinématographe en chirurgie. Si le premier parvient à le coiffer sur le fil, avec sa conférence, en octobre, le second va se démarquer afin d'éviter le caractère spectaculaire des démonstrations de Doyen. Il donne, d'ailleurs, sa conférence dans un lieu très symbolique, à savoir, la Faculté de Médecine, le samedi 17 décembre 1898 :
Le Triomphe de la Cinématographie
On a beaucoup parlé du grand événement de samedi dernier à la Faculté de médecine. Le Tout-Paris y avait été gracieusement invité par M. le docteur Léon Bonnet à venir voir couper une jambe et un bras. L'opération n'a pas été faite en nature, ce qui n'eût pas manqué d'attirer sur le vaillant médecin les foudres de la censure médicale, mais par l'intermédiaire du cinématographe ou, plutôt, du chronophotographe, car si le premier nom s'applique à l'instrument de plaisir bien connu des boulevardiers, le second se rapporte exclusivement à l'appareil scientifique inventé depuis plus longtemps par M. Marey pour l'étude et la décomposition du mouvement.
La conférence du docteur Léon Bonnet a prouvé définitivement que la chronophotographie est destinée à constituer une méthode d'enseignement et d'observation incomparable chacun a pu y voir, avec une netteté et une fixité donnant sur l'écran l'illusion absolue de la vie réelle, le jeune opérateur, M. Rebreyend, entailler les chairs, retrousser le lambeau nécessaire à couvrir le moignon, trancher les ligaments, rabattre le lambeau et emporter la jambe avant que, grâce à l'hémostase, une seule goutte de sang se soit écoulée. De même pour le bras, mais ici la séparation ou plutôt, pour employer le mot scientifique, la désarticulation du membre, est toujours plus difficile et la seconde opération, au lieu des quarante-cinq secondes nécessaires à la première, a duré une minute entière, un siècle pour les belles mondaines attirées par la curiosité à l'amphithéâtre, mais rendues haletantes par l'émotion d'un premier début !
Ce qui, devant un public de médecins ou d'étudiants, peut rendre un pareil spectacle instructif au plus haut point, c'est la possibilité d'arrêter à loisir l'appareil pour bien montrer la position du couteau, de l'opérateur et de l'opéré à chaque phase de l'opération, et la faculté de réitérer la démonstration à loisir, sans avoir à se procurer un nouveau malade, ou s'il s'agit simplement de médecine opératoire un nouveau cadavre.
A.R.
Le Gaulois, Paris, 24 décembre 1898, p. 6.
L'article se positionne clairement dès les premières lignes. On n'est pas du côté du spectaculaire et du cinématographe - sous-entendu, du côté du Dr. Doyen - mais de celui du chronophotographe et de Marey, et donc de la science. Si le nom de l'opérateur ne nous est pas parvenu, l'appareil pour sa part peut faire songer à Demenÿ ou Gaumont. En outre, deux films sont présentés au public, le premier une amputation d'une jambe, le second l'amputation d'un bras. Il s'agit là d'une conférence à caractère unique, car nous ne connaissons pas, par la suite, d'autres présentations de vues chirurgicales de ce type. Léon Bonnet semble avoir renoncé à utiliser le chronophotographe par la suite, ou bien a-t-il jugé bon de ne plus en parler publiquement.
1899
← 1898 Le cinématographe Lumière du Grand-Café (14 boulevard des Capucines, 1er janvier-31 décembre 1899) → 1900
Cinématographe Lumière. Grand Café, Programme, 8 avril 1899
Source: Bibliothèque Historique de la ville de Paris (4-DEP-004-095)
← 1898 Le cinématographe Lumière des Grands Magasins Dufayel (13 boulevard Barbès, 1er janvier-31 décembre 1899) → 1900
← 1898
Les projections continuent dès le début de l'année :
A l'occasion des fêtes du mardi gras, exposition de mobiliers complets, par milliers, toujours prêts à être livrés; attractions diverses: les rayons X et le cinématographe Lumière, dans les Grands Magasins Dufayel. Seule maison expédiant franco d'emballage dans toute la France, quels que soient le poids ou le volume des articles achetés.
La clinique des rayons X est ouverte au public tous les jours, de neuf heures à midi, le mercredi, gratuitement.
Le Figaro, Paris, jeudi 9 février 1899, p. 5.
De nouvelles expériences scientifiques sont présentées en mars :
Aux grands magasins Dufayel :
Tous les jours, en semaine, de 2 heures à 5 heures ; le dimanche, de 9 heures à 11 heures du matin,.
Lès nouvelles Conquêtes de la Science : répétition des expériences présentées au centenaire des arts et métiers avec les puissants appareils Radiguet. Le Téléphone haut parleur Dussaud : Le Cinématographe Lumière, scènes animées et parlées avec imitation parfaite des bruits, de l'eau, du pas des hommes et des chevaux, du roulement des attelages, du crépitement de la fusillade, du grondement du canon, des musiques militaires, des trompes de chasse, des chants, etc., etc., par le Stentor.
Nul doute qu'il n'y ait foule pour applaudir les petites perles musicales qui sont au programme.
Le Figaro, Paris, lundi 20 mars 1899, p. 5.
→ 1900
← 1898 Le Kinétographe du Théâtre Robert-Houdin (8 boulevard des Italiens, 1er janvier-31 décembre 1899)
← 1898
Les annonces disparaissent et ce n'est que de façon épisodique que l'on sait que des spectacles sont encore organisés :
Le théâtre Robert-Houdin reprendra ses matinées du dimanche et du jeudi à partir du dimanche 3 septembre, avec l'intéressant programme de M. Carmelli, l'habile illusionniste.
Tous les soirs, exhibitions des merveilleuses vues animées de M. Méliès, uniques en leur genre.
La France, Paris, jeudi 31 août 1899, p. 3.
← 1898 L'American Biograph (Folies-Bergère, 1er janvier->1er juin 1899)
← 1898
Les séances de l'American Biograph se prolongent au cours de l'année 1899. Si les annonces ne varient guère, il arrive parfois que l'on signale des tournages de vues animées :
Les principales scènes de Parisiana-Revue ont été jugées dignes de passer à. la postérité ; elles ont été, en effet, reproduites par l'Américan Biograph et vont faire la joie du nouveau continent. C'est même la première fois qu'on a pu prendre des cinématographies à la lumière artificielle.
Demain, en matinée, la revue avec tous les interprètes.
Le Figaro, Paris, 4 février 1899, p. 4.
C'est également le cas pour le tournage une vue représentant le Président de la République :
Avec une rapidité prodigieuse, l'American Biograph a pris hier, à la sortie du Congrès de Versailles, le tableau représentant le départ du nouveau Président de la République. Par un tour de force incroyable, le tableau dès ce soir défilera sous les yeux des spectateurs des Folies-Bergère. L'American Biograph a fait cette prise avec une grande habileté et l'attraction qu'il présente aux Folies-Bergère est de tout premier ordre.
Le Figaro, Paris, 19 février 1899, p. 4.
La publicité de l'American Biograph se centre surtout sur les nouvelles vues tournées et la rapidité, "la célérité américaine", de leur présentation :
Le record de la rapidité est sans contredit détenu par l'Américan-Biograph des Folies-Bergère. Hier soir dimanche il faisait défiler devant une salle comble à crouler tous les épisodes du Grand Prix du Président de la République. Prendre donc vue à trois heures, la faire passer à onze heures devant le public, c’est bien là le comble de la célérité même américaine.
Le Soleil, Paris, 3 avril 1899, p. 4.
C'est également le cas pour le retour du commandant Marchand :
Le comble de la célérité, bien américaine :
L'Américan Biograph fera défiler, ce soir, aux Folies-Bergère, le débarquement du commandant Marchand, à Toulon. C'est donc avant son arrivée à Paris que la foule élégante qui, chaque soir, fréquente au music-hall de la rue Richer, pourra saluer le héros de Fashoda.
Le Petit Journal, Paris, 31 mai 1899, p. 4.
Les vues cinématographiques, à peine, tournées sont présentées aux Folies-Bergère :
Ah ! les photographes !
Ils surgissent de tous côtés ; ils vous visent, vous obsèdent, vous turlupinent... C'est à leur envoyer des coups de canne dans l’objectif !
Signalé tout particulièrement parmi ces chevaliers de la chambre noire : Paul Rousseau qui cumule le Kodak avec les fonctions de juge à l’arrivée ; Fordyce, très sélect et hermétiquement ganté ; Raffaele, Beau, toute la lyre des professionnels.
Dans un coin, l’American Biograph sévit avec fureur et l’opérateur me communique un tuyau sensationnel : demain soir, il donnera aux spectateurs des Folies-Bergère la primeur des courses d’artistes cinématographiées.
C’est égal, si la postérité manque de documents l...
Journal des sports, Paris, samedi 3 juin 1899, p. 2.
Répertoire (autres titres) : [le soir même des] funérailles du président Félix Faure [le tableau pris quelques heures plus tôt défilait au milieu des acclamations respectueuses du public] (Gil Blas, Paris, 25 février 1899, p. 1).
← 1898 The Royal Biograph (Casino de Paris, 1er janvier-> 13 mars 1899)
← 1898
The Royal Biograph va rester à l'affiche du Casino de Paris jusqu'au 13 mars, date de la dernière mention de l'appareil dans la presse (La France, Paris, 13 mars 1899, p. 4).
Les vues animées de la Compagnie des Wagons Lits (3, Place de l'Opéra, 1899)
Félix Mesguich, engagé par la Compagnie des Wagons Lits, va tourner une série de films en France. Ces vues animées sont projetées au siège de la Compagnie, 3, place l'Opéra, au début de l'année 1899 d'après le témoignage du cinématographiste :
Ainsi au début de l'année 1899, l'écran en plein air de la Compagnie des Wagons-Lits, place de l'Opéra, put refléter le visage animé de quelques coins de la terre de France.
Félix Mesguich, Tours de manivelle, Paris, Grasset, 1933, p. 30.
En l'absence de documents faisant foi, nous ignorons précisément pendant quelle période ces projections ont eu lieu.
Le cinématographe Lumière de la Salle Wagram (<26> février 1899)
Un cinématographe Lumière fonctionne au Wagram-Concert en février :
Wagram-Concert possède cette semaine un programme des mieux composés.-Ninon de Verneuil la fine diseuse, une excellente troupe de concert, de nombreuses attractions et les intéressants tableaux du cinématographe Lumière justifient la faveur dont jouit actuellement le music-hall de la salle Wagram.
Victor Roger.
Le Petit Journal, Paris, dimanche 26 février 1899, p. 3.
Le cinématographe d'Eugène Pirou (13, boulevard Bonne-Nouvelle, 2->2 mars 1899)
Eugène Pirou présente son film sur les obsèques du président Félix Faure sur le boulevard Bonne-Nouvelle:
Les personnes qui n'ont pu voir le défilé aux obséques de Félix Faure vont pouvoir satisfaire leur curiosité, si elles ont envie d'assister à la promenade du cortège funèbre.
En effet, Eugène Pirou, le sympathique photographe du boulevard Saint-Germain, a cinématographié le défilé en dix films, formant ensemble une longueur de deux cents mètres. Cet intéressant spectacle va être visible tous le sjours et tous les soirs, 13, boulevard Bonne-Nouvelle, à partir de jeudi prochain.
L'Intransigeant, Paris, 27 février 1899, lundi 27 février 1899, p. 3.
Le Cinématographe de Raoul Grimoin Sanson (2 Passage Dareau, 8 avril 1899)
Raoul Grimoin-Sanson organise une projection de vues animées pour l'Association amicale du quartier de ls Santé :
Association amicale du quartier de la Santé, passage Dareau, 2.-Samedi 8 avril, à neuf heures précises du soir, conférence sur les "Procédés et appareils chromophotographiques"; projections cinématographiques animées en couleur par l'inventeur Grimoin Sanson, ingénieur. Deuxième partie: concert de famille donné par les membres de l'Association.
L'Intransigeant, Paris, samedi 8 avril 1899, p. 3.
Le Phonorama de l'Olympia (Sous-sol de l'Olympia, 21 avril-[octobre] 1899)
Le phonorama de Berthon, Dussaud et Jaubert va s'installer au sous-sol de l'Olympia, lieu qui a accueilli d'autres appareils cinématographiques. Il s'agit ici d'un nouveau système qui associe le son et l'image. C'est Le Journal qui le premier annonce l'arrivée prochaine de cet appareil tout à fait nouveau :
Nous apprenons que dans les vastes sous-sols de l'Olympia, une exploitation d'un grand intérêt scientifique va commencer vendredi prochain.
Il s'agit d'un nouvel appareil breveté appelé le cinémicrophonographe qui donne, avec des projections en couleurs et animées, une audition de la parole, des chants, de la musique et de différents sons se rapportant avec un synchronisme parfait aux scènes représentées.
Cette invention est certainement appelée au plus grand succès.
Le Journal, Paris, 12 avril 1900, p. 4.
C'est en effet le vendredi 21 avril qu'a lieu l'inauguration du Phonorama :
Le Phonorama a fait, hier, des débuts retentissants dans les sous-sols de l'Olympia. C'est un appareil véritablement merveilleux qui fait, par un ingénieux système, passer devant les yeux des spectateurs des photographies animées en couleur et de grandeur naturelle. Les personnages représentés dont la musique accompagne les mouvements joignent les paroles aux gestes. On a l'illusion complète d'une scène jouée.
Remarqué parmi les tableaux : le défilé de deux régiments de ligne, musique en tête, danseuses des rues dans un quartier populeux de Londres, dansant au son d'un orgue de Barbarie, assassinat du duc de Guise ; une procession avec chants, cantiques et bruits de cloches.
La Lanterne, Paris, 23 avril 1899, p. 3.
Certaines des vues présentées semblent appartenir à des catalogues déjà préexistants. Deux d'entre elles font directement écho à des films Lumière : Assassinat du duc de Guise et Danseuses des rues. Les autres titres, trop imprécis, pourraient également être du même éditeur. Quelques jours plus, quelques explications scientifiques viennent compléter l 'information :
LE PHONORAMA
28, boulevard des Capucines
LES MERVEILLES DE LA SCIENCE MODERNE
Le Phonorama, du grec (phônê, voix) et orama, vue), est un spectacle inédit.
Comme sa dénomination l'indique, la voix et aussi le chant et les sons de toute nature, sont entendus par les spectateurs en même temps que se déroulent devant leurs yeux, des scènes animées, en couleurs, auxquelles ces mêmes voix, chant et sons ont été préalablement adaptés, de manière qu'il en résulte une parfaite concordance pour l'ouïe et la vue.
Voilà donc réalisée cette idée, si simple qu'elle est venue à l'esprit de tout le monde, lors de l'apparition du Cinématographe, d'une combinaison possible du Phonographe avec le Cinématographe, en vue d'obtenir l'illusion complète de la vie.
Tel est l'objet, du Phonorama, également dénommé Cinémicrophonagraphe, parce qu'il est le résultat de la combinaison à la fois électrique et mécanique, de ces merveilles de la science moderne, le Microphone de Hughes, le Téléphone de Graham Bell, le Phonographe d'Edison, le Graphophone de Bell et Tainter, et le Cinématographe Auguste et Louis Lumière.
La Lanterne, Paris, 5 mai 1899, p. 3.
Par la suite, les annonces se limitent au strict minimum dans la rubrique spectacle et ce n'est que rarement qu'un entrefilet - probablement publié par l'Olympia lui-même - rappelle le succès des projections :
Le Phonorama fait courir en ce moment tout Paris dans les sous-sols de l'Olympia.
Cette merveilleuse découverte, avec ses scènes animées, parlées et coloriées, donne l'illusion absolue de la vie.
Pour un prix modique, les enfants s'y amusent, les curieux s'y distraient et les savants s'y intéressent.
Ses auditions sont une véritable merveille de la science moderne.
La Lanterne, Paris, 3 juin 1899, p. 3.
La permanence du Phonorama dans les sous-sols de l'Olympia semble attester que le public vient nombreux à ces projections assez exceptionnelles. Pendant cinq mois, au moins, les séances vont se poursuivre sans interruption. La plupart des journaux publie la dernière annonce du Phonorama, autour du 20 septembre (Le Rappel, Paris, 20 septembre 1899, p. 4.), à l'exception du Rappel qui la publie le 10 octobre 1899 en page 4.
Le Cinématographe Pirou (Cercle Militaire, 2 juin 1899)
À l'occasion de la soirée donnée au Cercle Militaire en l'honneur du commandant Marchand, un appareil Pirou projette des vues cinématographiques de l'arrivée du commandant:
LES OFFICIERS DU GENIE
Vendredi soir a eu lieu, au Cercle militaire, le banquet des membres de la réunion des officiers de réserve et territoriaux du génie.
A l'issue du dîner, le président de la réunion, M. le capitaine Dibos, a fait une causerie autorisée par M. le gouverneur militaire de Paris, sur "l'entrainement à la marche en pays de montagne".
Un superbe cinématographe de la maison Pirou, gracieusement prête à M. le lieutenant Pidat, a reproduit les différentes péripéties, désormais historiques, de l’arrivée du commandant Marchand à Toulon, de la scène des décorations, et du débarquement à la gare de Lyon du glorieux héros de Fachoda.
Quelques noirs de la suite du commandant Marchand avaient été amenés dans le salon de projections, et ne pouvaient en croire leurs yeux en voyant, reproduits avec la fidélité que l'on sait, les tableaux mêmes qu’ils avaient vus se dérouler réellement devant eux quarante-huit heures auparavant.
M. le capitaine Dibos, de l’état-major particulier du génie territorial, et M. le capitaine Debreaux, commandant la compagnie d'aérostiers du 2e régiment du génie, sont les auteurs du fameux projet de traversée du Sahara en ballon, en guide-ropant et en utilisant les vents alisés pour, en partant du Nord-Est de la Tripolitaine, atteindre vraisemblablement le Niger, voire la côte ouest de l’Afrique.
La Patrie, Paris, mercredi 7 juin 1899, p. 3.
L'American Biograph de F. Lauste au Journal (Salle des Fêtes du Journal, 1er juillet 1899)
NOS COURSES CYCLISTES.
[...]
P.S.: Samedi soir a eu lieu, dans notre Salle des Fêtes, le banquet hebdomadaire auquel assistaient les vingt-cinq premiers de notre précédente épreuve. L'heure tardive à laquelle on s'est séparé nous a empêché de donner le compte rendu de cette fête famiale dans notre numéro d'hier.
[...]
L' "American Biograph" était aussi de la fête, et ce merveilleux appareil, qui laisse bien loin tous les cinématographes connus, nous a fait applaudir une série de vues tout à fait saisissantes, passant sans aucune trépidation. Celle du commandant Marchand débarquant à Toulon est une merveille; ce n'est pas une image que nous avons devant les yeux, mais un véritable tableau vivant, qui a été salué par les bravos, par un ban et un double ban.
Voici les courses à bicyclettes: en automobile, où nous reconnaissons le compte de Dion en voiturelle et M. Bouton sur son tri.
L'armée défile aussi; puis, grâce au "Biograph", nous avons, sans fatique, fait le délicieux voyage du littoral méditerranéen: Beaulieu, la Turbie, Monaco, Montecarlo.
C'est un spectacle merveilleux; toutes nos félicitations à M. F. Lauste, l'ex-assistant d'Edison, qui dirigeait cette séance.
F.M.
Le Journal, Paris, 3 juillet 1899, p. 4.
Le cinématographe Pirou (Salle de spectacles, Grande Roue, 16 juillet 1899)
C'est à l'occasion de la visite des Soudanais de la mission Marchand que le cinématographe Pirou de la salle de spectacles de la Grande Roue, offre une séance de projections de vues animées :
LES SÉNÉGALAIS À PARIS
Les Soudanais de la mission Marchand ont visité Paris, guidés par des officiers du régiment des sapeurs-pompiers.
[...]
En route ils s'arrêtent à la Grande Roue. On fait faire un tour de roue aux noirs, puis on leur montre les attractions ; la cage mystérieuse, où un prestidigitateur escamote un nègre qui a bien voulu se prêter à l'expérience et fait apparaître à sa place une jeune femme, les intéresse beaucoup. Ils sont stupéfaits. De là on les conduit dans la salle de spectacle, où ils assistent à une séance de cinématographe. Ils rient de bon cœur.
Journal du Loiret, Orléans, lundi 17 et mardi 18 juillet 1899, p. 1.
Le clou du spectacle est la présentation du duel entre le lion et le taureau, vues tournée à Roubaix :
Très brillante et très réussie la fête de nuit organisée hier à la Grande Roue de Paris à l'occasion de la première représentation du nouveau cinématographe Pirou dont le clou est le fameux combat du lion et du taureau de Roubaix.
Une assistance d'élite, comprenant les personnalités les plus en vue du tout-Paris, mondaines, clubmen, artistes, demi-mondaine, se pressait dans les jardins superbement illuminés.
Naturellement le match de Roubaix défrayait toutes les conversations, et tout le monde s'accordait pour reconnaître que, quoi qu'on en ait dit, le duel entre le lion et le taureau avait présenté un réel intérêt et avait donne lieu à de fort belles prises entre les deux adversaires que le cinématographe de la Grande Roue reproduit avec une extraordinaire netteté.
Signalons, en terminant, la présence hier, à cette représentation sensationnelle.de M. Jean Dupuy. ministre de l'agriculture, accompagné de sa famille.
La Liberté, Paris, vendredi soir 21 juillet 1899, p. 2.
Un autre article, publié dans La Dépêche tunisienne, ne donne pas la même vision de ce combat singulier :
La plupart des théâtres sont fermés. Seuls, l'Opéra, la Comédie-Française, les Nouveautés, l'Ambigu, les Folies-Dramatiques et le Théâtre de la République tiennent bon et soutiennent contre la canicule une lutte où la gloire l'emporte sur le profit.
Les spectacles d'été font, en revanche, de belles recettes. Je signale une chose curieuse. Dans l'enceinte de la Roue de Paris, non loin du Champ-de-Mars, on donne chaque soir des spectacles variés, parmi lesquels des séances de cinématographe. En ce moment, on y reproduit avec une précision saisissante le fameux combat du lion et du taureau qui vient d'avoir lieu à Roubaix. C'est d'autant plus curieux que le rugissement du lion et le mugissement du taureau sont imités à la cantonnade avec une grande habileté.
La reproduction photographique étant nécessairement d'une exactitude absolue, on se rend compte des véritables conditions de cette lutte, qui a été, en réalité, l'assassinat d'un vieux lion débilité par l'âge et l'esclavage.
Attaqué par le taureau, l'infortuné « roi des animaux » n'a essayé qu'une fois de prendre l'offensive et, encore, l’a-t-il fait faiblement, sans conviction. On le voit fuyant et poursuivi, lancé en l'air comme un paquet lamentable, puis piétiné et enfin assommé contre les barreaux de la cage, devant lesquels il se dresse, sanglant, effaré, les pattes écartées, pareil aux lions crucifiés par les Mercenaires, dans Salammbô.
Il faut souhaiter que ce triste spectacle ne soit pas renouvelé à Roubaix, bien que le pari de 25.000 francs, proposé par le dompteur Bidel, qui offre un de ses lions, ait été accepté.
Les combats d'animaux doivent être interdits ; nos mœurs adoucies ne comportant plus que les combats d'hommes, à la condition qu'ils aient lieu par masses innombrables, ce qui est un correctif.
La Dépêche tunisienne, Tunis, jeudi 27 juillet 1899, p. 2.
L'American Biograph (Salle des fêtes du Journal, 1er juillet 1899)
L'American Biograph d'Eugène Lauste offre une session exceptionnelle à l'occasion du banquet hebdomadaire du Journal. Il présente une belle collection de vues animées :
NOS CONCOURS CYCLISTES
HEBDOMADAIRES
L'ENSEIGNEMENT ET LES PROFESSIONS LIBÉRALES
[...]
LE JOURNAL.
P.-S. — Samedi soir a eu lieu, dans notre Salle des Fêtes le banquet hebdomadaire auquel assistaient les vingt-cinq premiers de notre , précédente épreuve. L'heure tardive à laquelle on s'est séparé nous a empêchés de donner le compte rendu de cette fête familiale dans notre numéro d'hier.
[...]
L' "American Biograph" était aussi de la fête, et ce merveilleux appareil, qui laisse bien loin tous les cinématographes connus, nous a fait applaudir une série de vues tout à fait saisissantes, passant sans aucune trépidation. Celle du commandant Marchand débarquant à Toulon est une merveille ; ce n'est pas une image que nous avons devant les yeux, mais un véritable tableau vivant, qui a été salué par les bravos, par un ban et un double ban.
Voici les courses à bicyclettes; en automobile, où nous reconnaissons le comte de Dion en voiturette et M. Bouton sur son tri.
L'armée défile aussi ; puis, grâce au « Biograph », nous avons, sans fatigue, fait le délicieux voyage du littoral méditerranéen : Beaulieu, la Turbie, Monaco, Montecarlo.
C'est un spectacle merveilleux ; toutes nos félicitations à M. E. Lauste, l'ex-assistant d'Edison, qui dirigeait cette séance.
F.M.
Le Journal, Paris, lundi 3 juillet 1899, p. 4.
The American Biograph (La Cigale, 120 boulevard Rochechouart, >10-31 décembre 1899) → 1900
L'American Biograph s'installe à la Cigale dans les premiers jours de décembre 1899 :
Les Parisiens ont une préférence marqués pour les revues et pour les cinématographes. C'est ce qu'a pensé la direction de la Cigale en terminant A la Cigale ! Général ! A la Cigale ! par une série de projections animées dépassant par leur variété, leur netteté absolues toutes celles que l'on a pu contempler jusqu'à ce jour. L'apparition de la plupart des tableaux de l'Américan Biograph a été saluée de longs bravos et il a fallu "bisser" les deux derniers qui sont d'un très saisissant effet.
Cette attraction nouvelle est donnée eu matinée aujourd'hui.
Gil Blas, Paris, 10 décembre 1899, p. 3.
La Cigale (1903)
© Ph. Chauveau
Les projections se prolongent jusqu'à la fin de l'année et au-delà :
A la Cigale ! général ! A la Cigale ! la revue de M. Fiers, dont la 200e est prochaine, sera donnée en matinée dimanche, lundi et mardi, ainsi que les projections animées - chaque semaine renouvelées - de l'American Biograph.
Le Petit Parisien, Paris, 29 décembre 1899, p. 4.
Répertoire (autres titres) : Un lancement de navire, Incendie d'une métairie (Gil Blas, Paris, 14 décembre 1899, p. 4), Lancement d'un transatlantique (Le Figaro, Paris, 14 décembre 1899, p. 5), Le Défilé des Saint-Cyriens (La Libre Parole, Paris, 14 décembre 1899, p. 4), Un sauvetage en Marne (L'Écho de Paris, Paris, 15 décembre 1899, p. 4).
→ 1900
The Royal Biograph (La Pépinière, décembre 1899)
La Pépinière, après le décès de F. Trouillas, en juin 1898, passe sous la direction de sa veuve. Le Guide des plaisirs à Paris évoque ainsi la clientèle de cette salle de spectacles :
Coin curieux à visiter. Y rester une heure pour passer en revue tous les types et genres de domestiques parisiens, valets et femmes de chambre, garçons d'écurie et palefreniers, cochers de grande maison, bonnes et cuisinières, autrement appelés : " gens de maison. " On retrouve ici toutes les figures des bureaux de placement, voire même des femmes de ménage et des concierges !
La petite " bobonne ", gentille, coquette, bavarde, espiègle, s'y sent chez elle, comme sa maîtresse à l'Opéra ou aux Français.
Guide des plaisirs à Paris, Paris, Édition photographique, [c. 1900], p. 65-66.
Le Concert de la Pépinière accueille principalement des revues aux titres évocateurs (La Foire aux nichons, Rincez-vous l’œil, Pipi-métro...) et des opérettes.
Ce soir vendredi au concert de la Pépinière dernière représentation de la revue. Demain samedi, on jouera Ki Ki Ki Ki [sic], l’amusante opérette de Bataille et Sermet. Comme attraction, le Royal-Biograph avec des scènes inédites des plus amusantes.
Le Petit Caporal, Paris, 22 décembre 1899, p. 3.
Ki-Ki-Ri-Ki est une " japonaiserie ", genre particulièrement prisée à l'époque. Le Royal Biograph apparaît comme un simple adjuvant au spectacle principal. Aucune information ni sur le propriétaire de l'appareil, ni sur le programme de vues animées. La dernière annonce date du 6 janvier 1900 (Paris, Paris, 6 janvier 1900, p. 4).
Rue de la Pépinière et Concert de la Pépinière (début XXe siècle).
L'American Biograph (Folies-Bergère, 30-31 décembre 1899) → 1900
L'American Biograph, le vrai et unique American Biograph, réapparaîtra demain soir samedi, sur la scène des Folies-Bergère. Au prix d'immenses sacrifices, la Société du Biograph a envoyé sur le théâtre de la guerre anglo-boër des équipes de photographes qui ont adressé aussitôt à Paris les tableaux des engagements les plus saillants. Demain samedi, ces vues très émouvantes défileront devant le public des Folies-Bergère.
Le Petit Parisien, Paris, vendredi 29 décembre 1899, p. 4.
La presse publie le programme de fin d'année :
Ce soir :
Aux Folies-Bergère, débuts de l'American Biograph, qui présentera pour la première fois les tableaux suivants:
1º La fontaine de Longchamps à Marseille ;
2° Meadbrook Hunt ;
3° Le navire à toutes voiles dans le port de New-York ;
4° Vieux port de Marseille ;
5° Derrière le rideau ;
6° Voyage sur la Côte, d'Azur : Monte-Carlo, Monaco, Beaulieu, la Turbie ;
7º La Reine passant la revue à Aldershot des troupes partant pour le Transvaal ;
8° Le 5e fusilier partant pour le Transvaal ;
9° L'embarquement du général Buller à Southampton ;
10° Le train blindé quittant Durban pour Eastcourt.
Le Figaro, Paris, 31 décembre 1899, p. 5.
Les séances se prolongent au cours de l'année 1900.
→ 1900
1900
← 1899 Le cinématographe Lumière (Grands Magasins Dufayel, 1er janvier-31 décembre 1900) → 1901
Jean de Paleologue "Pal", Grands Magasins Dufayel, 1900.
La presse évoque la présence du fama Aguibou, roi de Macina :
Le fama Aguibou, roi de Macina, accompagné de son fils Mocktar et d'Amadou Salifou, son officier d'ordonnance, et de MM. Richaud, administrateur des colonies; le maréchal des logis Grenier, de l'artillerie de marine, interprète, détachés par M. le ministre des colonies, a passé l'après-midi de samedi dans les Grands Magasins Dufayel qui l'on vivement intéressé.
Il a assisté à une séance de prestidigitation et à la 6,000e représentation du Cinématographe "Lumière", le mieux installé de tout Paris, et dont les scènes animées et parlées, avec imitation parfaite des bruits de l'eau, du pas des hommes et des chevaux, etc., sont si appréciées du nombreux public qui se rend journellement aux Grands Magasins Dufayel.
Parmi les autres attractions: Conférence sur les événements actuels de Chine, avec projections, théâtre miniature, photographie des couleurs, etc., etc.
Le Figaro, Paris, lundi 10 septembre 1900, p. 4.
← 1899 The American Biograph (La Cigale, 120 boulevard Rochechouart, 1er-2 janvier 1900)
← 1899
L'American Biograph continue à projeter des vues animées dans les tout premiers jours de l'année 1900 :
Voilà six mois bientôt que la revue Fiers tient l’affiche de la Cigale. Sous peu de jour en effet on fêtera la 200e de : A la Cigale ! Général ! A la Cigale ! Il n’est pas dans les salles de concert, de succès comparable.
Cette revue sera donnée en matinée dimanche, lundi et mardi et se terminera par les projections annoncées— chaque semaine renouvelées — de l’Américan Biograph.
La Souveraineté nationale, Paris, 29 décembre 1899, p. 4.
← 1899 L'American Biograph (Folies-Bergère, 1er janvier-> 25 avril 1900)
← 1899
L'American Biograph continue ses projections en 1900, même si les informations relatives aux programmes restent assez rares :
C'est tout un émouvant voyage au Transvaal, que l'Américan Biograph fait faire avec les tableaux d'une actualité brûlante qu'il présente chaque soir aux Folies-Bergère. Cette collection de vues dont la poignante authenticité fait des admirateurs chez les plus sceptiques, va s'enrichir ce soir de scènes nouvelles, qui dépassent tout ce que le Biograph a donné jusqu'à ce jour.
Gil Blas, Paris, 27 février 1900, p. 4.
Pour le reste, juste des entrefilets très peu informatifs jusqu'à la fin du mois d'avril.
L'American Biograph (Galerie Georges Petit, 26 janvier-31 décembre 1900) → 1901
Demain, la galerie Georges Petit s'ouvrira pour les séances organisées par l'American Biograph, des vues animées représentant des scènes de la vie intime de S. S. le Pape Léon XIII. Parmi les vues présentées, il en est dont l'impression sera très profonde sur le public.
Aujourd'hui, l'inauguration aura lieu, à quatre heures, dans un concert spirituel auquel on ne sera admis que sur carte d'invitation personnelle.
Le Figaro, Paris, 25 janvier 1900, p. 1.
La Galerie Georges Petit (début XXe siècle)
Les informations sur les vues sont complétées par un autre article :
L’American Biograph organise à partir d’aujourd’hui, à la galerie Georges Petit, 8, rue de Sèze, des séances qui se succéderont de deux à six heures et de huit à onze heures du soir. On y verra en dessins animés, S. S. le pape Léon XIII au Vatican, en voiture, dans les jardins, et donnant sa bénédiction, de ce beau geste simple et grand, dont les pèlerins français ne perdent jamais le souvenir.
C’est là un spectacle que tout le monde ira voir ; tandis que M. Bizet prélude sur l’orgue Célesta-Mustel, les vues se développent et l’effet est aussi varié que saisissant.
Le Soleil, Paris, 26 janvier 1900, p. 2.
Grâce à un nouvel article, nous connaissons d'autres vues du répertoire de l'American Biograph :
Voici, en dehors des épisodes de la vie Intime de S. S. le Pape Léon XIII, quelques unes des scènes que montre en ce moment, l’après-midi et le soir, à la galerie Georges Petit, l’American Biograph : le Forum, le Temple de Vesta, un couvent de moines, la Procession des moines arméniens, un enterrement à Rome, la Procession du corpus Christi, etc.. Aussi est-ce par kilomètres qu’on mesure les pellicules déroulées devant le public. Pour le Pape seul, il n’y a pas moins de dix-sept mille successifs. Aussi le succès est-il retentissant.
La Libre Parole, Paris, 31 janvier 1900, p. 2.
C'est Eugène Lauste qui est responsable du poste :
Quelle extraordinaire leçon de choses l'on prendrait, si l'on pouvait assister aux vues animées de S.S. le pape Léon XIII, dans le réduit où se tient avec ses appareils M. Lauste, le savant directeur de l'usine de l'American Biograph ! Le public qui vient en foule à la galerie Georges Petit, l'après-midi et le soir, ne se doute pas de l'effort mécanique énorme et des soins que réclame, la mise en œuvre de ces bandes à qui l'on doit l'illusion de la vie.
Le Gaulois, Paris, 3 février 1900, p. 1.
L'écho de ces projections arrivent jusqu'au chroniqueur Jules Claretie qui va leur consacrer tout un article dans Le Temps :
Quel étonnement !
Ce pape, caché d'ordinaire à tous les yeux, Léon XIII, dans sa chaise à porteurs, traversant la loggia du Vatican ou se promenant dans ses jardins, nous l'avons vu, touché du regard et comme du doigt, chez Georges Petit, l'autre jour, je ne sais quelle compagnie de cinématographie ayant obtenu la faveur spéciale de fixer les pas et les gestes de Sa Sainteté. Et c'est vraiment prodigieux. Avec le cinématographe, il ne sera plus besoin tantôt de voyager. La vie vient à vous. Et ce souverain pontife, que la foule entrevoit à peine durant les grands jours de la chrétienté, pâle dans ses vêtements blancs, le voici, ô miracle, qui descend de sa voiture, s'appuie au bras d'un cardinal, gagne lentement une chaise près de la muraille de son jardin, s'y assied, ôte son chapeau, prend son mouchoir et s'essuie le front. On entend son essoufflement, on aperçoit le pli de sa lèvre. Mieux encore : dans cette chaise à porteurs qui s'avance vers vous, de face, le visage souriant et émacié de Léon XIII - tel que le peignit Chartran - apparaît, et, tout à coup, une main sort de la chaise, une maigre main qui s'étend sur la foule accourue et qui, d'un grand geste harmonieux, bénit les spectateurs du cinématographe comme elle a béni, là-bas, les fidèles du Vatican.
Je me demande où nous irons et si vraiment, avec les applications futures de la photographie la vie moderne gardera le moindre secret. Être béni en effigie ! C'est une des curiosités inattendues du cinématographe. Peut-être cinématographie-t-on, à l'heure présente, au Transvaal, les rencontres les plus sanglantes des belligérants. Peut-être nous présentera-t-on M. Brunetière partant devant son public de grandes dames et de prélats. Les photographes sont à l'affût de toutes les scènes curieuse et vivantes.
L'un d'eux, très enflammé, vint me dire un jour :
Est-il vrai que M. Pailleron lise demain une pièce nouvelle à la Comédie-Française ? Oui. Deux petits actes.
Alors je vous demande l'autorisation de prendre pendant la lecture des épreuves cinématographiques. Ce sera tout à fait intéressant et l'on pourra les montrer au public à l'heure même où la Comédie jouera ces deux pièces !
J'eus toutes les peines du monde à lui démontrer qu'une lecture à un comité est une séance secrète, qu'il était impossible d'accorder une autorisation contre laquelle protesterait l'auteur lui-même, tout le premier. Le bon photographe me trouva évidemment timide, administratif et retardataire.
Mais ce qu'on me demandait là, on le demanda un jour à M. Pingard. Autorisation de photographier une séance d'élection à l'Académie ! Tout simplement. Un jour viendra où, dans ces tribunes du Collège des Quatre-Nations, dans la salle de nos séances de réception, quelque cinématographe sera braqué sur le récipiendaire et notera avec sa précision mathématique les mouvements, la façon dont la main gantée tourne les feuillets du cahier imprimé et dont, parmi les applaudissements, les lèvres un peu sèches, cherchent la douceur traditionnelle du verre d'eau sucré posé sur le pupitre.
Ce jour-là, en lisant les discours at home - tandis que le cinématographe " fera les gestes " on aura - et ce sera peut-être avant peu - Une réception à domicile.
JULES CLARETIE.
Le Temps, Paris, 1er février 1900, p. 3.
Jusqu'en décembre les projections continuent sans doute de façon discontinue. Ainsi en mars l'appareil est à Lille. Par ailleurs, les annonces sont publiées, mais le programme ne semble guère varier :
GALERIE GEORGES PETIT, 8, rue de Sèze.
-Vues animées de S. S. le pape Léon XIII, reproduites par l'American Biograph. Tous les jours de 2 h. à 6 h. et de 8 à 11 h. Orgue Celesta-Mustel.
Le Peuple Français, Paris, 25 décembre 1900, p. 4.
Le Biophonographe (système Joly) (Concert-Théâtre de la Grande Roue, [1900])
Nous ne disposons que du témoignage d'Henri Joly recueilli par Maurice Noverre pour attester la présence du biophonographe au Concert-Théâtre de la Grande Roue, à l'occasion de l'Exposition Universelle :
Au cours des démonstrations faites devant des amis et relations d'affaires, au " théâtre de la Grande Roue ", un film reproduisait M. Normandin faisant une conférence sur l'appareil. L'assemblée crut d'abord que l'industriel lui-même parlait derrière l'écran.
La vérité sur l'invention du film photophone ", Le Nouvel Art Cinématographique, nº 5 (2e série), janvier 1930, p. 52.
La presse n'a pas gardé le souvenir de ces essais - Le Concert-Théâtre de la Grande Roue n'apparaît d'ailleurs pas pour les années 1900 et 1901. Le biophonographe en est encore à sa période d'essai semble-t-il. En 1902, un biophonographe fonctionne effectivement à la Grande Roue.
Le chronophotographe Gaumont (Palais de la Ville de Paris, [avril]-[novembre] 1900)
"Le cinématographe à la section de l'enseignement de la Ville de Paris"
Louis Figuier, Les Merveilles de la science (suppléments), 29 septembre 1900.
Les responsables du Pavillon - ou Palais - de la Ville de Paris sont en pourparlers avec la maison Gaumont depuis le mois de juin 1899, afin d'y installer un chronophotographe au moment de l'Exposition Un courrier et un "Projet de marché" permettent de connaître la nature des échanges et de l'accord :
22 juin 1899
Monsieur le Directeur de l'Enseignement Primaire de la Ville de Paris. E. V
Monsieur le Directeur,
Après avoir examiné de très près la demande que vous avez bien voulu nous faire au sujet d'une installation de projections animées & continues à l'Exposition Universelle de 1900 dans le Pavillon de la Ville de Paris, nous avons l'honneur de vous remettre sous ce pli un projet de marché qui, nous l'espérons, vous donnera satisfaction.
Pour être à même de supporter tous les aléas, nous avons pris le parti de réduire à quatre le nombre des appareils en service.
Comme vous l’avez demandé, le service des projections sera fait par notre personnel.
Pour rendre le séjour du pavillon habitable pour les opérateurs nous aurions à faire installer deux conduites d'aération sous le plancher. Nous espérons que ce détail ne sera pas un obstacle pour l'établissement du pavillon à l'endroit que vous avez prévu.
Si comme nous l'espérons ce projet de marché vous donne satisfaction, nous vous serons obligés de bien vouloir nous le faire savoir pour que dès maintenant nous puissions mettre à la disposition de Monsieur Demeny, un opérateur, le matériel et les bandes nécessaires pour la prise des négatifs.
Dans le cas où il vous plairait de nous demander quelques renseignements complémentaires, nous sommes à votre entière disposition pour nous trouver au rendez-vous qu'il vous plaira de nous fixer dans votre cabinet.
Veuillez agréer, Monsieur, l'assurance de notre respectueuse considération.
L. Gaumont &. Cie.
Rep. dans CORCY, 1998: 412-414.
Collection Félix Potin, 27. Pavillon de la Ville de Paris, 1900
© Collection Grimh
Le projet de Marché permet de savoir que Gaumont propose de prendre en charge la totalité de l'installation, opérateur compris, à l'exception de la source d'énergie :
22 juin 1899
PROJET DE MARCHÉ
Nous soussignés L. Gaumont &. Cie, Ingénieurs constructeurs, demeurant à Paris. 57, rue St. Roch, nom engageons à fournir à la Ville de Paris un pavillon de projections animées comprenant :
4 postes Chronophotographiques système G. Demeny, commandés mécaniquement.
Chaque poste permettant l'emploi de bandes chronophotographiques continues de 35 mm de large et donnant par projection des images d’un format de 18 x 24 sur glace dépolie, avec une lampe électrique à incandescence comme source lumineuse.
Les quatre postes seront renfermés dans un pavillon métallique.
Ce pavillon sera de forme rectangulaire, les quatre projections se feront sur un seul des grands côtés.
Cette installation sera faite par nos soins et à nos frais dans le local affecté à la ville de Paris à l'Exposition Universelle de 1900 dès que l'emplacement, libre de toute entrave., sera mis à notre disposition
Nous nous engageons également à assurer l'entretien de cette installation et à la faire fonctionner à nos frais pendant toute la durée de l'Exposition, les jeudis et dimanches, de 2 heures à 4 heures, ainsi que dans le cas des visites de Comités.
Nous prendrons également à notre charge la fourniture et le développement de 20 bandes négatives, ainsi que les frais de déplacement d'un opérateur pour la prise de ces vues dans les établissements de la Ville de Paris.
D'autre part il est convenu que la Ville se chargera de faire installer à ses frais, à la porte du pavillon, une prise de courant reliée à l'un des secteurs à courant continu de l'Exposition, de façon à pouvoir assurer un courant de 110 volts et de 20 ampères. Les frais de consommation de courant et location du compteur seront à notre charge à la condition que le prix de l'hecto watt heure ne dépasse pas sensiblement celui que nous payons actuellement au secteur municipal des Halles.
Deux cartes d'entrée de service seront mises à notre disposition pour assurer le service des projections. Nous supporterons les frais d'enregistrement occasionnés par le présent marché et nous demeurerons seuls responsables des accidents qui pourraient se produire dans le fonctionnement ou à l'occasion du fonctionnement de l'appareil à l'intérieur du pavillon.
La présente entreprise est consentie moyennant la somme nette à forfait de Neuf mille francs qui nous sera payée par fractions aux dates ci-après :
1. Trois mille francs le 1er février 1900
2. Trois mille francs le 1er Juin 1900
3. Trois mille francs le 1er Août 1900.
A la clôture de l'Exposition le pavillon Chronophotographique et ses accessoires resteront notre propriété.
Fait à Paris le 22 juin 1899
Vu & Conforme,
L. Gaumont & Cie.
Rep. dans CORCY, 1998 : 414-415.
L'American Biograph (La Bodinière, 16 rue Saint-Lazare, 8-17 avril 1900)
À la Bodinière, "Théâtre d'Application", l'American Biograph doit donner quelques séances au cours du mois d'avril 1900 :
La semaine sainte à la Bodinière :
A partir d'aujourd'hui dimanche jusqu'au, mardi 17 avril tous les jours, de 1 h. 1/2 à. 5 heures, et tous les soirs, de 8 h. 1/2 à 11 heures, Sa Sainteté le pape Léon XIII, tableaux animés par l'American Biograph.
Tous les jours, à 5 heures, à partir de lundi 9 avril, première représentation de l'œuvre, nouvelle de. Georges Fragerolle : Lourdes, mystère en douze tableaux ; décors et dessins d'Uzès, interprété par l'auteur, Georges Fragerolle.
Le Figaro, Paris, dimanche 8 avril 1900, p. 4.
Une nouvelle annonce, qui n'apporte guère d'informations nouvelles, est publiée quelques jours plus tard :
Aujourd'hui, à la Bodinière
De une heure et demie à cinq heures et de huit heures et demie à onze heures : Sa Sainteté le pape Léon XIII, tableaux animés par l'Américan Biograph, qui ont eu un si gros succès chez Georges Petit. A cinq heures troisième représentatio de Lourdes, mystère en douze tableaux, avec chœurs musique de E. Fragerolle ; décors de Uzès. Interprété par l'auteur, M. Georges Fragerolle.
Le Matin, Paris, 11 avril 1900, p. 3.
Le Phonorama de l'Exposition Universelle (Rue de Buenos Aires, [15 avril]-12 novembre 1900)
La Société du Phonorama, fondée le 11 juin 1898, se donne pour but d'exploiter le cinémicrophonographe inventé par Berthon, Dussaud et Jaubert. Elle va pour le compte de la Compagnie Général Transatlantique organiser des projections de vues animées et, sans doute, sonorisées, dont le cinématographiste est Félix Mesguich. Malgré l'importance de l'événement, la presse ne semble avoir prêté aucune attention à ce spectacle.
Le Panorama Transatlantique, le Maréorama et le Grand Globe Céleste (1900)
© BGE, Centre d'iconographie genevoise
La dissolution de la Société du Phonorama, le 24 décembre 1900, quelques semaines après la fin de l'Exposition Universelle indique que la réussite économique et peut-être artistique n'ont pas été au rendez-vous.
Le cinématographe du trois-mâts "Deux Empereurs" (Seine, > 16 avril-> 16 avril 1900)
À l'occasion de l'exposition universelle, le trois-mâts de pêche " Deux-Empereurs " va proposer des projections cinématographiques relatives à la vie des Terreneuvas et à la pêche de la morue :
Les Terreneuvas à l'Exposition
Le trois-mâts de pêche " Deux-Empereurs " à Paris
[...]
Les armateurs du Deux-Empereurs l'ont bien compris et ont suppléé à l'absence même des bancs de Terre-Neuve à Paris par l'heureuse idée suivante ne s'épargnant aucuns frais pour rendre leur exhibition aussi intéressante que possible, ils ont fait cinématographier les diverses phases de la vie de nos marins sur le Grand Banc ainsi que les multiples et pénibles opérations de la pêche à la morue.
La cale du vieux navire morutier,parfaitement appropriée et désinfectée au Laurénol, sera transformée en salle de spectacle, oú seront représentées au cinématographe toutes les scènes de la vie du bord et les travaux de nos marins " banquais ".
Ainsi, avec une exactitude parfaite reflétant la vie, on verra les doris aller élonger leurs lignes, les lever, ramener les morues. Toutes les phases de la préparation de la morue sur le pont du navire " banquier " seront encore reproduites d'une façon non moins expressive. La pêche de la boëtte, en cornet ou vignot ; le boëttage des lignes et leur lavage dans les mannes ; le décollage des morues, le lavage et la salaison seront montrés aux visiteurs avec la plus scrupuleuse fidélité photographique..
C'est après cette substantielle visite que les promeneurs pourront redire non sans raison, avec Yann Nibor, le poète réaliste des matelots :
Ah ! dans not' métier de galériens
Tout n'est pas ros', mes vieux terriens !
Quand su' la mer y a des gros flots,
Terriens, plaignez les pauv's matelots !
Pour la première fois, les Parisiens, les provinciaux terriens et les milliers de visiteurs cosmopolites qui viendront à l'Exposition connaîtront donc par l'exhibition pittoresque d'un vrai navire " terreneuvien ", et autrement mieux que par des récits plus ou moins exacts, la vie de nos braves Terreneuvas pendant leurs six à sept mois de campagne annuelle, le rude labeur accompli par tous ces braves et frustes pêcheurs de morue dans les brumes et les glaces...
Et ce sera là vraiment une nouveauté, en même temps qu'une attraction de premier ordre peur tous ceux qui s'intéressent à la grande pêche des bancs de Terre-Neuve, aux 400 navires qu'elle fait armer et aux 10,000 pêcheurs qui les montent.
Il faut dire aussi que 1900 sera la seule année où le trois-mâts .granvillais, le Deux-Empereurs, ne sera pas réarmé pour Terre-Neuve. Certes, ce vétéran de notre grande pêche a bien mérité le repos ; mais il est à présumer, au point de vue financier, que sa première campagne en Seine sera même plus productive que celles de nos autres voiliers qui " bourlinguent " ou " dérapent " sur le Grand Banc...
Théophile Janvrais.
Le Gaulois, Paris, 16 avril 1900, p. 3.
Le catalogue Gaumont est le seul à proposer une série qui porte le titre La Pêche à la morue sur les bancs de Terre-Neuve.
Le trois-mâts "Deux Empereurs" devant le Palais des Armées de terre et de mer (1900) [D.R.]
Le Cinématographe Lumière (Pavillon des Voyages animés, < 26 avril-12 novembre 1900)
Le directeur des Voyages animés, Manceaux Duchemin fait appel aux frères Lumière afin de réaliser les différentes vues animées :
M. Manceaux Duchemin, Directeur des Voyages animés, s'est d'abord assuré le concours de MM. Lumière, de Lyon, qui se sont chargés de toutes les vues cinéamtographiques, de M. Lévy, pour les projections en couleurs, et de M. Gaumont, pour la chromophotographie. Il a arrêté avec eux la composition de sept spectacles: la Savoie, le Dauphiné, la Champagne et les Vosges, les Pyrénées, la Provence et la Côte d'Azur, l'Auvergne et le Limousin, la Bretagne. Qu'elle que soit la perfection de ces vues, leur défilé sous les yeux du public aurait été un peu monotone, si la direction n'avait charé M. Bertol-Graivil de les présenter aux spectateurs, en vers et en proses rythmée, vers et prose sur lesquels le maître Francis Thomé broda une de ses plus exquises partitions.
Noua vons assisté à plusieurs représentations. Les vues en couleurs, délicieusement teintées, des lacs du Bourget et d'Annecy, du Mont Blanc, de la mer de Glace à Chamonix, de la Grande Chartreuse, de Vizille, etc., nous ont délicieusement charmés. La Champagne et les Vosges donnent forcément Jeanne d'Arc, Domrémy et Vaucouleurs, et c'est Belfort, avec son lion d'airain "grisonnant sous la neige". L'Auvergne nous offre ses danses pittoresques; les Pyrénées, les cérémonies religieuses de Lourdes; la Bretagne ses plages; la Provence sa poésie. Puis, pour finir la Côte d'Azur.
L'inauguration du pavillon des Voyages Animées a lieu en avril :
LES VOYAGES ANIMÉS.-Sur les bords de la Seine, en quittant les jardins du Trocadéro, on s'arrêtera aux Voyages animés pour voir sans fatigue les curiosités du pays de France et pour entendre Suzanne Dalbray chanter délicieusement les chansons de chaque province.
La Fin du siècle, Paris, 26 avril 1900, p. 1.
La Grande Revue de l'Exposition va consacrer un article détaillé aux Voyages Animés :
LES VOYAGES ANIMÉS
A droite du pont d'Iéna, au pied du Trocadéro s'élève un gracieux pavillon que des signes lumineux, le soir, vers la Seine, nous disent être celui des Voyages animés. Ces voyages s'effectuent dans notre France pittoresque, et des projections cinématographiques les animent. Il appartenait à la Société des voyages Duchemin, et à son distingué directeur M. Manceaux, qui a déjà beaucoup fait pour développer le goût des excursions dans nos belles provinces, de présenter à nos hôtes d'exposition les beautés de notre sol trop méconnues. C'est avec une habileté remarquable et une mise en scène très judicieuse que ce project d'attraction a été conçu. De superbes vues panoramiques en couleurs nous transportent successivement aux Pyrénées, en Auvergne, en Dauphiné, en Bretagne, en Normandie, tandis que des projections cinématographiques font revivre les scènes les plus curieuses de la vie provinciale : un jeu de Boules en Franche-Comté, une danse villageoise en Gascogne, une promenade sur la côte d'Azur, une ascension dans les Alpes, etc. La voix d'une récitante module des strophes enthousiastes ou des explications faciles, suivant que la scène présente, par exemple, l'aspect majestueux d'un site pyrénéen ou l'inédit d'un tableau local. L'œil est charmé par ces reproductions parfaites de vérité, en même temps que l'esprit se meuble des connaissances essentielles à notre bagage ethnographique. Mais ce n'est pas tout : les organisateurs de cette attraction, pour donner avec encore plus d'intensité, si possible, une idée exacte du pays entrevu, nous font entendre des chansons locales, interprétées avec un art parfait. Les noms de Mme Miette et Suzanne Dalbray nous dispensent de commentaires. Et dans ce cadre charmant la musique de Francis Thomé berce délicieusement.
Ce qui est à louer aussi sans réserves, c'est l'harmonieuse conception du projet dans tous ces détails. Le spectacle qui nous a été présenté l'autre soir nous montrait les Pyrénées. Eh bien, ce n'était pas seulement les aspects merveilleux de nos montagnes, leurs cirques, leurs pics superbes, ou encore ces admirables régions où se réveillent au printemps et Bagnères et Cauterets et Luchon qu'on faisait défiler devant nos yeux, mais on avait eu soin de signaler les événements historiques survenus.
La Grande revue de l'Exposition, 1900, p. 176-177.
Robert Salles, Voyages animés, 1900.
Notre province elle-même figure en personne, grâce au cinématographe dans le coquet théâtre des Voyages animés, qui chaque semaine, affiche L'Auvergne et le Limousin. Seulement les vues de notre pays s'en tiennent au paysage du Gargilesse sur les confins du Berry et au clocher de la cathédrale de Périgueux ! Des vers de mirliton, psalmodiés par une actrice de genre, célèbrent "de la bourrée les couples enlacés" !! Et une vague musiquette a la prétention de jouer des airs du pays !!!
Lemouzi, Brive, décembre 1900, p. 140.
Le Phono-Cinéma-Théâtre (Exposition universelle, 28 avril 1900-12 novembre 1900)
Parmi les innovations que l'on présente à l'Exposition universelle de 1900, il y a plusieurs appareils qui combinent l'image cinématographique et le son phonographique. L'un d'eux est le Phono-Cinéma-Théâtre, imaginé par Marguerite Vrignault et financé par Paul Decauville qui fonde une société pour son exploitation. Les vues sont tournées par un pionnier, autrefois chez les Lumière, Clément-Maurice. Par ailleurs, le pavillon dispose de deux salles dont l'une est sous la responsabilité de Félix Mesguich et l'autre sous celles de Georges Maurice, secondé par son frère Léopold, les fils de Clément-Maurice. C'est dans le pavillon du Théâtroscope qu'est installé le Phono-Cinéma-Théâtre. Le bâtiment, édifié par M. R. Dulong, architecte, est, lointainement, inspiré du " pavillon Frais " du Petit Trianon (Alfred Picard, Rapport général administratif et technique, Tome Septième, Paris, Imprimerie Nationale, 1903, p. 230).
Théâtroscope et Phono-Cinéma-Théâtre
© Phonorama
La rue de Paris, où se trouve la plupart des petits théâtres et des attractions, ouvre au public le 28 avril 1900. Le Figaro présente les spectacles qui s'offrent aux visiteurs, dont le Phono-Cinéma-Théâtre :
[...]
Puis le "Phono-cinéma-théâtre", dont l'idée est très ingénieuse et amusante. Dans une délicieuse reproduction du salon de Marie-Antoinette à Trianon, nous verrons et nous entendrons tout l'état-major des plus grands artistes de Paris : Sarah Bernhardt, Coquelin, Maurel, Rosita Mauri, Félicia Mallet, etc., interprétant leurs plus retensissant succès.
Le Figaro, Paris, 28 avril 1900, p. 1.
Pourtant, malgré cette annonce assez précoce, il faut attendre le premier vendredi de gala, le 8 juin 1900, pour disposer de la présentation complète du spectacle. Encore faut-il être prudent, car l'essentiel des articles qui vont être publiés au cours des mois que dure l'Exposition Universelle, sont en réalité des réclames qui la société du Phono-Cinéma-Théâtre fait passer dans la presse.
François Flameng Affiche du Phono-Cinéma-Théâtre, 1900 |
François Flameng, Affiche du Phono-Cinéma-Théâtre, 1900 |
Le Phono-Cinéma-Théâtre
Ce soir aura lieu, au Phono-Cinéma-Théâtre, le premier vendredi de gala.
Tout le monde connaît ce joli théâtre, aimable reconstitution du « Salon Frais » de Marie-Antoinette à Trianon, où Mme Marguerite Vrignault, une femme de goût artistique et délicat, a organisé un spectacle qui marquera dans l'histoire de l'art théâtral.
Grâce à la combinaison complète et absolue de ces deux merveilles modernes, le phonographe et le cinématographe, on est arrivé à un résultat d'une rare perfection, et dont il faut féliciter MM. Clément-Maurice et Lioret.
On a, en regardant le cinématographe, la surprise d'une netteté et d'une fixité absolument parfaites dans la reproduction des scènes. C’est là un progrès qui n'est pas banal et qui est dû, en partie, à la prestigieuse habileté de l'opérateur et, en partie, à des perfectionnements inédits apportés à la construction des appareils par un chirurgien très fameux, à l'adresse et à la hardiesse légendaires, qui a imaginé ces perfectionnements en utilisant le cinématographe pour son compte.
Quant au phonographe, c'est également une pure merveille de netteté et de sonorité ; cette qualité a son importance si l'on songe qu'il a à reproduire la voix des premiers artistes de notre temps.
C'est vraiment l'élite de la scène française qu'on applaudira au Phono-Cinéma-Théâtre.
Jugez-en :
Mme Sarah-Bernhardt, M. Coquelin aîné, M. Victor Maurel, Mlle Rosita Mauri, Mme Reichenberg, Mlle Félicia Mallet, Mlle J. Chasles, M. Coquelin cadet, M. de Féraudy, M. Jean Coquelin, Mlle Mily Meyer, Mlle Mariette Sully, Mlle Zambelli, Mlles Mante, Mlle Cléo de Mérode, M. Polin, de la Scala et de l'Alcazar d'Été ; M. Louis Maurel, M. Jules Moy, Mme Réjane.
Les noms que vous venez de lire constituent - excusez du peu ! - la troupe du Phono-Cinéma-Théâtre, troupe exclusive ; car tous ces artistes ont accordé à l'entreprise le monopole, si l'on peut dire, de leur voix et de leurs gestes.
Une partie seulement de cette troupe d'élite donnera demain, et il y aura là néanmoins de quoi satisfaire les plus difficiles ; voici en effet le programme de la représentation :
Scène du duel d'Hamlet, jouée par Sarah Bernhardt, M. Magnier, Mlle Seylor.
Scène des Précieuses ridicules, jouée par Coquelin aîné, Mmes Kerwich et Esquilar.
La Korrigane, dansée par Mmes Mauri, Violat et Mante.
Danses Directoire, par Mlles Blanche et Louise Mante.
Polin dans le Troupier pompette.
En dehors du plaisir très réel et très délicat que l'on éprouve à ce spectacle, on ne peut s'empêcher d'avoir l'agréable et consolante pensée, que ce sont là de beaux sons et de beaux gestes qui sont fixés pour l'éternité, et que si les hommes de notre génération ne connaissent plus Talma et Rachel que par ouï-dire, nos petits-neveux admireront, les sublimes attitudes de Sarah, entendront la voix claironnante de Coquelin, et revivront nos émotions et nos joies artistiques.
C'est là, n'est-il pas vrai, la réalisation d'un beau rêve et il faut se réjouir de vivre à une époque où de pareilles chimères deviennent des réalités.
Et l'on nous promet sous peu de nouvelles surprises, notamment des représentations phono-cinématographiques en plein air, sur 'la terrasse du théâtre, dominant la Seine, et son merveilleux décor; ce sera un triomphe, et la récompense bien méritée d'une des initiatives les plus artistiques et les plus hardies de notre temps.
Le Figaro, Paris, 8 juin 1900, p. 2.
On voit bien la tonalité générale de l'article qui, au-delà de la simple présentation, est un vecteur pour faire la publicité pour le spectacle. Il est question également du célèbre chirurgien Eugène Doyen qui a travaillé avec Clément-Maurice pour le tournage de ses opérations chirurgicales. On annonce également des projections en plein air, mais la suite ne le confirmera pas. On doit au journal Le Gaulois un des articles les plus complets sur le Phono-Cinéma Théâtre que nous reproduisons in extenso :
Bloc-Notes Parisien
LE PHONO-CINÉMA THÉATRE
Combien de fois, lorsqu'il vous est arrivé de vanter le mérite d'un artiste tel que Mounet-SuIIy devant des personnes d'un certain âge, ne les avez-vous pas entendues s'écrier: "Ah! si vous aviez connu Ligier!" De même, s'il s'agissait de Sarah Bernhardt, les mêmes personnes s'exclamaient: "C'est possible, mais si vous aviez entendu Rachel! Si vous vous hasardiez à admirer devant elles la voix de M. Alvarez, elles vous répondaient du tac au tac: "Ah! sivous aviez entendu Nourrit!" De même pour Coquelin: "Ah! si vous aviez entendu Régnier!"
Que répondre à de telles exclamations? Que nous reste-t-il de ces artistes hors ligne d'autrefois, que nous reste-t-il de Talma, de Mlle Georges, de Mlle Mars, de Lekain, de la Clairon, de la Champmeslé? Rien, si ce n'est le témoignage des contemporains. Les grands auteurs ont légué leurs oeuvres impérissables à la postérité. Les grands artistes, au talent éphémère, n'ont pu lui léguer que leur nom.
Et pourtant, quelles jouissances artistiques n'éprouverions-nous pas, si Talma, si Rachel avaient pu survivre à eux-mêmes, de manière à nous procurer aujourd'hui, par quelque artifice, les impressions mêmes qu'ils apportèrent à leurs spectateurs.
Eh bien, grâce aux inventions nouvelles, le talent de nos grands artistes d'aujourd'hui et de demain survivra à leur retraite, à leur disparition même. Sarah Berhhardt, Réjane, Bartet, Delna, Mounet-Sully, Coquelin. Le Bargy, Jean de Reszké, et tant d'autres apparaîtront dans leurs principaux rôles, et tels que nous les avons vus et entendus, devant nos petits-neveux: car ils les verront et les entendront tels que nous les avons entendus et vus nous-mêmes.
***
Un artiste pouvait seul avoir une telle idée et la réaliser. En la circonstance, c'est à une femme au sens artistique le plus affiné que l'honneur en revient, à Mme Marguerite Vrignault, directrice artistique du Phono-Cinéma théâtre.
Le Phono-Cinéma théâtre est un délicieux établissement situé à l'entrée même de la rue de Paris, à l'Exposition, sur la gauche, immédiatement après le pavillon de la Ville de Paris. Il rappelle beaucoup, par son aspect extérieur, le salon frais de Marie-Antoinette, dans les anciens jardins de Trianon, à Versailles, avec les immenses fenêtres, tout en glaces, qui revêtent ses murs, et sur lesquelles on peut admirer une ravissante affiche de Flameng.
Avant de partir du spectacle qui est offert à l'intérieur, il est bon de dire quelques mots sur l'application scientifique à laquelle Mme Vrignautt a donné le nom de Phono-Cinéma.
Chacun connaît le phonographe, cette merveilleuse invention qui permet de recueillir sur un cylindre indélébile les paroles prononcées, les airs chantés, les morceaux d'orchestre, en un mot, tous les bruits de la nature. On connaît également le cinématographe, grâce auquel l'objectif photographique saisit et fixe, sur une série de pellicules les personnages avec leur relief et tous leurs mouvements.
Il suffisait - voyez combien l'idée était simple, mais il fallait l'avoir - de faire .poser devant te cinématographe nos grands artistes dans leurs scènes les plus célèbres, et de leur en faire déclamer te texte devant le phonographe. Il ne restait plus ensuite qu'à obtenir un synchronisme absolu entre le mouvement et la voix, de manière à ce que celle-ci accompagnât parfaitement celui-là, au moment de la projection sur l'écran des images cinématographiques. Ce synchronisme ayant pu être obtenu, le phono-cinéma était trouvé.
Ces explications préliminaires étant données, pénétrons ensemble dans la salle du Phono-Cinéma théâtre, une jolie salle longue, terminée par une véritable scène. Les trois coups sonnent, le rideau se lève, et sur l'écran, nous voyons apparaître Mlles Mante, de l'Opéra, qui exécutent avec une grâce exquise une série de danses Directoire. L'illusion est si complète que nous entendons un spectateur s'écrier:
- Ce n'est pas possible! L'écran est transparent, et elles dansent réellement par derrière.
Voici maintenant une scène des Précieuses ridicules. Coquelin est assis dans un fauteuil, entre Madelon et Cathos, que représentent Mmes Esquilar et Kervich. Et le voilà qui, avec des ronds de bras et de jambes et avec les mines tes plus comiques, se met à nous réciter puis à nous chanter la fameuse chanson "Ah! ah! je n'y prenais point garde!" C'est bien Coquelin que nous voyons devant nous, c'est bien sa voix que nous entendons. C'est prodigieux.
Nous sommes maintenant transportés à l'Opéra. Mme Rosita Mauri, Mlles Violat et Mante dansent devant nous le célèbre pas de la Sabotière dans la Korrigane. Dieu que Mme Mauri est gracieuse et spirituelle! Et ne voilà-t-il pas que, pour compléter l'illusion, le bruit des sabots frappant le sol en cadence est imité, à s'y méprendre, dans la coulisse!
Mais nous marchons de merveille en merveille, car voici Sarah Bernhardt elle-même qui vient, au milieu d'une nombreuse figuration, jouer, avec M. Pierre Magnier, la scène du duel d'Hamlet. Et nous ne. pouvons nous empêcher de nous représenter par avance l'émerveillement de ceux qui, dans cinquante ans, dans un siècle, verront surgir devant eux la grande tragédienne avec son élégante et hautaine sveltesse, avec la noblesse, la largeur et la justesse de ses mouvements. Les épées se croisent, se heurtent, se froissent, et nous entendons leur cliquetis qui tombe, toujours au moment qu'il faut. C'est admirablement réglé, et la salle entière éclate en applaudissements frénétiques.
Nous l'allons entendre maintenant, rire. à gorge déployée, avec notre doux et délicieux Polin, qui vient chanter une de ses meilleures chansons le Troupier pompette. C'est bien sa voix grasse et futée, ce sont bien ses gestes si amusants et si typiques, pour plier, déplier et ranger son mouchoir, pour relever sans cesse à la taille son pantalon d'ordonnance.
Enfin le spectacle se termine sur une gracieuse apparition de Mlle Cléo de Mérode, tout à fait charmante en une gavotte qu'elle danse à ravir.
***
Le Phono-Cinéma nous montre encore et nous montrera, en même temps qu'il nous les fera entendre, M. Victor Maurel, Mme Reichenberg, Mlle Félicia Mallet, Mlle J..Chasles, M. Coquelin cadet, M. de Féraudy, M. Jean Coquelin, Mlle Mily Meyer, Mlle Mariette Sully, M. Louis Maurel, de la Scala; l'humoriste Jules Moy, Mme Réjane, M. Duquesne et une foule d'autres. encore, dont les noms viendront s'ajouter à cette liste.
On voit que c'est une véritable institution à laquelle Mme Marguerite Vrignault attache son nom.
Après le spectacle, Mme Vrignautt a bien voulu nous conduire sur la terrasse du Phono-Cinéma théâtre qui domine la Seine, avec son admirable panorama. C'est là qu'est installé l'atelier où les artistes viennent poser devant le cinématographe. Mme Vrignault nous explique que le cinématographe ne peut fonctionner avec succès que par le grand soleil. Et comme, jusqu'à présent, la plupart des poses cinématographiques ont été prises en plein air, il en est résulté de ces tâches noires et heurtées, principalement sur les figures. Dans cet atelier, au contraire, tout en verres dépolis, on utilise la grande lumière du plein soleil, sans être incommodé par ses malencontreux rayons qui sont tamises, Voilà pourquoi les reproductions du Phono-Cinéma théâtre donnent, sans nulle retouche,~ ce qui serait impossible d'ailleurs avec te cinématographe – la physionomie exacte et claire au naturel de nos artistes, et voilà comment les figures de femmes nous apparaissent si blanches, si jeunes, si jolies. C'est là un véritable progrès.
Ajoutons que, très prochainement, par les chaudes soirées, des représentations select seront données, en plein air, sur cette terrasse, en face des palais illuminés de l'autre côté de la Seine. Ce/sera féerique, et ce sera une attraction de plus pour le Phono-Cinéma théâtre.
Tout-Paris.
Le Gaulois, Paris, samedi 9 juin 1900, p. 1.
Pour le deuxième vendredi de gala, les informations sont plus limitées et le programme semble presque identique au précédent (Le Figaro, Paris, 15 juin 1900, p. 3). Dans les jours suivants, les annonces distillent des éléments nouveaux du répertoire :
L'un des centres les plus élégants du vendredi à l'Exposition est toujours le Phono-Cinéma-Théâtre qui triomphe d'ailleurs tous les soirs. Le public sort ravi de cette très belle attraction d'où il emporte vraiment une très délicate sensation d'art.
Le programme vient de s'enrichir de quelques numéros très sensationnels parmi lesquels il faut citer l'Enfant prodigue, joué par Mme Félicia Mallet, M. Duquesne et Mlle Marie Magnier - qui a marqué son rôle d'une si personnelle et artistique empreinte - puis Jules Moy, dont la danse du ventre déchaîne chaque soir des rires inextinguibles.
On applaudit toujours Sarah Bernhardt dans la scène si émouvante du duel d'Hamlet, et Cléo de Mérode.
Le Figaro, Paris, 22 juin 1900, p. 3.
Si l'Enfant prodigue est identifiable, en revanche la " danse du ventre " par Jules Moy l'est moins. Ce dernier a tourné deux films identifiés, mais il est difficile d'y voir une danse du ventre... Le Figaro, au mois de juillet, va apporter quelques nouvelles informations :
La semaine dernière, une fête des plus originales a été donnée au Phono-Cinéma-Théâtre par une dame de la haute société parisienne. À l'occasion d'un anniversaire, cette dame, a réuni, dans l'une des deux salles du Phono-Cinéma-Théâtre qu'elle avait louée, un certain nombre d'amis et de parents, et elle leur a offert une représentation cinématographique du mariage de son fils, célébré l'année dernière. L'idée a eu beaucoup de succès. Elle est d'ailleurs tout à fait séduisante et il est probable qu'elle fera école.
Les deux jolies salles du Phono-Cinéma-Théâtre continuent, entre temps, à recevoir un très nombreux et très élégant public, au milieu duquel nous avons remarqué M. Casimir-Perier et sa famille.
Ou est ravi de retrouver là les artistes les plus aimés et les plus célèbres, dans toute leur réalité. Des surprises très sensationnelles sont d'ailleurs réservées au public pour dans très peu de temps ; en attendant, les représentations données avec les éléments actuels obtiennent toujours un gros succès.
Ce soir, changement de spectacle. Au programme : Sarah Bernhardt, Rosita Mauri, Cleo de Mérode, Polin.
Le Figaro, Paris, 7 juillet 1900, p. 3.
L'article révèle l'existence de deux salles qui, à l'occasion, sont louées pour des événements privés. Ont-elles été ouvertes à l'inauguration ou bien la seconde salle est-elle postérieure ? Il existe en tout cas deux équipes pour s'en occuper. Nous ignorons le nom de cette " dame de la haute société parisienne ", dont on tait le nom sans doute par discrétion, mais l'objectif est évidemment publicitaire afin d'inciter les gens aisés à louer les salles du Phono-Cinéma-Théâtre. On en profite également pour évoquer la présence de Casimir-Périer, ancien président de la République. Le Gaulois, de son côté, offre quelques nouvelles informations :
[...]
Et tous les jours, la foule afflue au Phono-Cinéma-Théâtre, où mondains et mondaines ont pris l'habitude de louer l'une des salles pour offrir a leurs amis des représentations privées qui sont aujourd'hui à la mode et seront le grand succès de l’hiver prochain.
Et l'on applaudit les artistes aimés du public parisien : Sarah, dans le duel d’Hamlet ; Rosita Mauri, dans le Mikagouva ; la gaie Mily-Meyer, dans ses amusantes chansons ; Mlles Chasles, dans le pas du faune, et Cléo de Mérode, dans sa gavotte.
Sans parler de Polin, l’étonnant tourlourou, et les excentriques Américains dans leurs étourdissantes clowneries où retentissent les bruits de gifles, de chaises qui dansent, de tables qu’on culbute, ce qui excite les rires unanimes, tant l’illusion est complète au Phono-Cinéma-Théâtre, avec son spectacle si distingué et si merveilleusement réglé.
Le Gaulois, Paris, 11 juillet 1900, p. 3.
L'occasion est donnée, pour le Phono-Cinéma-Théâtre et pour Clément-Maurice de profiter de la présence de John Philip Sousa à Paris pour tenter de tourner une nouvelle vue cinématographique et phonographique :
Changement de spectacle, hier, au Phono-Cinéma-Théâtre
Grand succès pour Mlle Zambelli et M. Vasquez dans la « Habanera » du Cid. Coquelin, plus en voix que jamais dans les Précieuses ; Sarah Bernhardt, Mily Meyer, Cléo de Mérode tiennent toujours l’affiche avec le même succès.
Sousa et son orchestre américain sont venus hier, drapeaux en tête, donner au Phono-Cinéma-Théâtre, avant de quitter Paris, une dernière audition dont le souvenir nous sera naturellement conservé. Et voilà un numéro de plus pour les représentations prochaines !
Le Figaro, Paris, 20 juillet 1900, p. 4.
Pourtant, rien ne permet d'affirmer que le tournage a réellement eu lieu. Le mois d'août est marqué par la visite exceptionnelle du shah de Perse. Passionné de technologie, et admiratif devant le cinématographe, le souverain ne manque pas l'occasion de visiter le Phono-Cinéma-Théâtre :
Il est tard, on va rentrer sans doute au palais de l'avenue Malakoff ? Mais non ! malgré la pluis, le Chah remonte en voiture et se dirige vers le palais de l'Optique, où Mazaffer-ed-Diue a assisté à une représentation du Phono-Cinéma-Théâtre. Il a pris le plus vif plaisir aux danses Directoire, exécutées par Mlles Mante, de l'Opéra ; au pas de la sabotière de la Korrigane, dansé par Mlle Rosita Mauri ; au duel d'Hamlet, si puissamment rendu par Sarah Bernhardt et M. Pierre Magnier ; à la gavotte de Mlle Cléo de Mérode, au ballet du Cid, dansé par Mlle Zambelli et M. Vasquez, et aux Chansons en crinolines, détallées par Mlle Mily-Meyer.
Le Chah a vivement félicité Mme Marguerite Vrignault, directrice artistique du Phono-Cinéma-Théâtre, qui lui avait donné l'illusion complète de la vie réelle, et a même exprimé le regret de ne pouvoir aller assister à une seconde représentation dans le local même du théâtre, rue de Paris.
Le Gaulois, Paris, 11 août 1900, p. 2.
Un renouvellement de vues a lieu au mois d'août et la presse annonce le nouveau programme :
Voici le programme de la semaine du Phono-Cinéma Théâre qui continue à être un des grands succès de la rue de Paris. Jamais, du reste, le public n'a à attendre, les représentations se suivant sans interruption et quand on arrive au milieu on reste pour la suivante.
1º La Korrigane, Par Mmes Rosita Mauri, Violat et Suzanne Mante, de l'Opéra.
2º La pantomime de l'Enfant Prodigue (fragment), le 2e tableau, Pierrot chez Phrynette, par Félicia Mallet et Mlle X.
3º Le ballet du Cid, par Mlle Zambelli et M. Vasquez.
4º Le duel d'Hamlet, par Mme Sarah-Bernhardt, M. Pierre Magnier et Mlle Seylor.
5º Danses anciennes, par Mlle Cléo de Mërode.
6º La Chanson en crinoline, par Mlle Mily-Meyer.
7º Ballet du Faune, par Mlles J. Chasles et Mante.
8º Excentrica americans, Scène chez le photographe, par Mason et Forbes.
Le Soir, Paris, lundi 6 août 1900, p. 2.
Si habituellement les articles de presse ne sont pas signés, nous disposons malgré tout des impressions d'un journaliste, G. Davenay, qui, cela dit, fait simplement l'éloge du Phono-Cinéma-Théâtre, avec quelques informations nouvelles sur la programmation :
La Photographie mouvante et parlante du théâtre
II y a à l'Exposition, vers le commencement de la Rue de Paris, du côté du pont des Invalides, un petit théâtre qui est très visité en ce moment et qui mérite Je grand succès qu'il obtient auprès du public, parce qu'il constitue un réel progrès artistique, et parce qu'il aura dans l'avenir une valeur documentaire tout à fait considérable c'est le joli théâtre qu'a fondé Mme Vrignault : le Phono-Cinéma-Théâtre. Le nom en est peut-être un peu trop compliqué, mais il exprime cependant très nettement l'idée de la fondatrice, puisqu'il emploie tout à la fois les derniers perfectionnements du phonographe et le cinématographe. C'est au moyen de ces deux appareils si curieux que Mme Vrignault a réussi à reconstituer, en des visions animées, la vie et le jeu de nos plus grands artistes, dans le charme de leur physionomie, dans leurs mouvements, dans leur voix. La réussite de cette tentative si originale dépasse tout ce que l'on peut en dire.
Aussi les artistes eux-mêmes vont-ils, après avoir gracieusement posé devant les appareils du Phono-Cinéma-Théâtre, se revoir, s'entendre, et, ce qui est agréable aussi, s'entendre applaudir comme s'ils jouaient eux-mêmes devant leur public.
Sarah Bernhardt, par exemple, a été admirablement saisie dans la fameuse scène du duel d'Hamlet, et la reconstitution de cette scène est une merveille d'art en même temps qu'un chef-d'œuvre d'exactitude.
Réjane joue, dans Ma Cousine et dans Madame Sans-Gêne, avec un tel esprit que le spectateur se croirait transporté au Vaudeville.
Mlle Rosita Mauri, dans le pas de la Sabotière, est exquise de vérité Mlle Zambelli n'est pas moins gracieuse dans le ballet du Cid ; Reichenberg, Mily Meyer, Félicia Mallet, Cléo de Mérode, Victor Maurel, Mariette Sully, Mlle Jeanne Chasles, de Féraudy, Mlles Mante, Violat, Polin, Jules Moy, le clown Footitt et Chocolat dans une scène inénarrable, etc., etc., tous les artistes en renom, passent sous nos yeux étonnés et émerveillés ; et cette revue, qui fait la joie des parents comme des enfants, puisqu'elle est de bon ton, soigneusement composée dans son répertoire, constitue chaque soir l'un des plus grands attraits de la Rue de Paris.
Coquelin, l'immortel Cyrano, termine cette revue avec les Précieuses ridicules, et sa voix sonore et splendide ne s'éteint que sous les applaudissements comme à la Porte-Saint-Martin ! Et tout cela pour un franc, dans la salle la plus élégante de l'Exposition !
Le Phono-Cinéma-Théâtre constitue donc, en même temps qu'une ravissante distraction que tous les salons voudront avoir cet hiver, un immense progrès scientifique, et grâce à lui voici les choses les plus fugitives et les plus charmantes de la scène fixées à tout jamais dans l'avenir, pour le plus grand plaisir et pour la plus grande instruction de tous, grands et petits.
G. Davenay.
Le Figaro, Paris, 8 septembre 1900, p. 3.
Même si nous avons quelques remarques sur le nom du spectacle, pour le reste aucune critique sur le fonctionnement... Davenay évoque également des titres nouveaux, mais certains n'ont pas été, semble-t-il, conservés, si jamais ils ont été tournés comme dans le cas de Madame Sans-Gêne. C'est au début du mois de septembre que le phonographe l'Idéal de Lioret est remplacé par le Céleste de chez Pathé :
Au Phono-Cinema-Théâtre
Hier, il y avait un début sensationnel rue de Paris. Mme Réjane paraissait pour la première fois au Phono-Cinéma-Théâtre. C'était pour moi une excellente occasion de retourner dans la ravissante bonbonnière de la rue de Paris (pont des Invalides).
D'ailleurs, je ne faisais en cela qu'imiter le public qui, après être allé au Phono-Cinéma-Théâtre, y retourne avec empressement.
J'avais appris que Mme Marguerite Vrignault, directrice artistique du Phono-Cinéma-Théâtre, avait corsé son programme par l'adjonction de tableaux nouveaux du plus vif intérêt.
Tout cela m'attirait, et je n'étais pas le seul car la jolie salle du Phono-Cinéma-Théâtre, au moment où j'y pénétrais, était pleine d'un public attentif et émerveillé. Le succès, au début s'est métamorphosé en triomphe et cela se conçoit. Ce mois de septembre a attiré à l'Exposition une foule de provinciaux et d'étrangers ; d'autre part, nombre de Parisiens effectuent déjà leur rentrée. Et naturellement, tout ce monde se rend avec empressement dans les établissements de l’Exposition dont la vogue s’est emparée.
Le Phono-Cinéma-Théâtre est de ceux-là. N'est-ce point un charme tout à fait inédit que de voir grâce au cinématographe, vivre et agir devant soi nos premiers acteurs, et de les entendre en même temps, grâce à un phonographe perfectionné ? Notons, à ce propos, que depuis hier le Phono-Cinéma-Thêâtre possède un nouveau et puissant phonographe qui est le dernier mot de la perfection. On ne saurait rêver illusion plus complète, et nos petits-neveux nous seront reconnaissants de te leur savoir légué, avec les œuvres de nos grands auteurs dramatiques, la physionomie exacte de leurs interprètes.
Je vous parlais tout à l’heure du programme du Phono-Cinéma-Théâtre. Il est de premier ordre. C’est d’abord cette merveilleuse scène du duel d'Hamlet, un vrai clou, qui évoque notre grande Sarah, avec sa silhouette d’une si élégante sveltesse, avec ses gestes si sobres et si dramatiques…
Puis voici les trois tableaux de l'Enfant prodigue. Aux sons de l’exquise musique d’André Wormser, Félicia Mallet, spirituelle et poignante à souhait, Mme Marie Magnier, M. Duquesne interprètent devant nous les trois scènes du Vol, de Pierrot chez Phrynette et du Retour.
Puis ce sont les danses Directoire, par les toutes gracieuses Mlles Mante, de l’Opéra ; puis Cléo de Mérode, dans sa danse javanaise et dans sa danse ancienne.
Voici Mlle Zambelli et M. Vasquez, de l’Opéra, qui exécutent devant nous les trois variations espagnoles du ballet du Cid, de Massenet.
Et que dire de Mlle Mily Meyer dans ses chansons en crinoline ? La silhouette est délicieuse de grâce futée, et le phonographe nous envoie, de telle façon que l’on s’y méprend, la voix pointue et si drôle de la gentille divette.
J’ai gardé les débuts, la véritable première, pour la bonne bouche. Nous avons donc vu et applaudi Mme Réjane dans la fameuse scène de Ma Cousine, où elle danse son fameux quadrille naturaliste. Ce fut un gros, très gros succès. L’illusion était telle qu’on aurait été tenté de rappeler la grande artiste.
On n’oublie pas les enfants au Phono-Cinéma-Théâtre. Aussi fait-on paraître à leur intention deux scènes du plus désopilant comique : « Chez le Photographe », par les excentriques américains Mason et Forbes, et un intermède étourdissant par nos vieux amis Footitt et Chocolat, qui n’ont jamais été surprises encore.
Le Gaulois, Paris, 9 septembre 1900, p. 2
Comme on peut l'apprécier, les articles, signés ou pas, sont souvent très redondants et ne proposent que peu d'informations nouvelles. Il faut toutefois retenir une amusante anecdote au sujet de l'une des vues, L'Enfant prodigue qui va déclencher la flamme d'un admirateur de l'actrice qui joue le rôle de Phrynette :
L’illusion est si complète au Phono-Cinéma-Théâtre de la rue de Paris, qu’il en est résulté, hier, un bien amusant incident.
Depuis plusieurs jours, un Anglais assistait assidument au spectacle du Phono-Cinéma théâtre et applaudissait particulièrement les trois tableaux de l’Enfant prodigue. On sait que le rôle de Phrynette y est interprété par une actrice anonyme, Mlle X.
Hier donc, au sortir de la représentation, notre Anglais se précipita au contrôle et demanda le nom été l’adresse de Mlle X., disant qu’il voulait l’épouser et l’emmener en Angleterre.
Le plus piquant de l’aventure, c’est Mlle X… n’est autre qu’une danseuse étoile de nos théâtres subventionnés !
Le Gaulois, Paris, 16 septembre 1900, p. 3.
La passion est telle qu'il ne va pas hésiter à faire passer dans la presse une petite annonce pour retrouve sa belle anonyme ou son sosie... deux mois plus tard :
MONSIEUR bien élevé, instruit, très riche, encore jeune, désirant se marier, voudrait faire connaissance d'une personne ressemblant à l'artiste qui mime le rôle de Phrynette dans l'Enfant prodigue, au Phono-Cinéma-Théâtre, 42 bis, boulevard Bonne-Nouvelle. Ecrire poste restante, sous initiales, T.M., bureau de la Madeleine.
Le Matin, Paris, 22 novembre 1900, p. 6.
L'histoire ne dit pas si le monsieur bien élevé... et encore jeune a fini par trouve une belle Dulcinée pour lui faire un brin de causette... Mais alors, l'Exposition Universelle a fermé ses portes.
Répertoire (autres films) : Variations du cygne (Le Gaulois, Paris, 26 juin 1900, p. 2), La Poupée (Le Journal, Paris, 1er octobre 1900, p. 3), Terpsichore (Le Gaulois, Paris, 5 octobre 1900, p. 2.), Brunin (Le Figaro, Paris, 16 octobre 1900, p. 3).
Les Projections cinématographiques de M. Dussaud (1er mai 1900)
L'inventeur suisse François Dussaud, présent dans différents pavillons de l'Exposition Universelle, mène également une vie mondaine qui le conduit à présenter, en privé, le fruit de ses expériences scientifiques. Ainsi, le 1er mai 1900 (La Presse, Paris, 2 mai 1900, p. 3) le couple Dussaud fête l'ouverture du Pavillon des Inventions :
Intéressante réception chez M. et Mme Dussaud, à l'occasion de l'ouverture du pavillon des inventions de M. Dussaud, au salon d'honneur de l'Exposition.
M. Dussaud a fait assister ses invités à quelques-unes des expériences qui sont faites chaque jour à l'exposition avec ses téléphones haut parleurs et inscripteurs phonographes pour sourds et cinématographes pour aveugles. Parmi les invités :
M.. Lardy, ministre de Suisse en France ; le commissaire général de Suisse à l'Exposition et Mme Ador, M. et Mme Develle, M. et Mme Camille Flammarion, M. et Mme Lefèvre-Pontalis, général et Mme Béziat, M. Caron, conseiller municipal, et Mme Caron, M. Osiris, M. et Mme Edouard Rod, le comte Balny d'Avricourt, etc.
Mme Dussaud, dont la voix égale la beauté, a ravi ses hôtes en interprétant quelques-uns de nos maîtres les plus aimés.
Le Figaro, Paris, 3 mai 1900, p. 2.
La science n'est pas fâchée avec les mondanités et les Dussaud savent s'entourer d'invités particulièrement prestigieux.
Le Cinématographe Pirou (Avenue Rapp 37, <7 mai->7 octobre 1900)
Pendant l'Exposition Universelle, Eugène Pirou a installé un cinématographe avenue Rapp:
Notes d'élégance
Parmi les intéressantes attractions offertes aux nombreux visiteurs de l'exposition, les séances de cinématographie, données 37, avenue Rapp par Eugène Pirou seront certainement très suivies.
On sait avec quel art le portrait est traité 5, boulevard Saint-Germain, où toutes les illustrations françaises et étrangères forment une galerie unique dans son genre et très précieuse par ses multiples documents. Toutes les personnalités mondaines, politiques, scientifiques, artistiques, aussi bien que les personnages diplomatiques, les chefs d'Etats etc. ont été photographiées par Eugène Pirou devenu en quelque sorte le portrait officiel.
COMTESSE DE TRAMAR.
Gil Blas, Paris, lundi 7 mai 1900, p. 2.
Il est encore annoncé en octobre:
Cinématographe Pirou, avenue Radd [sic] , entrée 0,50.
Le Petit Moniteur universel, Paris, dimanche 7 octobre 1900, p. 4.
Le cinématographe (Boulevard Montmartre, <10> mai 1900)
Le cinématographe installé au Boulevard Montmartre est le témoin involontaire d'une tentative de vol sur les spectateurs :
UNE SCÈNE TRAGIQUE
Paris, 10 mai.
Une scène tragique a profondément ému hier soir, vers 10 heures, les promeneurs qui encombraient le boulevard Montmartre.
Comme de coutume, la foule était grande devant le passage Jouffroy, regardant le cinématographe installé de l’autre côté du boulevard. Cela induisit deux voleurs internationaux, Pierre Andréas, âgé de 27 ans, originaire de Berne, et Claude Rigaud, né à Buenos-Ayres, à pratiquer le vol à la tire auquel ils sont venus se livrer à Paris pendant l’Exposition. Mais deux agents de la sûreté surveillaient les filous et, au moment où Andréas subtilisait le portemonnaie d’un monsieur, ils l’arrêtèrent. Aidé de son camarade, le voleur se dégagea, sortit un revolver de sa poche et trois fois le déchargea sur l'un des agents. Celui-ci se baissa et les-projectiles, qui auraient parfaitement pu atteindre des passants, allèrent s’aplatir sur un arbre.
Au bruit des détonations, les gardiens de la paix Boujon et Ollivier accoururent et se jetèrent sur les voleurs qu’ils parvinrent à maîtriser. Accompagnés par la foule, qui menaçait de leur faire un mauvais parti, Andréas et Rigaud ont été conduits chez le commissaire qui les a envoyés au Dépôt.
Le Progrès, Lyon, vendredi 11 mai 1900, p. 2.
Le cinématographe du pavillon de Monaco (12 mai-novembre 1900)
Comme bon nombre de pavillons nationaux, Monaco a fait construire son pavillon, dû aux architectes Médouin et Marquet. La Société des Bains de Mer de Monaco a organisé en 1899-1900, un grand concours cinématographique avec de nombreux prix. Assez logiquement, à l'occasion de l'Exposition Universelle, le pavillon monegasque va donc accueillir un cinématographe :
Le pavillon de Monaco sera inauguré samedi après-midi.
Deux séances cinématographiques seront données aux invités du commissariat : l'une à quatre heures et demie, l'autre à cinq heures et demie.
Le Figaro, Paris, 8 mai 1900, p. 3.
Pavillon de Monaco, Exposition Universelle 1900 [D.R.]
La salle du cinématographe est installée en sous-sol et les films présentés, au moins pour une part, proviennent du Concours de la Société des Bains de Mer :
[...] dans le sous-sol.
Aux murs, un magnifique panorama de la principauté dû au peintre marseillais Olive, révèle aux yeux du visiteur toute la magie de cette région enchanteresse qu'un poète bien inspiré a si heureusement baptisé : la Côte d'Azur.
L'installation du sous-sol est complétée par un cinématographe qui reproduit des scènes et des paysages du pays, notamment les épreuves primées au dernier concours de Monaco, telles que le Carnaval de Nice, la Baigneuse, etc. L'accès du sous-sol n'est pas gratuit comme les parties supérieures ; on n'est pourtant pas très exigeant puisqu'on ne demande que la modique somme de 25 centimes.
L. de Quellern, L'Exposition 1900 par l'image, Paris, S. Schwarz, 1900, p. 552.
Il semble pourtant qu'au bout de quelque temps, les séances de cinématographie deviennent gratuites (Le Journal, Paris, 10 juillet 1900, p. 2. Nous supposons que les projections vont se poursuivre jusqu'à la fermeture de l'Exposition Universelle, en novembre.
Le Cinématographe Indo-Chinois (Exposition universelle, 15 mai 1900-12 novembre 1900)
Dans le cadre de l'Exposition Universelle de 1900, l'Indochine est particulièrement à l'honneur. On peut y retrouver, au Trocadéro, un condensé de la culture de l'art khmers, gravir l'Escalier des Géants, découvrir la Colline et la Terrasse, admirer la Coupole, entrer dans la Pagode, s'enfoncer dans le Temple souterrain, regarder les diaporamas... On peut également s'installer devant le Cinématographe indo-chinois :
Le cinématographe dont on fait défiler devant les yeux émerveillés des visteurs les différentes scènes, a un succès considérable et justifié. Rien ne saurait rendre l'impression, dans ce cadre étrange, du défilé des troupes indo-chinoises, de la promenade des éléphants à Pnom-Penh, des danses des jeunes Annamites à Hué, de l'arrivée de M. Paul Doumer à la tribune des régates de Saïgon.
Depuis l'ouverture, les séances ont lieu tous les jours de 3 à 5 heures.
Dans la libérale pensée de mieux faire connaître à tous l'Indo-Chine, M. P. Doumer a voulu que toutes ces leçons de choses soient accessibles à tous à titre gracieux. On ne saurait trop l'en remercier. Il en est d'ailleurs récompensé par l'affluence énorme qui se presse dans les pavillons, dans le souterrain et la pagode, devant les dioramas et aux séances du cinématographe Lumière.
C'est M. Veyre qui a pris toutes ces vues pendant un laborieux et fructueux séjour en Indo-Chine et c'est lui qui dirige les séances au souterrain du Trocadéro. Son talent est à la hautuer de son courage, car il n'a pas marchangé sa peine en courant les cinq pays indo-chinois.
La Grande revue de l'Exposition, supplément illustré de la Revue des Revues, nº 12, 1900, p. 215.
C'est en effet Gabriel Veyre qui a parcouru l'Orient pendant de longs mois qui est l'auteur de toutes les vues présentées dans le pavillon de l'Indochine. C'est lui aussi qui tout au long de l'Exposition Universelle va présenter et sans doute commenter les films qu'il a tournés entre mai 1899 et février 1900.
Exposition universelle de 1900. nº 42, L'Indo Chine
Le cinématographe du pavillon de l'Égypte (Exposition universelle, 15 mai 1900-12 novembre 1900)
Au pavillon de l'Égypte, des projections cinématographiques sont organisées. Les vues présentent les rives du Nil y du Soudan :
Pabellón de Egipto
Se compone de tres edificios unidos: un palacio, un teatro y un bazar, cuyo estilo árabe contrasta con la suntuosa seriedad de los otros dos.
El palacio principal es una síntesis de los templos de Abydos, de Karnac, d'Ipsamboul.
En los bajos se pueden ver los panteones y las momias de las dinastías desaparecidas; y además, un museo retrospectivo.
A la izquierda del Bazar se vé una fuente, reproducción de la de Sebil el Gamalich. Bajo los pórticos, tiendas y escaparates.
En el interior, un cinematógrafo de las orillas del Nilo y del Sudan.
El teatro puede contener 1.200 personas y en él se pueden representar obras de gran espectáculo , numerosos desfiles, Pabellón de Egipto bailes y pantomimas.
Mar y Tierra, En la exposición universal de París, nº 22, Madrid, 8 de septiembre de 1900, p. 505.
Pavillon de l'Égypte (Exposition universelle, Paris, 1900)
Le Théâtroscope de l'Exposition Universelle (rue de Paris, 15 mai-12 novembre 1900)
C'est le 15 mai, presque un mois après l'inauguration de l'Exposition Universelle, que le pavillon Théâtroscope ouvre ses portes (Le Siècle, Paris, 15 mai 1900, p. 4). Il s'agit d'un spectacle dont le responsable est Alfred Bréard, un homme d'affaire français. Nous ne disposons que de peu d'informations relatives au fonctionnement du théâtroscope de l'Exposition. Un entrefilet semble dire que les choses fonctionnent de façon exceptionnelle :
Offrir un million et se le voir refuser, voilà qui n'arrive pas tous les jours. C'est le cas pourtant de la Société du Théâtroscope, qui refuse cette jolie somme contre son brevet et elle prouve que l'on a raison de dire la Fortune sourit aux audacieux, car chaque soir les deux établissements font le maximum, aussi bien à la rue de Paris de I Exposition qu'au charmant théâtre du 35, boulevard des Capucines.
Le Petit Parisien, Paris, 7 juillet 1900, p. 3.
Diorama (à gauche) et Théâtroscope (à droite) L'Exposition par l'image, Paris, Imp. de Poissy/Imp. L. Marpon/A. Debuisson/, [1900], p. 727. |
Le Théâtroscope et le Phono-Cinéma-Théâtre © Phonorama |
Mais la réalité est pourtant plus sombre. Les affaires ne marchent pas et le public n'est pas au rendez-vous tant espéré par Alfred Bréard. Il va donc tenter d'installer des mutoscopes et pour ce faire il envoie la demande suivante, datée du 27 juillet, auprès du Commissaire général :
Monsieur le Commissaire général,
La concession du Théâtroscope qui m'a été accordée dans la rue de Paris comprend des projections de vues animées par systèmes optiques et cinématographiques.
Je viens en conséquence solliciter de votre bienveillance la permission de joindre à mon établissement quelques appareils de Mutoscope qui formeront le complément tout naturel du Théâtroscope. Vingt appareils Mutoscope suffiront à nos besoins.
J'espère que vu l'état défectueux des recettes et des pertes que j'ai déjà subies, vous voudrez bien, monsieur le Commissaire général m'accorder cette autorisation...
Alfred Bréard.
Archives Nationales F12 4358.Cité dans Meusy, 1995, 92.
En réalité, lorsqu'il envoie ce courrier, Alfred Bréard a déjà installé 12 mutoscopes dans le pavillon de l'Exposition universelle. Malgré les résultats bien médioces - l'installation des mutoscopes ne change pas vraiment la donne -, il n'hésite pas à faire passer dans la presse des entrefilets hyperboliques où les chiffres ont été particulièrement gonflés pour attirer le chaland, mais la réalité est plus sombre :
28,000 spectateurs en un mois. Tel est le bilan du Théâtroscope, dont la salle n'a que 70 fauteuils. Il faut dire que les représentations ont une durée de 30 minutes et que beaucoup y reviennent. L'invention du Théâtroscope, quoique scientifique, laisse sous le charme ceux qui ont eu la bonne fortune d'assister à une de ses séances. Les fauteuils sont à un prix si modique, qu'en faisant un tour le soir on y passe un moment très agréable et... peu coûteux, A. Mercklein.
Le Figaro, Paris, 14 août 1900, p. 5.
Il resterait à savoir le type de vues que présentes ces appareils... Par une curieuse coïncidence, les mutoscopes sont, en effet, au centre d'une polémique en cet été 1900. Ces appareils à vision individuelle permettent, avec une certaine discrétion, de voir, en particulier, des scènes grivoises ou érotiques... toujours moins repérables que sur grand écran. Le scandale remonte à la préfecture de police qui va prendre les dispositions nécessaires pour mettre fin à ces pratiques :
La censure et les mutoscopes. - On sait ce que sont les mutoscopes, ces appareils installés un peu partout dans les salles de dépêches de journaux nationalistes, ou dans les halls des magasins.
La plupart représentaient des sujets pins ou moins obscènes.
Depuis longtemps on s'élevait contre cet abus et de nombreuses plaintes étaient déjà parvenues à la préfecture de police, ainsi que pour les cartes postales qu'on pouvait voir il y a quelques jours affichées dans les bureaux de tabac ou les librairies.
Le Parquet se décida à agir, M. André, juge d'instruction, fut chargé de cette affaire.
Hier, dans l'après-midi, sur commission rogatoire de ce magistrat, M. Hamard, sous-chef de la sûreté, accompagné de son secrétaire, M. Moniot, s'est rendu dans les librairies, bureaux de tabac, halls, kiosques, boutiques, etc. ; a saisi toutes les cartes ou sujets mutoscopes contraires aux bonnes mœurs.
Pareille épuration a été faite dans certains» attractions de l'Exposition. Une trentaine de saisies ont été opérées.
De plus, une vingtaine de camelots porteurs de cartes postales incriminées ont été arrêtés, puis relâchés après s'être vu confisquer leurs provisions.
L'Aurore, Paris, 23 août 1900, p. 3.
Alfred Briard a-t-il été concerné... on peut le penser compte tenu que cette pratique est généralisée et qu'il a besoin de renflouer ses caisses. Un autre journal nous donne d'ailleurs une idée de l'ampleur du trafic :
[...] Dans la seule journée de mercredi, on a récolté 50.000 cartes postales illustrées, 600 photographies, 40 cinématographes, 400 boîtes de mutoscope. Et cette saisie n'a porté que sur une partie de la rive droite...
La République française, Paris, 24 août 1900, p. 3.
Mutoscope ou pas, le pavillon ne fait pas du tout recette, et nous disposons d'un court témoignage d'un citoyen américain qui ne fait que confirmer l'échec commercial du Théâtroscope :
Paris, 30 Aug.
[...]
The theatroscope will strike most people as an Ingenious (but not too ingenious) trick. It is said to have solved all the difficulties hitherto inherent to cinematographic representations. There is no “stagger” in the movement of the figures, the outlines are clear, and the colors natural. On the other hand, a suspicion may naturally arise in any ordinary person’s mind that a real performer is acting behind the stage before an inclined mirror which reflects on to another mirror in front of the audience; also that an artificial wheeze is being given to the vocal accompaniment to suggest a gramophone. Nature imitating art for the purpose of deceiving humanity is a novel idea, but the public does not seem to be much attracted by it. When I visited the theatroscope there was not a soul in the place except myself, so that the performance could not begin, and on returning the next day the usher recognized me as "the customer" of twenty-four hours before.
The theatroscope, however, whatever its secret, is less irritating than most of these cinematographic exhibitions.
The New York Times, New York, 9 sept, 1900, p. 16.
Les remarques sont assez savoureuses et confirment que les spectateurs se comptent sur les doigts de la main... La dernière phrase, malgré tout, semble indiquer - ce que confirme le reste de l'article - que le théâtroscope est, malgré tout, le plus original et le plus intéressant de tous les cinématographes présentés lors de l'Exposition Universelle. Nous savons par ailleurs qu'Alfred Bréard va adresser une nouvelle demande, le 11 septembre 1900, afin de pouvoir installer de nouvelles attractions : " [...] Le nombre des visiteurs n'est pas celui sur lequel nous avions compté et par suite je vois la possibilité de tirer un petit avantage des emplacements non requis par notre exploitation. " (Archives Nationales F12 4358). Nouvelle demande, preuve du désarroi face au désastre économique, le 19 septembre afin de " présenter des divertissements effectués sur une scène véritable [...], non pas seulement par réflexion sur des écrans mais par vision directe au spectateur... (Archives Nationales F12 4358). Le pavillon du Théâtrophone ferme donc ses portes le 12 novembre, dernier jour de l'Exposition universelle (Gil Blas, 12 novembre 1900, p. 4).
Le Cinématographe (Exposition Universelle, salle privée, <16> mai 1900)
Sous la plume de "AUGUSTO", dans le quotidien valencien Las Provincias, on peut lire une information relative à la projection de vues sur Lourdes et les apparitions miraculeuses. C'est aussi l'occasion de rappeler l'état d'impréparation de la plupart des pavillons et palais de l'Exposition Universelle:
Todos los días se formulan nuevas quejas contra la defectuosa organización de la exposición. No es posible saber cuando estarán todas las instalaciones completamente arregladas. Los productos se hallan afinados, siento la confusión tan grande, que todas las noches se cometen muchos robos, en términos que han desaparecido gran número de cajas. Los pintores también se quejan amargamente, pues a pesar de que los dos palacios de Bellas Artes son verdaderas maravillas de arquitectura y de ejecución, cuando llueve, el agua cae sobre los cuadros expuestos.
Pero todas estas faltas quedan compensadas por el aumento de los atractivos en la exposición. Todos los domingos tocaran cuatro nuevas músicas, de tres a cinco de la tarde, en diferentes puntos. También contamos con otro atractivo que mitiga algo la mala impresión que producen los palacios aún no terminados y las cajas con el embalaje medio abierto. En una sala privada se exhibe el curioso espectáculo del cinematógrafo de Lourdes, que en sus 20 cuadros nos ofrece la Restitución Histórica completa de las apariciones de la Virgen a Bernadette y los milagros de Lourdes; si Lourdes actual con sus millares de peregrinos en solemne procesión es, la célebre gruta y los angarilleros que conducen a los enfermos a la piscina milagrosa. El entusiasmo de los concurrentes es verdaderamente edificante, y son en gran número los miembros eminentes del clero francés que honran con su presencia las exhibiciones de este cinematógrafo.
Las Provincias, Valencia, lunes 21 de mayo de 1900, p. 1.
Le mirographe de François Lallement (Boulevard Bonne-Nouvelle/Nouvelles galeries "A la Ménagère", >17 mai 1900)
L'ancien Bazar a été racheté, en 1899, par les Nouvelles Galeries qui agrandissent le bâtiment et le baptise " À la ménagère ". L’inauguration a lieu le 17 mai 1900. Par la suite, un appareil mirographe va être installé par François Lallement :
A la fin de cette même année 1900, M. F. Lallement installait un "Mirographe" dans les magasins de "La Ménagère", boulevard Bonne-Nouvelle.
Cela aussi fut un événement. Combien de Parisiens qui, chaque jour, voient le cinéma fonctionner aux Galeries La Fayette, au Printemps, au Louvre, etc., savent que "La Ménagère" les avaient précédés dans cette voie, vingt-cinq ans auparavant ? Hommage soit rendu de cette initiative au charmant homme et à l'excellent technicien qu'est M. Lallement !
Le courrier des cinémas, Lille, 16 mai 1930, p. 11.
Le Biograph Américain (Grande Roue, < 20 mai-15 septembre 1900)
Outre les projections organisées au Grand-Guignol, le biograph américain - ou American Biograph - est également présent, parmi d'autres attractions, à la Grande Roue :
A partir de dimanche, 20 mai, les nombreuses attractions de la Grande Roue de Paris : Biographe américain, Danses orientales, Cage mystérieuse, Homme rouge, Mystère égyptien, Glissoires indiennes, seront absolument gratuites pour tous les visiteurs : c’est une véritable révolution à la Grande Roue. Dimanche Fête populaire à tarif réduit, 0 fr. 50, avec toutes ces attractions. Entrée gratuite pour les militaires en tenue et les enfants au-dessous de douze ans.
S’il est une chose à l’Exposition dont le public a horreur, et pour cause, c’est d'avoir sans cesse la main à la poche pour s’offrir les attractions semées sur sa route. Allez à la Grande Roue et vous ne connaîtrez pas cet ennui : toutes les attractions y sont gratuites : Biographe Américain, l’Homme Rouge, la Gage Mystérieuse, les Danses Orientale», les Mystères d’Egypte... que sais-je, à partir de demain dimanche !
La Liberté, Paris, dimanche 20 mai 1900, p. 2.
Une nouvelle grande fête populaire a lieu le jeudi 24 mai :
Demain jeudi, nouvelle grande fête populaire à la Grande Roue de Paris avec toutes les attractions absolument gratuites. Biographe américain, Danses orientales, Cage mystérieuse, l'Homme Rouge, l'Egyptienne, tout cela gratis pro Deo ! Que voudrait-on de plus pour assurer dans cette journée un formidable succès à la Maison du Colosse de fer de l'Exposition.
Journal des débats politiques et littéraires, Paris, 24 mai 1900, p. 3.
L'exploitant de la Grande Roue n'hésite pas à multiplier les articles, à l'occasion, pour dénoncer la concurrence que lui fait le cinématographe Lumière installé dans la salle des fêtes :
L'administration de l'Exposition va même jusqu'à nous faire concurrence : c'est ainsi que nous exploitons ici le biographe américain ; elle a de son côté installé le cinématographe de la salle des fêtes, attraction gratuite.
La Presse, Paris, 15 septembre 1900, p. 1.
La Société Trémolet et Cie pour l'exploitation du Cinématographe Algérien (<22 mai-<21 juillet 1900)
C'est à l'occasion de l'Exposition Universelle de Paris que Louis Trémolet va faire parler de lui. Il est à l'origine de la constitution de la nouvelle Société du Cinématographe Algérien :
SOCIÉTÉ DU CINÉMATOGRAPHE ALGÉRIEN
8º Une convocation de la Société concessionnaire monopole du Cinématographe Algérien à l'Exposition Universelle de 1900, demandant au Syndicat de s'intéresser à l'oeuvre de vulgarisation algérienne qu'elle entreprend, et qui consiste à faire connaître, au moyen du cinématographe, les beautés de l'Algérie rustique et pittoresque.
Après échange de vues, la Chambre décide d'insérer dans le Journal Général un avis informant les syndicataires qu'ils trouveront au Secrétariat les renseignements relatifs à cette entreprise, qui doit être réalisée par une Société anonyme au capital de 75.000 francs.
Journal Général de l'Algérie et de la Tunisie, Alger, dimanche 4 février 1900, p. 1.
Quelques jours plus tard, Louis Trémolet va exposer les détails de son ambitieux projet :
L'Algérie animée
Un de nos jeunes et sympathiques concitoyens, M. Louis Trémolet, photographe d'art, formait le projet, il y a quelque temps, de montrer l'Algérie vivante, l'Algérie animée, à l'Exposition de 1900. Ce projet qu'il a conçu, il l'a réalisé Nous y applaudissons de tout cœur.
Une société de Cinématographe Algérien s’est constituée, "pour la vulgarisation de l'Algérie pittoresque, rustique, agricole et industrielle, par le moyen du cinématographe et de tous les appareils chronophotographiques et graphophoniques.
Ajoutons que cette société a obtenu la concession et le monopole de l'exploitation du cinématographe et du phonographe algériens à l'Exposition Universelle. C’est dire combien est assuré, combien promet d'être grand le succès de l'œuvre entreprise.
Mais, pour en montrer toute l'importance et toute la portée, laissons parler sou initiateur lui-même.
Voici comment s’exprime M. Louis Tremolet :
"La France adresse aujourd’hui à tous les peuples un appel fraternel, elle les convie à la plus imposante manifestation du Génie humain, et dans quelques mois, notre capitale, Paris, ouvrant toutes ses portes, aux innombrables visiteurs accourus des quatre points du monde, offrira le grandiose spectacle de l’union et de la paix par le travail, elle déploira pour eux toutes ses richesses, tous ses trésors ; de notre côté, nous Algériens, ne devons nous pas aussi faire connaître, admirer et aimer notre colonie, tel a été mon premier désir en créant à l’Exposition de 1900, un spectacle par la photographie animée, représentant notre beau pays, sous ses aspects les plus séduisants et les plus variés.
J'ai voulu mettre sous les yeux des visiteurs, le côté pittoresque et rustique de notre Colonie Africaine, faire connaître l’indigène dans ses coutumes, ses mœurs curieuses et souvent étranges, faisant dérouler devant des millions de visiteur, non par une simple image, mais bien plutôt par le mouvement et la vie elle-même, la réalité en un mot, et dans le cadre enchanteur des pays arabes, les scènes les plus attrayantes et les plus animées.
Au point de vue colonisation, j’ai tenu surtout à montrer les progrès accomplis par notre activité nationale, faire admirer nos grandes cités et leurs industries naissantes, nos grands centres avec leurs exploitations modèles, l'Agriculture et la Viticulture et leurs immenses domaines, en un mot faire connaître et apprécier au monde entier, les beautés les richesses de ce merveilleux pays ; n’est-ce pas là, la plus intéressante et la plus utile Vulgarisation que l’on puisse rêver.
Toutes ces scènes, ayant aussi un caractère essentiellement artistique, seront animées du souffle pour ainsi dire réel de la vie, et produiront l’illusion complète de la réalité, chaque tableau sera la reproduction vivante et fidèle de l’Algérie depuis son littoral jusqu'au désert.
La section algérienne, où sera installé le cinématographe algérien, dont je me suis assuré la concession monopole, est édifiée sur un terrain admirablement situé, au centre des Jardins du Trocadéro réservés aux colonies, et en bordure de la grande avenue, où viendra converger le plus grand nombre des visiteurs. C’est donc là, dans un local spécialement aménagé, et que m’a concédé la section algérienne, que sera créé au point de vue algérien, la plus séduisante attraction du siècle.
Je ne doute pas que mes efforts soient couronnés d’un plein succès et qu'ils contribuent à faire connaître, aimer et apprécier encore davantage notre beau pays, si souvent méconnu, et lui apporter les sympathies de tous les peuples venus dans notre capitale célébrer l'apothéose du travail et du génie national.
Ce sera un pas immense pour le développement de notre Algérie, car, lorsqu’on aura vu la reproduction vivante, on tiendra à la connaître encore mieux, on voudra alors y venir, la parcourir en tous sens, afin d’en admirer les sites merveilleux et les richesses incomparables que la nature s’est plu à lui prodiguer."
Bien dit, Monsieur ! Et nous n’avons que des applaudissements à ajouter à ce magnifique exposé de votre œuvre généreuse de propagande algérienne. Vous nous permettrez seulement de nous réjouir en toute sincérité à ses futurs succès pour notre belle colonie française et pour vous-même...
L'Anti-juif algérien, Mustapha, mardi 20 février 1900, p. 2.
Un autre organe de presse français offre quelques informations complémentaires et souligne les difficultés de fonctionnement des attractions algériennes à cause de problèmes d'alimentation électrique :
Aux attractions algériennes. L’administration de l’Exposition cause un préjudice énorme aux propriétaires du stéréorama algérien, qui ne peuvent faire fonctionner leur appareil mécanique faute de la force motrice qui devait leur être fournie depuis l’ouverture de l’Exposition. Ne voyant encore rien venir et fatigués de perdre tous les jours de l’argent, MM. Francowitchtz et Godan viennent de se décider à installer un moteur électrique qui fonctionnera aujourd’hui ou demain. J’engage tous les visiteurs à s’arrêter au stéréorama, ils ne regretteront pas leur argent. Il en est de même pour le propriétaire de la grotte de Bou Arnaina, renfermant un million en pièces de vingt francs authentiques et qui, outre ce million, a installé une cascades de pièces d’or; il a été obligé, lui aussi, de monter un moteur électrique. À signaler une nouvelle attraction, celle de M. Trémollet [sic], propriétaire du cinématographe algérien. Vues animées de l’Algérie, de la Tunisie et de l’Afrique centrale.
La Libre Parole, Paris, 22 mai 1900, p. 2.
Dès le mois de juillet, la société fondée par Louis Trémolet prononce sa dissolution. C'est Auguste Seigle qui préside l'assemblée générale :
AVIS
Société en commandite par Acitons, TRÉMOLET et Cie, pour l'exploitation du Cinématographe Algérien
Les Actionnaires sont convoqués en assemblée générale le samedi, 21 juillet 1900, à neuf heures du matin, dans les salons de l'Hôtel de la Régence, à Alger.
Ordre du jour:
1º Dissolution de la Société;
2º Nomination d'un liquidateur aux lieu et place du gérant actuel ;
3º Autorissation pour le liquidateur de vendre le matériel et de céder le droit au bail.
Le Président, Auguste SEIGLE.
La Dépêche algérienne, Alger, 15 juillet 1900, p. 3.
Le Phono-Cinéma-Théâtre (Ministère du Commerce, 23 mai 1900)
Lors de la soirée organisée par le ministre du Commerce, Alexandre Millerand, Marguerite Vrignault va présenter son Phono-Cinéma-Théâtre, parmi d'autres attractions présentées à l'Exposition Universelle de 1900 :
AU MINISTÈRE DU COMMERCE
Le ministre du commerce et Mme Millerand ont offert, hier soir, un dîner de cent soixante-dix couverts aux bureaux du Sénat et de la Chambre des députés, aux grandes commissions parlementaires et aux grands corps de l'État.
La table, dressée dans la grande salle des fêtes, était garnie de ravissantes corbeilles d'orchidées.
Mme Millerand avait, à sa droite, M. Fallières, président du Sénat, et à sa gauche, M. Deschanel, président de la Chambre des députés.
Le ministre du commerce avait, à sa droite Mme Fallières, et à sa gauche, Mme Maurice Faure.
Pendant le dîner, l'excellente musique de la garde républicaine s'est fait entendre.
À dix heures, la réception a commencé. Au cours de la soirée, plusieurs des attractions de l'Exposition ont été présentées aux invités, notamment le phonocinémathéâtre, les Chansons d'autrefois, chantées par Mme Marie Aubert et M. Tauffenberger, les danseuses espagnoles, etc.
Le Matin, Paris, 24 mai 1901, p. 2.
Marguerite Vrignault va d'ailleurs être félicitée par le ministre lui-même... Cela ne nous dit pourtant pas si le spectacle est à la hauteur des espérances :
Un détail curieux à propos du phonocinémathéâtre de l'Exposition, qui a eu tant de succès avant-hier à la soirée du ministère du commerce.
C'est Mme Marguerite Vrignault, qui a eu l'idée de cette attraction si amusante, dans laquelle on reconstitue non seulement les gestes de nos grands artistes, mais leur voix. Et c'est elle qui, en qualité de directrice et de membre du Conseil d'administration, a présidé à la construction, ainsi qu'à l'organisation de ce joli théâtre.
Chez M. Millerand, mercredi, elle était d'ailleurs très félicitée de son initiative qui constitue une des curiosités de la Rue de Paris.
Le Figaro, Paris, 25 mai 1900, p. 2.
Le Théâtroscope (35 boulevard des Capucines,(3 juin 1900-[décembre 1900])
Le Théâtroscope du boulevard des Capucines va ouvrir ses portes le 3 juin 1900 comme le signale le journal Le Figaro :
Aujourd'hui :
Ouverture du Théâtroscope, 35, boulevard des Capucines...
Le Figaro, Paris, 3 juin 1900, p. 4.
Il s'agit du second lieu où est présenté le Théâtroscope, et il est également placé sous la responsabilité d'Alfred Bréard. Dès lors, la presse va publier régulièrement des entrefilets - pour l'essentiel des réclames produites sans doute par la Société elle-même et son fondateur - dont certains permettent d'avoir au moins une vague idée du spectacle :
Le théâtroscope, 35, boulevard de Capucines et rue de Paris, à l'Exposition, donne un merveilleux spectacle d'illusion étrange : la nuit se fait, une douce voix chante et la scène soudain éclairée représente les acteurs et actrices qui sont censés jouer et chanter. Non seulement ils ont les couleurs de la vie, les gestes appropriés aux paroles, mais l'expression de physionomie ; c'est absolument nouveau et très curieux, il faut voir ce spectacle amusant et hautement scientifique. Fauteuils : 1 fr. Tous les jours de quatre à sept et de huit à onze heures et demie.
Le Gaulois, Paris, 26 juin 1900, p. 3.
Trois jours plus tard, quelques lignes, signées " Nicolet ", complètent un peu l'information :
Nous devons signaler l'inauguration, à Paris, du Théâtroscope, 35, boulevard des Capucines. Une véritable petite bonbonnière et, ce qui ne nuit en rien, un spectacle du plus haut intérêt. Ce théâtre, en ce temps d'Exposition, aura certainement un très gros succès auprès des provinciaux et des étrangers toujours à la recherche de nouveau. En assistant à une soirée du Théâtroscope, on éprouve une surprise indéfinissable. On entend des artistes, on les peut voir, et, en réalité, ils n'existent que pour vous charmer un instant. C'est très curieux.; Nous en reparlerons plus longuement. Les matinées sont données de quatre a: sept heures tous les jours, et les soirées, de huit à onze heures et demie.
Nicolet.
Le Gaulois, Paris, 29 juin 1900, p. 3.
Bien que nous en soyons bien loin, ces descriptions donnant l'illusion de la présence d'acteurs ou de chanteurs n'est pas sans évoquer les hologrammes. Alfred Bréard fait installer, comme il le fait au pavillon d'Exposition Universelle, des mutoscopes, pour tenter de relancer les recettes :
Hier a eu lieu l'inauguration, au Théâtroscope, 35, boulevard des Capucines, des projections animées automatiques. C'est une découverte appelée, croyons-nous, à un grand succès. Le spectacle sera donné en permanence de deux six heures et de huit à onze heures et demie.
Le Matin, Paris, 27 juillet 1900, p. 4.
Alors que le pavillon de l'Exposition Universelle a fermé, la salle du boulevard des Capucines continue ses spectacles, mais, à partir du mois de novembre, ils vont changer de format comme l'indique l'article suivant :
Nous avons reçu, hier soir, dans les bureaux du journal, la visite du prince Colman, né au Transvaal, âgé de vingt-six ans, et qui possède la respectable taille de 2 mètres 45.
Ce colossal géant, qui vient donner aux Parisiens un échantillon dos produits transvaaliens, sera heureux de les recevoir au théâtroscope du boulevard des Capucines, où il sera visible tous les jours, et où les Anglais, toujours à l’affût dos nouveautés, pourront le contempler à leur aise.
La Libre Parole, Paris, 28 décembre 1900, p. 3.
Par la suite, les annonces disparaissent indiquant semble-t-il que le Théâtroscope a fermé ses portes. Plus tard, la salle va ouvrir à nouveau.
→1901
Le Cinématographe du Champagne Mercier (Exposition Internationale, 3 juin-12 novembre 1900)
Le Pavillon du champagne Mercier, situé devant l'École Militaire, est l'œuvre de Paul Dufresne, architecte décorateur. À l'entrée, on découvre un diorama des caves de la maison Mercier, au premier étage, on trouve un salon d'exposition et de dégustation et au second étage, le cinématographe. L'inauguration a lieu le 3 juin 1900 :
Le pavillon du champagne Mercier
L'ouverture du pavillon du champagne Mercier, situé en face l'Ecole Militaire, a lieu aujourd'hui ; il contient, dans ses sous-sols, le panorama des Caves de la Maison ; une salle magnifiquement décorée, destinée à la dégustation, occupe le premier étage ; enfin au deuxième étage est installé un cinématographe qui reproduira les vues les plus intéressantes de la Champagne. C'est, on le voit, une véritable attraction offerte gracieusement aux nombreux visiteurs qui viendront déguster cette marque si appréciée des connaisseurs.
Le Journal, Paris, 3 juin 1900, p. 3.
Pavillon du champagne Mercier à l'Exposition 1900
(Collection du Champagne Mercier)
Le cinématographe présente une petite série de films qui évoquent les différents moments de l'élaboration du champagne Mercier. L'accès est gratuit et la publicité cherche aussi à attirer le jeune public en lui offrant des " cinématographes de poche " (La Petite République, Paris, 22 juin 1900, p. 2) :
Pavillon du champagne Mercier
Tous les jours, de 2 heures à 7 heures, au cinématographe Mercier : " Le champagne à travers les âges ", depuis la découverte de la mousse, en 1600, par Dom Pérignau [sic], moins de l'abbaye d'Hautevillers, près Ay, jusqu'à nos jours.
Ajoutons que, sauf à la dégustation des vins de Champagne, tout est gratuit au " Pavillon du Champagne Mercier ", et que d'élégants petits guides de l'Exposition sont offerts aux visiteurs. Toutes les personnes qui auraient des réclamations à faire sont priées de s'adresser à M. Brault, représentant de la maison Mercier, qui se tient à la disposition du public au pavillon, de 10 heures du matin à 7 heures du soir.
La Petite République, Paris, 28 juin 1900, p. 3.
Si les spectacles cinématographiques payants ne font pas trop recette, tel n'est pas le cas des pavillons qui offrent des vues animées gratuites, comme le pavillon du champagne Mercier :
Pavillon du Champagne Mercier
Le nombre des personnes qui ont assisté aux séances gratuites du cinématographe au pavillon du Champagne Mercier, pendant la journée de dimanche, a été de 6723.
Quatorze mille guides ont été offerts aux visiteurs du panorama représentant les célèbres caves de la maison Mercier, à Epernay.
La Petite République, Paris, 5 juillet 1900, p. 2.
Si l'on en croit ce chiffre, et compte tenu que le jour de référence est un dimanche, on peut malgré tout penser que le cinématographe du pavillon Mercier a eu un succès très significatif. Par ailleurs, le seul incident, minime, à déplorer au cours des mois que dure l'Exposition universelle, est un commencement d'incendie vite maîtrisé ;
Vers dix heures du matin, un commencement d'incendie s'est déclaré, à l'Exposition, dans le pavillon du Champagne Mercier, situé en bordure de l'avenue de la Motte-Piquet.
Le feu était dû à l'explosion d'une ampoule électrique, et a été éteint à l'aide de seaux d'eau par les employés de la galerie de l'alimentation.
Les dégâts sont insignifiants.
L'Aurore, Paris, 15 août 1900, p. 3.
Exposition 1900, Guide offert aux visiteurs du Pavillon du Champagne Mercier, 1900 © Collection particulière |
Comme tous les autres pavillons, celui du champagne Mercier ferme ses portes à la fin de l'Exposition universelle.
Le Cinématographe Géant Lumière (Exposition Universelle/Salle des Machines, [14 juin]-12 novembre 1900)
L'équipe qui s'occupe de ce cinématographe Géant est composée de Charles Moisson, le responsable technique, assisté d'Emmanuel Ventujol et de Jacques Ducom. Dans un premier temps, l'idée a été de l'installer dehors sur le Champ de Mars comme l'explique Alfred Picard, le commissaire général de l'Exposition, au président de la République, Émile Loubet :
LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE À L'EXPOSITION
On examine ensuite la maquette du château-d'eau de 80 mètres de hauteur qui sera placé au Champ de Mars. M. Alfred Picard explique comment fonctionnera un immense cinématographe perfectionné, visible, le soir, de tous les promeneurs du Champ de Mars. Ce cinématographe géant reproduira de grandes scènes de 1900, défilés, cortèges, etc.
S'adressant au général Bailloud, M. Alfred Picard ajoute : " On y verra aussi, mon général, des parades militaires, l'école de Joinville dans ses exercices. "
Le Temps, Paris, 20 septembre 1899, p. 4.
Des problèmes d'ordre technique liés à la résistance au vent de l'écran conduisent les frères Lumière et Picard à choisir une solution moins ambitieuse, en plaçant le dispositif dans la salle des Fêtes de l'Exposition. Il s'agit d'une immense salle (6.300 m2) pouvant contenir 15000 personnes dans laquelle va être disposé l'écran géant de 20 mètres de largeur sur 16 de hauteur. Si la maison Lumière prend en charge l'équipe technique, l'écran et le projecteur, l'administration de l'Exposition universelle s'occupe de la cuve d'eau - afin de mouiller l'écran et le rendre assez transparent pour que l'on puisse regarder des deux côtés -, les treuils et la cabine de projection.
" Vues du grand écran du Cinématographe Lumière, installé par l'administration de l'Exposition Universelle de 1900 dans la Salle des Fêtes, située alors, au centre de la Galerie des Machines. Cet écran avait 18 mètres de haut sur 18 mètres de large. (Photographie communiquée par M. Moisson qui s'occupait de la direction technique de ce cinéma, assisté de M. Ventugol [sic] et de l'auteur de cet ouvrage) " © Jacques Ducom, Le Cinématographe scientifique et industriel, Paris, Albin Michel, [1911], p. 68. |
Le Cinématographe Géant Le grand écran dressé par Louis Lumière, Galerie des Machines, pour la présentation de son cinématographe géant. (Document Louis Lumière) © Georges Sadoul, Histoire générale du cinéma, Les Pionniers du Cinéma (1897-1909), Paris, Éditions Denoël, 1947 p. 103. |
Le Cinématographe Géant [1900] © Mary Evans Picture Library |
La Presse, Paris, 30 juin 1900, p. 2. |
Si l'inauguration de l'Exposition a lieu le 14 avril, il faut attendre le 16 juin pour entendre parler du Cinématographe Géant, à l'occasion de la visite du roi Oscar de Suède. Reçu par M. Picard, commissaire général de l'Exposition et M. Chardon, secrétaire général, qui ont projeté d'offrir au souverain un spetacle d'illuminations, le monarque découvre le spectacle :
L'administration de l'Exposition avait projeté d'offrir an roi, aussitôt après son dîner le spectacle de l'illumination du palais de l'Electricité et du Château-d'Eau.
Malheureusement, on n'était pas encore prêt et le roi de Suède, conduit par MM. Picard et Chardon, dut passer sa soirée à la salle des Fêtes où il assista à une séance de cinématographe.
Ce n'est que vers onze heures que les fontaines lumineuses purent fonctionner devant le roi de Suède qui a manifesté là plus vive admiration pour ce merveilleux spectacle.
Le XIXe siècle, Paris, 16 juin 1900, p. 3.
Malgré ce contretemps, le roi Oscar n'a pas boudé son plaisir, ni le succès personnel de sa visite :
[...] Une séance de cinématographe a eu lieu. Le signal des applaudissements a été donné par Oscar II après une scène représentant l'assaut d'un mur par des chasseurs alpins.
- Allons, messieurs, a crié le roi, applaudissons les soldats français !
Paris, Paris, 16 juin 1900, p. 1.
Le film signalé fait évidemment partie de la collection Lumière. On ignore si entre la visite royale et la première annonce dans la presse du Cinématographe Géant, il y a eu d'autres projections. N'oublions pas d'ailleurs que le spectacle est gratuit et que sa mise en place reste complexe. La presse ne commence à parler des projections qu'à partir du 27 juin 1900 (Le Petit Journal, Paris, 28 juin 1900, p. 2) et c'est Le Matin qui offre le compte rendu le plus complet de cette attraction :
LE CINÉMATOGRAPHE-GÉANT
C'était hier soir, à neuf heures, dans la salle des Fêtes, la première séance du cynématographe-géant qui désormais fonctionnera tous les soirs.
Au milieu dé la gigantesque piste, un énorme écran se dresse, face au grand orgue qu'on a essayé tous ces jours derniers.
Pendant que se projettent sur l'écran les différentes scènes cinématographiques, parmi lesquelles il faut citer une vue tout fait drôle de la foule sur le trottoir roulant, les joueurs de cartes arrosés, l'assaut d'un portique, l'arrivée d'un train en gare, les jeux icariens, le carnaval à Nice, un bal aux Sables-d'Olonne, une querelle enfantine, l'assaut d'un mur par des chasseurs à pied, pendant que tout cela passe devant nos yeux, l'orgue accompagne les tableaux d'airs appropriés, produisant un effet grandiose dans cette immensité. Viennent ensuite d'admirables projections de photographies en couleurs, gerbes de fleurs de toutes espèces et de toutes teintes,intérieurs d'appartements, intérieurs d'églises, paysages, le tout merveilleusement réel. Et entre les tableaux éclatent, on ne sait trop où,, des. applaudissements lointains. Puis, quand la séance est finie, et tandis que l'orgue joue l'hymne russe, l'électricité aveuglante jaillit de tous les côtés, chassant les spectateurs qui s'étaient doudement habitués à la seule clarté papillotante du cinématographe-géant.
Le Matin, Paris, 1er juillet 1900, p. 2.
Le Rapport (voir infra) établi par le commissaire général, Alfred Picard, indique que les séances comportent 15 vues animées et 15 vues fixes en couleurs. On ne connaît que quelques titres des 150 qui ont été présentés. Désormais les séances vont se succéder, parfois interrompues par des fêtes ou des événements particuliers qui nécessitent l'espace de la Salle des Fêtes, mais les informations n'apportent désormais plus guère de nouveautés. Il faut attendre en fait le début du mois d'août pour que le Cinématographe Géant soit honoré par la présence du Shah d'Iran qui décide de se rendre aux projections de la Salle des Fêtes :
C'est à la salle des Fêtes, brillamment éclairée, que le shah est amené tout d'abord. Au dessous du grand orgue est disposée une triple rangée de fauteuils et de chaises. M. Picard s'assied à la droite du shah, le grand vizir à sa gauche. Parmi les invités privilégiés de M. Picard, remarqué les commissaires généraux et leurs femmes, M. Paul Loubet et le colonel Silvestre.
Le grand orgue joue la Marseillaise et l’hymne persan. M. Picard offre ensuite à Sa Majesté une séance de cinématographe géant. Successivement apparaissent les tableaux suivants : cortège de M. Loubet au Champ-de-Mars le jour de l'inauguration de l'Exposition ; une vue panoramique de la rue des Nations ; les jeux Icariens ; une caravane de chameaux ; les bords du Nil ; les danses espagnoles à la Feria ; la sortie des ateliers Lumière ; une mauvaise farce ; une procession à Séville ; un gros temps en mer ; l'assaut d'un mur par le 29e chasseurs ; enfin la photographie dos couleurs.
Le schah, qui s'intéresse fort à ce qui touche à la cinématographie, a paru goûter avec un plaisir tout particulier à ce spectacle, dont il a félicité M. Picard.
Le Matin, Paris, 5 août 1900, p. 2.
Son intérêt pour le cinématographe n'est pas fortuit, on vient d'organiser pour lui une séance privée pour des essais avec le biophonographe d'Henri Joly et il va emporter de nombreux cinématographes, dont ceux de la maison Gaumont. Quant au Cinématographe Géant, il va poursuivre ses projections sans plus rien de bien notoire jusqu'à la fin de l'Exposition universelle, en novembre 1900.
1 3. Séances de cinématographie et de photographie en couleurs dans la salle des Fêtes. - Un autre spectacle du plus haut intérêt, offert à titre également gratuit, était celui des séances de cinématographie et de photographie en couleurs dans la salle des Fêtes. |
L'écran situé suivant le plan de l'axe longitudinal du Champ de Mars avait 21 mètres de largeur et 18 mètres de hauteur. Afin de le soustraire à la poussière, les opérateurs le descendaient, après chaque soirée, dans une cuve en ciment ménagée sous le plancher de la salle et contenant de l'eau. Une demi-heure avant la séance, il était relevé au moyen d'un treuil établi au-dessus de la verrière ; pendant le montage, des jets d'eau le lavaient à nouveau. L'étoffe avait été choisie de manière à laisser passer, une fois mouillée, à peu près autant de lumière qu'elle en réfléchissait ; de la sorte, l'image se voyait également des deux côtés et les spectateurs pouvaient prendre place dans tous les gradins de la salle. Il résulte des comptages approximatifs faits à diverses reprises que le nombre moyen des spectateurs fut de 5,000 pour les séances chargées et de 3,000 pour les séances moins suivies. La moyenne de 5,000 est très au-dessous du nombre effectif des visiteurs qui, plusieurs fois, se pressèrent dans la salle pour assister au spectacle. Généralement, l'affluence était plus grande le dimanche, le lundi, le jeudi et le samedi, que le mardi, le mercredi et le vendredi. Au total, 1,400,000 personnes environ ont profité de cette attraction si intéressante. Elle a fait le plus grand honneur à MM. Lumière, qui, d'ailleurs, en supportaient les frais pour la plus large part. Dès le début de ses études, le Commissaire général avait conçu le projet de faire une application plus grandiose encore du cinématographe ; il voulait, chaque soir, offrir aux foules massées dans le Champ de Mars et au Trocadéro une série de vues sur un écran gigantesque disposé au droit de la Tour. Les expériences préliminaires ayant donné des résultats satisfaisants, une longue cuve fut créée à l'emplacement voulu. MM. Lumière, de leur côté, préparèrent le matériel. Malheureusement les dispositifs de support de l'écran ne lui assuraient pas une fixité suffisante sous l'action du vent, et le temps manqua pour transformer ces dispositifs. |
Alfred Picard, Exposition universelle internationale de 1900 à Paris. Rapport général administratif et technique |
L'American Biograph (Hippodrome, 14-15 juillet 1900)
C'est à l'occasion de la Fête Nationale que l'Hippodrome va proposer des projections animées grâce à l'American Biograph :
L'Hippodrome donnera une matinée demain dimanche 15 juillet.
Dès ce soir les principales scènes de la revue de cet après-midi seront projetées sur un écran de 520 mètres carrés, par l'American Biograph.
Le Petit Parisien, Paris, 14 juillet 1900, p. 4.
La revue est celle qui a lieu à Longchamp :
A l'Hippodrome :
A l'occasion de la Fête nationale, la public assistera ce soir, grâce à l'American Biograph, à la Revue qui a lieu dans l'après-midi à Longchamp.
L'Écho de Paris, Paris, 15 juillet 1900, p. 4.
Le Biophonographe (Projection privée pour le Shah de Perse, 5 août 1900)
Le Shah de Perse, en visite à Paris, à l'occasion de l'Exposition Universelle, va avoir sans doute la primeur de l'appareil d'Henri Joly, commercialisé par les frères Normandin. Le souverain est friand de ce type d'innovations techniques et cinématographiques. Sans qu'il nous soit possible de l'affirmer, il est fort probable que l'inventeur ou l'un des deux frères soient à la manœuvre :
Le souverain grand amateur d'inventions, comme l'on sait, a employé une partie de la matinée à l'audition et à la vue d'un appareil nouveau, le biophonographe qui enregistre mécaniquement et reproduit ensuite les vues cinématographiques en même temps que les chants ou les paroles qui accompagnent chaque geste ou mouvement.
Le shah a pris un grand plaisir à ce spectacle intime auquel assistaient les principaux personnages de sa suite.
Le Siècle, Paris, 5 août 1900, p. 2.
L'American Biograph (Grand Théâtre Métropolitain-Porte Maillot, 5 août-> 24 septembre 1900)
C'est dans le cadre d'une grandiose représentation "Africa in Paris" où de multiples artistes interviennent, que l'opérateur Gibbons présente l'American BIograph.
International Herald Tribune, Paris, dimanche 5 août 1900, p. 3.
Au programme l'on trouve The Total Eclipse of the Sun at Algiers, The Great Prize Fight et des vues de la Chinese War. Le spectacle attire les revendeurs malhonnêtes qui pullulent autour du théâtre :
Le spectacle du Théâtre Métropolitain obtient en ce moment un si vif succès que des marchands n'ont pas craint d'organiser, aux alentours des portes, sur l'avenue de la Grande-Armée, un commerce frauduleux de billets. Cinq de ces trafiquants ont été conduits au commissariat de police, à l'heure où le public du dimanche se pressait, avant-hier, aux bureaux.
Voilà maintenant les spectateurs prévenus. Pour applaudir aux lions de Juliano, à la danse Éclair et aux épisodes dramatiques de l' "Afrique à Paris", on est prié de s'adresser simplement aux guichets, qui, dès aujourd'hui, sont doublés.
Le Journal, Paris, 21 août 1900, p. 6.
Par ailleurs, le spectacle semble connaître des difficultés, mais qui ne concernent pas l'american biograph :
- Les difficultés que présentait la grande chasse avec les cinq lions de Juliano ont été levées, et ce numéro extraordinaire figurera demain au programme du Théâtre Métropolitain. Avec le merveilleux biographe Gibbons et les gymnastes, le spectacle sera d’un intérêt sans précédent.
Dimanche soir commenceront les ascensions du ballon captif lumineux, avec descente en parachute à 1,000 mètres. Cette attraction, unique au monde, fera courir tout Paris à la porte Maillot,et le succès du Métropolitain va grandir encore. Les délégués du congrès des postes ont chaleureusement applaudi, hier, à l’émouvante Afrique à Paris.
L'Intransigeant, Paris, 25 août 1900, p. 3.
Le spectacle semble se prolonger jusqu'à la fin du mois de septembre :
THÉÂTRE MÉTROPOLITAIN (Porte Maillot), 9 h.-Attractions : Danse Eclair ; Les Lions.- L'Afrique à Paris. Matinées : Jeudis, dimanches (3 h.).
Le Gaulois, Paris, 24 septembre 1900, p. 4.
L'American Biograph (Folies-Bergère, 1er octobre-31 décembre 1900) → 1901
L'American Biograph reprend du service aux Folies-Bergère au début du mois d'octobre où il est annoncé comme l'une des attractions nouvelles :
Ce soir, aux Folies Bergère, cinq débuts : Chinko, jongleur comique ; Lamartine, imitation de danses américaines ; Thérèse et Partner, hypnotiseur ; Troupe russe Tartakoff, danses russes ; l’Américan Biograph vues inédites d'actualité ; les Huline, célèbres clowns excentriques.
La Souveraineté nationale, Paris, 1er octobre 1900, p. 4.
Ce n'est qu'exceptionnellement que la presse évoque le spectacle donné aux Folies-Bergère :
SOIRÉE PARISIENNE
AUX FOLIES-BERGERE
UN SPECTACLE SENSATIONNEL
M. Marchand a, depuis longtemps, habitué le public nombreux et élégants qui fréquente les. Folies-Bergère à un spectacle toujours attrayant, mais cette fois il s'est surpassé.
Son programme est vraiment hors de pair. Comme l'actualité ne le laisse jamais indifférent, M. Marchand a fait ajouter à l'American Biograph, un des numéros les plus goûtés, l'arrivée à Paris de Krüger. C'est là un tableau d'un irresistible attrait : vingt autres numéros, tous d'un ordre supérieur, enrichissent le programme incomparable du théâtre de la rue Richer. C'est pour n'en citer que quelques-uns : Madame Bonaparte, le ravissant ballet de Pfeiffer, que Mariquita a réglé avec sa science et son esprit coutumiers et dans lequel deux jeunes étoiles, Mlles Brucky et Ruzeau, rivalisent de grâce et de beauté ; le quartette Armani, dans lequel on acclame le premier mandoliniste du monde ; la troupe Tartakoff, des danseurs et des danseuses russes, dont la réputation est universelle ; Hill et Hull, des comiques excentriques d'une force et d'une adresse rares, et enfin, brochant sur ce tout déjà admirable, le célèbre dompteur Seeth et ses vingt et un lions de Ménélick :
Il faut voir Seeth, calme et souriant, au milieu de ses vingt et un fauves aux crocs toujours menaçants, dont il se fait obéir sans menaces ni colère.
Les exercices périlleux auxquels ils se livrent semblent d'une extrême simplicité, tant Seeth se joue visiblement du danger. Ils sont pourtant, terribles, ces lions, si terribles, que nul autre que Seeth ne peut les approcher, que nul autre que lui n'ose entrer dans leurs cages, aux heures des repas.
Et cependant, un simple fouet à la main, Seeth va et vient au milieu de cette armée de fauves, comme un berger de Virgile au milieu de son troupeau de moutons; C'est•superbe et terrifiant.
L'Écho de Paris, Paris, 13 décembre 1900, p. 3.
The American Biograph est toujours à l'affiche à la fin de l'année 1900 :
FOLIES-BERGÈRE. Téléphone: 102.59.-Tous les soirs, à 8 h 1/2.-Le compteur Seeth et ses 20 Lions de Ménélick. Criterium de la lutte, Hackenschmidt. Madame Bonaparte, ballet-pantomime 2 tableaux. Quartette Armanini. La Sylphe. Hill et Hull. The american Biograph. Dimanches et fêtes, matinées à 2 h 1/2.
Gil Blas, Paris, 21 de diciembre de 1900, p. 4.
Les séances se prolongent au cours des mois suivants.
→ 1901
Le Phono-Cinéma-Théâtre (42 bis, Boulevard Bonne-Nouvelle, 10 novembre-31 décembre 1900) → 1901
Après avoir connu un succès relatif à l'Exposition Universelle de Paris, le phono-cinéma-théâtre va s'installer dans une salle située au 42 bis, boulevard Bonne-Nouvelle, à deux pas du théâtre du Gymnase. C'est Marguerite Vrignault, directrice artistique et inspiratrice du projet, qui va exploiter le programme de vues animées et sonores. L'inauguration a lieu le 10 novembre alors que les portes de l'Exposition sont sur le point de fermer :
L'inauguration du Phono-Cinéma-Théâtre dans la salle du boulevard Bonne-Nouvelle, a eu lieu hier avec un plein succès.
Le programme était d'ailleurs très heureusement composé, et le public fort nombreux a beaucoup applaudi la saisissante représentation de l'Enfant prodigue, où l'on revoit avec plaisir Mmes Félicia Mallet, et Marie Magnier et M. Duquesne. Les danses Directoire de Mmes Blanche et Louis Mante, les chansons de Polin, Mlle Kerf et M. Viscusi dans le ballet de Terpsichore ; les Chansons en Crinoline de Mily Meyer, et les étonnants excentriques américaines Mason et Forbes.
Un triomphe a accueilli l'admirable reconstitution de la scène du duel d'Hamlet, où Sarah Bernhardt est d'une si tragique beauté. Durant six mois, c'est au Phono-Cinéma-Théâtre que l'on pourra venir applaudir la grande artiste qui nous quitte, et cela seul suffirait à assurer le succès de ce charmant théâtre.
Le Figaro, Paris, 11 novembre 1900, p. 5.
Il s'agit, bien sûr, de continuer à exploiter les vues qui ont été présentées pendant plusieurs mois à la rue de Paris de l'Exposition. Nous n'avons ici qu'une partie du répertoire, même s'il est très probable que toutes les vues aient été présentées au cours des mois. Une précision dans l'article nous permet de savoir que la salle est aménagée et louée pour une durée de six mois, ce qui signifie que les projections prendront fin, ce qui est le cas, en mai 1901. Quelques annonces vont être publiées, mais sans aucun doute la plus singulière est celle que le Journal offre dans son édition du 22 novembre :
MONSIEUR bien élevé, instruit, très riche, encore jeune, désirant se marier, voudrait faire connaissance d'une personne ressemblant à l'artiste qui mime le rôle de Phrynette dans l'Enfant prodigue, au Phono-Cinéma-Théâtre, 42 bis, boulevard Bonne-Nouvelle. Ecrire poste restante, sous initiales, T.M., bureau de la Madeleine.
Le Matin, Paris, 22 novembre 1900, p. 6.
On imagine que les jeunes femmes intéressées par ce " rôle " ont dû se précipiter pour bien vérifier qui est donc cette actrice qui joue Phrynette... et savoir si elles ont une certaine ressemblance... Pour le reste, même si l'annonce du spectacle est publiée journalièrement, plus aucune information particulière n'est communiquée.
→ 1901
L'appareil Gaumont (Salle de la Bourse du Travail, 11 novembre 1900)
Un conférence est organisée avec des projections animées :
Bourse du Travail.-[...]
Le dimanche 11 novembre, à 8 heures 1/2, salle de la Bourse du Travail, conférence syndicale à 9 heures 1/2, grande séance de cinématographe (appareils de la maison Gaumont).
La Lanterne, Paris, vendredi 9 novembre 1900, p. 3.
Le Biographe Américain de l'Automobile Club de France (Hôtel Pastoret, Salle des Fêtes, 15 novembre 1900)
À l'occasion de la soirée organisée par l'Automobile Club et l'Aéro Club, Clément-Maurice présente une vue Panorama cinématographique de l'Exposition Universelle qu'il présente avec un biographe américain - ou American Biograph - de l'American Mutoscope and Biograph Company :
ESCRIME
A LA SALLE DES FÊTES DE L'A. C. F.
Voici le programme de la soirée, mi-escrime, mi-aéronautique, que l'Automobile Club et l'Aéro Club offrent ce soir à leurs invités et à leurs membres dans la salle des fêtes de l'hôtel Pastoret.
Rappelons aux sociétaires des deux Cercles que les dames, sous la réserve de parenté, — de rigueur également aux dîners du mercredi, — y sont admises.
Tenue de soirée, et coiffure de théâtre ou de bal, sans chapeau, pour les dames.
PROGRAMME:
Première partie
MM. Raux, adjudant, maître au 5e d'infanterie, et G. Jourdan, professeur au Cercle (fleuret) ;
MM. Bougnol, professeur au Cercle, 2me prix, tournoi international 1900, et L. Perrée, amateur, 2me prix, tournoi international de 1900 (épée) ;
MM. Castérès, professeur, et Jobert, amateur (boxe);
MM. Lucien Merignac, professeur, 1er prix, tournoi international de 1900, et L. Masson, 1er prix, tournoi international de 1900 (fleuret).
Entr'acte
Conférence de M. le comte de La Vaulx, son voyage en ballon : de Paris en Russie (grand prix de l'Exposition).
Deuxième partie
MM. Cuvilliez, adjudant, maître au 89e d'infanterie, et Marcel Boulenger, amateur (fleuret) ;
MM. Laurent, professeur, 1er prix, tournoi de Dunkerque, et Bruneau de Laborie, amateur (épée) ;
MM. Conte, professeur, 1er prix, tournoi international de 1900, et le capitaine comte de La Falaise, amateur, 1er prix, tournoi international de 1900 (sabre) ;
MM. Albert Ayat, professeur au Cercle, 1er prix, tournoi international de 1900, et Ramon Fonst, amateur. 1er prix, tournoi international de 1900 (épée).
Le Biographe Américain
Panorama cinématographique de l'Exposition Universelle (M. Clément Maurice).
***
Le Panorama cinématographique de M. Clément Maurice, absolument inédit et d'un effet très curieux, sera une des parties les plus intéressantes du programme très éclectique de cette fête qui promet d'être des plus élégantes.
Louis Perrée.
L'Auto, Paris, 15 novembre 1900, p. 1.
1901
← 1900 Le cinématographe Lumière (14, boulevard des Capucines, 1er janvier-31 décembre 1901) → 1902
Dès le début de l'année, les séances du cinématographe Lumière sont annoncées par la presse:
Le Cinématographe Lumie`re, visible tous les jours, 14, boulevard des Capucines; 6, boulevard Saint-Denis, et salle des Fêtes des grands magasins Dufayel.
L'Intransigeant, Paris, mardi 1er janvier 1901, p. 2.
← 1900 Le cinématographe Lumière (6, boulevard Saint-Denis, 1er janvier-31 décembre 1901) → 1902
Dès le début de l'année, les séances du cinématographe Lumière sont annoncées par la presse:
Le Cinématographe Lumie`re, visible tous les jours, 14, boulevard des Capucines; 6, boulevard Saint-Denis, et salle des Fêtes des grands magasins Dufayel.
L'Intransigeant, Paris, mardi 1er janvier 1901, p. 2.
← 1900 Le cinématographe Lumière (Grands Magasins Dufayel, 1er janvier-31 décembre 1901) → 1902
Dès le début de l'année, les séances du cinématographe Lumière sont annoncées par la presse:
Le Cinématographe Lumie`re, visible tous les jours, 14, boulevard des Capucines; 6, boulevard Saint-Denis, et salle des Fêtes des grands magasins Dufayel.
L'Intransigeant, Paris, mardi 1er janvier 1901, p. 2.
Le spectacle se complète parfois de projections de vues fixes et d'auditions phonographiques :
Tous les jours, de deux à six heures, et les dimanches, de dix heures à midi, spectacle varié dans la salle des attractions des Grands Magasins Dufayel. Projections photographiques avec explications sur les événements de Chine et du Transwal, l'Exposition de 1900, la Côte d'Azur. Au cinématographe, le récent voyage du président de la République à Nice et à Toulon, le jubilé et les obsèques de la reine Victoria, les courses de taureaux, les cuirassés français et italiens, etc. Intermèdes par le phonographe "Le Stentor". Exposition. Nombreuses attractions.
L'Intransigeant, Paris, 3 juin 1901, p. 4.
C'est en juillet qu'à lieu la visite des ambassadeurs marocains qui ont admiré le cinématographe :
Les ambassadeurs marocains ont passé, hier, une bonne journée à Paris. M. Dufayel, qui avait déjeuné avec eux, les a amenés avec leurs suites, les uns en landau, les autres dans ses automobiles, assister à la séance de gala qu'il leur offrait dans la salle du cinématographe de ses magasins, et où ils ont pris un très grand plaisir à se voir représenter lors de leur réception à l'Elysée.
Le Journal, Paris, 10 juillet 1901, p. 1.
Un conférencier est également sollicité alors que l'on atteint déjà les 7.000 séances de projections animées :
Spectacle entièrement nouveau chaque semaine aux Grands Magasins Dufayel, où tous les jours de deux à six heures, et les dimanches et jours fériès de dix heures à midi, le cinématographe le plus perfectionné qui existe, obtient toujours le m`me succès après plus de 7,000 sèances. Au programme tous les sujets d'actualité : La revue du 14 juillet avec la compagnie cycliste, les Manoeuvres de l'escadre de la Méditerranée, l'Arche de Noé, Scèns comiques. Transformations, etc., etc. Explications par un conférencier. Intermède par le graphophone "Le Stentor." Tous les jeudis dans les Magasins, après-midi musical par le petit orchestre. Exposition. Nombreuses attractions.
L'Intransigeant, Paris, 14 août 1901, p. 4.
En août également, les magasins Dufayel accueillent les enfants du Patronage laîque:
Patronage laïque
La sortie de dimanche 18 août, avec visite au cinématographe des magasins Dufayel a été des plus charmante, favorisée par un temps splendide.
Peu de nos enfants connaissaient le cinématographe aussi c’est avec une vive surprise et une admiration sincère qu’ils ont pu voir fonctionner ce merveilleux appareil qui représente la vie réelle d’autant plus fidèlement que les personnages sont de grandeur naturelle et que les plus petits bruits comme les paroles sont reproduits avec la plus fidèle perfection. Aussi nos enfants ravis, n’ont-iis cessé de demander des explications tant est inné chez les petits le désir d’apprendre ; et nous avons dû leur promettre de les ramener une autre fois voir ces projections lumineuses qui étonnent même les esprits les plus blasés, et font que malgré les tentatives de recul des amis des temps passés toutes les intelligences sont tournées vers la science, cette grande libératrice qui détruira fatalement l’œovre malsaine des siècles passés, la superstition et la religion.
Le Conseil d'administration.
Le Tribun, Montreuil, 25 août 1901, p. 1.
Répertoire (autres titres): Les obséques de la reine Victoria (L'Intransigeant, Paris, 14 février 1901, p. 4), Carnaval de Nice (La Justice, Paris, 14 avril 1901, p. 3), Les manoeuvres des alpins, La Terre Sainte et Jérusalem (Le Temps, Paris, 15 avril 1901, p. 3), Le voyage du président de la République à Nice et à Toulon (Fêtes franco-italiennes, Visite des cuirassés, Évolution des escadres) (L'Intransigeant, Paris, 23 avril 1901, p. 4), La Course d'automobile Paris-Berlin, (avec explications sur les détails de cette course et l'arrêt de chaque concurrent à la frontière belge), Le Dompteur du Jardin d'Acclimatation et ses fauves (L'intransigeant, Paris, 7 juillet 1901, p. 4), L'Arrivée du tsar en France, La Revue navale (Le Journal, Paris, 21 septembre 1901, p. 4), La Revue de Dunkerque, La Revue de Bétheny (L'Intransigeant, Paris, 23 octobre 1901, p. 4).
← 1900 Le Phono-Cinéma-Théâtre (42 bis, Boulevard Bonne-Nouvelle, 1er janvier-[7 mai] 1901)
←1900
Les séances du Phono-Cinéma-Théâtre vont se poursuivre au cours des premiers mois de l'année 1901. Très peu d'annonces nouvelles et l'on ne fait que répéter les informations déjà connues. La seule nouveauté va être l'introduction de vues nouvelles relatives aux funérailles de la reine Victoria :
Le Phono-Cinéma-Théâtre a ajouté depuis avant-hier à son programme si attrayant, un merveilleux défilé des obsèques de la reine Victoria qui ne dure pas moins de dix minutes. On y voit, comme on les a vus le 2 février, à Londres, le duc de Norfolk et le feld-maréchal lord Roberts, la musique des Horse Guards, le char funèbre, le roi Edouard VII et l'empereur Guillaume, le duc de Connaught, les rois de Grèce et de Portugal, les princes étrangers représentant toutes les cours européennes, les voitures royales, etc., etc.
Cette nouvelle attraction attirera encore plus la foule au petit théâtre du boulevard Bonne-Nouvelle où l'on voit et entend toujours Sarah Bernhardt, Coquelin aîné, Cléo de Mérode. etc.
Le Journal, Paris, 10 février 1901, p. 5.
Il est difficile de savoir de quel éditeur de films provient la série consacrée aux obsèques de la souveraine britannique... On rappelle, au passage, les noms de quelques acteurs qui figurent dans les films du phono-cinéma-théâtre. Ce qui est sans doute le plus remarquable, c'est que le périodique, Le Menestrel, en février 1901 va consacrer un long article au spectacle, dont on peut dire qu'il n'est très nouveau :
Le Phono-Cinéma-Théâtre. — Un nom fâcheux et désagréable pour qualifier un spectacle curieux, ingénieux et amusant. Curieux surtout, car ce spectacle est basé sur une intelligente combinaison du cinématographe et du phonographe, combinaison qui permet de reproduire, dans leur ensemble vocal et mimique, c'est-à-dire dans leur exactitude absolue et complète, telle ou telle scène de tel ou tel ouvrage, où, en même temps qu'on entend le dialogue des personnages avec la voix même des acteurs qui les représentent et que nous connaissons bien, on voit reproduits tous leurs mouvements, les passades, les jeux de scène, etc. Je sais bien que si le cinématographe est parfait, il n'en est pas tout à fait de même du phonographe, qui laisse encore à désirer, et que celui-ci conserve encore un côté canard qui altère un peu trop les voix que nous sommes accoutumés d'entendre ; cependant ces voix restent reconnaissables et, en somme, le résultat obtenu est vraiment intéressant.
Pour ne parler que du cinématographe proprement dit, on voyait là,, au naturel, des choses étonnantes : Mlle Zambelli et M. Vasquez dansant un pas du ballet du Cid à l'Opéra; Mlle Rosita Mauri dans la Korrigane ; Mlle Chasles dans le Cygne, de l'Opéra-Comique ; Mlle Cleo de Mérode dansant la gavotte ; mieux encore, Mlle Félicia Mallet, Mlle Marie Magnier et M. Duquesne dans trois scènes de l'Enfant prodigue. Mais le comble, c'était de voir et d'entendre, par l'alliance des deux procédés, Mme Sarah Bernhardt dans la scène du duel d'Hamlet, Mme Réjane dans Ma cousine, Mlle Mariette Sully dans la Poupée, M. Coquelin dans les Précieuses ridicules et dans Cyrano de Bergerac, M. Polin dans ses chansons de tourlourou, MlIe Milly Meyer dans ses chansons en crinoline... Et, comme couronnement, une scène désopilante, Chez le photographe, par deux clowns excentriques, Mason et Forbes, avec le bruit des gifles qui. retentissent, des chaises qui se cassent, des meubles qu'on culbute, etc. Ceci est inénarrable.
La directrice de ce gentil spectacle était Mme Marguerite Vrignault, et il n'est que juste de faire connaître les noms des deux ingénieurs qui l'avaient rendu possible, MM. Clément-Maurice et Lioret.
(A suivre.) ARTHUR POUGIN.
Le Ménestrel, Paris, 10 février 1901, p. 43.
Cet article nous fournit, malgré tout, ce que l'on peut considérer comme le programme presque complet du Phono-Cinéma-Théâtre. Puis, plus aucune information significative n'est publiée jusqu'à la dernière annonce du 7 mai (Le Journal, Paris, 7 mai 1901, p. 6.)
← 1900 The American Biograph (Folies-Bergère, 1er janvier-[17] mai 1901)
← 1900
The American Biograph poursuit ses projections dans les premiers mois de l'année 1901. Parfois, à l'occasion de certaines projections exceptionnelles, un article est publié :
SPECTACLES DIVERS
Le Biograph des Folies-Bergère présentera, à partir de ce soir, douze vues nouvelles toutes d'un intérêt transcendant. L'une d'elles, notamment, produira un imposant effet : c'est celle qui représentera sa Sainteté Léon XIII, assis sur un banc du jardin du Vatican et méditant. La vie anime les traits du vénérable pape, dont le sourire paternel et bienveillant semble comme un encouragement et une bénédiction à la foule qui le contemple.
Gil Blas, Paris, 11 janvier 1901, p. 4.
Les funérailles de la reine Victoria constituent également une série remarquable :
Hier, deux nouvelles vues, envoyées de Londres ont émerveillé les spectateurs qui assistaient aux Folies-Bergère aux projections de l'Américan Biograph. L'une montre le nouveau roi d'Angleterre, Edouard VII, dans son uniforme de grande tenue arrivant en voiture au Palais.
L'autre est la représentation des funérailles de la reine Victoria, avec le défilé de tous les officiers accrédités par les nations étrangères.
Ces deux vues, qui tous les soirs feront désormais partie du spectacle des Folies-Bergère, augmentent encore l'attrait de la soirée, où successivement on assiste à l'éblouissant balleet "Napoli" aux incroyables exercices des chiens artistes de Gillett, aux danses de Luz Chavita et de Miss Bartho, la curieuse bellerine yankee, à la gymnastique stupéfiante des soeurs Klos. Soirée unique en vérité.
Le Pays, Paris, 9 février 1901, p. 4.
Les séances s'interrompent, semble-t-il, dans les premiers jours d'avril :
FOLIES-BERGÈRE. Téléph. 102-59.-Tous les soirs à 8 h 1/2, Napoli, ballet; 4 tableaux, de Po. Milliet et Alfano, Emile Gautier, travail équestre aérien. Les Papillons, nouvelles danses lumineuses. Delmore et Lee Gillett et ses 25 chiens. The Amérivan Biograph. Vues inédites, etc. Dimanches et fêtes, matinées à 2 h 1/2.
Le Petit Journal, Paris, 4 avril 1901, p. 4.
Certains journaux publient encore des annonces jusqu'à la fin du mois de mai (La Libre Parole, Paris, 17 mai 1901, p. 4). Ce n'est qu'en septembre que les séances reprennent, à la réouverture de la salle.
Répertoire (autres titres) : Épisodes de la vie de la reine Victoria et du nouveau roi d'Angleterre (Le Figaro, Paris, 26 janvier 1901, p. 4), La reine Victoria, Edouard VII (Gil Blas, Paris, 27 janvier 1901, p. 4), [demain dimanche] L'Entrée à Londres du nouveau d'Angleterre, Le Mariage de la jeune reine Wilhelmine (Le Journal, Paris, 16 février 1901, p. 5), Funérailles de la reine Victoria : le défilé des officiers des nations étrangères (La Fin de siècle, Paris, 24 février 1901, p. 1), La Prise de Pékin (Le Figaro, Paris, 9 mars 1901, p. 4).
← 1900 L'American Biograph (Galerie Georges Petit, 1er janvier-31 décembre 1901) → 1902
←1900
La Galerie Georges Petit continue de présenter des vues animées avec l'American Biograph, mais sans renouvellement du programme :
GALERIE GEORGES PETIT, 8, rue de Sèze.-Vues animées de S. S. le pape Léon XIII, reproduites par l'American Biograph. Tous les jours de 2 h. à 6 h. et de 8 à 11 h. Orgue Célesta-Mustel.
Le Peuple français, Paris, 9 janvier 1901, p. 4.
La même annonce est reproduite pendant de longs mois (Le Peuple français, Paris, 30 décembre 1901, p. 4) et au-delà.
→1902
Le Phono-Cinéma-Théâtre (Café du Globe, 13 janvier 1901)
Même si le Phono-Cinéma-Théâtre est installé au 42 bis boulevard Bonne-Nouvelle, il lui arrive de commettre quelques infidélités comme celle du samedi 13 janvier où les films sont projetés au Café du Globe :
Le Phono-Cinéma-Théâtre, qui a retrouvé, dans sa charmante salle du boulevard Bonne-Nouvelle, à côté du Gymnase, son grand succès de la rue de Paris, à l'Exposition, devient le numéro le plus recherché des soirées particulières. Samedi dernier notamment : Sarah Bernhardt, Mlle Hatto, Cossira ont été chaleureusement applaudis au Café du Globe, dans une soirée offerte à l'Union belge, par son sympathique président. M. Robert.
Le Journal, Paris, 16 janvier 1901, p. 5.
Marguerite Vrignault connaît sans doute Émile Robert, président de l'Union Belge, société royale de secours mutuels et de bienfaisance à Paris, mais également commissaire adjoint de Belgique à l'Exposition Universelle, récemment promu au grade d'officier de la Légion d'honneur à titre étranger.
Le théâtre Robert Houdin à la salle des Capucines (39 boulevard des Capucines, 14 février-[27] mai 1901)
À la suite de l'incendie du 31 janvier, le théâtre va continuer ses spectacles dans la salle des Capucines, anciennement théâtre Isola :
Le théâtre Robert-Houdin, pendant les travaux de réfection de la salle du boulevard des Italiens, détruite récemment par l'incendie de la photographie Tourtin, continuera à donner ses matinées de prestidigitation, les jeudis, dimanches et fêtes, à la salle des Capucines (ancien théâtre Isola). La première matinée aura lieu jeudi prochain 14 février, à deux heures.
Le Temps, Paris, 13 février 1901, p. 3.
Georges Méliès et sa troupe continuent leurs représentations :
Au Théâtre Robert-Houdin, provisoirement installé salle des Capucines, aujourd'hui à deux heures, matinée par M. Charley. Dimanche prochain, matinée par M. Raynaly.
Les travaux de restauration de la salle Robert-Houdin commencent cette semaine. M. Méliès se propose d'y apporter de grandes améliorations, tant au point de vue de la sécurité du public, qu'au point de vue de la disposition générale qui se trouvera plus en rapport avec le goût du jour.
L'Écho de Paris, Paris, jeudi 11 avril 1901, p. 4.
Pourtant la presse consultée n'évoque plus les projections cinématographiques. En mai, on annonce la fin des spectacles :
Malgré l'installation provisoire du théâtre Robert-Houdin à la salle des Capucines, les recettes ont été très satisfaisantes, et les matinées du dimanche et du jeudi vont continuer jusqu'à la Pentecôte, avec les habiles illusionnistes Raynaly et Charley.
Les travaux de restauration de la salle du boulevard des Italiens sont commencés, et M. Méliès espère faire la réouverture du théâtre Robert-Houdin vers le mois de juillet.
A. Kuntz.
L'Aurore, Paris, 7 mai 1901, p. 3.
Le Figaro publie sa dernière annonce le 27 mai 1901.
← 1900 Le Théâtroscope-Concert (Boulevard des Capucines, mai 1901- [1901])
(← 1900)
Le Théâtroscope, situé au 35, boulevard des Capucines, a fonctionné jusqu'à la fin de l'année 1900. Au-delà, les informations manquent. Il semble que, pendant quelque temps, dans les premiers mois de 1901, la salle ait été fermée. C'est en tout cas ce que l'on peut déduire de l'entrefilet suivant :
Signalons l'ouverture du Théâtroscope-Concert, 35, boulevard des Capucines, attraction nouvelle et très parisienne.
Tous les jours, à trois heures, et, le soir, à huit heures, programme choisi, troupe de premier ordre.
L'Aurore, Paris, 6 mai 1901, p. 3.
Par la suite, nous ne disposons plus d'informations pour savoir à quel moment la salle du Théâtroscope ferme.
Le cinématographe publicitaire (Grands boulevards, <30> avril 1901)
Sur les Grands boulevards, un cinématographe projette des films publicitaires :
LETTRE PARISIENNE
Paris, 1er mai.
Le soir, en flânant le long des boulevards, des curieux en grand nombre s'amassent vis-à-vis de ces tableaux transparents où de seconde en seconde se succèdent des pancartes vantant telle ou telle spécialité ?
Ce ne sont point ces réclames illuminées qui attirent ainsi de nombreux badauds, mais de temps à autre, on a recours, pour le plus grand plaisir du bon public, au cinématographe ; il faut voir alors les yeux s'écarquiller pour mieux suivre les péripéties des scènes représentées. Jusque-là, il n'y a pas grand mal, et lorsqu'on nous montre la sortie des ateliers de la maison "Untel'' ou les réfectoires de l'usine "Chose" c'est une façon bien anodine de nous inciter à nous servir chez ces fabricants avisés. Mais, où la réclame non seulement par l'image, mais par les tableaux mouvementés du cinématographe devient dangereuse, c'est quand on poétise aux yeux du peuple des marchandises malfaisantes.
Pas plus tard qu'hier soir, comme je me promenais tranquillement sur les grands boulevards que la tiédeur de la, nuit encombrait d'une foule compacte, mes regards s'arrêtèrent tout à coup sur un de ces tableaux à réclames dont je vous parlais plus haut. Une annonce quelconque venait de disparaître lorsque tout à coup le cinématographe nous offrit le spectacle gratuit d'une scène fort animée.
C'était un intérieur d'ouvrier. Au milieu de la chambre, on apercevait un berceau autour duquel évoluaient trois personnes : le père, la mère et un docteur. Le médecin, en gestes très compréhensibles, indiquait à la jeune femme anxieuse, que son enfant se mourait de faim parce qu'elle n'avait plus de lait.
Le docteur partit, tandis qu'affolée la mère se désespérait, l'homme se levait, brutal, lui montrait le poing, reprochant à la pauvre créature de ne pouvoir allaiter leur fils et s'en allait avec un regard de mépris.
Ce petit drame intime était rendu avec beaucoup d'art, un semblant de vie très intense. Et les femmes regardaient, intéressées par la douleur de cette autre femme qui, les bras au ciel, implore assistance. Tout à coup, comme répondant à la supplique, un ange apparut dans un nuage qui s'évanouit pour laisser apercevoir un biberon plein de lait. La mère, illuminée de joie, le prit, et sortant son enfant du berceau lui présenta tout en le balançant sur ses genoux le long tube de caoutchouc, ce tube meurtrier qui a fait déjà tant de victimes.
Aussitôt, comme sous le coup de quelque baguette de fée, le poupon reprit santé ; la maman, heureuse, rassurée, laissa éclater son bonheur et pour que la fête fut complète, le mari qui rentrait la mine renfrognée, croyant son petit sauvé, se réconcilie en embrassant la mère, que, tout à l'heure, il menaçait.
Voilà le détail de ce tableau vivant; il dure quelques minutes, mais c'est assez pour jeter dans l'âme simple des travailleuses, des femmes du peuple, la mauvaise semence. Pourquoi donc, après tout, ne pas donner à son enfant ce "sein" artificiel si commode et qui réussit si bien. Le docteur le défend, mais, les médecins avec leurs idées de progrès sont tous les mêmes, il y a des années qu'on élève des enfants avec ce biberon-là. le rêve des biberons, puisqu'il suffit de remplir la bouteille de lait et de la déposer près du baby dans le berceau où elle se tient bien chaude. Le poupon, le caoutchouc aux lèvres, tète tout son saoûl et| s'endort, tandis que la ménagère travaille à «on aise.
Et l'ignorante ne se dit point que ce terrible biberon à tube, le biberon anglais comme on le désigne dans les rapports de la Faculté de médecine, tue chaque année des centaines d'enfants, qui ne demandaient pour vivre qu'un peu de bon lait.
Le Courrier de Metz, Metz, vendredi 8 mai 1901, p. 1.
L'American Biograph (Eldorado, < 19 mai 1901)
A l'Eldorado, l'American Biograph commence ses projections vers la mi-mai 1901 :
A l'Eldorado, grand succès pour le désopilant Lahury, réserviste, où Draem se révèle un impayable comique, pour la joyeuse comédie Personne ! et l'Américan Biograph, dont les vues nouvelles sont fort goûtées.
La Fin du Siècle, Paris, 19 mai 1901, p. 3.
Le biophonographe (Grand Café, <23> mai 1901)
C'est dans la même salle, au sous-sol du Grand Café, 14 boulevard des Capucines, que s'installe le biophonographe à partir du mois de mai 1901. Les informations sont très rares et seul L'Écho de Paris prête une attention toute particulière à cette inauguration :
Les séances du Biophonographe ont lieu tous les jours de deux heures à sept heures et de huit heures à minuit, 14, boulevard des Capucines, salle du sous-sol du Grand Café.
L'Echo de Paris, Paris, 23 mai 1901, p. 2.
En outre, un très long article, en principe consacré à ce cinématographe sonore, occupe deux colonnes du même journal. Compte tenu de sa longueur - il est surtout consacré à une évocation assez enflammée des artistes et des acteurs -, nous n'en retiendrons que les fragments où il est directement question de l'appareil :
Chronique scientifique
L’immortalité des comédiens
Parmi les attractions qui sollicitent périodiquement la faveur du public, il en est une d'éclosion toute récente — sa mise au point définitive datant exactement d'hier —dont l'intérêt et la portée dépassent de beaucoup la mesure ordinaire des spectacles qui visent à l'amusement des foules. Il s'agit d'un nouvel appareil réunissant et combinant en une simultanéité parfaite le phonographe et le cinématographe et que son auteur, un ingénieur français, M. Normandin, a baptisé, du nom de : Biophonographe
L'idée n'est pas nouvelle et depuis longtemps-déjà faisait l'objet-de nombreux travaux dont les plus heureux n'avaient abouti, jusqu'à ce jour, qu'à des avatars tout au plus bons à remplacer la lanterne magique et à servir de joujoux d'appartements. Ce qui est nouveau, c'est le tour de force réalisé, c'est la précision des appareils employés, qui a permis de joindre au cinématographe qui reproduit les formes et les gestes, le phonographe qui reproduit la voix, cela avec un tel degré de perfection que c'est l'artiste lui-même qui apparaît devant nous, en vie, en beauté. Pas une hésitation, pas une fausse manœuvre ; la simultanéité des intonations et des mouvements est assurée avec une justesse incroyable ; on écarquille les yeux, on tend l'oreille, on est stupéfait, on est charmé. Tout d'abord on pouvait craindre le nasillement du phonographe ou que, les intonations restant exactes, le timbre de la voix ne fût changée ; il n'en est rien ; tout dans l'ensemble est frappant de vérité.
La presse avait été convoquée, et avec elle des artistes que cette question touche plus particulièrement. Tous étaient émerveillés. Une telle invention fera courir et amusera petits et grands ; mais elle a et doit avoir une portée plus haute.
[...]
Si le Biophonographe eût été inventé cent ans plus tôt, du moins serions-nous renseignés ; nous pourrions admirer et comparer, dire si Sarah a égalé Rachel et si Rousseil a égalé George. Puis, de ces illustrations tragiques, nous pourrions retrouver les traditions perdues ; elles seraient sous nos yeux ; nos oreilles entendraient les cris de leurs cœurs, les accents de leurs âmes si éprises d'art, si amoureuses de beauté ; elles revivraient devant nous comme un enseignement — qui sait ? comme un reproche peut-être à nos tragédiennes, d'aujourd'hui !
[...]
Par le Biophonographe on saura comment Coquelin interprétait Cyrano et comment Rostand voulait que Cyrano fût interprété.
[...]
Si le Biophonographe eût existé au temps de Molière, il nous montrerait aujourd'hui du Croisy jouant Tartuffe comme le voulait le poète. Et cela mettrait tout le monde d'accord, les comiques et les premiers rôles — ce qui n'est pas toujours facile.
[...]
Le Biophonographe comble cette lacune; il n'est donc pas seulement un amusement; il rendra de réels services à nos comédiens futurs tout en les préparant eux aussi pour la postérité ; il instruira nos petits-fils sur ceux qui furent les joies de nos soirées, qui assurèrent nos plaisirs les plus délicats… et les autres ; pour eux Sarah Bernhardt sera immortelle, et celle qui fut la belle Otero aussi. Heureuse postérité ; plus heureuse que nous, qui n'avons du passé que quelques toiles et quelques marbres, elle jouira de nos artistes et elle aura son Louvre… le Louvre de l'art dramatique.
GEORGES LUDWIG.
P.-S. — Les séances du. Biophonographe ont lieu tous les jours, de deux heures à sept heures et de huit heures à minuit, 14, boulevard des Capucines, salle du sous-sol du Grand Café.
L'Écho de Paris, Paris, 23 mai 1901, p. 2.
La tonalité quelque peu exaltée de tout l'article nous laisse sur notre faim, car il n'est jamais question des vues sonores qui ont été présentées lors de cette soirée spéciale... D'ailleurs, rien dans le reste de la presse de nous permet de compléter notre information, en particulier sur les programmes et la durée des représentations dans le temps.
Le Cinématographe Réclame (Boulevard des Italiens, <27> mai 1901)
Sur le boulevard des Italiens, en face du café de la Paix, un cinématographe réclame propose des vues de Luchon :
LUCHON
ELECTRICITÉ ET CINEMATOGRAPHE.-
Entrant enfin dans la voie du progrès, notre station vient d'adopter la réclame par l'électricité et le cinématographe.
Sur le boulevard des Italiens, en face du café de la Paix, les curieux admirent tous les soirs les vues cinématographiques suivantes: le Casino de Luchon, l'établissement thermal, la salle des humages et la vallée du Lys.
Un peu plus loin, sur le même boulevard, apparaissent, toutes les dix minutes, en grandes lettres électriques, les mots : Humage, Luchon, reine des Pyrénées.
Voilà qui est parfait pour Paris. Restent les mesures à prendre dans le littoral et à l'étranger.
La Dépêche, Toulouse, lundi 27 mai 1901, p. 3.
The American Biograph (Folies-Bergère, 13 septembre-> 6 octobre 1901)
En septembre, à la réouverture de la salle rénovée des Folies-Bergère, les projections de l'American Biograph reprennent :
Folies-Bergère. (Réouverture)
Hier a eu lieu la réouverture des Folies-Bergère. Est-il besoin de dire que celte soirée inaugurale a été un véritable triomphe et que d’un bout à l’autre de la représentation les applaudissements n’ont cessé da retentir dans la salle merveilleuse que M., Marchand vient de faire reconstruire. Il faudrait citer toutes les attractions dont se compose le programme, car le succès a été général. On a bissé le délicieux ballet comique de Mme Mariquita, Une Noce auvergnate, un véritable chef-d’œuvre de grâce et de bouffonnerie, qui fera époque dans la littérature chorégraphique. On a acclamé la troupe sans pareille des Kremo, acrobates stupéfiants d’audace et d’agilité, et les chiens d'Ed. de Nora, et les Bogdani, et les Vincentina, patineurs incomparables et l’American Biograph avec ses vues inédites.
Tous les numéros enfin ont successivement ravi, émotionné et transporté le public des Folies-Bergère.
Le Soleil, Paris, 14 septembre 1901, p. 3.
M. Marchand, responsable du programme, s'occupe également de la programmation des films de l'American Biograph directement :
SPECTACLES DIVERS
Ce soir, quatre "films" sensationnels seront présentés au public des Folies-Bergère. M. Marchand vient en effet d'acquérir la propriété exclusive des vues prises par l'American Biograph les 8, 9, 10 et 11 septembre au château de Fredenborg et représentant le Tsar Nicolas II, le roi Edouard VII d'Angleterre, Christian IX de Danemark, Georges 1er, de Grèce, accompagnés des impératrices et des reines, des petites et grandes-duchesses de Russie et des familles impériales et royales. Au moment où le ministère de l'intérieur vient d'interdire l'usage de tout appareil photographique sur le passage du Tsar, ces instantanés vont avoir un considérable retentissement. M. Marchand a fait un véritable coup de maître en se les appropriant.
Gil Blas, Paris, 18 septembre 1901, p. 4.
L'information relative au nouveau programme est détaillé dans Le Figaro du même jour :
C'est M. Marchand qui s'est rendu acquéreur pour les Folies-Bergère des vues cinématographiques dont nous parlions hier et qui ont été prises ces jours-ci en Danemark par l'Américan-Biograph. Voici les,quatre " films " qui, ce soir même, se dérouleront sous les yeux des spectateurs du music-hall de la rue Richer : 1º " Elseneur, 8 septembre 1901 " : les souverains russes accompagnés des monarques réunis à Fredensborg, reçoivent le roi d'Angleterre au débarcadère royal ; 2° " Château de Fredensborg, 9 septembre 1901 " ; promenades souverains,Nicolas II,Edouard VII, Christian IX, Georges 1er, impératrice de Russie-Féodorovna et Aléxandra, reine d'Angleterre, familles impériales et royales ; 3° " Château de Fredensborg, 10 septembre 1901 " : les petites grandes-duchesses Olga et Tatiana en récréation dans le jardin privé avec lès petites princesses Margaritta et Martha de Suède et de Norvège; 4º " Château de Fredensborg, 11 septembre 1901 " ; le Tsar et la Tsarine, reconduits par Christian IX, Edouard VII, Georges 1er, les familles impériales et royales, quittent le château.
Le Figaro, Paris, 18 septembre 1901, p. 5.
Une nouvelle annonce est publiée quelques jours plus tard :
SPECTACLES DIVERS
Matinée spécialement réservée aux familles aujourd'hui aux Folies-Bergères, avec le très intéressant programme composé par M. Marchand et dont le clou est évidemment la troupe des Kremo, ces admirables acrobates qui défient dans leurs exercices toute comparaison, les Schéténa, délicieuses chanteuses viennoises, les jumeaux Marco's et leur exhilarante pantomime, la Noce auvergnate, l'exquis ballet comique de Mme Mariquita, les vues nouvelles de l'American Biograph tout cela forme un spectacle attractif et amusant au possible.
Gil Blas, Paris, 6 octobre 1901, p. 2.
Répertoire (autres titres) : Les grands souverains de l'Europe, Les fêtes de Reims, Les fêtes de Dunkerque, Les fêtes de Bétheny (La Vie Parisienne, Paris, 28 septembre 1901, p. 546).
Le Kinétographe du Théâtre Robert-Houdin (8 boulevard des Italiens, 22 septembre-31 décembre 1901) → 1902
Après de longs mois de fermeture, le théâtre Robert-Houdin de Georges Méliès, provisoirement installé salle des Capucines, rouvre ses portes le 22 septembre. Édouard Raynaly est chargé de présenter la séance d'inauguration comme il le rappelle dans ses Mémoires d'un Escamoteur :
Les Mémoires d'un Escamoteur
par
E. Raynaly.
[...]
Il ne reste plus aujourd'hui, à Paris, que l'éternel théâtre Robert-Houdin, auquel pendant une douzaine d'années j'ai eu l'avantage d'être attaché. On sait que ce théâtre a été récemment détruit, par les suites d'un incendie qui éclata dans l'immeuble (à suivre)
Rapidement reconstruit, il possède une nouvelle et ravissante petite salle. La réouverture a eu lieu le 22 septembre 1901.
A cette occasion, M. G. Méliès, propriétaire et directeur actuel, a bien voulu me confier le soin de présenter la séance d'inauguration; Ce théâtre, si plein de magiques et réjouissante souvenirs, est maintenant, lui aussi, envahi par le cinématographe. Il y consacre ses soirées, au cours desquelles se déroulent les fantastiques tableaux dus à l'imagination féconde en même temps qu'extraordinaire de M. Méliès. Les représentations de physique amusante n'y sont plus données que les jeudis et di manches en matinées.
La somme de magie, ainsi offerte désormais, semble suffire aux exigences de la consommation parisienne, le monde qui s'amuse est actuellement à la recherche de spectacles différemment pimentés.
Le Siècle, Paris, jeudi 18 septembre 1902, p. 3 et samedi 20 septembre 1902, p. 2.
La reouverture est brièvement commentée par la presse :
La réouverture du théâtre Robert-Houdin, au 8, boulevard des Italiens, a été un véritable succès. La nouvelle salle entièrement reconstituée à neuf et décorée d'une façon artistique et charmante a émerveillé les spectateurs qui n'ont pas marchandé leurs applaudissements au nouvel illusionniste, M- Legris, un artiste de grand talent.
Ces merveilleuses vues cinématographiques de G- Méliès, ont, comme toujours fort amusé. Les dernières parues sont véritabl ment remarquables.
L'Écho de Paris, Paris, 2 octobre 1901, p. 5.
Quelques jours plus tard sont annoncées quelques vues nouvelles :
Dès la reprise des matinées au théâtre Robert-Houdin, 8, boulevard des Italiens, les spectateurs sont venus en foule applaudir le nouvel illusionniste, M. Legris. Ses expériences inédites ont été très goûtées.
Les nouvelles vues cinématographiques de M. G. Méliès, inimitables et extra-originales, remportent aux matinées ainsi qu'aux soirées un triomphal succès de fou rire. "Le chimiste repopulateur", "le Déshabillage impossible", "la Chirurgie de l'avenir" et la charmante féerie du Petit Chaperon rouge font la joie des petits et des grands.
Le Figaro, Paris dimanche 13 octobre 1901, p. 5.
En novembre, Georges Méliès annonce qu'il dispose d'environ 300 vues à la vente :
Le coquet petit théâtre Robert-Houdin fait salle comble à toutes les matinées. Les en fants s'amusent aux merveilleux tours de prestidigitation du professeur Legris, et les. grandes personnes s'intéressent aux admirables vues cinématographiques de M. Méliès. Notons que plus de 300 séries inédites sont à la disposition des amateurs qui pourront se les procurer au théâtre.
A. Mercklein.
Le Figaro, Paris, mardi 26 novembre 1901, p. 5.
Une annonce publié en décembre laisse entendre que les vues cinématographiques sont devenues l'attraction principal du théâtre Robert-Houdin :
Depuis que M. Méliés a fait du théâtre Robert-Houdin le plus charmant petit théâtre de Paris, il est de mode d'aller applaudir les étonnantes vues cinématographiques d'un genre tout spécial qui y sont données tous les soirs.
Les matinées de prestidigitation sont également terminées par le cinématographe.
Le Figaro, Paris, mercredi 18 décembre 1901, p. 5.
Pendant les derniers jours de l'année, le théâtre propose des matiniées presque tous les jours :
A l'occasion des fêtes de Noël et du jour de l'an, le théâtre Robert-Houdin donnera des matinées les mercredi 25, jeudi 26, dimanche 29, lundi 30, mardi 31 décembre, mercredi 1er, jeudi 2 et dimanche 5 janvier.
A toutes ces représentations, le professeur Legris, dans son intéressant programme, et les vues cinématographiques de M. G. Méliès.
Le Matin, Paris, 21 décembre 1901, p. 4.
→ 1902
Le cinématographe et le biophonographe aux Nouvelles Galeries " À la ménagère " (octobre 1901)
L'ancien Bazar a été racheté, en 1899, par les Nouvelles Galeries qui agrandissent le bâtiment et le baptise " À la ménagère ". L’inauguration a lieu le 17 mai 1900. C'est pendant l'automne 1901 qu'au deuxième étage, des séances de cinématographe et de biophonographe sont organisées.
Que faire pour occuper l'après-midi du dimanche ? Aller aux Nouvelles Galeries "A la Ménagère", boulevard Bonne-Nouvelle, admirer la variété et le bon marché de leur assortiment d'appareils de chauffage et d'éclairage : Calorifères, poêles de tous systèmes, foyers, cheminées fixes ou mobiles, fourneaux de cuisine, garnitures de foyer de tous styles, lampes, suspensions, etc., rien ne manque. Au deuxième étage, séances de Cinématographe et de Biophonographe.
Le Figaro, Paris, 27 octobre 1901, p. 1.
Publicité Nouvelles Galerie, À la ménagère (c. 1900)
Nous savons par ses mémoires que l'opérateur qui a installé le cinématographe n'est autre que Félix Mesguich qui l'évoque dans Tours de manivelle :
Enfin pour utiliser les quelques loisirs qui peuvent me rester, je fais deux installations, l'une chez Dufayel, l'autre à " La Ménagère ".
Félix Mesguich, Tours de manivelle, Paris, Grasset, 1933, p. 35.
L'installation terminée, Félix Mesguich a dû passer la main à un opérateur attitré. Nous ignorons la durée dans le temps de ces projections. Mais des séances cinématographiques sont à nouveau signalées en 1902 et en 1903.
The American Biograph (Eldorado, <19 octobre-31 décembre 1901) → 1902
The American Biograph est annoncé à l'Eldorado à la mi-octobre :
ELDORADO. Téléph. 219-78-DRANEM, Roger M., Gosset, Albens, Mlles Mary-Hett, Daris, Mistinguett. " Le Bouche Trou ", pièce. The American Biograph.
Le Journal, Paris, 19 octobre 1901, p. 5.
Avec une information sur les vues :
À l'Eldorado, signalons The American Biograph, avec une série de vues nouvelles, parmi lesquelles une splendide reproduction de la revue de Bétheny.
Le Fin de siècle, Paris, 20 octobre 1901, p. 3.
Sans plus d'informations, The American Biograph est annoncé jusqu'à la fin de l'année :
Eldorado.-Mmes Mary Hett, Danis, Mistinguette. MM. Dranem, Roger, Gosset, Albans.-Lahury réserviste.-Chagrin d'ivrogne.-The American biographe.
La Petite République, Paris, 31 décembre 1901, p. 4.
Les séances se poursuivent en 1902.
→ 1902
Le Phono-Cinéma-Théâtre (Olympia, [25 octobre 1901]-[19 décembre 1901])
De retour d'une tournée européenne, accompagné de Marguerite Vrignault, Félix Mesguich, pendant quelques semaines, s'installe à l'Olympia avec le Phono-Cinéma-Théâtre. Il l'évoque dans Tours de manivelle, même s'il situe cela, par erreur, au début de l'année 1901, alors qu'il s'y trouve en octobre-décembre 1901 :
À notre retour à Paris, au début de 1901 [sic], c'est à l'Olympia, sous la direction des frères Isola, que nous présentons désormais le programme du Phono-Cinéma-Théâtre.
Cela ne va pas toujours sans difficulté. je me souviens notamment, qu'un soir. j'étais enfermé dans ma cabine, au premier étage, tandis que M. Berst était placé avec son phono à l'orchestre. La salle se trouvait plongée dans l'obscurité, lorsqu'une main malveillante coupa le fil de transmission acoustique qui me permettait de suivre à distance, au moyen d'un récepteur, la marche du cylindre. Sans interrompre la séance, je réussis néanmoins à terminer ma projection dans un synchronisme parfait, et personne ne s'aperçut que l'opérateur avait été subitement frappé de surdité.
Mesguich,1993, 33-34.
La fin des séances est à situer vers la fin du mois de décembre 1901 ou peut-être début janvier 1902.
Olympia, Paris, Programme du 19 décembre 1901
© Musée McCord Museum
Le Cinématophone (Casino des Charmettes, 16 novembre 1901)
À l'occasion de la fête organisée par les Amis du Peuple du 17e arrondissement, un cinématophone présente des vues animées :
Pour les malheureux
[...]
Très beau, très grand et très légitime succès pour la fête organisée samedi soir par les "Amis du Peuple du dix-septième arrondissement", au profit de la soupe populaire.
Dès huit heures et demie, une foule nombreuses se pressait dans la jolie salle du "Casino des Charmettes", mise gracieusement à la disposition des organisateurs par l'aimable directeur, M. Léon Roche. Il y avait là des ouvriers, des employés, beaucoup de citoyennes, qui tous étaient venus joyeux de pouvoir apporter leur obole pour leurs frères victimes du chômage et de la faim.
[...]
On a terminé par une séance très intéressante de cinématophone.
L'Intransigeant, Paris, mardi 19 novembre 1901, p. 3.
Le Biophonographe de la Société Médicale des Praticiens (Hôtel des Sociétés Savantes, 22 novembre 1901)
C'est à l'occasion d'une séance publique annuelle organisée par une société savante, la Société Médicale des Praticiens que des projections biophonographiques sont organisées :
La séance publique annuelle de la Société médicale des praticiens aura lieu vendredi prochain, à neuf heures précises du soir au grand amphithéâtre de l'hôtel des Sociétés savantes, sous la présidence d'honneur de M. le docteur Emile Dubois, député, ancien président du Conseil général de la Seine, assisté du docteur Paul Archambaud, président de la Société.
Cette séance comportera d'intéressantes communications scientifiques avec projections de clichés radiographiques. Elle se terminera par des scènes amusantes de biophonographe et un solo de flûte par M. Fontbonne, soliste de la garde républicaine.
Journal des débats politiques et littéraires, 22 novembre 1901, p. 2.
Aucune information ni sur l'opérateur, ni sur la programmation. Il faut dire que le biophonographe est surtout vu comme un appareils pour distraire le public à la fin de la soirée.
Le cinématographe Lumière du Théâtre Séraphin (Passage de l'Opéra, <10-31 décembre 1901)
Au théâtre Séraphin, le 9 décembre se produit un début d'incendie sans gravité puisque la séance du cinématographe peut se poursuivre :
Panique dans un théâtre
Hier, vers cinq heures, pendant la matinée, au théâtre Séraphin, passage de l'Opéra, un commencement d'incendie s'est déclaré. Une panique s'est produite. Le feu a été éteint très rapidement avant l'arrivée des pompiers qui étaient venus avec deux pompes à vapeur.
L'enquête a établi que des pellicules avaient pris feu dans la cabine du cinématographe.
La représentation a continué vingt minutes après.
La Lanterne, Paris, 10 décembre 1901, p. 3.
Les séances se prolongent jusqu'à l'année suivante.
Le cinématographe Lumière de la Pouponnière (Sorbonne/Salle Richelieu, 15 décembre 1901)
Lors d'une réunion de la Pouponnière, œuvre destinée à subvenir à l'enfance, des projections cinématographiques sont organisées avec un appareil Lumière :
Les OEUVRES POUR L'ENFANCE
[...]
La Pouponnière
A la Sorbonne, salle Richelieu, M. Paul Strauss avait été prié d'exposer aux bienfaitrices de l'œuvre la transformation de la Société.
M. Frédéric Passy présidait. Quand il est apparu sur l'estrade, on a acclamé en lui le titulaire d'un des prix Nobel.
[...]
Il explique comment, malgré l'argent recueilli l'existence de l'œuvre a été menacée :
[...]
La matinée s'est terminée par des tableaux où le cinématographe Lumière a reproduit toute la vie de la Pouponnière.
Le Figaro, Paris, lundi 16 décembre 1901, p. 3.
1902
← 1901 Le cinématographe Lumière (Grands Magasins Dufayel, 1er janvier-31 décembre 1902) → 1903
Les séances du cinématographe se prolongent, mais il semble qu'à partir de novembre, les "sonorisations" disparaissent pendant plusieurs années. Celle-ci est une des dernières annonces où il est encore question de dialogues et d'imitation de bruits :
Après plus de huit mille séances, le cinématographe des Grands Magasins Dufayel obtient toujours un immense succès, grâce à ses spectacles exclusifs, intéressants et toujours nouveaux. Scènes d'actualité et vues comiques à transformations avec dialogues et imitation de tous les bruits. Accompagnement par un excellent orchestre. Les séances ont lieu, en semaine, à 2 h. 1/2, 3 h 1/2, et le dimanche matin à 10 et 11 heures. Exposition.
L'Autorité, Paris, mercredi 12 novembre 1902, p. 4.
←1901 Le Cinématographe du Théâtre Robert-Houdin (8 boulevard des Italiens, <19 janvier-> 8 juin 1902)
Dès les premiers jours de janvier, les séances du cinématographe continuent:
Théâtre Robert-Houdin. Séances de prestidigitation, cinématographe.
Le Triboulet, Paris, 19 janvier 1902, p. 15.
Les séances sont encore annoncées en juin:
Théâtre Robert-Houdin. Séances de prestidigitation, cinématographe.
Le Triboulet, Paris, 8 juin 1902, p. 15.
← 1901 The American Biograph (Eldorado, 1er janvier- > 7 juin 1902)
← 1901
The American Biograph continue ses projections années à l'Eldorado en 1902 :
Eldorado.-Mme Mary Hett, Danis, Mistinguette. MM. Dranem, Roger, Gosset, Albans.-Lahury réserviste.-Chagrin d'ivrogne.-The American Biograph.
La Petite République, Paris, 1er janvier 1902, p. 4.
Les annonces se succèdent avec peu de changements. En mai, des vues nouvelles sont annoncées
A l'Eldorado, des tableaux d'une palpitante actualité attirent en ce moment une foule énorme ; car The american Biograph fait vivre devant les yeux du public angoissé toute l'île de la Martinique et rien n'est plus émouvant que de voir passer la ville de Saint-Pierre qui n'est plus aujourd'hui qu'un souvenir.
Gil Blas, Paris, 24 mai 1902, p. 3-4.
Répertoire (autres titres) : Le Voyage du Président en Russie (Le Journal, Paris, 7 juin 1902, p. 5).
← 1901 L'American Biograph (Galerie Georges Petit, 1er janvier-> 5 juin 1902) → 1903
← 1901
L'American Biograph continue à fonctionner, en 1902, dans la Galerie Georges Petit avec le même programme :
GALERIE GEORGES PETIT, 8, rue de Sèze.-Vues animées de S. S. le pape Léon XIII, reproduites par l'American Biograph. Tous les jours de 9 h. à 6 h. et de 8 h. à 11 h. Orgue Eclecta-Muslet.
Le Peuple français, Paris, 2 janvier 1902, p. 4.
La presse reproduit le même entrefilet jusqu'en juin 1902 (Le Peuple français, Paris, 5 juin 1902, p. 4.
← 1901 Le cinématographe Lumière du Théâtre Séraphin (Passage de l'Opéra, 1er janvier-12 mars 1902)
Dès le début de l'année 1902, les séances sont annoncées dans la presse :
Les intéressantes représentations du Cinématographe-Lumière attirent, chaque après-midi et chaque soir un nombreux public au Théâtre Séraphin (passage de l'Opéra).
Le Petit Caporal, Paris, samedi 25 janvier 1902, p. 3.
Au début du mois de février, la presse continue de publier les annonces :
Les si intéressantes, si pittoresques et si attrayantes représentations du Cinématographe Lumière attirent toujours beaucoup de monde au Théâtre Séraphin (passage de l'Opéra, de quatre heures et demie à six heures de l'après-midi, et de huit heures et demie à dix heures et demie).
Le Petit Caporal, Paris, mardi 4 février 1902, p. 3.
La dernière annonce date de la mi-mars :
THEATRE SERAPHIN (passage de l'Opéra).-De 4 h 1/2 à 6 heures et de 8 h. 1/2 à 10 heures. Cinématographe Lumière.
Le Peuple français, Paris, 12 mars 1902, p. 4.
Société Générale des Cinématographes et Films (35, boulevard de la Tour-Maubourg, 19 janvier 1902)
La Société Générale des Cinématographes et Films cherche à diffuser ses marchandises et produits en Espagne :
POSICIÓN DE PORVENIR
Deseamos para la introducción y venta de nuestros aparatos cinematográficos, en los diversos establecimientos, una persona capaz y seria que se interese en el negocio. Deberá disponer de un capital de francos 500, como mínimum. No son necesarios conocimientos especiales al abandonar su empleo. Dirigirse a la Société Générale des Cinématographes et Films. 35, boul. de la Tour-Maubourg. París.
Heraldo de Madrid, Madrid, domingo 19 de enero de 1902, p. 4.
Le Cinématographe de l'Olympia (26 boulevard des Capucines, 6->27 septembre 1902)
L'Olympia dont la réouverture a eu lieu le samedi 6 septembre a mis à son programme, Le Voyage dans la lune de Georges Méliès :
A l'Olympia:
L'Olympia vient de rouvrir ses portes par une soirée de gala extrêment brillante.
[...]
Enfin nous voici dans la Lune, grâce à une féerie cinématographique en 20 tableaux de M. Méliès... C'est comme qui dirait du Jules Verne poussé au comique.
La Politique coloniale, Paris, 10 septembre 1902, p. 3.
Quelques jours plus tard, un autre article indique que le film est toujours projeté :
Le merveilleux spectacle de l'Olympia, si habilement composé par les frères Isola, a ceci de particulier qu'il plaît aussi bien au public raffiné du boulevard qu'aux nombreuses familles des matinées. En effet, Bezan et ses poneys dressés, les amusants singes de Berzina, le prestidigitateur de Lion, Robbins et le Voyage dans la lune forment un attrayant programme que complètent agréablement Marguerite Deval et Régnard dans Frégolinette.
Le Figaro, Paris, 27 septembre 1902, p. 5.
L'opérateur Félix Mesguich en a conservé le souvenir qu'il rapporte dans ses mémoires :
Un poste Lumière, installé à l'Olympia, sous ma direction, succède peu après au Phono-Cinéma-Théâtre.
J'y passe le fameux "Voyage dans la Lune", de M. Georges Méliès. Cette production est une incursion originale dans le domaine de la fantasmagorie. Elle inaugure la systématisation du truquage qui n'avait été jusqu'alors employé qu'à titre exceptionnel.
Ayant obtenu une copie de cette fantaisie, j'ai l'idée de la faire accompagner d'une partition de musique, adaptée par le chef d'orchestre de l'Olympia. C'est peut-être la première interprétation musicale d'un film muet. Cette innovation plaît tellement qu public, que la mode devient "à la lune".
MESGUICH, 1933: 34.
On ignore jusqu'à quand est présenté le film, ni si d'autres vues sont proposées au spectateur.
Le Cinématographe des Nouvelles Galeries "A la Ménagère" (Boulevard Bonne-Nouvelle, 28 septembre 1902- >28 septembre 1902)
Dès l'année précédente, des projections cinématographiques et biophonographiques ont été organisées au 2e étage des Nouvelles Galeries "À la Ménagère", sur le boulevard Bonne Nouvelle. En septembre 1902, une nouvelle salle est inaugurée :
Demain dimanche, à 2 heures, inauguration de la nouvelle salle de cinématographe aux Nouvelles Galeries "A la Ménagère" du boulevard Bonne-Nouvelle. Programme entièrement nouveau.
Le Petit Parisien, Paris, 27 septembre 1902, p. 4.
Le Biophonographe Normandin (Grande-Roue de Paris, 18-19 octobre 1902)
Le biophonographe, d'après le témoignage d'Henri Joly recueilli par Maurice Noverre, aurait fonctionné, vers 1900, au Concert-Théâtre de la Grande Roue... En tout état de cause, en octobre 1902, nous disposons d'une trace de la présence de cet appareil à la Grande Roue parisienne. C'est à l'occasion de grandes fêtes organisées par la " Fédération des Sections des Vétérans des Armées de Terre et de Mer 1870-71 du Département de la Seine " afin de renflouer ses caisses que nous apprenons que parmi les divertissements se trouve bien le biophonographe Normandin :
FÉDÉRATION DES SECTIONS DES Vétérans des Armées de Terre et de Mer 1870-71 DU DÉPARTEMENT DE LA SEINE
La Fédération, pour assurer des ressources aux caisses de secours des sections et à sa propagande, organise les samedi 18 et dimanche 19 octobre, à la Grande Roue de Paris, de grandes Fêtes, qui seront extrêmement brillantes et se distingueront entre toutes par l'originalité et l'importance des avantages offerts aux visiteurs.
Nous faisons un pressant appel à votre concours pour nous aider à placer nos tickets-remboursables du prix de 0 fr. 50 et donnant droit, gratuitement, à une série de spectacles dont voici l'exposé exact : l’ascension de la Grande Roue.
— Théâtre-concert ; music-hall ; grand bal kermesse; biophonographe Normandin ; cabaret montmartrois ; concert napolitain ; la voyante musicale ; l'homme rouge ; le mystère d'Isis ; la sellette enchantée ; le théâtre des Pygmées ; l'enfant prodige ; les glissades indiennes, etc.
De plus, chaque visiteur recevra, en quittant l'établissement, un cadeau-souvenir en échange de son ticket.
Jamais, dans aucun établissement au monde, on n'a vu donner de pareils avantages pour si peu d'argent.
Nos Fêtes sont donc assurées d'un succès prodigieux si tout le monde veut se dévouer à la propagande par le placement des tickets.
Nous sommes convaincus de pouvoir compter sur tous vos efforts dans l'intérêt général de votre section et de la Fédération, et vous prions, Messieurs et chers camarades, d'agréer, avec nos remerciements, nos sincères salutations.
Pour la Commission des fêtes : Le Président de la Fédération, CLÉON-DELABY.
19, boulevard Morland et à la Mairie du IVe arrondissement, de 3 h. à 6 h.
Le Vétéran, Paris, 1er octobre 1902, p. 14.
L'article laisse entendre que les spectacles proposés ne le sont pas spécifiquement pour ces fêtes, mais qu'ils sont probablement accessibles au public le reste du temps. Toujours est-il que nous ne disposons d'aucune autre information au sujet de ces représentations spéciales.
La Grande Roue de Paris, ouverte et fonctionnant tous les jours. Concert d'Été (c. 1900)
Modèle déposé, propriété exclusive de la Grande Roue de Paris
Le Royal Diograph (Ba-ta-Clan, novembre 1902)
Une courte et brève annonce, publiée en novembre 1902, évoque la présence du Royal Diograph dans le music-hall, le Bataclan, situé au 50, boulevard Voltaire (11e)
Ce soir, à Ba-ta-Clan, première représentation de la Consigne est de rafler, scènes d'actualité des plus amusantes, jouées par M. Charland, Mlle Léontia, et de l'Armoire, pièce très fine et très humoristique, où l'on assiste à la désopilante scène d'un huissier apposant les scellés sur une armoire, dans laquelle sa femme est enfermée. La partie concert, déjà si intéressante, est augmentée des Pierrots musicaux et du Royal Diograph. Prochainement, le public aura la bonne fortune d'applaudir Louise France, dans les Deux Tourtereaux, de M. Ginisty, pièce qu'elle a créée au Théâtre Libre, avec Antoine.
Le Journal Paris, 7 novembre 1902, p. 5.
On peut penser malgré tout que le Royal Diograph - un autre nom du Royal Biograph - est resté quelque temps au Bataclan.
Le Cinématographe Parlant su Salon des Industries du Mobilier (Grand Palais, 3-16 novembre 1902)
Au Salon des Industries du Mobilier, un cinématographe parlant fonctionne pendant toute la durée de l'événement :
Demain, au Grand Palais des Champs—Elysées, Salon des Industries du Mobilier, entrée : 50 centimes. A visiter : l'Exposition des Gobelins - Trois siècles de Tapisseries.- Exposition de Sèvres .et de Beauvais. — Grand Biorama des Bois. Cinématographe Parlant.
Rappelons que la fermeture est irrévocablement fixée au 16 novembre.
Journal des débats politiques et littéraires, Paris, dimanche 2 novembre 1902, p. 3.
Le Cinématographe Gaumont (Salon de l'Automobile, du Cycle et des Sports, <13> décembre 1902)
Au Salon de l'Automobile, un appareil Gaumont présente des vues animées :
Salon de l'Automobile, du Cycle et des Sports
Troisième journée.-Visite du roi des Belges
[...]
Si nous parlions un peu des galeries supérieures ? Allons visiter les différentes sections du premier étage. On y trouve des nouveautés qui ne sont pas moins intéressantes que celles du rez-de-chaussée.
Le cinématographe, monté par la maison Gaumont, dresse là-haut sa grande carcasse, tandis qu'à ses pieds de nombreux dons appartenant à la loterie gratuite sont exposés.
Les vues du cinématographe sont, cette année, particulièrement amusantes. Il y en a pour tous les goûts: la course d'automobiles Paris-Vienne, le Circuit des Ardennes, des séances de lutte, scènes de théâtre, etc.
Le Vélo, Paris, samedi 13 décembre 1902, p. 1.
1903
← 1902 Le cinématographe Lumière (Grands Magasins Dufayel, 1er janvier-31 décembre 1903) → 1904
Les séances du cinématographe se prolongent au cours de l'année:
Une foule considérable se presse, chaque jour, au Cinématographe des Grands Magasins Dufayel, dont les représentations sont devenues classiques dans leur genre, ccomme celles de l'Opéra et du Théâtre-Français le sont dans le leur. Au programme: l'impressionnante ascension du Mont-Blanc, tous les détails de l'exploitation du bois au Canada, la chasse à courre, le Durbar de Delhi, le cake-walk et toute une série de vues en couleurs, de transformations désopilantes, accompagnés par un excellent orchestre et avec l'imitation parfaite des bruits de toute sorte. A chacune des séances, présentation de la lumière chantante, avec les appareils de la Maison Radiguet.
Le Journal, Paris, mardi 10 mars 1903, p. 6.
Le Cinématographe des Nouvelles Galeries "À la Ménagère" (Boulevard Bonne-Nouvelle, abril 1903)
Une annonce publiée en avril 1903 semble indiquer que les projections cinématographiques continuent depuis 1901, au deuxième étage des Nouvelles Galeries "À la Ménagère", mais il ne nous est pas possible de savoir s'il y a eu des interruptions.
Le Petit Journal, Paris, 22 avril 1903, p. 6.
Nous ne trouvons pas d'informations au-delà de cette date.
← 1902 L'American Biograph de la Galerie Georges-Petit (12 rue Godot-de-Mauroi, <16> mai 1903)
← 1902
L'American Biograph continue à fonctionner, en 1903, dans la Galerie Georges Petit :
Les intéressantes conférences artistiques de M. Marius Vachon à la galerie Georges Petit, 12, rue Godot-de-Mauroi, qui avaient été interrompues la semaine dernière, seront reprises demain soir dimanche, à neuf heures.
Ces conférences mensuelles présentent l'originale et inédite attraction d'être illustrées de portraits vivants d'artistes français, peintres et sculpteurs, exécutés au moyen du cinématographe Lumière. Les portraits vivants sont ceux de MM. Joseph Bail, Jean Béraud, Besnard, Bouguereau, Carolus-Duran, Cottet, J. Dupré, François Flameng, Gardet, Jean Geoffroy, Gérôme, Gervex, Jules Lefebvre, Lhermitte, Roll, Rodin et Roybet.
Le Figaro, Paris, samedi 16 mai 1903, p. 4.
Le Royal Diograph (Moulin-Rouge, 30 avril-juillet 1903)
C'est à partir du mois de mai que le Moulin-Rouge accueille pour quelque temps un Royal Biograph (sous le nom Royal Diograph). Il ne s'agit pourtant que d'un numéro parmi bien d'autres que l'on présente dans ce music-hall qui s'est rendu universellement célèbre grâce à son " Quadrille naturaliste ". C'est en 1902 que d'importants travaux sont effectués dans l'établissement de Joseph Oller, et le 5 mars 1903, la nouvelle salle est inaugurée. Quelques semaines plus tard, le Royal Biograph fait son apparition pour la première fois :
Ce soir, au Moulin-Rouge, pour la première fois, le Royal Diograph, fera défiler devant les dîneurs du restaurant le voyage du Président en Algérie. Julien, qui est débordé depuis qu'il a pris la direction du restaurant, toute sa clientèle élégante l'a suivi au Moulin-Rouge, ne répond pas des tables après huit heures trois quarts. Aujourd'hui et demain, deux dernières représentations de l'Américain Cook, le désopilant acrobate ; avec à ceux qui n'ont pas encore applaudi l'homme le plus drôle du monde. Le succès fou de Strongfort, l'hercule écrasé en scène par une automobile augmente tous les jours et Miss Noisett et ses trois frères continuent, dans le Cercle de la mort, à faire frissonner la salle.
La Lanterne, Paris, 30 avril 1903, p. 4.
Quelques jours plus tard, d'autres vues sont annoncées :
Au Moulin-Rouge ont lieu, ce soir, les débuts sensationnels de miss Etta, qui vient d'attirer pendant deux mois toute l'aristocratie anglaise à l'Alhambra de Londres. Surnommée la Mme Sans-Gêne du trapèze, nul doute qu'elle n'obtienne à Paris le même succès, au milieu de cette pléiade d’étoiles composée de Lionel Strongfort, l'écrasé quotidien ; miss Noizet et ses frères, créateurs du cercle de mort ; les Napols, les Fitzgerald, etc...
Signalons que, le soir même de l'arrivée d'Édouard VII, le Royal Diograph en offrait la primeur aux dîneurs du restaurant Indien, stupéfaits de ce tour de force. Ce soir, la revue de Vincennes.
Le Journal, Paris, 5 mai 1903, p. 1.
L’appellation " Royal Diograph " n'est sans doute pas une coquille, car Edgard Normandin, le frère d'Ernest Normandin, a déposé la marque " Diograph ", en 1898, pour un appareil chronophotographique. Les vues évoquées Le Voyage du Président en Algérie, L'Arrivée du roi Édouard VII et La Revue de Vincennes sont difficilement identifiables dans la mesure où plusieurs éditeurs de films proposent des titres similaires. Par la suite, très peu d'informations jusqu'au mois de juillet où il est question pour la dernière fois, semble-t-il, du Royal Diograph :
Quel est le music-hall de Paris où l'on voit le plus de jolies femmes ?
Telle est la question que nous voulions poser à nos lecteurs, puisque les concours sont aujourd'hui à la mode.
Mais on nous a très justement fait remarquer qu'il n'y aurait qu'une réponse unanime et que l'établissement désigné d'un commun accord serait le Moulin-Rouge.
Tous les soirs, la jolie Marville, la toute mignonne Ellen Baxone, entourée d'un bataillon de délicieuses misses Cocktail's font acclamer la Belle de New-York, le plus grand succès d'opérette que l'on ait eu à enregistrer depuis vingt-cinq ans.
Après ce merveilleux spectacle, on peut applaudir l'énigmatique Phroso, qui continue tous les soirs à déchaîner l'enthousiasme, et le Royal Diograph.
La Lanterne, Paris, 18 juillet 1903, p. 1.
Répertoire (autres titres) : Le Voyage du Président en Angleterre (La Lanterne, Paris, 16 juillet 1903, p. 3).
Le Cinématographe du docteur Doyen (Nouvelle clinique, 14 mai 1903)
C'est à l'occasion de l'inauguration de son nouvel Institut de Chirurgie, que le docteur Doyen a invité des membres de la presse parisienne. La nouvelle clinique se trouve rue Racine et tout est parfaitement orchestré et le cinématographe est également à l'honneur :
Le Cinématographe
Dans un coin de la salle, une sorte de logette vitrée et surélevée sert au fonctionnement du cinématographe. Le cinématographe reproduisant des opérations ! voilà une chose que Doyen n'a pu faire « avaler » au public ; l’a-t-on blagué, ce procédé, qui est pourtant l'un des meilleurs que l'on connaisse pour apprendre aux intéressés certaines méthodes opératoires. Avant-hier, dînant à la salle de garde d'un grand hôpital parisien, j'entendais précisément chanter, par un interne, une chanson – très drôle, d'ailleurs, et dont Doyen serait le premier à rire – dont un couplet évoque Doyen opérant, tandis que vingt cinématographes fonctionnent à la fois ! Eh bien ! il faudrait pourtant avertir le public qu'il se montre injuste en faisant peser un discrédit, une accusation de charlatanisme sur l’homme qui eut le premier, l'idée ingénieuse d'enregistrer pour les étudiants d'aujourd’hui et de demain un souvenir exact, complet, visuel enfin, d'opérations qu'il exécute avec une maîtrise unique. Devant ses invités d'hier, Doyen s'est expliqué avec bonne grâce sur ce reproche qui lui tient à cœur, et il nous a tous gagnés à la cause du cinématographe en nous faisant assister à une séance qui reproduisait quelques-unes de ses plus curieuses interventions.
Ces projections nous furent offertes dans une grande salle du rez-de-chaussée, qui sert à la mécanothérapie, à la gymnastique rationnelle. Cette mécanothérapie, c'est-à-dire le traitement par le mouvement, prend aujourd'hui une extension énorme. Que ce soit par le sandow ou par les appareils compliqués comme ceux que nous vîmes hier, chacun désormais s'agite méthodiquement… et voilà que les spécialistes des maladies nerveuses s'accordent eux aussi à préconiser la mécanothérapie à leurs clients.
Auprès de cette, vaste salle de gymnastique on a placé l'installation hydrothérapique. Plus loin, nous trouvons des ateliers où plusieurs ouvriers travaillent en permanence pour les moulages et la fabrication des appareils orthopédiques. La clinique présente en effet cette particularité d'être comme un organisme complet et de- suffire par elle-même à ses besoins elle fabrique même son électricité.
Louis Paillard.
La Presse, Paris, 17 mai 1903, p. 1-2.
L'article, tout à la gloire du célèbre docteur, n'offre pas, comme celui de son confrère du Rappel, la réaction du public qui est pour le moins secoué par ces images fortes :
Puis, après une visite à la salle de photographie, les invités du docteur Doyen assistèrent à une série d'opérations : ablation d'un goitre, d'un rein, résection d'un genou au moyen de la scie circulaire, opération d'une tumeur fibreuse abdominale, amputation d'une jambe et ouverture d'un ventre avec double manœuvre de la table opératoire.
Un peu pâles, les yeux vagues des gens mal à l'aise, ils regardaient, horrifiés... et c'est avec un soupir de soulagement qu'ils virent cesser cette séance de... cinématographie chirurgicale.
Le Petit Parisien, Paris, 15 mai 1903, p. 4
Les projections d'Eugène Doyen laissent rarement indifférent le public souvent non averti et la violence des images, leur " vérité " est parfois insoutenable.
Le Bioscope du Jardin de Paris (Champs-Elysées, <27 juin- [5] septembre 1903)
Au jardin de Paris, fonctionne le Bioscope à la fin du mois de juin :
Au Jardin de Paris, fraîcheur, gaieté, élégance, voilà ce que trouvent en ce moment les étrangers et Parisiens de marque, sans compter un programme absolument varié et des attractions hors ligne, entre autres le Bioscope, de Ch. Urban, tout à fait intéressant la belle Debauga dans ses poses lumineuses, et les danses de l'American Cake-Walk, exécutées par les meilleurs lauréats des concours de Paris.
Le Matin, Paris, 27 juin 1903, p. 5.
Le Bioscope propose également des vues cinématographiques tournées très récemment :
Au Jardin de Paris, un vrai tour de force a été exécuté par le Bioscope de Ch. Urban; samedi soir il a fait admirer à l'êtégante clientèle, et à 48 heures d’intervalle seulement, la course d’automobiles dite Coupe Gordon-Bonnette 1903, qui a été couru jeudi dernier en Irlande; la série des vues a vraiment intéressé le public qui n’a cessé d’applaudir avec insistance ce merveilleux résultat; c’est le record de célérité d’actualité qui a été gagné par l’Américain Bioseope.
Le Soir, Paris, 6 juillet 1903, p. 3.
En septembre, le Bioscope fonctionne encore :
Le beau temps qui nous favorise en cette flin de saison augmente la vogue du Jardin de Paris, aussi les Parisiens et les étrangers de marque viennent en foule se reposer des chaleurs de la journée, applaudir un excellent programme et goûter, grâce au Bioscope de Ch. Urban, l'illusion d’un vrai voyage en Suisse.
Le Jockey, Paris, samedi 5 septembre 1903, p. 1.
Répertoire (autres titres): Le Voyage de M. Loubet à Londres (La Lanterne, Paris, vendredi 10 juillet 1903, p. 3), La Revue de Longchamp (L'Éclair, Paris, mercredi 15 juillet 1903, p. 4), La Chasse au cerf, L'Ascension du Mont-Blanc (Le Jockey, Paris, samedi 1er août 1903, p. 1), Le Voyage au Canada (Le Jockey, Paris, samedi 22 août 1903, p. 1).
L'American Biograph (Aérodrome de la Porte-Maillot, 20- > 23 juillet 1903)
Des projections cinématographiques sont organisées à l'aérodrome de la Porte-Maillot à partir du 20 de juillet 1903 :
Aujourd'hui, à l'aérodrome de le Porte-Maillot (Ballon captif), inauguration des projections gratuites en plein air - sur écran de dix mètres carrés - par l'American Biograph du Casino de Paris et du Palace-Théâtre de Londres : Vues uniques et inédites de S. S. Léon XIII au Vatican. Magnifiques panoramas. Programme très varié. Tous les soirs, de 9 à 11 heures (sauf en cas de pluie).
Gil Blas, Paris, 20 juillet 1903, p. 4.
Elles s'interrompent peu après à la suite de la mort du pape :
Par suite de la mort du Pape Léon XIII, les projections de l'American Biograph, de l'aérodrome de la Porte-Maillot, ont été suspendues hier.
A dater de ce soir, reprise des vues uniques et inédites du Pape Léon XIII au Vatican.
Programme très varié, et projections gratuites.
La Presse, Paris, 22 juillet 1903, p. 4.
Le Realgraph du Moulin-Rouge (90 boulevard de Clichy, 23 juillet-31 août 1903)
Alors que les séances du Royal Diograph viennent à peine de prendre fin, un nouvel appareil, dont le nom Réalgraph a été déposé par le frère d'Ernest Normandin, Edgard Normandin, prend la suite pour continuer à offrir des séances de vues animées. Même si l'annonce suivante paraît à plusieurs reprises, elle ne nous éclaire guère sur la nature de ce nouveau cinématographique, ni sur la qualité des projections :
MOULIN-ROUGE (508-63) D. P., L. -Flers, 8 h.-Phroso. La Belle de New-York. The Realgraph. Restaurant dans la salle et dans le Jardin d'Été.
Le Matin, Paris, 23 juillet 1896, p. 6.
La dernière annonce date du 31 août 1903.
Le Realgraph du Nouveau-Cirque (247 rue Saint-Honoré, 4 septembre 1903-septembre 1903)
Le Realgraph qui s'installe au Nouveau-Cirque dans les premiers jours de septembre pourrait bien être celui qui quelques jours au préalable a présenté des vues animées au Moulin-Rouge. En tout cas, la presse est un peu plus loquace lorsqu'elle évoque l'inauguration :
RÉOUVERTURE DU NOUVEAU CIRQUE
Hier a eu lieu la réouverture du Nouveau-Cirque de la rue Saint-Honoré, si aimé des Parisiens. La salle, comme d'habitude, offrait un coup d’œil charmant.
M. Houcke, l'habile " manager ", a su réunir une troupe hors de pair, aux numéros comme toujours passionnants.
Citons notamment une grande nouveauté, le " Réalgraph ", d'une précision telle que l'on croirait avoir la réalité sous les yeux. Mlle Blanchet de Paunac mérite bien son nom de " mystérieuse ". Sybille d'une habileté surprenante, ses expériences de télépathie déroutent la raison, et ses réponses instantanées aux questions les plus inattendues confondent l'imagination. Les exercices équestres de Harry et de sa jeune sœur Eva ont fait sensation. Très applaudis aussi, les deux jeunes Patty, équilibristes et jongleurs incomparables.
La belle Américaine, Rita del Erido, la très élégante et très troublante écuyère de haute école, a montré, comme toujours, sa haute intelligence du cheval et sa grâce de femme du monde. Les habitués l'ont revue avec plaisir, et elle a bien justifié l'ovation générale qui a été faite à sa beauté et à son talent. Puis tout un lot de clowns sont venus jeter la note gaie. Au premier rang, Foottit et Chocolat, dont les excentricités ont provoqué le fou rire habituel. Mentionnons encore les Gatty et Jack. Pour terminer le spectacle, nous avons eu des exercices de natation, par des plongeurs extraordinaires.
Cette série d'attractions a obtenu le plus grand succès, et on peut augurer que les représentations se succéderont, très courues et très fructueuses.
Le Matin, Paris, 5 septembre 1903, p. 5.
Combien de temps l'appareil est-il resté au Nouveau-Cirque ? En tout dès le 8 septembre les annonces disparaissent.
Le Realgraph du Ba-Ta-Clan ([26] septembre 1903-[2 octobre] 1903)
Une nouvelle fois, le realgraph - s'agit-il toujours du cinématographe dont le nom a été déposé par Edgard Normandin, frère d'Ernest Normandin se retrouve dans une salle de spectacles. Cette fois-ci, c'est au Ba-Ta-Clan qu'il présente des vues animées :
A Ba-Ta-Clan [...]
Les vues projetées par le célèbre Réalgraph, qui sont la plus grande attraction de Londres, et dont Ba-Ta-Clan s'et assuré l'exclusivité, ont intéressé au plus haut point.
Le Journal, Paris, 26 septembre 1903, p. 4.
De manière assez exceptionnelle, nous connaissons le titre de quelques vues annoncées dans Le Figaro du même jour :
A Ba-Ta-Clan, au succès de Mme Méphisto, succède celui de la gentille opérette de M. Trébla et Schwoeblé : Cendrillette ou la Culotte merveilleuse. Succès partagé par les interprètres, en tête Mlle Milcent et M. Darthaud, excellents chanteurs doués de jolies voix comme on en rencontre rarement au concert. Puis le "black-américain" Foot Ger's, et la grosse attraction, les merveilleuses vues du Réalgraph, dont Ba-Ta-Clan s'est assuré la propriété : Le magnifique travail des abeilles, les moeurs des serpents, caméléons, etc., etc.
A ce beau programme viendra s'ajouter, le 3 octobre, Inaudi, le prodigieux calculateur.
Le Figaro, Paris, 26 septembre 1903, p. 4.
Le répertoire proposé pourrait évoquer une programmation de vues de la Bioscope Films. Les annonces disparaissent dès le début du mois d'octobre.
L'Urban Bioscope (Théâtre du Moulin-Rouge, <30 octobre 1903)
En octobre, le théâtre du Moulin-Rouge propose une série de vues scientifiques de la collection Urban :
Le monde invisible
Le théâtre du Moulin-Rouge, à Paris, présente au public un numéro original qui mérite d'être signalé en raison de son intérêt scientifique.
Sous le nom de « Urbain Bioscope et le monde invisible », on fait défiler sous les yeux des spectateurs une série d'études microscopiques cinématographiées, c'estàdire que l'on peut suivre sur un écran lumineux les mouvements d'êtres microscopiques grossis de 10 à 10,000 fois.
Ces vues cinématographiques sont particulièrement remarquables par leur netteté, leur clarté et la grande quantité de détails que l'on peut y distinguer.
Une série de vues permet de suivre les différentes phases de la vie des abeilles dans une ruche; la cinématographie d'une goutte d'eau de rivière avec sa faune et sa flore; une autre série représente un morceau de fromage sur lequel on distingue avec une grande netteté les mouvements des acariens qui l'habitent; signalons aussi la vue cinématographique de la circulation du sang dans les vaisseaux de la palme d'une patte de grenouille; d'autres vues enfin reproduisent les mouvements de différents animaux: insectes, serpents, batraciens, etc.
C'est la première fois, croyons-nous, que l'on est arrivé à cinématographier, avec de tels grossissements, les mouvements des infiniment petits.
Cette nouvelle application du cinématographe pourra rendre de grands services; il sera facile maintenant de présenter à un public nombreux les détails que l'on ne pouvait voir jusqu'à présent que dans le champ d'un microscope.
Journal du Jura, Bienne, vendredi 30 octobre 1903 (supplément), p. 1.
Le cinématographe du Musée Grévin (10 boulevard Montmartre, 28 octobre-> 4 décembre 1903) → 1904
Le Musée Grévin offre des projections cinématographiques:
Spectacle absolument unique au Cinématographe des Grands Magasins Dufayel, qui détient toujours le record de l'actualité en présentant à ses nombreux spectateurs les plus intéressantes vues prises au cours du voyage à Paris des souverains d'Italie.
Le programme comprend également l'Epopée napoléonienne, grande reconstitution historique faisant l'objet de quatorze tableaux en couleur, ainsi que la Belle au Bois dormant, féerie à grand spectacle en 11 tableaux de couleurs et quantités d'autres scènes comiques et à transformations qui constituent un ensemble parfait.
Le Pays, Paris, mercredi 28 octobre 1903, p. 4.
Les annonces pour pour l'essentiel assez lapidaires :
Musée Grévin. Entrée: 1 fr.-Une réception chez l'empereur Menelick; Bonaparte à la Malmaison; SS. Léon XIII et le cortège pontifical; le journal lumineux par le cinématographe.
La France militaire, Paris, vendredi 4 décembre 1903, p. 4.
Les séances se prolongent l'année suivante.
Répertoire (autres titres): Le Roi et la Reine d'Italie à Paris, tous les épisodes du séjour: Paris, Versailles, revue de Vincennes (La Dépêche coloniale, Paris, 9 novembre 1903, p. 4).
→ 1904
Le Cinématographe (Salon des Abonnés du Figaro, <6> novembre 1903)
Le salon des abonnées du Figaro propose des projections cinématographiques :
NOTRE SALON DES ABONNÉS
Aujourd'hui, à cinq heures, dans notre SALON DES ABONNÉS, séance hebdomadaire de cinématographie. En voici le programme : -« Au feu ! » — « Le déshabillé désopilant ».— « Le chien et la pipe ». — « Les éléphants ». — « Croiseurs cuirassés ». — « Statues vivantes ».
Le spectacle se terminera par la nouvelle « Course de taureaux » que vient de faire prendre à Barcelone le Cinématographe Pathé et qui est certainement ce qu'on a fait de mieux jusqu'à présent en vues cinématographiques.
Le piano sera tenu par le compositeur A. Gnocchi, qui a bien voulu nous prêter son concours.
L'affluence des spectateurs a été telle, vendredi dernier, que quelques abus se sont produits. Nous rappelons à nos abonnés et lecteurs que, pour ces séances, il est nécessaire d'être muni de la carte du SALON DES ABONNÉS, qui sera réclamée à l'entrée. Les personnes accompagnant le titulaire d'une carte devront se présenter en même temps que lui au contrôle du Salon.
Nous donnerons d'ailleurs comme d'habitude une séance supplémentaire à cinq heures et demie.
Le Figaro, Paris, vendredi6 novembre 1903, p. 1.
L'Excelsior Réalgraph de la Gaîté-Rochechouart (décembre 1903)
L'Excelsior Réalgraph qui offre des vues cinématographiques à l'occasion du Réveillon de Noël a-t-il quelque chose à voir avec le Réalgraph du frère d'Ernest Normandin, Edgard Normandin ? Les rares annonces publiées dans la presse ne nous éclairent guère :
Ce soir, à la Gaîté-Rochechouart, à l'occasion du Réveillon, grande soirée de gala : " Excelsior Réalgraph ". Rentrée de Dalbret. Au programme le Gosse du Miracle, l'amusant vaudeville de Fabrice Lémon et de Marsan.
Le Journal, Paris, 24 décembre 1903, p. 6.
Sans doute, l'appareil n'a-t-il été présenté que le soir du Réveillon, car aucune autre annonce n'est publié par la suite.
1904
← 1903 Le cinématographe Lumière (Grands Magasins Dufayel, 1er janvier-31 décembre 1904) → 1905
Le cinématographe des Grands Magasins Dufayel continue à fonctionner tout au long de l'année 1904. À l'occasion de la visite des Calésiens à Paris (25 septembre), ces derniers, invités par les poissonniers des Halles, posent devant l'établissement. Une affiche indique que le cinématographe fonctionne à cette époque.
Les Calaisiens à Paris.-Visite aux Grands Magasins Dufayel. 25 septembre 1904.
Le cinématographe du théâtre Robert-Houdin (8 boulevard des Italiens, 1er-> 4 janvier 1904)
Au cours de l'année, les informations relatives aux projections cinématographiques sont assez rares :
Au théâtre Robert-Houdin, les séances de cinématographie sont toujours très suivies, grâce aux vues si intéressantes de M. Méliès. Le Royaume des Fées réalise ce que qu'on peut imaginer de plus fantastique.
Aussi le public est-il toujours empressé surtout aux séances du dimanche où l'on refuse du monde.
Cette jolie féerie sera donnée aux matinées de prestidigitation des 1er, 2, 3 et 4 janvier.
Le Gaulois, Paris, vendredi 1er janvier 1904, p. 4.
En décembre, la chambre syndicale de la prestidigitation se réunit pour une soirée exceptionnelle :
La chambre syndicale de la prestidigitation, dont les présidents d'honneur sont MM. Isola, directeurs de l'Olympia et des Folies-Bergère, le président, M. Méliès, directeur du théâtre Robert Houdin, et le. vice-president M. Raynaly, artiste prestidigitateur, a donné, au théâtre Robert-Houdin, devant une salle archicomble, une représentation offerte à ses membres honoraires.
Cette représentation, d'un genre spécial, a obtenu un succès dépassant toutes les espérances et elle marquera certainement dans les annales de la Magie. Conduite par M. Raynaly, dont le petit discours d'ouverture a été fort bien accueilli, cette séance offrait cette originalilé d'être faite par plusieurs, artistes. Rien de plus curieux et de plus attirant que de voir ces différentes personnalités ayant chacune son allure, son langage et ses tours particuliers.
En présence du succès considérable et bien mérité obtenu par cette si curieuse première, qui a eu lieu un peu en petit comité, une représentation publique, cette fois, sera donnée dans une plus vaste salle.
La séance s'est terminée par quelques-unes de ces si curieuses et si extraordinaires projections cinématographiques de la création et fabrication de M. Melier [sic].
Le Siècle, Paris, vendredi 16 décembre 1904, p. 4.
Le Cinématographe du Petit Journal (21, rue Cadet, mars-juillet/septembre-décembre 1904)
Le Petit Journal (Façade rue Lafayette, 61 et Façade rue Cadet 21)
Le Petit Journal, alors l'organe de presse le plus important au monde, va se lancer dans l'aventure du cinématographe. C'est au premier étage du 21 de la rue Cadet, dans sa grande salle de spectacle, que les projections vont se dérouler. L'inauguration a lieu le 10 mars 1904. Nous ne connaissons ni le nom du responsable du poste, ni celui de l'appareil - sans doute un Pathé -, en revanche, le premier programme nous est connu. Le répertoire est immédiatement identifiable, ce sont des vues provenant du catalogue Pathé, ce que la presse confirme d'ailleurs : Combat des escadres russe et japonaise, Premiers engagements des Russes et Japonais, Incendie du Théâtre de Chicago, L'Épopée Napoléonienne, La Reine Marie-Antoinette... auxquelles il faut ajouter de " nombreuses vues comiques et à transformations ", ainsi que des " scènes de cinématographe et phonographe le chanteur comique Mercadier. " La présence de ces dernières vues indique que l'appareil cinématographique est combiné avec un phonographe. C'est Le Petit Journal, on s'en doute, qui fait le compte rendu le plus long et le plus positif de la séance inaugurale :
LE CINÉMATOGRAPHE DU PETIT JOURNAL
Malgré les prévisions les plus optimistes, le succès des cinq séances de cinématographe qui ont eu lieu,hier, dans la Grande Salle de Réunions du Petit Journal a dépassé tout ce qu'on pouvait espérer.
Pour la première séance, qui était annoncée pour deux heures et demie, plus de cinq mille personnes, qui tenaient toutes à la main leur bon détaché du Petit Journal, se rangèrent à la queue dans le vaste hall de nos messageries, prés d'une heure avant l'ouverture des portes.
Aussi, lorsque ces portes furent ouvertes, les agents et les employés de l'administration ont-ils dû user de toute leur énergie pour faire comprendre au public que tout le monde ne pouvait passer à la fois au tourniquet et entrer dans la salle : débordés, leur tâche ne fut pas toujours facile.
En quelques instants, à chaque représentation, notre Grande Salle s'est trouvée remplie, et malheureusement il restait encore autant de monde dehors.
Nous avons.été dans l'obligation de donner trois représentations supplémentaires.
Le spectacle, charmant, a dédommagé, le public de sa longue attente ; il nous a prouvé par ses applaudissements; combien il appréciait à leur valeur les superbes bandes Pathé, toutes nouvelles; inédites, qui défilaient, en noir et en couleurs sous ses. yeux.
Les vues du combat des escadres russe et . japonaise et dès premiers engagements entre les belligérants ont été notamment suivies dans leurs dramatiques péripéties, avec la plus grande attention.
Ces magnifiques bandes fabriquées par cette grande maison, universellement réputée, ont obtenu le succès qu'elles méritaient par le luxe et la richesse inouïs de la figuration.
Les rires se sont ensuite donné libre cours, à l'apparition des vues à transformations et comiques : une d'entre elles, surtout; a eu un très vif succès, celle où Galipeaux mime avec tant de drôlerie : le Premier cigare du collégien.
En résumé, un colossal succès, pour le cinématographe du Petit Journal. Malheureusement, toute médaille a son revers ; le revers, pour nous, c'est d'avoir été obligés de refuser presque autant de monde que nous en avons admis, au cours des cinq séances dé l'après-midi et du soir.
Nous organiserons prochainement une nouvelle représentation, tout aussi belle que celles d'hier, pour toutes les personnes que nous avons eu le regret.de voir partir.
Le Petit Journal, Paris, 11 mars 1904, p. 1.
L'opération est réussie, et l'on voit bien - l'article est publié en première page du journal - que ces séances cinématographiques ont une claire dimension publicitaire. Dans un premier temps, elles sont espacées puisque la deuxième n'a lieu que le 24 mars, puis les suivantes, quotidiennes, à partir du 27 mars. Celles du 4 avril 1904 ont un caractère particulier. L'une d'elles, en effet, est réservée aux ouvrières parisiennes. L'été 1903, Le Petit Journal avait organisé un train de plaisir pour transporter quelques centaines d'ouvrières à la mer :
LA JOURNÉE DES OUVRIÈRES PARISIENNES DANS LA GRANDE SALLE DE RÉUNIONS DU PETIT JOURNAL
21, rue Cadet, 21
[...]
La séance de cinématographe des ouvrières parisiennes aura lieu le Lundi de Pâques, 4 Avril, à deux heures et demie de l'après-midi, et une seconde séance aura lieu, si nous le jugeons nécessaire, à quatre heures.
Cependant, malgré notre vif désir de faire le plus d'heureuses possible, nous ne pouvons inviter tout le monde : aussi avons-nous décidé de tenir à la disposition des 3,000 premières ouvrières qui se présenteront, 61, rue Lafayette, à nos guichets, des cartes d'entrée que nous leur remettrons gratuitement sur la présentation du numéro de la Mode du Petit Journal qui paraîtra le Jeudi 31 Mars et de cinq numéros du Petit Journal parus dans la semaine précédant le jour de Pâques.
La distribution des cartes d'admission à cette belle séance aura lieu, 61, rue Lafayette, pendant toute la journée du Samedi 2 Avril, de sept heures et demie du matin à six heures du soir, et durant toute la matinée du Dimanche de Pâques, de neuf heures du matin à midi.
Nous publierons prochainement dans le Petit Journal, au " Courrier des Théâtres ", le programme de cette séance exceptionnelle.
Sous aucun prétexte, les hommes ne seront admis à cette matinée, réservée exclusivement aux ouvrières parisiennes.
Le Petit Journal, Paris, 25 mars 1904, p. 1.
La gratuité ne l'est en fait qu'à moitié puisque les ouvrières doivent se procurer 6 numéros du Petit Journal... Le quotidien publie dès lors, très régulièrement, les programmes du cinématographe installé au 1er étage de son siège. C'est le 7 avril qu'est introduite une nouveuté, le Dussaud'scope (ou Dussaudscope). Il s'agit en fait d'un procédé qui permet de jouer sur les couleurs des films :
PREMIÈRE REPRÉSENTATION du DUSSAUD'SCOPE
Depuis huit années que le cinématographe est inventé, chacun a pressenti qu'un jour viendrait où la Science obtiendrait des scènes dans lesquelles se succéderaient toutes les nuances et toutes les intensités lumineuses de la Nature. Un grand nombre de savants se sont efforcés de réaliser ce rêve de façon satisfaisante. Après des années de recherches de laboratoire, un ingénieur français, M. Dussaud, vient d'atteindre au succès.
M. Dussaud a apporté au Petit Journal un nouvel appareil de son invention, qui, en projetant sur un écran des vues animées et en couleur, permet de varier à l'infini leur intensité et leurs nuances les plus délicates.
C'est une révolution dans la cinématographie, c'est une orientation des plus attrayantes dans le domaine de la science et de l'art.
Le Petit Journal, toujours à l'affût de toutes les nouveautés capables d'intéresser et d'instruire le grand public, a obtenu de M. Dussaud la primeur de ces curieuses expériences ; il donnera aujourd'hui, à la suite de sa séance journalière de cinématographie, la première représentation du Dussaud'scope.
Le Petit Journal, Paris, 7 avril 1904, p. 3.
Une révolution pour le journaliste... peut-être, mais qui n'apporte finalement pas grand chose à la projection. Plusieurs films Pathé - semble-t-il - vont ainsi être présentés avec cet appareil, et cela jusqu'au mois d'octobre 1904. La dernière mention du Dussaud'scope se trouve dans Le Petit Journal du 26 octobre 1904 en page 3. En ce qui concerne les projections de la salle du Petit Journal, elles s'interromptent vers le 17 juillet et reprennent le dimanche 18 septembre 1904 et continuent jusqu'à la fin de l'année.
Répertoire (autres titres) : Horrible fin d'un concierge, Les Sœurs Barrisson, Un coup d’œil à chaque étage, Une idylle sous un tunnel, Le Chat botté, L'Eau qui fait pousser les cheveux, Les acteurs comiques Galipeaux et Dranem, Charge de cuirassiers, Barnum (Le Petit Journal, Paris, 23 mars 1904, p. 4), Les Croiseurs cuirassés Saint Louis et Gaulois entrant dans le port de Tunis, La Passion en 15 tableaux (Le Petit Journal, Paris, 27 mars 1904, p. 1), La Belle au bois dormant (ballet) (Le Petit Journal, Paris, 3 avril 1904, p. 3), Combat naval devant Port-Arthur (Le Petit Journal, Paris, 5 avril 1904, p. 3), Masques et Grimaces, Le Chapeau magique, Courses de taureaux, La Soubrette ingénieuse, Le Consulat et l'Empire, Japonaiseries, Paris;Joinville;Saint-Mandé (Le Petit Journal, Paris, 19 avril 1904, p. 3), Le Voyage de M. Loubet en Italie, La Catastrophe du "Petropavlosk" (Le Petit Journal, Paris, 2 mai 1904, p. 3), Le Voyage de M. Loubet à Rome, La Défense de Port-Arthur, le combat naval, dans les forts, Les Marins du Varyag et du Korietz passé par le grand-duc Serge, à Moscou, La Mort de l'amiral Makharoff, etc., Une chasse au sanglier (Le Petit Journal, Paris, 19 mai 1904, p. 3), La Défense de Port-Arthur: Dans les forts, combat naval, mort de l'amiral Makharoff, A Moscou: Revue des états-majors et des héroïques marins du Varyag et du Korietz passé par LL.A.I. le grand-duc Serge, gouverneur de Moscou, et le grand-duc Alexandre, Le Voyage de M. Loubet à Rome: les fouilles du Forum, le cortège traverse la Via Nazionale, le roi d'Italie et son brillant état-major, Courses de taureaux à Madrid en l'honneur du roi d'Espagne (Le Petit Journal, Paris, 10 mai 1904, p. 3), Un voyage en Italie.-Le port de Gênes. Venise: Le grand canal, le pont des Soupirs. Naples: Une excursion au Vésuve en éruption. Rome: Visite aux ruines du Forum et du Colisée, Une course de taureaux à Madrid en présence du roi Alphonse XIII.-L'entrée du quadrille, les chevaux, les banderilles, la mort, Le combat naval devant Port-Arthur: Dans les forts.-A Moscou: Les héroïques officiers et marins du Varyag et du Korietz passés en revue par le grand-duc Serge, Une chasse au sanglier en forêt de Doullens, Le Dussaud'scope : La grotte féerique: les poissons, la naïade, Marie-Antoinette: A Trianon, le tribunal révolutionnaire, la mort de la reine (Le Petit Journal, Paris, 22 mai 1904, p. 3), Une visite à l'école de cavalerie de Saumur, Épisodes pittoresques de la guerre russo-japonaise, Le Dussaud'scope: La Naïade, au fond de la mer (Le Petit Journal, Paris, 8 juin 1904, p. 3), La Catastrophe de Mamers (Le Petit Journal, Paris, 18 juin 1904, p. 3), La Course Gordon-Bennett (Le Petit Journal, Paris, 27 juin 1904, p. 3), Dispute de joueurs, L'Ours et la Sentinelle, Les Perroquets savants, Excursions-Petit Journal, Départ de nos excursionnistes. En route, L'Âne lutteur, Le mitron Dranem, Un drame dans les airs, Les Dénicheurs d'oiseaux, Les Indiens cow-boys, Scènes de guerre. Le Dussaud'scope 1re représentation des Fontaines lumineuses et des Feux d'artifices, Un concours de pêche du Petit Journal, Au feu (Le Petit Journal, Paris, 18 septembre 1904, p. 1).
→ 1905
← 1903 Le cinématographe du Musée Grévin (10 boulevard Montmartre, 1er janvier-31 décembre 1904) → 1905
← 1903
Les séances continue au musée Grévin annoncée désormais comme "l'actualité par le cinématographe" :
MUSÉE GRÉVIN. Entrée: Un franc. THÉATRE GRÉVIN.
Les Catacombes romaines. Le Cirque. Bonaparte à la Malmaison. L'actualité par le cinématographe.-tous les jours, matinée à 3 h. et le soir à 9 h.; "Le Sursis", A la matinée de 5 h., tous les jours: "AVant la noce", "Un [baiser] en diligence.
L'Éclair, Paris, 2 janvier 1904, p. 4.
Les séances se prolongent tout au long de l'année.
→ 1905
Le Théâtre Zoologique de François Bidel (Foire du Trône, 3 avril-[1er] mai 1904)
Le célèbre dompteur, François Bidel, après un triste accident, va transformer sa ménagerie en un Théâtre Zoologique qui utilise un cinématographe pour accompagner la conférence donnée par M. Henriel. Il s'agit de présenter des films dont on suppose qu'ils ont été tournés aux quatre coins du monde et qui permettent de voir les faunes dans leur environnement. Nous ignorons si ces vues sont effectivement des vues d'actualité ou si certaines ont été reconstituées. L'inauguration de la Foire du Trône a lieu le 3 avril 1904 et elle va durer jusqu'au premier mai.
Théâtre Zoologique, imp. E. Chaligné, Paris, 1904
(reproduit dans Bidel, 1967, 303-304) [D.R.]
Le programme de la conférence n'est pas indiqué, mais il est le même à chaque spectacle. La presse en donne une idée rapide :
Le théâtre de Bidel
La foire du Trône a repris tout à coup une vogue qu'elle n'avait pas eue depuis longtemps. Elle possède une " great attraction ", le théâtre zoologique de Bidel, place de la Nation. Faire le tour de la terre, avec le cinématographe, et rencontrer, en Abyssinie, de vrais lions ; aux Indes, une palpitante chasse au tigre ; au pôle Nord, des ours blancs,... tous dans leur pays natal, parmi de vrais indigènes et des décors de Cornil, décorateur de l'Opéra, s. v. p.
Allez chez Bidel, avec vos enfants, sans hésiter.
L. X.
Le Radical, Paris, 4 avril 1904, p. 3.
Le Journal, Paris, 3 avril 1904, p. 7.
Le Théâtre Zoologique, après la fin de la Foire du Trône, quitte la place de la Nation et s'installe près du pont de l'Alma pour la Fête des Invalides.
Le cinématographe du Musée Grévin (10 boulevard Montmartre, <19> avril 1904)
Le Musée Grévin offre des projections cinématographiques :
Musée-Grévin.-Entrée: 1 franc.-Les Catacombes romaines.-Le Cirque.-Bonaparte à la Malmaison.-L'actualité par le cinématographe.
La Dépêche coloniale, Paris, 19 avril 1904, p. 4).
Le Théâtre Zoologique de François Bidel (Fête des Invalides, 12 mai-2 juin 1904)
Albert Rancy, petit-fils de François Bidel, indique dans le livre qu'il a consacré au célèbre dompteur que le Théâtre Zoologique s'est installé à la Fête des Invalides :
[...] le théâtre zoologique Bidel se fixa ensuite près du Pont de l'Alma pour la durée de la Fête des Invalides (du 12 mai au 2 juin inclus). Il connut le même succès qu'il avait connu place de la Nation et fut seul de tos les métiers à pouvoir travailler tous les jours.
Albert Rancy, Un lion parmi les lions, Evreux, Impr. Labadie, 1967, p. 2999.
Cela se confirme bien grâce un entrefilet publié, entre autres, dans Le Petit Journal qui évoque le Théâtre Zoologique :
- En Sibérie :
Le voyage à travers les glaces polaires de la Sibérie, où l'on rencontre des ours blancs et des troupeaux de milliers de rennes, la circulation sur le fameux Transsibérien russe, la Chine et les Indes, ces profondes fourmilières d'hommes, avec leurs grands fauves, etc., etc., voilà ce que vous verrez pour la dernière fois encore, aujourd'hui, chez Bidel, place de la Nation, et, à partir du 12 mai, place des Invalides, à la fête des Invalides.
Le Petit Journal, Paris, 1er mai 1904, p. 4.
Le Biophonographe (La Grande Roue, mai 1904)
Si l'on en croit son inventeur, Henri Joly, le biophonographe aurait été en fonctionnement au Concert-Théâtre de la Grande Roue depuis 1900. Autant dire que l'appareil fonctionne depuis quatre ans lorsqu'un journal signale brièvement sa présence :
À LA GRANDE-ROUE
L'étrange machine tourne lentement dans le ciel bleu, et ses wagonnets, pavoisés pour la circonstance aux couleurs nationales, sont bondés de soldats, amateurs de sensation inédites, qui s'émerveillent bruyamment.
En bas, de nombreuses attractions attendent les voyageurs radieux. Le café-concert, où défilent les couples alertes ; le cabaret montmartrois, commémoration de la Butte ; le biophonographe, curieuse combinaison du son et du mouvement, retiennent tout à tour leur attention.
Un bal, ce soir, ainsi qu'une joyeuse kermesse attireront à la Grande-Roue les amateurs de danse et de distractions foraines. Le public sera admis à cette fête, et nul doute qu'il ne vienne nombreux assister aux ébats des troupiers.
Le Matin, Paris, 31 mai 1904, p. 2.
Le quotidien Le Matin a organisé, le 29 mai, une événement sportif qui va d'ailleurs être filmé par la maison Gaumont sous le titre La Marche de l'Armée. Dans un long compte rendu, le journaliste évoque les attractions auxquelles ont été invités les concurrents de l'épreuve en question... au rang desquelles se trouvent la Grande-Roue et son biophonographe.
Le Cinématographe Gaumont (Galerie des Machines, 19 juin 1904)
À l'occasion des fêtes des enfants offertes et organisées par le Matin, un cinématographe Gaumont propose un programme de vues animées :
Le cinématographe.
On n'a pas oublié le joli tour de force accompli, le 29 mai dernier, par MM. L. Gaumont et Cie, qui, avec le concours de la Société française des accumulateurs Tudor, ont réussi à donner le soir de la Marche de l'Armée, au gala du Trocadéro, la cinématographie complète de notre belle épreuve militaire. Le Matin a obtenu le concours gracieux de M. L. Gaumont pour dimanche à la galerie des Machines, et le spectacle qu'il offrira aux milliers d'enfants réunis dans le vaste hall comptera assurément parmi les plus goûtés, i Voici le programme des représentations cinématographiques, qui auront lieu à deux, trois, quatre et cinq heures de l'après-midi.
1. La Marche de l'Armée ;
2. Le déshabillage impossible ;
3. La pendule enchantée ;
4. Le fiancé ensorcelé ;
5. Panorama sur le chemin de fer électrique de Chamonix ;
6. Le cocher de fiacre endormi ;
8. Les braconniers.
Chaque représentation durera une heure environ.
Le Matin, Paris, 17 juin 1904, p. 2.
Le Cinématographe Gaumont (Salon des abonnées du Figaro, <16 novembre-31 décembre 1904) → 1905
Dans le salon des Abonnés du Figaro, des vues cinématographiques de la maison Gaumont sont projetées :
Notre Salon des Abonnés
Nous donnerons demain jeudi, à cinq heures une séance de cinématographie, au cours de laquelle la maison Gaumont fera passer, sous les yeux de nos abonnés, une série de vues d'après nature : Du Faget à Chamonix, Rentrée de bateaux de pêche, Pêche au chalut sur le Dogger Bank.
Le Figaro, Paris, mercredi 16 novembre 1904, p. 3.
Répertoire (autres titres) : La Mouche, Cocher de fiacre endormi, La Leçon de boxe, Cambrioleur maladroit (Le Figaro, Paris, mercredi 14 décembre 1904, p. 3.)
→ 1905
Le Cinématographe de G. Chaix (6 boulevard Saint-Denis, <15 décembre 1904) → 1905
G. Chaix, propriétaire du cinématographe se déclare en faillitte :
DÉCLARATIONS DE FAILLITES
(Jugements du 13 décembre)
[...]
G. Chaix, cinématographe, 6, boulevard Saint-Denis.
Le Temps, Paris, jeudi 15 décembre 1904, p. 3.
Le Ciné-Nesterson (Olympia, 30 décembre 1904)→ 1905
Le Ciné-Nesterson, à l'occasion de la fin de l'année, propose des séances de cinématographie à l'Olympia :
Olympia. — Samedi soir 30 décembre, dimanche 1er janvier et lundi 2 janvier, matinées et soirées de vues cinématographiques par le Ciné-Nesterson.
1re partie. — Arrivée d’un train ; Défilé de cavalerie ; Ce que l’on voit de mon sixième; Ballet de sylphides ; une Douche imprévue ; la Pêche miraculeuse ; ascension du mont Senet ; Exposition rétrospective de 1900, prise en bateau ; les statues en goguettes ; féerie à grand spectacle, en 8 tableaux ; Dénicheurs d’oiseaux.
2e partie. — Thony et sa poupée vivante ; Sauts de haies par des chevaux libres ; Farce de rapins ; Voltige à cheval ; Pincés ! ; C’est Pierrette ; Triste nuit de noce : Concierge et Tourlourou ; Fantasia arabe ; Monsieur et Madame sont pressés ; Frégoli parisien ; Voyage de noces en 1re classe ; Roman d’amour de Jenny.
3e partie. — Illusionniste mondain ; Baignade impossible ; Nuit terrible ; Ramoneur et pâtissier ; Cendrillon. féerie en 12 tableaux ; Marie-Antoinette, drame historique en 9 tableaux ; les Cambrioleurs modernes, par la troupe Omer’s.
Fauteuils, 0 fr. 50; galeries, 0 fr. 25.
L'Union libérale, Paris, 1er janvier 1905, p. 4.
→ 1905
Le cinématographe de Georges Méliès des Folies-Bergère (32 rue Richer, 31 décembre 1904)
Dans la revue des Foliés-Bergère, présentée à la fin de l'année, Georges Méliès présente son film Le Raid Paris-Monte-Carlo en automobile :
SOIRÉE PARISIENNE
LA REVUE DES FOLIES BERGÈRE
Nous l'avons eue enfin cette revue. Quel luxe ! quelle richesse ! que de trouvailles et que d'esprit ! Les frères Isola ne pouvaient donner de plus jolies étrennes aux Parisiens.
[...]
Le raid Paris-Monte-Carlo est une innovation fort amusante de M. Méliès. Le tableau de la Côte d'Azur est à citer également, avec ses danses américaines; enfin, l'apothéose.
Le Journal, Paris, dimanche 1er janvier 1905, p. 6.
→ 1905
1905
← 1904 Le cinématographe Lumière (Grands Magasins Dufayel, 1er janvier-31 décembre 1905) → 1906
Le Cinématographe des Grands Magasins Dufayel est toujours actif en 1905:
Programme entièrement nouveau au Cinématographe des Grands Magasins Dufayel. Voyage du Président de la République en Espagne, Fêtes des Vignerons à Vevey, Vues d'Auvergne, Panorama de la Côte d'Azur, etc... Nouvelles féeries à grands spectacles telles que le conte fantastique de Don Quichotte, en couleurs, etc., etc...
Demain jour de la Toussaint séances de cinématographe, le matin à 10 et 11 heures. Toute la semaine, l'après-midi à 2, 3, 4 et 5 heures. Tous les jours également concert dans le Jardin d'hiver, buffet glacier. Nombreuses attractions.
L'Intransigeant, Paris, 1er novembre 1905, p. 4.
← 1904 Le Cinématographe du Petit Journal (21, rue Cadet, janvier-juillet/octobre-décembre 1905)
← 1904
Les projections du cinématographe du Petit Journal se poursuivent au cours de l'année 1905. Il semble pourtant que, désormais c'est la Société du Cinématographe automobile qui est partie prenante dans ces projections. C'est ce que laisse entendre le suivant article :
INFORMATIONS
Cinématographe automobile
Nous apprenons que. la Société a pris ses dispositions pour tenir son assemblée générale dans le courant du mois d'octobre. Les formalités légales qui ont exigé un temps que l'on aurait désiré moins long, vont donc enfin se trouver accomplies.
En ce qui touche l'exploitation, les nouvelles que nous donne la Société sont de nature à intéresser les actionnaires. D'abord, les séances à la Grande Salle des Fêtes du Petit, Journal pour la saison d'hiver recommenceront le dimanche 1er octobre. Et nous ajouterons que le matériel a été modifié de façon à couvrir un immense écran qui occupera la presque totalité de la grande scène.
Des perfectionnements ont été également apportés dans la construction des voitures automobiles. Une voiture du type définitif adopté, sera, d'ailleurs, amenée dans le grands hall des Fêtes, le jour de l'assemblée, et les actionnaires pourront l'examiner à loisir. La voiture comprendra les panneaux automatiques, l'écran pour le cinématographe, les projections de clichés lumineux et les auto-théâtres.
En-somme, la période d'organisation et de mise en marche semble terminée, et l'on peut espérer que. les résultats à venir justifieront les prévisions formées au début. Déjà, des nombreuses villes parcourues avec ou sans voitures parviennent des échos du succès des séances données par la Société ; il en vient aussi, de l'étranger, car la Société opère actuellement en Italie. Ce succès ne peut que grandir avec le développement des opérations à la Société.
Le Petit Journal, Paris, 18 septembre 1905, p. 5.
En tout état de cause, les liens existent entre le Petit Journal, Alfred Bréard, administrateur de la société, François Dussaud, inventeur du Dussaud'scope.
Outre le spectacle de Guignol, d'autres numéros de variétés vont accompagner les séances données dans la salle du cinématographe du quotidien. C'est le cas de la voyante Michaëla, annoncée le 17 février, et qui donnera son numéro pendant des mois (Le Petit Journal, Paris, 17 février 1905, p. 1). En revanche, très peu d'informations relatives aux films projetés, qui sont pour l'essentiel des vues Pathé. En voici, l'une des rares :
Il y aura également aux mêmes heures, Cinématographe en couleurs, avec la nouvelle bande inédite Louis XIV.
On assiste aux Duels de Mousquetaires, à la Visite de Louis XIV au Masque de Fer, à l'Enlèvement de Mlle de Lavallière, aux ballets et grandes eaux de Versailles.
Le Petit Journal, Paris, 18 janvier 1905, p. 3.
La salle accueille régulièrement des associations ou des sociétés qui y organisent leur soirée, mais le cinématographe fait toujours partie des événements : La fête de la Boulangerie, le 17 mai (Le Petit Journal, Paris, 18 mai 1905, p. 3), L'oeuvre des colonies scolaires de vacances, le 18 mai (Le Petit Journal, Paris, 19 mai 1905, p. 4.), L'union pyrénéenne, le 21 mai (Le Petit Journal, Paris, 20 mai 1905, p. 2), Le bal du salon culinaire, La chambre syndicale de l'épicerie française... Pendant les deux mois d'été d'août et de septembre, le cinématographe va faire relâche (Le Petit Journal, Paris, 6 août 1905, p. 3).
Le Petit Journal, Grande Salle des Fêtes du 1er étage | Le Petit Journal, Paris, 4 octobre 1905, p. 1. |
Sans aucun doute, l'événement le plus important, à la reprise des séances, c'est la visite que rend la souveraine déchue de Madagascar, la reine Ranavalo, au Petit Journal qui va organiser pour l'occasion une séance de cinématographique :
Quand elle y pénétra, la salle entière éclata en applaudissements :
— Vive Ranavalo ! Vive la reine !
Notre hôtesse était très touchée, très émue et aussi très heureuse, de cette manifestation.
Elle prit grand plaisir., ainsi que ses compagnes, au superbe spectacle de notre Cinématographe ; elle donnait même le signal des applaudissements.
C'était pour, elle et pour sa suite une nouveauté que notre Cinématographe en couleurs ; et si la petite princesse Marie-Louise s'amusait et riait de tout son cœur, la reine, elle, se, faisait expliquer, le mécanisme de l'appareil.
Elle se montra émerveillée.
Entre. deux scènes, Ranavalo et sa suite prirent part à un lunch, servi dans un petit salon, où on lui offrit de magnifiques gerbes de fleurs.
Elle regagna ensuite sa logé.
Le Petit Journal, Paris, 9 octobre 1905, p. 1.
Pour le reste, encore quelques sociétés ou associations qui organisent des soirées (Association nationale de prévoyance et de secours des Jardiniers de France, 22 octobre, L'Association fraternelle des employés et ouvriers des Chemins de fer français, Les Anciens du 54e de ligne...) où le cinématographe tient sa place.
Répertoire (autres vues) : Louis XIV (Le Petit Journal, Paris, 2 janvier 1905, p. 3), L'arrivée du Président Loubet à Madrid (Le Petit Journal, Paris, 29 octobre 1905, p. 1), Voyage du Président Loubet en Espagne (Le Petit Journal, Paris, 1er novembre 1905, p. 2), La Course de taureaux, La Chasse royale a Casa-de-Campo (Le Petit Journal, Paris, 4 novembre 1905, p. 2), L'Arrivée du roi de Portugal à Paris (Le Petit Journal, Paris, 25 novembre 1905, p. 1).
→ 1906
← 1904 Le cinématographe de Georges Méliès des Folies-Bergère (32 rue Richer, 1er janvier-> 3 février 1905)
La revue des Folies-Bergère continue dès le début de l'année toujours avec le film Le Raid Paris-Monte-Carlo en automobile de Georges Méliès ;
Parmi les clous sans nombre que contient la Revue des Folies-Bergère, il en est un qu'il faut mettre à part: c'est le raid Paris-Monte-Carlo, en automobile, réalisé par le cinématographe, grâce à M. Méliès. Ce ne sont qu'épisodes désopilants, cascades extraordinaires. Tous les automobilistes voudront assister à ce voyage qui finit si agréablement grâce à un arrangement des plus ingénieux. L'apparition ensoleillée de la Côte d'Azur avec ses jolies hiverneuses est une de plus belles choses de la Revue des Folies-Bergère.
L'Écho de Paris, Paris, vendredi 20 janvier 1905, p. 1.
← 1904 Le cinématographe du Musée Grévin (10 boulevard Montmartre, 1er janvier-31 décembre 1905) → 1906
← 1904
Les séances continue au musée Grévin dès les premiers jours de janvier :
MUSÉE GRÉVIN. Les Catacombes romaines. Le Cirque. Bonaparte à la Malmaison. L'actualité par le cinématographe. Entrée, 1 fr.
Le Peuple français, Paris, dimanche 1er janvier 1905, p. 4.
Les séances se prolongent tout au long de l'année.
→ 1906
← 1904 Le Ciné-Nesterson (Olympia, 1er et 2 janvier 1905
← 1904
Le Ciné-Nesterson propose des séances de cinématographie à l'Olympia en début d'année :
Olympia. — Samedi soir 30 décembre, dimanche 1er janvier et lundi 2 janvier, matinées et soirées de vues cinématographiques par le Ciné-Nesterson.
1re partie. — Arrivée d’un train ; Défilé de cavalerie ; Ce que l’on voit de mon sixième; Ballet de sylphides ; une Douche imprévue ; la Pêche miraculeuse ; ascension du mont Senet ; Exposition rétrospective de 1900, prise en bateau ; les statues en goguettes ; féerie à grand spectacle, en 8 tableaux ; Dénicheurs d’oiseaux.
2e partie. — Thony et sa poupée vivante ; Sauts de haies par des chevaux libres ; Farce de rapins ; Voltige à cheval ; Pincés ! ; C’est Pierrette ; Triste nuit de noce : Concierge et Tourlourou ; Fantasia arabe ; Monsieur et Madame sont pressés ; Frégoli parisien ; Voyage de noces en 1re classe ; Roman d’amour de Jenny.
3e partie. — Illusionniste mondain ; Baignade impossible ; Nuit terrible ; Ramoneur et pâtissier ; Cendrillon. féerie en 12 tableaux ; Marie-Antoinette, drame historique en 9 tableaux ; les Cambrioleurs modernes, par la troupe Omer’s.
Fauteuils, 0 fr. 50; galeries, 0 fr. 25.
L'Union libérale, Paris, 1er janvier 1905, p. 4.
← 1904 Le Cinématographe Gaumont (Salon des abonnées du Figaro, 1er janvier 1905
Les séances de cinématographie continuent dès les premiers jours de l'année :
Notre Salon des Abonnés
Nous donnerons demain, jeudi une séance de cinématographe au cours de laquelle la maison Gaumont fera passer sous les yeux de nos abonnés une série de scènes humoristiques: Le Voyage à la mer, L'Anglais à Paris, Automobile diabolique, Fontaine lumineuse (scène en couleurs), etc., etc.
Une première séance aura lieu à cinq heures et une seconde à cinq heures et demie.
Entrée sur présentation de la carte d'abonné.
Le Figaro, Paris, mercredi 4 janvier 1905, p. 2.
Répertoire (autres titres): Les Petits peintres, Les Bienfaits du cinématographe, Bataille de laveuses, Le Courrier de Lyon, Les Deux Rivaux (Le Figaro, Paris, mercredi 18 janvier 1905, p. 3), La Perspective Newsky en hiver, Revue des tirailleurs de S. M. le Tsar, Revue des troupes se rendant en Orient, Le Vaporisateur, Le Charcutier ingénieux (Le Figaro, Paris, mercredi 1er février 1905, p. 3), Le Testament de Pierrot, Exercices à bord du Stein (Le Figaro, Paris, mercredi 15 février 1905, p. 3), Un marché chinois, Voyage en Suisse (Toboggan, Sauts en skis, Interlaken), Le Chapeau de papa, Restaurant ensorcelé (Le Figaro, Paris, mercredi 1er mars 1905, p. 3), Sports dans la neige, Les Joueurs, Scène de magnétisme, La Fille du forgeron (Le Figaro, Paris, mercredi 15 mars 1905, p. 2.), Cambrioleur ivrogne, Jour de guigne, Nos bons domestiques, Voleurs de chiens, Lecture passionnante (Le Figaro, Paris, jeudi 6 avril 1905, p. 3), Le Cliché révélateur, Un sous-marin, Aventure de carnaval (Le Figaro, Paris, mercredi 19 avril 1905, p. 3), Un baptême qui finit mal, Marchand de ballons, La Perruque, Cambrioleur facécieux (Le Figaro, Paris, mercredi 3 mai 1905, p. 3).
Le Cinématographe Automobile (Ba-ta-clan, janvier- septembre 1905)
La salle du Bataclan, après avoir connu une période particulièrement difficile, vient de retrouver un directeur en la personne du poète-chansonnier, Gaston Habrekorn. Sans doute faut-il penser que le renouvellement du spectacles comporte l'inclusion du cinématographe ? Toujours est-il que des séances s'organisent :
A Ba-ta-Clan : C'est dans sa vaste et coquette salle que la société du Cinématographe automobile offre au public ses merveilleuses vues en couleurs.
Demain dimanche 24 septembre, matinée à deux heures, soirée à 8 h 3/4.
La Lanterne, Paris, 24 septembre 1905, p. 3.
On ignore en revanche la date de l'inauguration et celle de la dernière séance de cinématographe automobile au Ba-ta-clan.
Le Cinématographe de la Grande-Roue (<11> mai 1905)
Les informations relatives au cinématographe de la Grande-Roue, dont les premières représentations datent de 1902, restent très limitées. On ne sait d'ailleurs pas si l'appareil est vraiment le même qu'au début. C'est à l'occasion d'une fête organisée par Le Petit Journal que nous entendons parler de lui, au mois de mai 1905 :
UNE FÊTE ENFANTINE
A LA
GRANDE ROUE DE PARIS
ORGANISÉE PAR LE
PETIT JOURNAL ILLUSTRÉ DE LA JEUNESSE
LE JEUDI 11 MAI
Entrées gratuites pour les Enfants
50% de réduction aux personnes les accompagnant
La fête enfantine organisée avec tant de succès le 2 avril dernier au Jardin d'Acclimatation par le Petit Journal Illustré de la Jeunesse, où, plus de 120,000 entrées, furent enregistrées aux guichets, nous a valu des montagnes de lettres de remerciement. De toutes parts, les lecteurs et lectrices de notre nouveau supplément nous prient de renouveler cette inoubliable journée de réjouissance.
Nous nous rendons avec beaucoup de joie au désir, si gentiment exprimé, de nos jeunes amis et de leurs parents.
Le Petit Journal Illustré de la Jeunesse invite donc toutes ses petites lectrices, tous ses lecteurs à venir passer l'après-midi du Jeudi 11 Mai dans le bel établissement de la GRANDE ROUE DE PARIS. Un bon d'entrée, inséré dans le numéro du Petit Journal Illustré de la Jeunesse, qui est mis en vente aujourd'hui, permettra à tous: les enfants âgés de moins de quinze ans de prendre part gratuitement à cette fête splendide, qui comprendra, outre, l'ascension de la Grande Roue, un bal, une représentation, théâtrale, une extraordinaire séance de prestidigitation, de saisissantes , projections cinématographiques, etc., etc.
L'amabilité de M. Th. Vienne, le directeur de la Grande Roue de Paris, a multiplié les attractions de cette fête, dont le Petit Journal publiera prochainement le programme complet.
Les grandes personnes qui accompagneront les jeunes invités du Petit Journal Illustré de la Jeunesse ne paieront que 25 centimes au lieu de 50, en présentant le bon d'entrée publié dans notre supplément.
Ajoutons que les personnes qui ne pourraient pas faire usage de ce bon le jeudi 11 mai pourront s'en servir le jour qui leur plaira, jusqu'au 15 juin, inclusivement.
C'est donc une prime tout à fait exceptionnelle qu'apporte aujourd'hui, à ses lecteurs, le Petit Journal Illustré de la Jeunesse. Qu'on se hâte de l'acheter : les numéros de ce charmant journal si gai, si spirituel, seront bientôt épuisés!
Le Petit Journal, Paris, 2 mai 1905, p. 1.
Le cinématographe ne constitue qu'une des nombreuses attractions de cette journée, et il va de soi que le programme des films projetés passe au second plan. En revanche, nous savons que le responsable du cinématographe - en est-il pour autant le propriétaire - est M. Morin :
Après le théâtre, nos jeunes amis s'intéressèrent très vivement au guignol, dirigé supérieurement par M. Huré ; aux exercices du merveilleux prestidigitateur Spirus-Gay ; au spectacle étonnant donné par l'original Toledo et, enfin, au très attrayant cinématographe de M. Morin.
Le Petit Journal, Paris, 12 mai 1905, p. 3.
On imagine que M. Morin continue à donner des représentations après cette fête particulière.
Le cinématographe de la Société astronomique de France (Hôtel des Sociétés Savantes, 22 juin 1905)
La Société astronomique de France organise la Fête du Soleil, en juin, et présente des vues cinématographiques :
La "Fête du Soleil".-C'est jeudi matin à trois heures une minute exactement, qu'a commencé l'été, dont la durée sera de quatre-vingt-treize jours et demi, puisqu'il durera jusqu'au 23 septembre, à 5 heures trente-neuf minutes du soir.
A cette occasion, comme l'année dernière, la Société astronomique de France a célébré la "Fête du Soleil", à l'hôtel des Sociétés savantes, 8, rue Danton, à Paris. Un banquet eut lieu en l'honneur de l'astre du jour qui, jeudi et vendredi, a parcouru pour notre hémisphère sa course la plus longue.
En effet, levé à 3 h. 38 (4 h. 41, heure centrale), il ne s'est couché, ces deux jours, qu'à 8 h. 5 (8 h. 27, h.c.). Vendredi, il s'est levé une minute plus tard, à 3 h. 59 (4 h. 42, h.c.), et ce sera dès lors la décroissance continue.
À l'issue du banquet, les convives ont eu la primeur de plusieurs inventions scientifiques merveilleuses: le cinématographe-phonographe et la carte postale parlante. Il suffit de parler devant cette carte, puis de la placer devant un appareil phonographique spécial, pour que la phrase prononcée se répète aussitôt.
Enfin, les banqueteurs se sont rendus, à onze heures et demie, à la tour Eiffel, ou tout en lunchant, ils ont attendu le lever du soleil, dont l'apparition fut saluée de hurrahs enthousiastes.
Journal d'Yverdon, Yverdon, mardi 27 juin 1905, p. 1-2.
Le cinématographe du théâtre Robert-Houdin (8 boulevard des Italiens, <16> septembre 1905)
Le théâtre Robert-Houdin continue de projeter des films de Georges Méliès comme Le Raid Paris-Monte-Carlo en automobile :
Le théâtre Robert-Houdin reprend ses matinées de prestidigitation du dimanche et du jeudi avec le professeur Legris dans un programme entièrement nouveau.
La séanoe est terminée par les merveilleuses vues animées de M. Méliès, parmi lesquelles nous notons, le «Raid Paris-Monte-Carlo», le plus grand succès cinématographique du jour.