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- Création : 24 mars 2015
- Mis à jour : 25 septembre 2024
- Publication : 24 mars 2015
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Ernest NORMANDIN
(Les Métairies, 1862-Les Métairies, 1934)
© coll. Bruno Sépulchre
Jean-Claude SEGUIN
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Jean Normandin (Rouillac, 07/04/1839-Les Métairies, 18/05/1896) épouse (Les Métairies, 14/05/1860) Clémentine Normand (Les Métairies, 21/03/1842-Les Métairies, 24/11/1899). Descendance :
- Philippe, Pierre, Jean, Emile, Ernest Normandin (Les Métairies, 01/05/1862-Les Métairies, 21/04/1934) épouse (Paris 13e, 27/04/1891) Caroline Gourmand (Paris 13e, 07/03/1864-)
- Jean, Clément, Joseph Normandin (Asnières, 1892-Coudekerque-Branche, 01/01/1935) épouse (Levallois-Perret, 07/04/1920) Germaine, Ernestine, Adèle Girot.
- Odette, Marie, Louise Normandin (Paris 5e, 30/04/1894-Mareuil, 13/06/1981) épouse Henri, Jean, François Roy.
- Pierre, Clément, Raoul, Edgard, Arsène Normandin (Les Métairies, 29/06/1869-)
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Les origines (1862-1895)
Fils d'un propriétaire-viticole, Ernest Normandin fait ses études à l'école de Jarnac, puis au lycée d'Angoulême. Après avoir obtenu deux ans de sursis, il est dirigé sur le 35e d'artillerie, en novembre 1885 et effectue son service militaire. Il est rendu à la vie civile en novembre 1886. Au cours des années suivantes, il devient sous-ingénieur aux mines d'Auzin (1887), puis représentant de la Compagnie Popp (1888), à Montpellier, où la société a obtenu la concession de l'électricité. Il fonde alors une usine d'élaboration d'eau-de-vie et de vin :
Auparavant, à Montpellier j'avais fait la connaissance du camarade Paul (1877) qui avait entrepris des travaux pour nous ; il était constructr mécanicien. Il me proposa en 1888 d'acheter les marcs de la Cie des Salins du Midi (non épuisés et contenant encore 3 à 5 % de vin) pour les represser et en tirer vin et alcool, surtout alcool. Il avait des pressions d'occasion à réparer, etc.
Bref ! je fournis 20 000 [frs] et il installa notre usine, sur place, dans un vieux fortin pour la campagne de 1889 [sic]. On prenait le marc avec des wagonnets.
L'affaire réussit nous fîmes une quantité fort appréciable d'alcool, mais il fallait l'écouler...
Normandin, 1933: 5.
Peu après, Ernest Normandin rentre à Paris pour occuper la place de secrétaire de Popp, puis celle de responsable du secteur technique. Mais son commerce d'alcool rencontre des problèmes :
J'étais rentré à Paris, l'alcool fut vendu à des contrebandiers, il y eut un naufrage... et paraît-il, il ne rentra pas un sou ! Je n'étais pas content, ne croyant pas à tous ces accidents...
Normandin, 1933: 6.
Sa situation à la Cie Popp n'étant pas satisfaisante, sur proposition de Reynaud son supérieur hiérarchique, il accepte de partir en Belgique comme directeur de travaux pour un charbonnage, présidé par M. Béchade, à des conditions très avantageuses (1000 frs et le logement). Il se marie en 1891, et revient à Paris au début de l'année 1892.
Les premières grandes entreprises de distribution d'électricité dans la capitale datent de 1889. M. E.L. Naze - un ancien communard - obtient (5 novembre 1890) le sixième secteur de la ville. Malgré de nombreuses difficultés financières, il parvient à trouver les soutiens économiques nécessaires. Il fonde alors la Compagnie électrique du secteur de la rive gauche. qui récupère sa concession (9 janvier 1904). En attendant la construction envisagée d'une station principale à Ivry, la Compagnie va assurer le service grâce à une usine provisoire :
La Société du secteur de la rive gauche avait, dès le mois d'octobre 1893, commencé son exploitation en utilisant la petite usine du Panthéon, d'une puissance de 100 kw. Ella a pu ainsi desservir quelques abonnés dans le quartier de la Sorbonne, et notamment les laboratoires de la nouvelle Sorbonne.
Lefèvre, 1896: 317.
Dans ses "mémoires", Ernest Normandin explique le rôle qu'il a tenu dans cette affaire et comment, avec l'un de ses amis, Rozès, il fait fonctionner l'usine de la place du Panthéon, dont il semble être le propriétaire, avant de la revendre à la Société du secteur de la rive gauche et se mettre " à faire de l'électricité (installation) pour mon compte. " (Normandin, [1933]: 6-7). Au printemps 1896, il est chargé des plans de l'éclairage électrique du Casino de Foncillon à Royan. Finalement, il va renoncer à cette industrie peu rentable, pour se lancer dans l'aventure du cinématographe.
Le cinématographe Joly-Normandin (1896-1897)
C'est par l'intermédiaire de Joseph Bonnet, un agent de brevets, qu'Ernest Normandin, comme il le raconte lui-même, fait la rencontre d'Henri Joly :
Me rendant compte que je ne progressais pas suffisamment, je sautai sur l'affaire du cinématographe Joly quand Bonnet, agent de brevets pour qui j'espérais quelquefois me le présenter [sic].
Normandin, 1933: 7-8.
Joly, chassé comme un malpropre par Charles Pathé, a également échoué dans sa tentative de rapprochement avec Georges De Bedts. En outre, il cherche des noises à Léon Gaumont pour une affaire de brevets. Autant dire que la proposition de collaboration que lui fait Ernest Normandin vient à point nommé. La rencontre a dû avoir lieu, par l'entremise de Joseph Bonnet, après le dépôt du brevet pour un " appareil chronophotographique pouvant également servir à la projeciton des positifs " (nº 254 836, 17 mars 1896). Il va s'agir alors de trouver un constructeur susceptible de produire en série les cinématographes. C'est l'ingénieur-constructeur Louis Doignon qui va s'en charger. Il est probable que le premier appareil est prêt en juin ou au début du mois de juillet 1896. La structure d'exploitation du cinématographe Joly est ainsi mise en place. Outre Doignon, elle est également composée de trois hommes clés : Henri Joly, Ernest Normandin et Eugène Pirou. Si le premier est l'inventeur du cinématographe qui porte son nom, le deuxième apporte les moyens nécessaires à sa commercialisation et le dernier devient le cinématographiste. Par ailleurs, trois options sont proposées aux exploitants : acheter le cinématographe au prix de vente normal, acheter l'appareil à un prix très inférieur mais en partageant l'exploitation avec le vendeur ou bien louer le projecteur.
Vincennes, le 25 juillet 1896 |
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Henri Joly, Lettre à Gaston Prinsac, Vincennes, 25 juillet 1896 © Collection particulière |
Dès l'été, Henri Joly commercialise trois appareils : le Cinématographe nº 1 (pour des bandes de 60 m de long), le Cinématographe nº 2 (pour des bandes de 150 mètres et qui peut s'adapter avec un phonographe) et l'appareil nº 0 (Format réduit pour bandes de 9 à 12 mètres de long). Par ailleurs, c'est Eugène Pirou qui est chargé de la fabrication des bandes cinématographiques. Dans son courrier, Joly ne fait pas mystère des productions que Pirou est susceptible d'offrir : " Tous les jours les plus jolies femmes, les plus jolies actrices posent devant nos appareils, et nos scènes ne sont pas à comparer avec ce qui s'est fait jusqu'ici. " Dès les origines, le cinématographe Joly cible parfaitement une partie du public potentiel.
Henri Joly, Lettre à Gaston Prinsac, Vincennes, 11 août 1896 |
C'est à l'occasion de l'Exposition du théâtre et de la musique (25 juillet-25 novembre) que le cinématographe, système Joly fait, sans doute, sa première apparition publique.
Exposition du Théâtre et de la Musique, 1896 © Musée Carnavalet |
L'Industriel forain, nº 272, Paris, 20-26 septembre 1896, p. 4. |
L'exposition se tient au Palais de l'Industrie et dans le Catalogue officiel de l'Exposition, sous le groupe 3 " Photographie, Matériel des Arts et des Sciences ", nous pouvons lire :
264. Doignon (Louis) et Normandin (Ernest)
Paris, rue Notre-Dame-des-Champs, 85, et rue Soufflot, 9.
Cinématographe Joly.
Exposition du Théâtre et de la Musique, Catalogue officiel de l'Exposition, 1896, p. 129.
Exposition du Théâtre et de la Musique, Catalogue officiel de l'Exposition, 1896, p. 124.
Il faut attendre les premiers jours de septembre pour voir apparaître dans la presse la mise en vente de l'appareil, même si la commercialisation est antérieure. Ainsi dans les petites annonces du Petit Parisien, du 3 septembre, les appareils sont disponibles.
Le Petit Parisien, Paris, 3 septembre 1896, p. 4.
On remarquera qu'il est question de " système Joly, breveté dès 1895 " afin de marquer une antériorité du cinématographe d'Henri Joly sur bien d'autres, ce que l'on trouve déjà dans le courrier transmis à Gaston Prinsac (voir plus haut). Après ces premiers essais fructueux, la structure de la maison Normandin se met en place. Victor Baïlac est engagé au mois d'août 1896, puis, vers le mois d'octobre, c'est Grégoire Bagrachow qui intègre la structure. Désormais, deux secteurs distincts sont mis en place, celui de la " photographie ", chargé de la prise de vue, et dirigé par Bagrachow et celui des représentations ou des projections, sous la responsabilté de Baïlac. Il est possible que Bagrachow soit venu remplacer, en partie au moins, le photographe parisien Eugène Pirou qui est l'auteur des vues antérieures à octobre 1896. On connaît également les noms de deux autres employés, MM. Puvillaud et Gasnier (Le Soleil, Paris, 21 août 1897, p. 2). Tout est donc prêt pour le développement de la maison Normandin. S'il est difficile de dresser la cartographie de la diffusion des appareils, nous savons que dès le mois de septembre le photographe A. Milhès présente un appareil Joly et, en octobre, celui des itinérants Jean Prinsac, Louis Vernet et Gaston Prinsac qui parcourent l'Algérie.
Alors qu'Henri Joly continue de croiser le fer avec Léon Gaumont, Ernest Normandin semble rester extérieur à ces polémiques et ces comptes d'apothicaire. Il faut dire qu'il organise des séances de projections de vues animées dans différentes villes de Bretagne au cours du premier semestre de l'année 1897. On le retrouve ainsi à Morlaix, Quimper, Pont-L'Abbé, Lorient, Vannes... Par ailleurs, les affaires semblent tourner correctement. Une indication, non dénuée d'intérêt, montre qu'il dispose des " Vues artistiq. origin. " qui sont dues, pour une part au moins, au responsable du service " photographie " Grégoire Bagrachow. En outre, un nouveau modèle, dès le mois de mars 1897, est à la vente.
Le Petit Parisien, Paris, 9 mars 1897, p. 4
NORMANDIN M... Mon Cinématographe a été dès son apparition considéré comme le meilleur. N.B. Je profite de l'occasion pour vous rappeler que je construis également des fontaines lumineuses très intéressantes en ce sens qu'elles ne nécessitent aucune canalisation d'eau; la même eau sert constamment. |
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Ernest Normandin, Lette type, [1897] © Bibliothèque Historique de la Ville de Paris (4-DEP-004-402) |
Ernest Normandin peut même se permettre de prêter gracieusement un appareil pour des manifestations ponctuelles, comme dans le cas de la journée de bienfaisance en faveur des blessés grecs qui a lieu le 4 avril 1897, au théâtre de la République, à Paris. Tout va donc pour le mieux, lorsque va se produire la terrible catastrophe du Bazar de la Charité. Même si la responsabilité échoit au sytème d'alimentation oxyéthérique, particulièrement inflammable, le cinématographe, en tant que tel, va vite être désigné comme responsable de l'incendie. Dans ses mémoires, Ernest Normandin résume l'affaire en quelques lignes :
Cette affaire menée concurremment avec mon affaire d'électricité me rapporta gros en 1896 et 1897 (environ 300 000, 00 frs). Elle se termina malheureusement par l'incendie du Bazar de la Charité qui me ruina complètement.
Chambellan que j'avais connu par Naze me conseillait de déposer mon bilan ; j'aurais pu sauver une centaine de mille francs, j'ai préféré tout payer avec les délais qui me furent accordés.
L'incendie du Bazar avait porté un coup énorme au Cinéma en général et au mien en particulier (je n'exploitais pas, je vendais des appareils). Peu à peu cela reprit.
Normandin, 1933: 7-8.
Comme si le coup assainé par la catastrophe du bazar de la Charité ne suffisait pas, quelques semaines plus tard, le 22 août 1897, un autre appareil Joly-Normandin est également à l'origine d'un début d'incendie au Parisiana.
Le coup pour Ernest Normandin est très dur, mais il ne renonce par pour autant au cinématographe. S'il est difficile de continuer à vendre des appareils " système Joly ", ce qui rappelle trop le drame du Bazar, il ne faut pas croire, pour autant, que les exploitants ont fait disparaître le nom. On retrouve en effet, en juin 1897, un cinématographe Joly à Brest, un autre à Montceau-les-Mines et Ernest Normandin lui-même organise une soirée à Chalon-sur-Saône en novembre 1897. En janvier 1898, " l’inimitable cinématographe JOLY, dit le roi des cinématographes " organise des projections à Fourmies. La situation pourtant est difficilement tenable et le changement du nom de l'appareil s'impose.
Le Royal Biograph (1898-1906)
Georges Brunel dans un opuscule qu'il a consacré à l'appareil de Joly, explique de quelle manière Ernest Normandin, affecté par la catastrophe du Bazar de la Charité, laisse son frère Edgard prendre en main les affaires du cinématographe :
Les appareils de M. Normandin ont subi pendant quelque temps, par suite du terrible malheur arrivé au Bazar de la Charité... un arrêt dans leur propagation, bien qu'ils fussent parfaits et remplissent admirablement le but qui les a fait créer. M. Normandin, qui avait apporté tous ses soins à la construction de ce cinématographe, pouvait espérer en retirer de grands profits, lorsque la terrible catastrophe est venue détruire ses espérances... On comprendra facilemnt que M. Normandin, frappé d'un tel malheur, ne désire plus s'occuper de son invention : mais son frère, M. Edgar Normandin, entreprit courageusement de remonter le courant d'opinion qui s'était produit contre les cinématographes en général, pensant avec juste raison qu'on ne pouvait imputer à un appareil tout en métal le fait d'avoir allumé un incendie.
Du reste, ses espérances se réalisèrent et aujourd'hui (en 1898) le " Royal Biograph " a une vogue universelle et le public ne craint pas plus les appareils qu'une attraction quelconque.
Georges Brunel, The Royal Biograph de Edgar Normandin et Cie, Paris, 1898, p. 62.
C'est au cours du printemps 1898 qu'Ernest Normandin décide finalement de céder son fonds et les droits sur les brevets du cinématographe Joly :
9 avril 1898 : Création d'une société en commandite "A. Saunier et Cie" entre Alfred Saunier, ingénieur, 51 rue d'Amsterdam, Paris, et le commanditaire Charles Flahault, 2 rue Dom-Bouquet à Amiens. La société, sise 26 rue des Fossés-Saint-Jacques, au capital de 46.000 francs, a pour objet "l'achat du Cinématographe perfectionné système Joly et de tous brevets, pris ou à prendre relativement à son invention, le tout actuellement la propriété de M. Normandin, ingénieur, 9 rue Soufflot, et que ce dernier exploite à Paris, rue des Fossés-Saint-Jacques, 26.
Archives de Paris, D3U3 C346 nº 656 (cité dans Laurent Manonni, " Repères biographiques sur Henri Joly ", 1895, nº 21, décembre 1996, p. 28-29)
Dès cette même année, une autre société " E. Normandin et Cie ", sise au 23, rue J.-J. Rousseau dont le nom figure sur un en-tête de courrier - voir document ci-après - est constituée. C'est Edgard Normandin, le frère d'Ernest, qui est à la manœuvre. Il dépose la marque " The Royal Biograph ", le 24 août 1898, au Tribunal de Commerce de Paris, puis le 22 octobre 1898, la marque " Diograph ". (cité dans L. Mannoni, 1996: 29). Mais l'annulation de la société est déclarée le 4 août 1899 :
Paris.-Annulation.-Société E. NORMANDIN et Cie, 23, J.-J.-Rousseau.-L.M. Tricheux, 66, b. St-Germain.-Jug. du 19 juil. 99.-P.A.
Archives commerciales de la France, 27e année, nº 63, Paris, Mercredi 9 août 1899, p. 998.
En octobre 1899, une nouvelle société en nom collectif " E. Normandin et Cie " est constituée entre Edgard Normandin et Rodolphe Fouchier, négociant, sise 21, rue Jean-Jacques Rousseau, au capital de 1000 francs. Elle a pour but " l’achat, la vente et l'exploitation de cinématographe et accessoires (Archives de Paris, D31 U3 C382 nº 1481, cité dans Mannoni: 1996: 29).
Par ailleurs, c'est à Paris que le 25 juin 1898 est présenté au public du théâtre Moncey le Royal Biograph, sans doute pour la première fois. Quelques semaines plus tard, en août, des séances de projections de vues animées sont organisées au Trianon. Mais c'est au Casino de Paris que le cinématographe s'installe,à partir de septembre 1898, pour plusieurs mois.
TheRoyal Biograph En-tête de courrier, 20 octobre 1898 Ch. Grenon (1975, 204) |
Journal de Cette, Sète, 22-23 janvier 1899, p. 4 |
René Pean, The Royal Biograph, 160 x 110,5 cm, c. 1898 |
Parmi les revendeurs du Royal Biograph, nous trouvons Louis Goudesone qui fait passer l'annonce suivante, dans l'édition de 1900, de l'Annuaire-almanach du commerce, de l'industrie, de la magistrature et de l'administration (p. 2342) : " GOUDESONE, cinématographes silencieux, acquéreur des appareils "Normandin" The Royal Biograph, films, boul. Voltaire, 131." La presse d'ailleurs, dans un article dont on devine aisément le caractère publicitaire, évoque le rôle de la maison Goudesone :
Tout le monde aujourd’hui connaît le cinématographe, et il est presque enfantin d’en rappeler le principe éminemment simple.
Cet appareil merveilleux de précision, consiste, on le sait, à décomposer sur une pellicule un mouvement, le vol d’un oiseau, le galop d’un cheval, en une série de photographies prises à des intervalles liés petits mais égaux. Si l'on fait repasser dans un mouvement très rapide cette succession de photographies, le spectateur aura l’illusion du mouvement.
L’inventeur en est le grand physicien M. Marey, et c’est le distingué savant photographe M. Louis Lumière qui en a fait la merveilleuse application.
Il s’est créé pour l’exploitation de cette invention des industries très importantes ; en première ligne, il convient de citer la Maison Goudesone, 131, boulevard Voltaire à Paris, avec ses appareils Normandin, si remarquables.
Tout ce qui concerne l’appareil et ses fournitures diverses se trouve là et de qualité supérieure.
On trouvera également à la maison Goudesone un appareil de salon présentant des vues animées qui est appelé à un grand succès.
Cet appareil donne l’illusion complète du mouvement qui se produit sans le secours de la lumière factice, en conséquence aucune crainte d’incendie.
En définitive, il est l'idéal recherché depuis longtemps, tant par la modicité de son prix, ainsi que celui des vues de rechange, que par son parfait fonctionnement.
La France, Paris, 10 avril 1900, p. 1.
Le Royal Biograph connaît un certain succès et dans les mois qui suivent plusieurs appareils sillonnent la France, et ce jusqu'en 1906.
Le Biophonographe (1900-[1906])
De l'aveu même d'Ernest Normandin, , " les années 1899, 1900, 1901 furent très dures pour moi " (Normandin, 8-9), mais il continue malgré tout à avoir des projets cinématographiques avec son complice Henri Joly :
En 1900 j'avais mis au point avec Joly un cinéma parlant par combinaison de cinéma et phono avec appareil de synchronisme, c'était parfait et mieux que ce que l'on fait actuellement puisque l'on avait la voix du phono et non pas la voix déformée actuelle.
Normandin, 1933: 8.
C'est en effet le 11 janvier 1900 qu'Henri Joly dépose un brevet d'invention (nº 296 097) pour un " mouvement synchronique de rotation de deux mobiles, applicable aux appareils cinématographiques et phonographiques combinés. " Quelques jours plus tard, la Société anonyme du Biophonographe (système Joly) est créée 6 février 1900) par Henri Joly. Parmi les actionnaires se trouvent Rodolphe Fouchier, Edgard Normandin et Ernest Normandin. La marque " Biophonographe " est à son tour déposée le 5 mars 1900.
Ernest Normandin. Biophonographe. Paris. 5 mars 1900.
INPI. Marques. Photographie et Lithographie. 1895-1901.
Enfin, au cours de l'assemblée générale extraordinaire qui se tient le 10 mai 1900, le compte rendu signale que " nous sommes à l'heure présente en possession d'une série complète d'appareils qui nous permet d'entreprendre n'importe quelle exploitation. Trois autres séries d'appareil seront très rapidement achevées et [...] nous pourrons apporter tous nos soins à l'exécution des scènes à représenter. "
Société du Biophonographe (Système Joly) Action de Cent Francs au Porteur [D.R.] |
Annuaire almanach du commerce de l'industrie, p. 1334, 1901 |
Dans les articles que Maurice Noverre a consacré à l'inventeur, il nous offre une description de l'enregistrement d'une saynète au moyen du biophonographe :
Après avoir patiemment fait apprendre et répéter par des artistes une petite saynète chronométrée avec le plus grand soin, M. Joly enregistrait sur cylindre de cire (format inter) la voix de ses acteurs. Après l'obtention d'un Phonogramme bien réussi, plusieurs copies de l'enregistrement étalent prises et les artistes reprenaient inlassablement les répétitions, dans le décor aux places repérées, mimant les paroles que leur faisait entendre le Phonographe, remplissant leur rôle en concordance avec les signaux (repères phonétiques, musicaux ou bruits). Lorsque le personnel arrivait à jouer facilement en synchronisme avec le Phonographe, cet appareil. était relié électriquement à l'appareil de prise de vues et les acteurs cinématographiés.
" La vérité sur l'invention du film photophone ", Le Nouvel Art Cinématographique, nº 5 (2e série), janvier 1930, p. 52.
Il propose même le scénario d'une de ces saynètes, Lolotte, tournée en 1900. L'un des premiers à découvrir cette nouvelle invention n'est autre que le Shah de Perse, en visite à Paris. Légèrement souffrant, il reste à l'hôtel :
Le souverain grand amateur d'inventions, comme l'on sait, a employé une partie de la matinée à l'audition et à la vue d'un appareil nouveau, le biophonographe qui enregistre mécaniquement et reproduit ensuite les vues cinématographiques en même temps que les chants ou les paroles qui accompagnent chaque geste ou mouvement.
Le shah a pris un grand plaisir à ce spectacle intime auquel assistaient les principaux personnages de sa suite
Le Siècle, Paris, 5 août 1900, p. 2.
Quelques heures plus tard, il visite l'Exposition universelle où une séance du Cinématographe Géant des Lumière lui est offerte. Des essais ont également eu lieu au Concert-Théâtre de la Grande Roue d'après le témoignage d'Henri Joly recueilli par Maurice Noverre, à l'occasion de l'Exposition Universelle :
Au cours des démonstrations faites devant des amis et relations d'affaires, au " théâtre de la Grande Roue ", un film reproduisait M. Normandin faisant une conférence sur l'appareil. L'assemblée crut d'abord que l'industriel lui-même parlait derrière l'écran.
La vérité sur l'invention du film photophone ", Le Nouvel Art Cinématographique, nº 5 (2e série), janvier 1930, p. 52.
En décembre 1900, la société du Biophonographe est transférée du 9, rue Soufflot au 31, rue Blanche.
Le Biophonographe, cinématographe parlant (c. 1900) En-tête de lettre (Grenon, 1975, 205) |
Le Biophonographe (c. 1901) |
Il faut attendre l'année suivante, 1901, pour que le biophonographe connaisse une modeste exploitation commerciale. C'est dans les sous-sols du Grand Café (14, bd des Capucines, Paris), comme le cinématographe Lumière quelque temps plus tôt, que des projections sont annoncées en mai 1901 :
Les séances du Biophonographe ont lieu tous les jours de deux heures à sept heures et de huit heures à minuit, 14, boulevard des Capucines, salle du sous-sol du Gand Café.
L'Echo de Paris, Paris, 23 mai 1901, p. 2.
Dans ce même journal, un très long article est consacré au biophonographe... même s'il est surtout question des comédiens. Nous n'en transcrivons que les fragments où l'appareil est évoqué :
Chronique scientifique
L’immortalité des comédiens
Parmi les attractions qui sollicitent périodiquement la faveur du public, il en est une d'éclosion toute récente — sa mise au point définitive datant exactement d'hier —dont l'intérêt et la portée dépassent de beaucoup la mesure ordinaire des spectacles qui visent à l'amusement des foules. Il s'agit d'un nouvel appareil réunissant et combinant en une simultanéité parfaite le phonographe et le cinématographe et que son auteur, un ingénieur français, M. Normandin, a baptisé, du nom de : Biophonographe
L'idée n'est pas nouvelle et depuis longtemps-déjà faisait l'objet-de nombreux travaux dont les plus heureux n'avaient abouti, jusqu'à ce jour, qu'à des avatars tout au plus bons à remplacer la lanterne magique et à servir de joujoux d'appartements. Ce qui est nouveau, c'est le tour de force réalisé, c'est la précision des appareils employés, qui a permis de joindre au cinématographe qui reproduit les formes et les gestes, le phonographe qui reproduit la voix, cela avec un tel degré de perfection que c'est l'artiste lui-même qui apparaît devant nous, en vie, en beauté. Pas une hésitation, pas une fausse manœuvre ; la simultanéité des intonations et des mouvements est assurée avec une justesse incroyable ; on écarquille les yeux, on tend l'oreille, on est stupéfait, on est charmé. Tout d'abord on pouvait craindre le nasillement du phonographe ou que, les intonations restant exactes, le timbre de la voix ne fût changée ; il n'en est rien ; tout dans l'ensemble est frappant de vérité.
La presse avait été convoquée, et avec elle des artistes que cette question touche plus particulièrement. Tous étaient émerveillés. Une telle invention fera courir et amusera petits et grands ; mais elle a et doit avoir une portée plus haute.
[...]
Si le Biophonographe eût été inventé cent ans plus tôt, du moins serions-nous renseignés ; nous pourrions admirer et comparer, dire si Sarah a égalé Rachel et si Rousseil a égalé George. Puis, de ces illustrations tragiques, nous pourrions retrouver les traditions perdues ; elles seraient sous nos yeux ; nos oreilles entendraient les cris de leurs cœurs, les accents de leurs âmes si éprises d'art, si amoureuses de beauté ; elles revivraient devant nous comme un enseignement — qui sait ? comme un reproche peut-être à nos tragédiennes, d'aujourd'hui !
[...]
Par le Biophonographe on saura comment Coquelin interprétait Cyrano et comment Rostand voulait que Cyrano fût interprété.
[...]
Si le Biophonographe eût existé au temps de Molière, il nous montrerait aujourd'hui du Croisy jouant Tartuffe comme le voulait le poète. Et cela mettrait tout le monde d'accord, les comiques et les premiers rôles — ce qui n'est pas toujours facile.
[...]
Le Biophonographe comble cette lacune; il n'est donc pas seulement un amusement; il rendra de réels services à nos comédiens futurs tout en les préparant eux aussi pour la postérité ; il instruira nos petits-fils sur ceux qui furent les joies de nos soirées, qui assurèrent nos plaisirs les plus délicats… et les autres ; pour eux Sarah Bernhardt sera immortelle, et celle qui fut la belle Otero aussi. Heureuse postérité ; plus heureuse que nous, qui n'avons du passé que quelques toiles et quelques marbres, elle jouira de nos artistes et elle aura son Louvre… le Louvre de l'art dramatique.
GEORGES LUDWIG.
P.-S. — Les séances du. Biophonographe ont lieu tous les jours, de deux heures à sept heures et de huit heures à minuit, 14, boulevard des Capucines, salle du sous-sol du Grand Café.
L'Écho de Paris, Paris, 23 mai 1901, p. 2.
La tonalité quelque peu exaltée de tout l'article nous laisse sur notre faim, car il n'est jamais question des vues sonores qui ont été présentées lors de cette soirée spéciale... D'ailleurs, rien dans le reste de la presse de nous permet de compléter notre information. Toutefois, et compte tenu de ce qu'écrit Georges Ludwig, cette présentation apparaît comme une " première " officielle. cela confirmerait que le biophonographe n'est vraiment opérationnel qu'à partir de 1901. Quelques jours plus tard, c'est l'ancienne société E. Normandin, sise 23, rue Jean-Jacques Rousseau qui est déclarée en faillite :
FAILLITES DU 28 JUIN 1901
De la Société E. Normandin et Cie (en liquidation), ayant eu pour objet la fabrication et l'exploitation d'appareils à projection animée, dont le siège social était à Paris, 23, rue Jean-Jacques-Rousseau, et dont était gérant le sieur E. Normandin, demeurant à Paris, rue du Faubourg-Montmartre, 52.-M. Bourdel, juge-commissaire; M. Raynaud, syndic provisoire.
Le Figaro, Paris, 2 juillet 1901, p. 6.
Par ailleurs, la raison sociale de la Société E. Normandin subit des modifications et change d'adresse :
Paris.-Modifications.-Société E. NORMANDIN et Cie, 21, J.-J. Rousseau.-La raison sociale devient FOUCHIER, NORMANDIN et Cie.-Transfert du siège 52, fg Montmartre.-4 juil. 1901.-L.
Archives commerciales de la France, 7 août 1901, p. 982.
Désormais le nom du deuxième fondateur, Rodolphe Fouchier, apparaît dans le nom de la société.
Le biophonographe va connaître une certaine reconnaissance dès les origines. Un citoyen américain, Alan Dale, rédige, le 25 juillet 1901, un article, alors qu'il se trouve à Paris, " The Paris open air concerts ara open and there is air. " Outre plusieurs paragraphes consacrés aux music-halls parisiens, il évoque une projection privée du biophonographe :
The Folies-Bergere is closed. Darkness there, and nothing more. I had just about decided that there was nothing at all new on the Paris music hall carpet when through the courtesy of Ben Nathan of London I was able to see a private view of a new “bio-phonograph” invented by M. Normandin. This tries to solve the vexed question of combining the biograph and the phonograph.
The pictures are captured by the former and the sounds by the latter. One view showed a tenor singer, life-size, who went through all the Italian gestures of his song, and gave the song at the same time.
It was capital. You could have sworn that a living being was before you. But the other features were imperfect. The voices sounded whizzy and snappy, and didn’t impress you with the idea that they were taken phonographically with the biograph picture.
But M. Normandin claims great possibilities for his invention, and I should say that the bio-phonograph had a great future. I saw all the mechanism of the thing, and I’m sorry I can’t describe it. Unfortunately I haven’t a mechanical bump. Please excuse this unfortunate lack.
The Salt Lake Herard, Salt Lake City, 19 Aug 1901, p. 4.
Malgré les imperfections signalées, Alan Dale est conquis par la nouvelle invention. Ce précieux témoignage montre que les essais de Normandin et de Joly relatifs au cinéma sonore sont loin d'être des fantaisies. L'appareil va connaître d'ailleurs une exploitation modeste certes, mais bien réelle. Un biophonographe circule en Amérique latine, sous le nom de " biofonógrafo " et donne, en particulier, des séances à Rosario (Argentine, septembre 1901). D'autres sont offertes à Paris, aux Nouvelles Galeries "À la Ménagère" (octobre 1901) ou à l'occasion de soirées organisées par des sociétés savantes, comme la Société Médicale des Praticiens (novembre 1901)... Pourtant, les affaires ne semblent guère florissantes et la dissolution est prononcée en novembre 1901 :
Société du Biophonographe.-Dissolution.-Suivant délibération, en date du 10 octobre 1901, l'assemblée générale extraordinaire des actionnaires de la Société du Biophonographe (système Joly), société anonyme au capital de 120.000 francs, dont le siège est à Paris, 31, rue Blanche, a prononcé, à compter dudit jour, 6 octobre, la dissolution de la société ; nommé comme liquidateur M. Ernest Normandin, demeurant à Paris, 9, rue Soufflot, avec les pouvoirs les plus étendus.-.. 9/11 1901.
Cote de la bourse et de la banque, Paris, 16-17 novembre 1901, p. 3.
Peu après, c'est le brevet du biophonographe qui est cédé à un certain M. Roy :
Joly (vendeur)-Roy (acquéreur)-Normandin, 9, Soufflot (Domicile élu pour les oppositions)-Entrée en jouissance (1er déc.)-Brevet du Biophonographe "Joly" (Fonds vendus).
Archives commerciales de la France, nº 98, 7 décembre 1901, p. 1549.
Dernier acte, la faillite déclarée en décembre 1901 et qui met un terme aux activités cinématographiques d'Ernest Normandin :
Société du Biophonographe (système Joly).-Déclaration de faillite.-Un jugement du tribunal de Commerce de la Seine, en date du 10 décembre 1901, a prononcé la faillite de la société du Biophonographe, au capital de 120.000 fr., dont le siège est à Paris, 31, rue Blanche, ayant pour objet, l'exploitation des brevets pris ou à prendre par Joly et de ceux que pourra prendre la Société dans tous les pays, pour un appareil de synchronisme, permettant d'accoupler un biographe et un phonographe, la vente de brevets ou licences, la fabrication, la vente des appareils et accessoires, et en général, toutes les opérations pouvant se rattacher à ce genre d'industrie. (Ouverture à ce jour). M. Malesset, juge-commissaire, et M. Raynaud, 6, quai de Gesvres, syndic.-D. 12/10/1901.
Cote de la Bourse et de la banque et le Messager de la Bourse réunis, Paris, 13 décembre 1901, p. 3.
En avril 1902, la clôture de la faillite est prononcée :
Clôtures de faillites pour insuffisance d'actif, nº 52 Biophonographe (Noms), Soc. anon. dite Soc. du (profession), 31, Blanche (demeure), 25 mars 1902 (jugement).
Archives commerciales de la France, nº 52, 28 juin 1902, p. 825.
L'histoire du biophonographe ne s'arrête pourtant pas là, même si Ernest Normandin renonce à continuer ses activités cinématographiques. D'une part, le biophonographe continue à fonctionner à la Grande-Roue, au moins jusqu'en 1904. Nous savons que des forains l'utilisent également comme dans le cas de Pierre Iunk qui présente encore, à Rouen, en 1906, un biophonographe. D'autre part, la société parisienne E. Plan et Cie a repris l'exploitation et peut-être aussi la commercialisation de l'appareil. Nous en avons un exemple dans des projections organisées à Séville, en 1906, au Teatro Cervantes.
Le Biophone (1901-?)
Alors qu'Ernest Normandin délaisse le cinématographe, c'est son frère Edgard Normandin qui, le 27 septembre 1901 dépose, au tribunal de commerce, la marque "Biophone" pour désigner des "appareils cinématographiques et phonographiques reliés ensemble de manière à donner l'illusion complète de la vie ". Il est délicat de savoir si cette marque a désigné des appareils qui ont circulé en France entre 1901 et 1906.
Le Réalgraph (1903)
Il faut enfin évoquer une nouvelle marque " le realgraph ", déposée auprès du Tribunal de Commerce, le 24 juillet 1903, par Edgard Normandin. De façon presque simultanée, un appareil de ce nom est présenté, pendant quelques semaines, au Moulin-Rouge de Paris, puis au Nouveau-Cirque, au Ba-Ta-Clan... À la fin de l'année 1903, on présente un Excelsior Réalgraph à la Gaîté-Rochechouart, mais il n'est certain qu'il s'agisse du même appareil.
Et après (1902-1934)
Ernest Normandin va abandonner le monde du cinématographe, décision due aux problèmes de santé de son épouse :
Mon frère que j'avais avec moi voulait continuer, mais ta maman ne voulait plus entendre parler de cinéma, ça la rendait malade, elle m'appelait cabotin et me disait que ce n'était pas la peine d'aller à l'École.
Cet accident et l'abus des bains de mer en 1900 et 1901 l'avaient rendue très malade et par ordonnance du médecin, il fallut quitter Paris au début de 1902.
Normandin, 1933: 8.
Il quitte ainsi Paris, en avril 1902, et s'installe à La Lucette, en Mayenne, où se trouvent des mines d'où l'on extrait de l'antimoine et de l'or. Normandin qui fait partie de la société d'exploitation, la Société Nouvelle des Mines de La Lucette (1904), et en devient directeur. Il reste à La Lucette jusqu'en [1915], date à laquelle il accepte une proposition dun ministère des affaires étrangères :
Le ministère des aff. étrangères (Berthelot et [Koermencher]) qui s'intéressaient à la concession Rondon m'envoyèrent au ministère des munitions où on me demanda d'expédier de là bas du Wolfram, en sorte que mon seconde voyage (septbre 1916-août 1917) avait un double but : Rondon et Wolfram (on m'avait aussi demandé de l'antimoine mais [l'ouvrier] eut pas besoin.
Normandin, 1933: 17.
Par la suite, en 1925, Normandin participe à la fondation d'une nouvelle société, la Société Nouvelle des Carrières de St-Même-les-Carrières, dont il est administrateur délégué :
Je voulus mettre sur pied l'affaire de St-Même, encore affaire industrielle mais constituant une erreur de ma part.
J'avais tablé sur le passé, le présent n'était plus le même.
Normandin, 1933: 18.
C'est à cette époque qu'Ernest Normandin retrouve Henri Joly comme il le raconte lui-même dans son manuscrit :
Malheureusement pour moi je reçus la visite de Joly inventeur du Cinématographe.
Il était misérable après avoir été riche. J'aurais dû l'éconduire, j'eus pitié de lui et je le suivis dans 3 affaires : pendule électrique, rafraichissement des salles de spectacle et une autre dont je ne me rappelle pas le nom ! (un cinéma réduit pour familles).
Évidemment, je n'aurais pas dû le faire ! C'était de minime importance, mais nous avons tout de même laissé là, chacun 2 ou 3000 F, les quelques amis que j'ai entraîné avec moi (dont Soulé).
Aucune de ces affaires ne supportait la discussion, sauf le pendule électrique qui arrivait trop tard, et Joly que je connaissais n'avais pas ce qu'il fallait pour aller jusqu'au bout. (Il m'en avait fourni la preuve précédemment).
Peut-être ai-je pris ces affaires, en outre de l'aide à fournir à Joly, pou occuper mon personnel ?? En tout cas : erreur absolu.
Normandin, 1993: 19.
Joly n'a cessé de déposer des brevets au cours des ans. Celui du pendule électrique (FR 540468) date ainsi du 11 juillet 1922. Cette nouvelle collaboration n'a pas laissé de trace. Par la suite, Normandin se lance à nouveau dans de nouvelles affaires (exploitation frustrée d'une mine d'or au Maroc, Thubernic en Tunisie, la S.I.M., Grury...). Il tombe malade, le 29 mai 1932, il rédige ses mémoires en juin 1933 et décède l'année suivante.
Bibliographie
GRENON Charles, Les Temps héroïques du cinéma dans le Centre-Ouest, Société d'Études Folkloriques du Centre-Ouest, janvier 1975, 288 p.
LEFÈVRE Julien, Les Nouveautés Électriques, Paris, J.-B. Baillière et Fils, 1896.
MANONNI Laurent, " Repères biographiques sur Henri Joly ", 1895, nº 21, d´cembre 1996, p. 17-38.
NORMANDIN Ernerst, [Mémoires], texte manuscrit, 12 juin 1933, 27 p.
Remerciements
Nos remerciements aux descendants d'Ernest Normandin pour les documents qu'ils nous ont transmis.
Nos remerciements aux descendants de Gaston Prinsac pour les documents qu'ils nous ont transmis.
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26-27/02/1897 | France | Morlaix | Salle de l'Hôtel de Ville | Cynématographe Joly |
18-20/03/1897 | France | Quimper | Salle Autrou | Cinématographe Joly |
03/1897 | France | Pont-L'Abbé | Cinématographe Joly | |
01/04/1897-04/04/1897 | France | Lorient | Théâtre | Cinématographe Joly |
04/04/1897-05/04/1897 | France | Vannes | Théâtre | Cinématographe Joly |
juin 1897 | Brest | |||
14/11/1897-16/11/1897 | France | Chalon-sur-Saône | Salle de l'Hôtel de l'Europe | Cinématographe Joly |