PÉRIGUEUX

Jean-Claude SEGUIN

Périgueux, chef-lieu du département de la Dordogne (France), compte 31439 habitants (1894).

1896

Le Scénimatographe (Place Michel-Montaigne, 29 août-8 septembre 1896)

C'est à l'occasion de la foire de septembre que les Périgourdins vont découvrir des photographies animées grâce au Scénimatographe. Cet appareil, pour lequel aucun brevet ne semble avoir été déposé, est commercialisé par la Société Anonyme des attractions nouvelles dont le siège est à Toulouse depuis le mois de juillet au moins. La presse annonce l'inauguration des sèances :

LE SCÉNIMATOGRAPHE
PLACE MICHEL-MONTAIGNE
Ce soir samedi 29 août et jours suivants, le spectacle le plus attractif de l'époque, le grand succès actuel de Paris et de Londres, la dernière merveille du siècle : La photographie vivante animée et en couleur, effets merveilleux obtenus par projections électriques grandeur nature.


L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, dimanche 30 août 1896, p. 3.

Deux jours plus tard, quelques informations supplémentaires sont publiées. Elles concernent essentiellement les horaires des séances :

LE SCÉNIMATOGRAPHE
PLACE MICHEL-MONTAIGNE

La photographie vivante, animée et en couleur, par le Scenimatographe, appareil perfectionné de la Société anonyme des attractions nouvelles.
Effets merveilleux obtenus par projection électrique grandeur nature.
Les exhibitions ont lieu chaque jour et se succèdent de demi-heure en demi-heure. Le jour, de 4 heures à 6 heures ; la nuit, de 8 heures à 11 heures.


L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, mardi 1er septembre 1896, p. 3.

Il faut attendre un nouvel article pour avoir une idée de la programmation proposée :

LE SCÉNIMATOGRAPHE
PLACE MICHEL-MONTAIGNE

À voir, sur la place Michel-Montaigne, l'appareil et ses effets merveilleux pour la photographie animée, le dernier grand succès du jour.
A citer, principalement, la Rue de Moscou, très mouvementée, le Couronnement du Tzar, le manège militaire, le marché de Vienne, la danse d'Auvergnat, la danse serpentine en couleurs, etc., etc.
Ces divers sujets donnent absolument l'illusion des scènes vécues, de l'être et de l'existence des choses. Le Scénimatographe est une merveille que tous, grands et petits, doivent voir ; c'est le plus joli spectacle du moment, aussi récréatif qu'instructif, scientifique, et à la portée de toutes les intelligences.


L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, vendredi 4 septembre 1896, p. 3.

Le lendemain, un nouvel article donne davantage de précisions :

Afin de répondre aux nombreuses demandes et pour satisfaire le public qui n'a pas encore assister aux exhibitions de photographie animée, l'administration du Scénimatographe inaugure, à partir d'aujourd'hui vendredi, des séances populaires : entrée, 0 fr. 50 centimes. Nous engageons tous ceux qui n'ont pas eu encore l'occasion de se rendre compte de ces merveilleux effets obtenus par la lumière électrique, à aller passer une demi-heure au Scénimatographe, place Michel Montaigne. Le spectacle est des plus nouveaux, attractif et instructif, même scientifique; les scènes animées qui se déroulent à l'œil du spectateur sont de grandeur nature et font éprouver un sentiment de surprise admiratrice, inconnu, inexplicable à tous ceux qui n'ont pas déjà vu cette dernière nouveauté, d'invention toute récente, le dernier grand succès de l'époque, la dernière merveille du siècle.
Les séances ont lieu tous les jours et se succèdent de demi heure en demi heure, le jour, de 3 heures à 6 heures: le soir, de 8 heures à 11 heures. Entrée, 0 fr. 50 centimes.


L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, samedi 5 septembre 1896, p. 3.

Une dernière annonce est publiée le 8 septembre.

Le Cinématographe Lumière d'Antoine Chavanon (Hôtel Didon/Salle des Fêtes, 9 septembre 1896)

perigueux hotel commerce
Hôtel du Commerce et des Postes. Propriétaire: Didon.

Dans les premiers jours de septembre, la presse locale annonce la prochaine arrivée du Cinématographe Lumière :

LE CINÉMATOGRAPHE DE MM. LUMIÈRE
Nous avons le plaisir d'annoncer à nos lecteurs l'installation très prochaine, à Périgueux, salle des fêtes de l'hôtel Didon, du véritable Cinématographe Lumière, qui a obtenu un très grand et très légitime succès dans toutes les villes de l'Europe où il a été présenté en public.-M. Chavanon, représentant de la maison Lumière, s'occupe de faire activer les travaux de décoration de la salle, de manière à présenter cette belle invention au public périgourdin, dans une salle confortablement aménagée, digne en tous points de nos compatriotes.


L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, samedi 5 septembre 1896, p. 3.

Une première soirée, réservée à la presse et aux officiels, a lieu le mercredi 9 septembre :

CINÉMATOGRAPHE LUMIÈRE
SALLE DES FÊTES DE L'HÔTEL DIDON
C'est ce soir, à 8 heures et demie, que le Cinématographe Lumière , dont nous avons annoncé récemment l'installation à Périgueux, ouvre ses portes au public.
Cette soirée d'inauguration, réservée à la presse et à quelques invités sera précédée d'une conférence sur le fonctionnement de l'appareil faite par M. Chavanon, directeur.
Demain mercredi et jours suivants, à 8 heures du soir, séances publiques. Entrée : 0,50 c.


L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, mercredi 9 septembre 1896, p. 3.

Le même journal propose un long compte rendu de la soirée inaugurale organisée par un collaborateur des frères Lumière, Antoine Chavanon : 

CINÉMATOGRAPHE LUMIÈRE
SALLE DES FÊTES DE L'HÔTEL DIDON
Les Périgourdins vont enfin connaître le Cinématographe Lumière qui, après avoir circulé dans toutes les grandes villes de France, vient de se fixer dans la salle des fêtes de l'hôtel Didon. Il avait d'abord été question de l'établir au théâtre ; mais la troupe Bellanger devant prendre possession de la scène vers le 25 courant, le représentant de la maison Lumière, qui ne veut pas quitter notre ville avant que tous ses habitants se soient succédé devant son écran, a dû chercher ailleurs, et ajoutons qu'il a eu la main heureuse, car la salle Didon, outre son excellente disposition, est à proximité des boulevards, sans compter que la réputation affable de ses propriétaires n'est pas faite pour nuire à l'entreprise, au contraire.
Nous avons pu nous en convaincre hier soir, à la séance d'inauguration, à laquelle se pressait un public élégant, ayant à sa tête les principales notabilités de notre ville, notamment le maire, le procureur de la République, l'inspecteur primaire, le secrétaire particulier du préfet, etc., etc., sans oublier les représentants de la presse locale. Cette séance a débuté par une conférence, faite par le directeur du Cinématographe, M. A. Chavanon, licencié ès-sciences, qui, en fort bons termes, nous a retracé l'historique de l'invention et des heureux perfectionnements qu'on su y apporter les frères Lumière. Toutes les explications, bien qu'étant appuyées parfois de mots techniques un peu barbares, ont pu être parfaitement saisies par l'auditoire, grâce aux démonstrations faites sur l'écran, au moment où l'image reproduite se déroulait dans l'appareil.
La série de clichés présentée hier soir est très intéressante. On a surtout applaudi Le clown au ruban, 'La sortie des ateliers Lumière, La Beignade [sic] en mer, La démolition d'un Mur et enfin L'Arrivée d'un train en gare, considérée à juste titre comme le clou de cette merveilleuse exhibition, que tous nos concitoyens voudront connaître, autant pour s'instruire que pour s'amuser. Les personnes qui, l'an dernier, à l'Exposition de Bordeaux, virent le Kinétoscope d'Edison, ne se doutaient guère que ce petit appareil, considéré comme un jouet, allait donner naissance au Cinématographe. Mais ce n'est pas tout, et la science, toujours en travail, n'a pas dit son dernier mot. Après avoir animé la photographie, on va la faire parler, et en Amérique, l'appareil des frères Lumière se double déjà du phonographe d'Edison. Que de surprises le XXe siècle ménage à nos enfants !
Fritz-Kobus.


L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, jeudi 10 septembre 1896, p. 3.

Au fil des jours, les programmes sont publiés dans L'Avenir de la Dordogne 

CINÉMATOGRAPHE LUMIÈRE
SALLE DES FÊTES DE L'HÔTEL DIDON
Aujourd'hui, jeudi, ouverture à 4 heures de l'après-midi. Voici le programme des nouvelles vues :
1. Départ pour le voyage; 2. Retour de voyage; 3. Le saut à la couverte; 4. Le serpentin; 5. L'arroseur; 6. Le repas de bébé; 7. Place des Cordeliers à Lyon; 8. La baignade en mer.
Entrée, 0 fr. 50.


L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, vendredi 11 septembre 1896, p. 3.

Un nouvel article rend compte du succès du cinématographe et de l'intérêt de cette invention :

CINÉMATOGRAPHE LUMIÈRE
SALLE DES FÊTES DE L'HÔTEL DIDON
Le public prend de plus en plus le chemin de la salle des fêtes de l'hôtel Didon et le Cinématographe augmente, chaque jour, ses recettes. C'est justice. Lorsque, moyennant un prix modique, l'on est admis à se distraire en s'instruisant, lorsque l'on peut se rendre compte des surprises extraordinaires que nous réserve ce siècle d'imaginations en travail constant, on a raison de secouer son apathie.
Les tableaux présentés sont pleins d'un réalisme frappant. La note cornique y est même parfois donnée. Le perfectionnement des frères Lumière est une curiosité artistique, une attraction pour tous, grands et petits, qui nous plonge dans la stupéfaction, car les moindres détails de la vie y sont observés. Nous citerons entre autres, parmi ceux exhibés et en mettant hors pair le train de voyageurs, Une baignade en mer avec ses lames de fond, ses franges blanches qui déferlent sur le rivage et ses baigneurs en pleine jouissance qui donnent, en été, des envies folles d'imitation ; puis l'Arrivée de voyage de toute une famille descendant d'omnibus et se livrant aux effusions d'amitié, aux marques de politesse, aux détails intimes qui sont l'apanage de tous ces retours au foyer ; enfin un Débarcadère de bateau à vapeur, page mouvementée et bien rendue. D'autres surprises nous sont réservées, nous le savons.
Où s'arrêtera-t-on avec cette invention ? à jouer des saquètes très probablement... peut-être... parlantes avec l'aide du phonographe ? Déjà certains cinématographes rendent les tons vrais des étoffes, sans colorer les chairs. On peut espérer mieux, et alors, ce sera la vie réelle. En attendant, ce que nous voyons est curieux et fort attrayant Il faut, paraît-il, 900 petites photographies pour constituer un tableau.
SALAMANDRE.


L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, mardi 15 septembre 1896, p. 3.

Alors que les séances tirent à leur fin, un article signé "S" évoque les tableaux animés et les effets qu'ils produisent sur le spectateur :

CINÉMATOGRAPHE LUMIÈRE
SALLE DES FÊTES DE L'HÔTEL DIDON
La collection de tableaux que M. Chavanon présente au public périgourdin a une réelle valeur et beaucoup d'entr'eux ont une portée artistique. Nous cueillerons parmi :
Dispute de bébés, page ravissante de fraîcheur et de naturel ; Partie d'écarté, que l'on jurerait observer derrière une glace de café ; Arrivée d'un train ; Sortie d'atelier ; Les Champs-Elysées ; Baigneurs en mer" ; Départ et arrivée d'une famille, et quantité d'autres panoramas charmeurs. Les plus petits détails de vie sont observés et visibles dans cette réduction de l'existence humaine et l'on se croirait transporté en face d'une race minuscule d'ombres surgie de terre. C'est le monde animé des miniatures, comme c'est aussi parfois la dimension réelle, saisissante de vérité. Des scènes comiques sont parfois intercalées dans le programme et jettent la note gaie sur son fond sérieux.
S.


L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, jeudi 24 septembre 1896, p. 2.

La clôture est annoncée pour le 27 septembre : 

CINÉMATOGRAPHE LUMIÈRE
SALLE DES FÊTES DE L'HÔTEL DIDON
Le Cinématographe Lumière qui pendant trois semaines, a fait les délices de ses nombreux visiteurs, va nous quitter: on nous prie, en effet, d'annoncer, pour dimanche prochain, la clôture définitive. Nous ne saurions trop engager nos lectrices et nos lecteurs à revoir encore cette merveille, qui réserve pour la fin ses meilleurs tableaux. Les familles qui ont su prendre de plus en plus le chemin de la salle Didon, ont voulu, par leur empressement, prouver au directeur qu'elles savaient apprécier le ton et le bon goût apportés dans une installation qui, bien que faite pour un laps de temps relativement court, a néanmoins toujours été digne de ses visiteurs, sous tous les rapports.


L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, samedi 26 septembre 1896, p. 3.

Répertoire (autres titres): Kermesse suisse, Pêcheurs tirant le filet; Un débarcadère, Un coin du port, à Marseille; Le Marché, à Marseille; Le repas de Bébé; Une discussion; La baignade en mer (L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, dimanche 13 septembre 1896, p. 3), L'Arroseur, La pêche de bébé, Une discussion; Une partie d'écarté; Une querelle de bébés; The Water Tabogant; La baignade en mer; L'arrivée d'un train en gare (L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, lundi 14 septembre 1896, p. 3). Bébé pêcheur, Les Tuileries à Paris; La Bourse à Marseille; Fête Suisse; Madrid: L'artillerie (L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, mardi 15 septembre 1896, p. 3), Arrivée d'un train en gare (L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, mercredi 16 septembre 1896, p. 3), Leçon de sabre, Le chapeau à transformation, La Garde Royale à Madrid (L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, jeudi 17 septembre 1896, p. 3), Leçon de bicyclette; Leçon de voltige; Forgerons; Leçon de sabre (L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, vendredi 18 septembre 1896, p. 2), Les cygnes, La leçon de voltige, Un prêté pour un rendu; La démolition d'un mur (L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, samedi 19 septembre 1896, p. 3), Pêcheur tirant le filet (L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, dimanche 20 septembre 1896, p. 2), Entrée du czar au Kremlin; Le czar et la czarine; Entrée du cortège à l'église; Les députations asiatiques; Mme la comtesse de Montebello; Le Te Deum; Paris: Les Champs Élysées (L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, lundi 21 septembre 1896, p. 3), Cortège du sceptre, Cyclistes et cavaliers (L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, mardi 22 septembre 1896, p. 3), Carmaux: chargement du coke (L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, mercredi 23 septembre 1896, p. 2), Une charge de cuirassiers (L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, jeudi 24 septembre 1896, p. 2), Berlin: place de la Gare (L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, vendredi 25 septembre 1896, p. 3), La Danse orientale, Bordeaux: Les allées Tourny (L'Avenir de la Dordogne, Périgueux, dimanche 27 septembre 1896, p. 2).

 

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