Théophile PATHÉ

(Chevry-Cossigny, 1866-Saint-Mandé, 1923)

pathe theophile 01

Jean-Claude SEGUIN

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Jacques Pathé (Altkirch, 29/05/1831- Saint-Mandé, 09/12/1895) épouse (Paris, 26/04/1862) Thérèse, Émélie Kech (Altkirch, 17/03/1835-Saint-Mandé, 08/06/1896). Descendance :

  • Jacques, Martin Pathé (Paris 12e, 16/06/1858-Paris, 05/1941)
    • épouse (Venette, 29/12/1890) Marie, Louise, Hortense Desaint (Compiègne, 04/03/1858-Compiègne, 12/09/1893)
      • Jacques, Marius Pathé (Compiègne, 10/10/1892-Valence, 15/10/1918)
        • épouse (Fontainebleau, 08/04/1914) Isabelle, Louise Despland (Caluire-et-Cuire, 15/06/1895-) et divorce (Seine, 16/07/1917).
    • épouse (Vitry-sur-Seine, 14/06/1902) Louise Zimmermann (Blotzheim, 02/08/1870-)
      • Jacques, Martin [Zimmermann] Pathé (Saint-Mandé, 02/10/1897-)
      • René, Théophile [Zimmermann] Pathé (Saint-Mandé, 19/12/1898, rec.14/06/1902-)
        • épouse (Lons-le-Saunier, 06/09/1924) Renée, Marie, Louise Léontine Chevassu
      • Marie-Louise [Zimmermann] Pathé (Saint-Mandé, 19/03/1902, rec. 14/06/1902-Limeil-Brévannes, 04/04/1983)
        • épouse (Roissy-en-Brie, 29/10/1921) Sylvain Pouly.
      • Charles, Désiré Pathé (Saint-Mandé, 23/04/1903-Chalon-sur-Saône, 05/09/1970)
        • épouse (Paris 4e, 13/02/1933) Gilberte, Prudence Luret (Allemant, 14/12/1905-)
      • André, Louis Pathé (Paris 12e, 28/07/1911-Créteil, 10/07/1984)
        • épouse (Aubervilliers, 04/05/1936) Simonne, Lucienne Falempi.
        • épouse (Aubervilliers, 29/03/1958) Alice, Marie Bobenrieth et divorce (Bobigny, 06/03/1975)
  • Émile Pathé (Paris 6e, 12/02/1860-Pau, 03/04/1937)
    • épouse (02/12/1884) Laurentine, Antoinette Sabouret (Paris 18e, 1865-Paris 10/1928). Descendance :
      • Jacques, Émile Pathé (Vincennes, 15/08/1885-Vincennes, 05/05/1941)
        • épouse (Toulon, 07/08/1907) Augusta, Jeanne Gasquet (1884-1972). Descendance :
          • Germaine, Marie Pathé épouse (Vincennes, 07/02/1927) Henri Martin
          • Colette, Mireille, Louise Pathé (Londres, 10/1912) épouse (Vincennes, 20/04/1938) Paul Boulbin
        • épouse (1931) Simone Genevois
      • Charles, Émile (Vincennes, 23/09/1886-Cavagnac, 29/03/1945)
        • épouse (Cannes, 09/07/1932) Jeanne, Rose Musso
      • Adolphe, Emile, Édouard Pathé (Montreuil, 20/11/1887-Paris 9e, 10/02/1894)
      • Irène Pathé (1889-1968)
        • épouse Georges Besson. Descendance : 
          • Josette Pathé (Paris, 06/06/1911)
            • épouse Peillard
      • Maxime, Fernand Pathé (Montreuil, 1891-1967)
      • Edmée, Jane, Émilienne Pathé (Paris 9e, 08/07/1893-Vincennes, 23/07/1893)
      • Mireille, Marie, Émilienne Pathé (Paris 9e, 14/08/1899-Le Havre, 21/04/1983)
        • épouse (Neuilly-sur-Seine, 09/12/1919) Jean Gustave Reinhart
        • épouse (Paris 16e, 13/08/1929) Georges, Émile, Jean Mussard et divorce (Périgueux, 22/10/1940)
  • Charles, Morand Pathé (Chevry-Cossigny, 26/12/1863-Monaco, 25/12/1957)
    • épouse (Paris 12e, 18/10/1893) Marie Foy (Paris 14e, 14/07/1872-Nice, 20/12/1923)
    • épouse Alice, Anna Silet (Paris 5e, 18/03/1890-Viry-Châtillon, 27/02/1974)
      • Denise Pathé
        • épouse Pierre Lefaucheux
      • Odile Pathé
    • épouse (Bourg-la-Reine, 01/12/1927) Antoinette, Léontine Poueydebat (1882-Bourg-la-Reine, 20/12/1974)
      • Pierre Pathé (1910-Villejuif, 15/11/1997)
        • épouse ([1931]) Simone Genevois
        • épouse (04/11/1937) Ariane Guedeonoff
    • adopte (Nice, 17/03/1926)
      • Marie-Blanche, Alexina Chaudron [Pathé] (Vitry, 18/10/1898-1990)
        • épouse (Paris 2e, 22/05/1924) Georges Cusinberche (Clichy, 30/12/1899-Maisons Lafitte, 14/04/1991) et divorce (Seine, 11/07/1936)
    • [adopte]
      • Mary, Maud Rizzo Pathé (New York, 16/06/1906)
        • épouse (Roissy-en-Brie, 22/10/1923) Roger Pathé (Paris 18e, 31/12/1897-)
  • Joseph, Théophile Pathé (Chevry-Cossigny, 18/01/1866-Saint-Mandé, 17/07/1923)
    • épouse (Paris 11e, 29/02/1892) Stéphanie Cosson (Tennie, 14/04/1865-Paris 16e, 26/04/1933)). Descendance :
      • Suzanne Pathé (Paris 5e, 20/12/1890-Grasse, 07/01/1982)
      • Roger Pathé (Montreuil, [1895]-Paris 12e, 16/10/1895)
      • Roger Pathé (Paris 18e, 31/12/1897-Fay-aux-loges, 28/10/1989)
        • épouse (Roissy-en-Brie, 22/10/1923) Mary, Maud Rizzo (New York, 16/06/1906)
      • Marie, Charlotte Pathé (Paris 18e, 09/12/1900-Paris 18e, 09/11/1974)
        • épouse (Paris 8e, 17/07/1920) Rodolphe, Jean Viaux (Ancy-le-franc, 04/02/1889-)
        • épouse (Paris 16e, 18/02/1939) Henri, Louis, Désiré Peccate (Paris 16e, 12/11/1890-La Celle-Saint-Cloud, 19/09/1969)
      • Théophile Pathé (Paris 19e, 23/08/1901-Paris 15e, 31/01/1968)
        • épouse (Tours, 12/05/1949) Paulette, Emma, Germaine Petibon (Tours, 1914-Louveciennes, 2013)
  • Henri, Alexandre, Antoine Pathé (Vincennes, 24/05/1868-Saint-Bernard, 30/07/1868)
  • Joséphine, Élisabeth, Eugénie Pathé (Vincennes, 14/02/1870-Saint-Mandé, 16/01/1892)
  • Marie, Anna, Jeanne Pathé (Vincennes, 29/05/1872-Duneau, 22/10/1872)

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Les premières années (1866-1903)

Né à Chevry-Cossigny, Théophile Pathé, se retrouve très jeune en Alsace: 

A la fin de la guerre de 1870, mon père, petit garçon de 5 ans, était revenu en France, ayant quitté Altkirch, en Alsace, où il y avait été mis en nourrice, puis presque oublié, jusqu'à l'âge avancé de sept ans. N'ayant alors parlé que l'allemand ou plutôt le patois alsacien, les petits français de Vincennes, ses compatriotes, l'avaient mal reçu et traité de "sale Prussien", sans se douter du reste que ce qualificatif "sal" tire son origine de l'ancien allemand ! Devant cette inimitié enfantine, mon père avait vivement oublié l'allemand et appris le français !


Suzanne Pathé, Souvenirs ensoleillés d'une éducation à l'américaine, tapuscrit, [1964], p. 162

Élevé "à la dure", le jeune adolescent est mis en apprentissage, dès l'âge de douze ans, chez un boucher :

Mon père garda toute sa vie un cruel souvenir de cette existence pénible de gavroche parisien maltraité, mal nourri, mal vêtu et ayant, le plus souvent, des chaussures percées.


Suzanne Pathé, Souvenirs ensoleillés d'une éducation à l'américaine, tapuscrit, [1964], p. 9.

Il va exercer de nombreux métiers au cours de son adolescence et sa vie de jeune homme :

Homme, mon père fut tour à tour garçon boucher, livreur, peintre en bâtiments, cocher de fiacre, garçon de café. Il exerça l’un ou l’autre de ces métiers comme ouvrier, selon les possibilités occasionnelles, changeantes et restreintes dans un monde où la protection sociale des prolétaires ou des travailleurs de toutes catégories était inexistante.
[…] Comme patron à son compte, mon père fut cafetier-buraliste, hôtelier, restaurateur, industriel et propriétaire d’une mine de talc en Italie.


Suzanne Pathé, Souvenirs ensoleillés d'une éducation à l'américaine, tapuscrit, [1964], p. 12-13.

Il excerce le métier de boucher au moment où il est appelé pour son service militaire dont il est dispensé au motif d'avoir un frère sous les drapeaux. Il va accomplir cependant deux périodes, la première au 31e régiment d'infanterie (3 novembre 1886 au 3 janvier 1888) et la seconde au 113e régiment d'infanterie (1er octobre au 15 novembre de 1890). Entre 1890 et 1894, il excerce différents métiers dont ceux de cocher de fiacre et de cafetier-buraliste (Montreuil-sous-Bois). Son frère Charles Pathé, qui s'est lancé dans l'exploitation du phonographe d'abord, puis du kinétoscope (1894) et enfin du photozootrope de M. Joly. Dès 1896, la société Pathé-Frères est constituée. Suzanne Pathé, fille de Théophile, évoque en ces termes l'association des frères Pathé :

Ce fut alors que mon oncle Charles causa à nouveau à ses frères : Jacques, Émile et mon père, qui, lui, avait justement vendu son bureau de tabac et débit de vins à Montreuil-sous-Bois ; il les décida sans trop de peine à s’associer avec lui, en vue de fabriquer au début des films pour le kinétoscope. Cette fabrication devait être faite en se servant de l’appareil construit sous les indications de Monsieur Joly. L’apport de Charles Pathé dans cette association était le « photozootrope », quelques autres en cours de fabrication, et un petit atelier déjà installé. Ses frères, par contre, fournissaient huit mille francs comptant chacun, cependant que l’exploitation rémunératrice de la vente des phonographes et cylindres restait exclusivement la propriété de mon oncle Charles. En attendant que puisse y être adjoint le cinématographe, le premier objectif de cette nouvelle entreprise devait donc être la fabrication des courtes bandes pour Kinétoscope qui mesuraient 12,50 m chacune, et se vendaient entre 60 et 100 francs pièce. Les demandes de ces petits films étant considérables, ceux-ci, pensait-on, donneraient un profit immédiat intéressant.
Après des débuts peu heureux, puis une discussion entre trois des quatre belles-sœurs, à propos de rien, qui aidaient au siège de l’entreprise, 72 cours de Vincennes, mon père décida de se retirer, ce que fit aussi mon oncle Jacques, l’aîné des quatre frères. Ils furent remboursés tous les deux et mon oncle Charles resta seul associé avec mon oncle Émile avec élimination du travail des deux belles-sœurs, créant la " Maison Pathé-Frères, Phonographes et cinématographes ". Mon oncle Charles ayant aussi consenti alors à faire l’apport, pur et simple, de son affaire de vente de phonographes et cylindres dans cette nouvelle association.


Suzanne Pathé, Souvenirs ensoleillés d'une éducation à l'américaine, tapuscrit, [1964], p. 39-40.

En réalité, la version de Charles Pathé diffère quelque peu de celle proposée par Suzanne. À la mort de leur mère, les frères Pathé se réunissent pour lui offrir un capital de 24 000 francs afin de constituer la société Pathé-Frères (28 septembre 1896). Cette dernière s’occupe essentiellement à ses débuts de la commercialisation du phonographe ; or, le greffier de justice de paix, M. Giraud lui a commandé un appareil cinématographique et quinze films afin de pouvoir l’exploiter en Russie. Malheureusement, il ne lui a pas été possible de remplir ses engagements et n'a pu livrer l’appareil dans les délais impartis. Il est alors tenu de payer des dommages et intérêts qui s’élève à 20 000 francs. Cette nouvelle situation inquiète les frères et deux d’entre eux quittent l’association initiale. C’est la prudence qui semble avoir alors guidé les pas de Théophile qui ne doit guère croire en l’avenir du cinématographe pour se retirer aussi vite de l’affaire. Il reprend alors un nouveau débit de boissons et tabac, le "Petit Ramponneau", à Paris (18e). Théophile Pathé va transformer le local en un café-concert où finissent par se produire des figures célèbres de l'époque : Charles Rousselière, Polin... À la suite de spéculations malheureuses (1901), il est contraint de vendre tous ses biens et s'installe aux Buttes-Chaumont avec sa famille. Quelques mois après (1901), Théophile Pathé décide de prendre en gérance, en 1902, un hôtel à  Saint-Valérie-sur-Somme.

Représentant de Pathé-Frères en Allemagne (1903-1905)

Dans le but de développer ses activités en AllemagneCharles Pathé propose à son frère d'ouvrir une succursale à Berlin, inaugurée le 14 novembre 1903. Théophile Pathé se rend en Allemagne, accompagné de son épouse, de sa fille Suzanne et de Paul Pigeard, un jeune homme que lui a recommandé son frère. C'est au 2e étage du nº 73 de la Friedrichstrasse que Théophile installe le local prévu pour ses activités : "THEOPHILE PATHE", Vertreter Der Compagnie Générale des Phonographes, Cinématographes et Appareils de Précision, Früher "Etablissements PATHE-FRERES" ("THEOPHILE PATHE", représentant de la Compagnie Générale des Phonographes, Cinématographes et Appareils de Précision, Anciens Etablissements PATHE-FRERES").

berlinfriedrichstrasse

Berlin, Friedrichstrasse, c. 1904
[La succursale de Pathé-Frères, se trouve face aux magasins Thiery et Sigrand]

Dans un contexte peu favorable - le cinématographe n'est pas encore très implanté à Berlin -, Théophile Pathé parvient à convaincre un commerçant d'ouvrir une salle, puis il tente de présenter les films chez les forains. Suzanne Pathé offre dans ces pages toute la stratégie mise en place par son père pour vaincre les résistances locales:

Il n'existait dans tout Berlin aucun cinéma et les Berlinois ne semblaient nullement ressentir l'absence totale de cette distraction moderne. Il allait falloir, bien sûr, leur en donner le goût et ceci à des prix attractifs. Mon père "dénicha" un tout premier client qui voulut bien ouvrir, dans un quartier interlope, une misérable boutique sur la devanture de laquelle furent apposées deux grandes affiches en couleur qui devaient attirer le public. Ce fut tout juste si mon père ne dut pas, pour décider le client à "courir le risque de cette aventure", lui avancer, non seulement l'appareil de projection, les films et l'équipement (ce qu'il fit), mais encore lui remettre à l'avance une somme suffisante pour le dédommager d'une perte éventuelle, en cas d'échec de l'entreprise ! Le prix d'entrée fut fixé à 25 Pfennigs par personne, somme du reste importante à l'époque pour la bourse d'un ouvrier Berlinois qui payait 0,20 Pfennig pour un pain noir et 0,05 Pfennig pour une grande chope de bière. L'homme, contrairement à ce dont il avait été certain, ne fit pas faillite. Il put même bientôt payer l'installation et si ce premier théâtre de cinéma­tographe dans Berlin ne fut pas une réussite spectaculaire, au moins nous permit-il d'ouvrir le compte nº1 dans nos livres tout neufs, dûment munis du cachet officiel du Tribunal de Berlin sur la première page desquels était inscrit en grandes lettres: gothiques : "Mit Gott", soit :  "Avec Dieu".
Cependant le temps passait et il fallait, à tout prix, trouver d'autres clients: car bientôt les premières traites arriveraient à échéance. Mon père aurait pu demander à ses frères le renouvellement partiel ou total de ses effets, mais cette idée ne lui convenait pas. Il employa alors les grands moyens et le cinématographe étant surtout une attraction foraine, il décida d'aller démontrer aux forains, sur place, dans leurs salles de spectacle mêmes, cette toute nouvelle attraction offerte par lettres avec force détails, mais auxquelles bien peu avaient répondu. Pour ce faire, il intima l'ordre à notre jeune employé Paul X., le protégé de mon oncle Charles, de l'accompa­gner. Ils prirent en bagages les appareils. nécessaires à la démonstra­tion projetée, y compris une installation complète pour la projection à l'acétylène; les films, les affiches, tout fut emporté et voilà les deux commis voyageurs en route : l'un parlant à peine l'allemand, l'autre ne le parlant pas du tout.
Arrivés à la foire choisie, il s'agissait d'abord de découvrir un forain apte à pouvoir faire de la projection. Autant que possible on s'adressait d'abord à celui auquel on avait offert l'attraction nouvelle par lettre. En général, aucun ne voulait prendre même la peine de se faire démontrer la nouveauté, craignant aussi que le feu ne fusse mis à leur établissement ! Mais mon père avait un air sûr de lui, il faisait de grands gestes qui expliquaient mieux apparemment que ne le faisait l'allemand du jeune employé servant de traducteur, que ce qu'il offrait devait devenir la source d'un revenu miraculeux pour quiconque voudrait bien en faire l'essai. Monter l'appareil à projeter, la lampe à arc, la résistance et l'installation d'éclairage à l'acétylène, puis déployer l'écran pour la démonstration était une chose faite en un tour de main et qui semblait si simple, lorsque c'était mon père qui la faisait, que finalement certains forains consentaient à bien vouloir étudier la question et à envisager une addition à leur programme courant qui consistait soit en une exhibition de femme à barbe ou de lutteurs aux biceps imposants, de nains difformes mais soi-disant princes des Indes, de chiens aboyant en sautant à travers des cerceaux recouverts de papier de soie ou encore de prestidigitateurs faisant sortir, de brillants chapeaux haut de forme, des lapins, colombes ou drapeaux.
-"N'achetez pas", faisait traduire mon père par son aide, "je reste deux jours, trois jours avec vous, durant lesquels je travaille sans aucun frais pour vous. Selon la réaction du public, vous commanderez ou ne commanderez pas., et, qui plus est, si vous commandez, vous ne paierez que lorsque vous aurez fait quelques bonnes recettes avec mon attraction !" Qui ne se laisserait tenter par des offres pareilles ? Mais les forains· sont des gens difficiles à convaincre, habitués qu'ils sont à bien savoir eux-mêmes la différence qui existe entre la promesse et la réalité de ce qu'ils prônent à leur public de foires !
Ce Monsieur Pathé promettait beaucoup pour les décider, mais eux aussi promettaient monts et merveilles et ne tenaient pas grand chose de ce qu'ils annonçaient avec grande fanfare. Aussi ne se jetaient-ils pas sur l'appat de la nouveauté miraculeuse et à crédit que leur offrait ce Français gesticulant dont ils devinaient, plutôt qu'ils ne comprenaient exactement, toutes les promesses: faites par le traducteur. Mon père revenait à la maison avec peu de commandes, mais sans se lasser, il repartait, revenait et repartait encore. Ma mère pleurait en cachette tous les jours, et moi, chagrine aussi, je faisais pour tant des progrès en allemand, tandis que maman pensait tout bas que, sans doute, je n'aurais jamais l'occasion de me servir de mon savoir, forcés que nous serions bientôt de retourner en France !


Suzanne Pathé, Souvenirs ensoleillés d'une éducation à l'américaine, tapuscrit, [1964], p. 142-145.

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Projecteur Pathé renforcé-film 35 mm-1905
Fabricant: Pierre, Victor Continsouza
© collection privée

En quelques mois, Théophile Pathé parvient à faire démarrer ses activités commerciales, mais il se retrouve dans l'impossibilité de livrer des projecteurs que la maison Pathé ne lui envoie pas en quantité suffisante. Ces questions qui semblent d'ordre purement technique pourraient dissimuler, en fait, un des premiers éléments qui va conduire, quelques semaines plus tard à une tension, puis à une rupture.

1905 pathe vallouy

"Théophile Pathé" à Henri Vallouy
Source :  Fondation Jérôme Seydoux-Pathé

 À cette époque Théophile Pathé fait imprimer des lettres commerciales à l'en-tête desquelles figurent à la fois le nom " Établissements Pathé Frères ", et le sien " Théophile Pathé ". Cela introduit une certaine confusion dans la hiérarchie et pourrait être la marque d'une certaine indépendance. Pour ce qui est du contenu du courrier envoyé à Henri Vallouy, il évoque un " pavillon " qui pourrait être en relation avec les activités cinématographiques de Théophile Pathé à Paris :

Monsieur Vallouy,
Monsieur Pathé a reçu votre lettre ce matin et comme il est très occupé, il me charge de vous répondre. Il a reçu avant hier le bail du pavillon et qui n'est pas tout à fait comme vous l'indiquez, nous vous le retournons afin que vous y fassiez faire les rectifications nécessaires et Mr Pathé le signera à son voyage à Paris dnas les premiers jours de février. Si le propriétaire adhère, payez et commencez puisque Mr Pathé vous portera l'argent nécessaire pour le tout. Vous verrez vous-même que les arbres du jardin doivent être respectés. Faîtes-lui retirer cette clause, et aussi faites...


À Monsieur Vallouy, 28 janvier 1905. Source: Fondation Jérôme Seydoux-Pathé (reproduit dans KESSLER, 2013: 119).

Toujours est-il que les relations deviennent plus délicates et conduisent Théophile Pathé à prendre quelques nouvelles initiatives. Il va faire affaire avec Oskar Messter, industriel et constructeur d'appareils divers:

Sans tarder, mon père se mit donc en quête dans Berlin de trouver avant tout un fabricant qui voulut bien lui construire l'appareil de projection. Ce fut Monsieur Messter, industriel constructeur d'appareils divers qui se laissa convaincre par mon père et consentit à courir le risque qu'offrait la fabrication d'appareils cinématographiques pour lesquels il n'aurait qu'un seul et unique client : mon père. Il fallut s'engager à prendre 300 appareils la première année (c'était un chiffre astronomique), mais mon père signa l'ordre sans hésiter. Or, son audace devait s'avérer avoir été seulement une sage prévoyance puisque, quelques mois plus tard, il allait trouver le constructeur à nouveau et lui demandait d'accepter la commande de mille appareils, livrables en 2 ans, mais plus vivement même si cela devait être possible.


Suzanne Pathé, Souvenirs ensoleillés d'une éducation à l'américaine, tapuscrit, [1964], p. 146-147.

La prospérité de la succursale de Berlin - et le renoncement de Charles Pathé d'envoyer son frère pour le représenter aux États-Unis -  conduit Théophile Pathé, toujours à la recherche de nouveaux films à proposer à Georges Méliès de distribuer ses productions. Dès lors, la situation entre les deux frères va se tendre. Cela provoque une réaction très virulente de Pathé-Frères qui, en mars 1905, s'oppose à la vente des films de la Star Film par la succursale dirigée par Théophile Pathé. Dès lors, la rupture entre les deux frères est consommée.  

"Th. Pathé Frères", "Théophile Pathé et Compagnie", "Compagnie des Cinématographes Théophile Pathé" (mars 1905-juillet 1907)

Le 15 mars 1905, sans doute par prudence, Théophile, Édouard (54, rue du Faubourg St Denis) et Eugène (26, Impasse du Progrès) Pathé fondent la société en nom collectif "Th. Pathé frères" qui " a pour but, la fabrication, la vente et l'achat d'appareils cinématographiques, de films, appareils, matières premières et tous accessoires se rattachant à cette industrie." Le siège de la société est fixé à Paris, au 26, impasse du Progrès et le capital social est de 81.700 francs. Théophile Pathé apporte, en particulier, " les marchandises existant dans sa maison de Berlin 73 Fredrich Strasse, de films et divers " pour un total de 60.500 francs. Edouard et Eugène Pathé, quant à eux, " apportent à la Société, la raison sociale : " Pathé Frères ", en outre, le premier " apporte son concours et ses aptitudes professionnelles " et le second " l'installation, le matériel, le droit au bail, et les loyers payés d'avance, d'une usine créée pur la fabrication des appareils formant l'objet de la dite société laquelle usine est située à Paris, impasse du Progrès 26 ".

Charles Pathé décide alors d'ouvrir une nouvelle succursale, en mai 1905, sans prévenir son frère. C'est M. Cardis, propriétaire  des magasins Thiery et Sigrand, qui se trouvent face aux bureaux de Théophile Pathé et avec lequel il s'est lié d'amitié, qui lui découvre l'existence de cette concurrente :

Puis, nous ayant appelé, ma mère et moi, il ajouta s'adressant à Monsieur Cardis :
-"Montrez-nous ça !" En même temps qu'il nous entraînait tous les trois hors de l'appartement. Avec l'aide de notre guide, en moins d'une minute, nous fûmes tous les quatre sur les lieux indiqués et nous pûmes voir, posé devant les fenêtres du premier étage d'un immeuble situé, en effet, tout près de celui que nous habitions, un grand panneau publicitaire, tout neuf, avec l'inscription peinte en grandes lettres bleues sur fond blanc : "Succursale de la Compagnie Générale des Phonographes et Cinématographes, Anciens Etablissements Pathé­ Frères". Un panneau publicitaire enfin, tout semblable à celui qui au troisième étage du 73 de la Friedrichstrasse, indiquait que Théo­phile Pathé était le représentant de la même maison.


Suzanne Pathé, Souvenirs ensoleillés d'une éducation à l'américaine, tapuscrit, [1964], p. 214.

Cette situation nouvelle conduit Théophile Pathé à rejoindre Paris, alors qu'il laisse sa femme et sa fille, Suzanne aux commandes du commerce de Berlin.

C'est au cours de l'année 1906 que la situation commerciale de Théophile Pathé semble se consolider. Le 4 juillet 1906, il fonde avec Louis Morénas la société en nom collectif "Théophile Pathé et Compagnie" et installe ses bureaux 6 rue de Lancry (10e), à Paris. Puis, le 13 décembre 1906, se constitue la Compagnie des Cinématographes Théophile Pathé dont le siège se trouve au 99, rue de Richelieu (2e), à Paris. Toutefois, la gestion de la nouvelle société se révèle délicate et Théophile Pathé voit vite sa position au sein de sa société se dégrader. Finalement, il renonce à diriger la société et il est remplacé par Alexandre Promio, dès le 30 juillet 1907 (→ Compagnie des Cinématographes Théophile Pathé) et conduit à sa démission en juillet 1907. Quelques mois plus tard, un journaliste lui consacre un long article qui ignore - ou feint d'ignorer - qu'il n'est plus directeur de la société :

Instantané
THEOPHILE PATHE
Nous vivons à une époque où le cinématographe règne en maître : il n'est donc pas inopportun d’apporter l'hommage de ces lignes spéciales à l’un des hommes qui ont le plus etl le mieux contribué à développer celle science théâtrale nouvelle celle qui procure tant de joies et de distractions aux petits comme aux grands, dans le monde entier.
Pour ne parler que de la France. M. Théophile Pathé peut revendiquer une bonne part dans ces succès car depuis l'époque encore récente où les projections tremblaient el incommodaient la vue, il a travaillé sans cesse à améliorer, à perfectionner ses appareils, et il serait injuste de ne pas reconnaître son mérite.
L’aimable industriel, est encore dans la force, de l'âge : c'est un tempérament laborieux, une intelligence clairvoyante remplie de prévoyance par conséquent, et qui au surplus déployé sans cesse beaucoup d'initiative.
Dans la Compagnie des Cinématographes qui porte son nom el son prénom, Théophile Pathé a donné la mesure de ses capacités techniques, en suivant pas à pas les progrès et l'évolution de l'industrie nouvelle mais déjà colossale par son extension el l'attrait Inépuisable qu’elle exerce sur le public. Celte Compagnie a rapidement connu la prospérité : il est vrai que son capital de deux millions de francs, a été employé avec tact et mesure ; sa marque est déposée pour la production de ses films, de ses photographies animées, de ses appareils cinématographiques complets enfin, avec leurs accessoires de tous genres. Citerai-je encore sa spécialité de vues en couleurs et sa pro[duc]tion annuelle de deux cents millions de photographies ? Je n’oublierai pas non plus de faire remarquer son autre spécialité de perforeuses et d'appareils à tirer brevetés, autant d'éléments de vitalité el de réputation pour la Compagnie des Cinématographes Théophile Pathé.
Et en présence de la popularité de ses projections animées elle a dû instituer une société filiale spécialement et exclusivement destinée à exploiter tous les appareils ci-dessus par l'organisation constante de représentations publiques à Paris, dans nos Départements et à l'étranger. J’aurai du reste l'occasion de m'occuper de cette seconde société dans un article ultérieur.
Je n’entrerai pas dans le détail de tous les appareils exposés rue de Richelieu n° 99. dans les vastes magasins de vente de la Compagnie Théophile Pathé, car ces détails seraient très longs pour le faible espace dont je dispose ici. Du reste, les étrangers de passage à Paris ne manquent pas de visiter ces établissements qui leur sont signalés par leurs cicérones parmi les curiosités de notre capitale.
J'ai voulu souligner le nom de Théophile Pathé, parce que sa personnalité est de celles auxquelles notre commerce international des cinématographes et des appareils qui s'y rattachent, doit une large place pour nos exportations : or c'est là je pense, le plus bel éloge que la presse puisse adresser à un notable fabricant.
Théophile Pathé au surplus est entouré de collaborateurs précieux et dévoués ; c’est du reste un chef bienveillant qui donne à tous l’exemple de l'assiduité à la tâche de chaque jour.
Stéphane Carrère.


Le Petit Moniteur universel, Paris, 5 mai 1908, p. 1. 

Les productions de Théophile Pathé (mars 1905-juillet 1907)

Privé désormais de la diffusion des films Pathé-Frères, Théophile Pathé cherche dès lors à étoffer le catalogue des films à vendre dans son commerce et prend la décision de lancer sa propre production. Sans aucune formation d'opérateur, il va confier la confection des films à un transfuge, André Wentzel, l'une des figures importantes de la maison Pathé-Frères :

Les opérateurs étaient Wentzel et Legrand. Au début Wentzel quitta la maison Charles Pathé pour rejoindre Théophile Pathé et en 1906 parti(t) ouvrir la "Cinès" à Rome.


Cinémathèque Française, Hughes Laurent, souvenirs de la maison Pathé des années 1904 à 1906, CRH105-B4

Hughes Laurent, dans un autre article, complète l'information : 

En 1903, il y avait à la maison PATHÉ deux opérateurs: M. VENTZEL [sic] et M. LEGRAND ; fin 1903 [sic], M VENTZEL quitta Charles PATHÉ pour aller chez le frère de celui-ci, Théophile PATHÉ, qui avait monté un petit théâtre, passage du Surmelin, et un atelier de montage, 9, rue des Gâtines.


H. Laurent, " Le décor de cinéma et les décorateurs ", Bulletin de l'AFITEC, 11e année, nº 16, 1957, p. 6.

C'est au Boulevard Gambetta, à Paris, que Théophile Pathé loue des locaux pour l'installation de son usine - "atelier de façonnage et dépôt de celluloïd (2e classe) " et bâtit le théâtre de prise de vues, sur un emplacement dans la cour. Pour le film vierge, il s'adresse aux Frères Lumière. La date du début de la production est à situer vers le printemps ou l'été 1905. Toutefois les premiers résultats ne sont guère concluants et Théophile Pathé incrimine son cinématographiste, sans doute André Wentzel et le rend responsable de l'échec artistique de ces oeuvres :

-" Mon metteur en scène est un incapable ", écrivait  mon père pour nous expliquer la raison de ce mauvais début. "Prenez encore un peu patience, j'apprends tous les jours davantage et j'aurai bientôt surmonté les plus grosses difficultés.


Suzanne Pathé, Souvenirs ensoleillés d'une éducation à l'américaine, mémoires inédites, 1964, p. 230 [collection particulière].

On s'en doute, la collaboration entre André Wentzel et Théophile Pathé prend fin et c'est désormais le directeur de la société qui, malgré son impréparation, va s'occuper du tournage des films :

Papa connaît maintenant la fabrication à fond. Nous avons un noyau de très bons ouvriers. Ils nous sont dévoués et pourront en encadrer de nouveaux dès que nous serons à même d'en embaucher d'autres. Ton papa s'est mis à la mise en scène ce qui fait de grandes économies et surtout, lui permet de travailler selon ses idées personnelles qui te plairont. J'ai dans mes bagages quelques nouveautés dont deux ~étonneront, ell seront certainement de gros succès. L'une a 200 mètres, l'autre 225. Papa est d'avis qu'il faut maintenant des bandes à long métrage, et souvent faire du "gros plan" comme ce fut le cas pour le "lunch d'enfants".


Suzanne Pathé, Souvenirs ensoleillés d'une éducation à l'américaine, mémoires inédites, 1964, p. 353 [collection particulière].

Alors que les affaires tournent plutôt bien, Théophile Pathé, qui commence à penser que la situation est désormais favorable, cherche à développer sa production et à avoir son propre catalogue :

Les grandes bandes ne nous reviennent pas à beaucoup plus de 600 ou 800 frcs, dès que nous en aurons suffisamment, nous ferons imprimer un catalogue, c'est indispensable pour démontrer que nous sommes des producteurs sérieux et constants et permettre à l'acheteur de composer tout un programme chez nous. 


Suzanne Pathé, Souvenirs ensoleillés d'une éducation à l'américaine, mémoires inédites, 1964, p. 353 [collection particulière].

Peu d'informations nous sont parvenues au sujet des films, de leur tournage et des acteurs qui ont participé à cette aventure. En ce qui concerne les opérateurs, si l'on exclut Théophile Pathé lui-même, il semble bien qu'il ne soit pas le seul à tourner la manivelle comme le suggère l'entrefilet ci-après :

Arrivés sur le Circuit aujourd'hui nos amis Harry Ray et Duc, venant pour la maison Théophile Pathé, prendre le Grand Prix de l'A.C.F. Mardi soir, tous les sportsmen empêchés d'aller à Dieppe pour des causes quelconques pourront suivre dans la plupart des établissements parisiens les péripéties de cette splendide course.


L'Auto, Paris, mardi 2 juillet 1907, p. 5.

Si l'identité d'Harry Ray et de Duc, reste mystérieuse, tel n'est pas le cas de Pauley , seul comédien qui a gardé le souvenir de cette époque : 

Pauley a fait du cinéma tout au début du "muet", aux temps héroïques où engagé par Théophile Pathé, il tourna, dans les rues de Vincennes, des grandes superproductions" qui mesuraient bien 150 mètres. A cette époque, on tournait toute une journée pour un cachet de 20 francs... "Mais comme dit Pauley en riant, j'avais dix-huit ans, j'étais svelte; les poursuites, les batailles et les arrosages qui étaient alors l'essentiel d'un film ne me faisaient pas peur."


Le Figaro, Paris, 2 novembre 1934, p. 6.

Paul Thomas a également gardé le souvenir de sa participation à la compagnie Théophile Pathé

Quand j'ai débuté au cinéma, dit Paul Thomas, j'avais à peine seize ans. C'était en 1905. Mes parents auraient voulu que je continue mes études, mais je ne rêvais que mécanique et chimie, et je finis par l'emporter. Un cousin me fit entrer dans les laboratoires de Théophile Pathé, où je commençais par faire modestement le tirage et le développement des négatifs.
Mon ambition, c'était naturellement de tourner. Je ne devins cependant opérateur que de longs mois après mon arrivée au laboratoire. Le premier film auquel je travaillai, je m'en souviendrai toute ma vie, s'intitulait La Retraite. Denizeau l'avait mis en scène et Desgrieux y tenait le rôle principal.
Un peu plus tard, Théophile Pathé réalisa Le Capitaine de Köpenick [sic]. Nous tournions les extérieurs rue de Ménilmontant, et cela n'allait pas sans peine. Le cinéma n'était pas comme aujourd'hui entouré d'admiration et d'égards. Dès que nous installions nos appareils sur le trottoir, un agent s'approchait et nous ordonnait de circuler. Pour avoir un peu la paix, nous étions obligés d'agir comme font les vendeurs " à la sauvette"· Nous repérions un endroit à peu près désert et nous postions des guetteurs pour nous prévenir, le cas échéant, de l'arrivée des agents ; nous nous hâtions alors de déguerpir pour reprendre le même manège un peu plus loin.
FRANCIS AMBRIÈRE.


Francis Ambrière, "Les souvenirs de Paul Thomas", L'Image, nº 15, Paris, 1932, p. 12.

Pour les autres figures, il faut s'en référer à Suzanne Pathé qui apporte des informations rares sur les débuts de la production. Tout d'abord quelques photographies, traces de tournage ou de films.

1905lettrebondieu 1907 1908 dame au camelia
La Lettre au bon Dieu (Théophile Pathé, c. 1905)
[Les enfants →] Roger Pathé (6 ans), Théophile Pathé (4 ans), Marie-Charlotte Pathé (5 ans)
© collection privée
La Dame au camélia (c. 1907-1908)
"au repos après une scène"
→ X, Marie de l'Isle, Geniat, Théophile Pathé, X, Suzanne Pathé
© Collection privée

Suzanne Pathé évoque également quelques autres titres : La Loi du pardon et La Retraite qui auraient été plagiés par la maison Pathé-Frères : le premier devient L'Âge du coeur et le second, Le Déserteur. Mais l'acteur le plus important qui commence, en 1905, sa carrière avec Théophile Pathé, c'est bien sûr Max Linder, alors qu'il est encore un inconnu. Il est probable que l'acteur ait tourné alternativement pour les deux éditeurs de films. En ce qui concerne Les Débuts d'un collégien (hiver 1905-1906), il est imité par Pathé-Frères, sous le titre Le Premier cigare d'un collégien (1908). Il existe de très nombreux autres films (→Compagnie Théophile Pathé).

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Théophile Pathé
© collection privée

Sa situation personnelle au sein de la compagnie qu'il a lui-même fondée se détériore vite au cours de l'année 1907 et en juillet, il est écarté de la direction et remplacé par Alexandre Promio.

Et après (août 1907-1923)

Les années qui suivent restent plus incertaines. Son nom reapparaît en 1908, associé à un cinématographe:

Le Ciné Pathé à Montbard.-Le cinématographe "American Théophile Pathé" donnera samedi 5 et dimanche 6 septembre, à 8 heures 1/2 du soir, dans la salle des fêtes de l'hôtel Lefol, deux grandes représentations avec les toutes dernières nouveautés parues: drames, voyages, féeries, grandes scènes comiques. Programme sensationnel,tour à tour d'émotion poignante et de fou rire irrésisitble. Le succès remporté par cet établissement dans notre contrée lui présage dans notre ville de nouveaux lauriers. Prix des places: réservées, 1 fr. ; premières, 0.75; secondes, 0.50. Enfants demi-place.


Le Progrès de la Côte-d'or, Dijon, 4 septembre 1908, p. 4.

Désormais, Théophile Pathé abandonne les activités liées au cinématographe. Il apparaît en 1909 comme fabricant de phonographes. Il disparaît en 1923.

Son fils, Théophile Pathé (1901-1968), travaille dans le cinéma et publie l'ouvrage Le Cinéma en 1942.

Bibliographie

KESSLER Frank, " Pathé versus Pathé, Exhibit A: Reading an Archival Document ", Film History, Vol. 25, No. 1-2, “Inquiries, Speculations, Provocations” (2013), pp. 118-129.

PATHÉ Suzanne, Souvenirs ensoleillés d'une éducation à l'américaine, mémoires inédites, 1964, [collection particulière].

SEGUIN Jean-Claude, Alexandre Promio, Paris. L'Harmattan, 1999, 304 p.

SEGUIN Jean-Claude, "La Compagnie des cinématographes Théophile Pathé" dans Michel Marie et Laurent Le Forestier, La Firme Pathé Frères 1896-1914, Paris, AFRHC, 2004, p. 107-121.

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