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22 octobre 1905 Merci de tes deux lettres du 20 que je viens de recevoir après l'arrivée d'Anatole qui m'a donné des nouvelles fraîches de tout le monde. Nous pensons partir pour Madrid demain, c'est-à-dire après les fêtes. En ce moment les chambres coûtent 50frs/jour et le reste à lavenant. Parce que les fêtes présidentielles sont amusantes. De là il est question d'aller à Lisbonne puis dans le sud - Grenade, Séville, Malaga, Murcie, et enfin en revenant toute la côte d'Azur. Cela représente au moins encore un mois. Je veux bien moi, tu comprends. Et vogue la galère. Tu cherches à me rassurer et je te remercie, l'avenir nous dira qui à (sic) raison. Ne t'inquiète pas de moi. Je vais on ne peut mieux et je soigne mon estomac. Tache de prendre autant de précaution pour ta petite personne. Mille caresses de ton Lili. Alice Guy, Lettre à sa mère, [Barcelone], 22 octobre 1905. Cinémathèque française, Fonds Gaumont. LG562-B50
Le directeur de notre filiale à Barcelone avait une charmante femme qui me donna l'hospitalité pour quelques jours. Un de nos clients Napoléon" qui m'avait rencontrée à Paris où il faisait de fréquentes visites, m'avait préparé une réception grandiose. Je fus, grâce à lui, reçue à bord d'une canonnière où les officiers, après m'avoir offert le pain et le sel, me firent visiter leur navire et m'invitèrent à leur table où m'attendait un superbe bouquet de camélias. Après une visite de la ville, très belle, mais assez banale, avec ses maisons trop modernes, trop riches, ses avenues rectilignes aux ombrages encore trop jeunes, nous fîmes le fameux pèlerinage du Montserrat. Maints pèlerins espagnols grimpent à genoux le chemin montagneux, coupé des stations du calvaire qui conduit au monastère bénédictin où se trouve la Vierge miraculeuse des "nuevos", mouveaux mariés. Depuis le mariage d'Isabelle la Catholique avec Ferdinand II d'Aragon, paraît-il, tous les souverains espagnols ont tenu à l'honneur de vêtir somptueusement cette Vierge. Le jour de notre visite elle portait un diadème d'or étlincelant de pierres précieuses, un manteau entièremernt brodé de vraies perles et un petit mouchoir de vraie dentelle. Le site était très beau. Anatole en prit de nombreux clichés. Alice Guy, Autobiographie d'une pionnière du cinéma (1873-1968), Paris, Denoël/Gonthier, 1976, p. 90.
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