Henri VALLOUY

(Paris, 1855-Levallois-Perret, 1917)

vallouy henri portrait  

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Jean-Claude SEGUIN

Jean, Charles, Léon Vallouy (Paris, 24/03/1831-Levallois-Perret, 30/09/1900) épouse (Paris, 17/06/1854) Fanny, Marie Duboc (Montmartre, 11/04/1831-Paris 8e, 27/03/1894). Descendance :

  • Henri, Léon, Joseph Vallouy (Paris, Montmartre, 27/03/1855-Levallois-Perret, 23/12/1917) épouse (Paris 10e, 15/10/1881. divorce: 22/11/1894) Louise, Aurélie Carlier (Paris, 04/01/1866-). Descendance :
    • Maurice, Jean, Hippolyte Vallouy (Paris 18e, 19/07/1882-Paris 18e, 20/02/1883)
    • Lucien, Gaston, Marcel Vallouy (Paris 10e, 18/12/1883-Montreuil, 07/01/1884)
  • Félicité, Laurence Vallouy (Paris, 19/02/1856-)
  • Louis, Léon Vallouy (Montrouge, 01/08/1857-Paris 18e, 22/12/1896) épouse (Paris 18e, 21/06/1890) Anne, Baptiste, Constance Pinguet (Paris, Montmartre, 12/02/1857-Paris 20e, 09/01/1907). Descendance :
    • Louise, Marguerite Vallouy (Paris 18e, 07/03/1883-Casablanca, 13/03/1946) épouse (Shanghaï, 28/12/1907) Raphaël, Jules, Florent Mathéné (Audrieu, 1881-).
    • Alice, Lucile Vallouy (Paris 18e, 30/12/1884-Casablanca, 01/04/1950).
  • Eugénie, Amélie, Charlotte (Paris 18e, 26/11/1860-Paris 8e, 10/05/1898)
  • Lucie, Adèle Vallouy (Paris, [1865]-Paris 8e, 25/05/1894)
  • Louis, Eugène Vallouy (Paris 18e, 13/11/1866) épouse (Paris 11e, 19/12/1891) Joséphine, Eugénie, Adelina Patriarche (Talant, 29/04/1871-)
  • Ernest Vallouy (1867-)

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Le père d'Henri, Jean, Charles, Léon Vallouy, commis à conservation de Paris depuis le 1er octobre 1853 jusqu'au 1er juillet 1880, reçoit une pension d'invalidité (947 francs) depuis le 1er août de cette année. Il figure également comme brigadier forestier (1881). À son mariage (1881), Henri Vallouy est " employé de commerce ". Il l'est toujours en 1883. On ignore les conditions dans lesquelles il a rejoint le monde du cinématographe, mais nous savons qu'il est déjà " photographe ", au moment du décès de son frère Léon, Louis Vallouy, en décembre 1896, avec lequel il habite, 27 rue Ordener.

Le Comptoir Général de Photographie ([1896]-[1901]

Henri Vallouy travaille pour le Comptoir Général de Photographie, dès 1896, selon le témoignage de Georges Hatot fait de lui le premier opérateur de la maison Gaumont :

H. LANGLOIS : Au début du cinéma, je vous avais posé la question au sujet de M. Valoui qui débutait dans la maison Gaumont. Qui a fait démarrer la maison Gaumont.
M. HATOT : C'est un nommé Valouis, un opérateur. Valouis habitait rue de la Villette, presque en face chez Gaumont, dans les 82 ou 84. C'est lui qui a décollé la maison Gaumont.
[...] Les premiers films de chez Gaumont, c'est nous qui les avons faits avec un nommé Valouis qui était l'opérateur.


VALLOUY, 1948: 19-20

Le croisement de ces informations nous laisse penser qu'Henri Vallouy joue un rôle clé, au moins, entre 1896 et 1898 et il apparaît comme une figure essentielle lors de la mise en place, chez Gaumont, du secteur cinématographique . Nous savons qu'avant janvier 1900, Henri Vallouy tourne des vues cinématographiques dont certaines qu'il présente au Concours de Cinématographie de Monaco:

Concours de Cinématographie de Monaco.-Le jury chargé d'examiner les envois faits à la société des bains de mer a décerné les prix suivants:
MM. le docteur Doyen, Désiré-Adolphe Thiberville et Henri Valloury [sic], ex æquo pour le premier et les deux seconds prix, chacun 6.666 fr. 65; Albert Londe, 2.000 fr.; Fesquet, 2000 fr.; Emile Pouche, 1.000 fr.; Achille Lemoine, 1000 fr.; Georges Meurant, 1.000 fr.; Joseph Lemercier, 1.000 fr.; le baron d'Arquivillier, 1.000 fr.; Thévenard, 1.000 fr.


Le Petit Marseillais, Marseille, 5 février 1900, p. 2.

 Le compte rendu de la séance au cours de laquelle les vues en compétition sont présentées au public fait apparaître les titres des films dont certains vont figurer au catalogue Gaumont: Laveuses au bord de l'eau, Vaches à l'abreuvoirTroupeau de moutons et Déchargement de Bois à Nawim (Sibérie) sur le TranssibérienPour quel(s) film(s) a-t-il été récompensé ? Sans doute les premiers et peut-être avec Anatole Thiberville. Toujours est-il qu'il obtient le 1er prix doté de 30000 francs :

Sa modestie l'a toujours empêché de dire à Shanghai ce que Paris sait bien, c'est qu'il a eu le Grand Prix au Concours international de cinématographe de Monaco où l'enjeu était de 30.000 FRANCS. Les conditions du concours jugé par les plus hautes sommités d'Europe réunies à Monaco par le prince régnant Albert Ier étaient rigoureuses, il fallait avoir soi-même pris la vue, tiré le négatif et le positif, sans aide ; le public appelé à assister aux épreuves du concours était le premier du monde, assemblé pendant les grandes semaines de Monaco dans le Théâtre splendide édifié par Garnier, l'architecte de l'Opéra de Paris. Ce public composé de toutes les élites séjournant sur la Côte d'azur et venues ce jour à l'appel du Prince, ratifia par ses applaudissements et ses acclamations le choix du jury quand il proclama comme lauréat du grand prix : Henri Vallouy.


VALLOUY, 1906: 373.

On lui attribue parfois le film Chirurgie fin de siècle et il serait l'un des acteurs de Chapellerie et Charcuterie mécaniques.

Directeur d'un établissement d'articles cinématographiques ([1901]-[1903])

Henri Vallouy, alors qu'il travaille pour Comptoir Général de Photographie, est le directeur d'un établissement (82, rue de la Villette) qui s'occupe d'articles cinématographiques et qui, fort probablement, collabore au moins avec Gaumont. Comme l'indique Georges Hatot, il se trouve effectivement non loin de chez Gaumont (55, rue de la Villette). Grâce à l'argent du 1er prix, Henri Vallouy va pouvoir agrandir les Etablissements Vallouy (rue Lévert)

Le lauréat sut faire bon usage de l'argent si justement gagné, il agrandit les Etablissements Vallouy, de la rue Lévert, à Paris. créés par lui, pour le coloris des vues de cinématographe, et si appréciés de tous les cinématographistes.


VALLOUY, 1906: 373.

Le journaliste anticipe quelque peu puisque l'établissement est encore situé à la même adresse pendant quelques années.  Dès 1903, Henri Vallouy figure comme directeur d'un  établissement, situé au 82 rue de la Villette (19e). En réalité, Henri Vallouy semble avoir "passé la main" à l'un de ses proches parents :

Puis il en confia la direction a un membre très proche de sa famille qui les dirige encore avec un rare talent, lorsqu'il apporta sa collaboration à la puissante Compagnie du cinématographe Pathé à Paras. Un homme de sa valeur ne tarde pas à se faire remarquer et se désigne lui-même pour les postes de confiance et de haute direction.


VALLOUY, 1906: 373.

vallouy 1905 Annuaire almanach du commerce de l'industrie [...] bpt6k3212492k 1379 vallouy henri
L'Annuaire-almanach du commerce, de l'industrie, de la magistrature et de l'administration (1905), Paris, Didot-Bottin, 1904, p. 1309. Annuaire-almanach du commerce, de l'industrie, de la magistrature et de l'administration,
Paris, Didot-Bottin, 1907, 1, p. 1392.

La Société Pathé (1904-1906)

C'est probablement vers 1903 qu'Henri Vallouy rejoint la maison Pathé-Frères, ce qui n'exclut pas des collaborations antérieures. En tout cas, il figure sur le  Journal comptable de la Compagnie générale des phonographes, cinématographes et appareils de précision (nº 6, p. 119 et 166). Il part, pour le compte de la compagnie, en Espagne, et des dépenses pour scènes sont effectuées par Pathé les 12 et 18 avril 1904 pour des frais de voyage à son nom:

12 avril 1904 : Vallouy, opérateur. Voyage en Espagne ;
19 avril 1904 : Vallouy, opérateur. Reliquat de voyage à Barcelone, 199 F 40 ;
27 avril 1904 : Vallouy, opérateur. Versement en compte, 300 F ;
29 avril 1904 : Vallouy, opérateur. Sa note de frais de voyage et de prises de vues à Barcelonne [sic], 300 F 60 ;
30 avril 1904 : Vallouy, opérateur. Reliquat de compte versé à la caisse, 46 F ;
30 avril 1904: Vallouy, opérateur. Voyage et prises de vues en Espagne : 254 F.»


Journal comptable de la Compagnie générale des phonographes, cinématographes et appareils de précision, n°6, p. 119 et 166. Fondation Jérôme Seydoux-Pathé.

Le séjour du roi d'Espagne à Barcelone en est, sans aucun doute, l'objet principal de ce voyage. Henri Vallouy va ainsi tourner plusieurs vues de l'événement, même si un seul film figure au catalogue Pathé.

Grâce à un courrier qui lui est adressé par un collaborateur de Théophile Pathé à Berlin - peut-être Paul Pigeard - nous comprenons qu'il a en charge certaines de ses affaires à Paris, d'ordre privé ou d'ordre professionnel ? Il est simplement question de " pavillon " 

1905 pathe vallouy
{tip Document reproduit dans KESSLER, 2013: 119.}"Théophile Pathé" à Henri Vallouy
Source :  Fondation Jérôme Seydoux-Pathé

Monsieur Vallouy,
Monsieur Pathé a reçu votre lettre ce matin et comme il est très occupé, il me charge de vous répondre. Il a reçu avant hier le bail du pavillon et qui n'est pas tout à fait comme vous l'indiquez, nous vous le retournons afin que vous y fassiez faire les rectifications nécessaires et Mr Pathé le signera à son voyage à Paris dans les premiers jours de février. Si le propriétaire adhère, payez et commencez puisque Mr Pathé vous portera l'argent nécessaire pour le tout. Vous verrez vous-même que les arbres du jardin doivent être respectés. Faîtes-lui retirer cette clause, et aussi faites...


À Monsieur Vallouy, 28 janvier 1905. Source: Fondation Jérôme Seydoux-Pathé (reproduit dans KESSLER, 2013: 119).

Agent général de Pathé (Shanghai, 1906-[1909])

Henri Vallouy, dont les qualités semblent avoir été appréciées par Charles Pathé, va se voir confiée la lourde responsabilité de l'ouverture de l'agence de Shanghai :

Lorsque la création de la Société Pathé en Chine fut discutée. un seul nom fut prononcé à l'unanimité, celui d'Henri Vallouy, il faillait pour les hautes et difficiles fonctions d'Agent général, un caractère comme le sien, une connaissance de toutes les parties de la profession comme seul il était il les à les posséder dans la Compagnie.


VALLOUY, 1906: 373.

Charles Pathé connaît la polyvalence d'Henri Vallouy et juge qu'il est la personne idoine pour lancer l'agence chinoise :

M. Charles Pathé, directeur général de la Compagnie à Paris, le pressa d'accepter cette délicate mission de confiance que seul il pouvait remplir, il l'accepta parce qu'il avait conscience de son devoir, sachant qu'il était le seul des collaborateurs de la Compagnie capable d'organiser cette affaire colossale du cinématographe Pathé en Chine, étant passé maitre dans la prise de vues, le tirage des négatifs et des positifs, les virages et le coloris, la projection, pouvant ainsi apprendre aux clients de toute catégorie leur futur métier et initier "la Chine qui s'ouvre" au plus colossal des commerces modernes, celui du cinématographe.


VALLOUY, 1906: 373.

Malgré le ton quelque peu hagiographique de l'article de Phono-ciné-gazette, il offre malgré tout quelques autres informations sur l'installation de l'agence de Shanghai au  30A Kiu-Kiang road :

M. Henri Vallouy, au moment de s'installer, trouvait trop grand le magasin du 30 A Kiu-Kiang, à Shanghai et déjà il luí faut une succursale à Shanghai, dans les Etablissements Sennet, et une à Tien-Tsin et une à Kharbin, dans les memes Etablissements et d'autres qu'il prépare dans dix villes chinoises d'un million d'habitants.
Un magasin et trois succursales en trois mois, voilà le résultat du cinématographe Pathé en Chine.
[...]
Inutile de dire que le succès à Tien-tsin et Kharbin est le même qu'à Shanghaï et qu'il faut maintenant ouvrir d'uatres succursales en Chine, les trois existantes ne suffisant plus.
Au milieu de ce succès colossal du Cinématographe, qui a dépassé toutes les espérances comme chiffres d'affaires et rapidité d'extension, l'Agent général de la Société du Cinématographe Pathé M. Henri Vallouy est complètement débordé, malgré les collaborateurs dont il a demandé le concours.


VALLOUY, 1906: 373.

Le même article donne un portrait particulièrement flatteur d'Henri Vallouy dans le même ton que l'ensemble du texte:

Tout le monde connaît M. Henri Vallouy à Shanghaï. Sa correction parfaite en affaires, ses connaissances approfondies du cinématographe, sa courtoisie, ne lui ont fait que des amis et lui ont valu les plus hautes relations. C'est une des personnalités les plus sympathiques de la ville par sa bonne humeur inlassable, au milieu du surmenage imposé par le débordement des affaires.
Il trouve toujours le temps malgré tout, de rendre immédiatement mille services aux clients pour les pièces à changer dans le matériel, pour mettre au courant les nouveaux clients, pour leur former des opérateurs, faciliter leurs débuts et leur trouver des séances à faire etc., etc, bref, les aider à gagner beaucoup d'argent.


VALLOUY, 1906: 373.

Nous ignorons jusqu'à quand Henri Vallouy reste en Chine.

Et après... (1910-1917)

On retrouve, en 1910, Henri Vallouy ou du moins les "ateliers Vallouy", installés rue Saint-Maur : 

On dem. ouvrières coloristes au pinceau pour ciné. S'adr. Atelier Vallouy, 81, r. St-Maur.


Le Journal, Paris, 1er octobre 1910, p. 6.

L'existence de cet " Atelier Vallouy " semble avoir été de courte durée. Henri Vallouy décède en 1917.

La dernière information dont nous disposons, c'est qu'en 1921-1922, dans l'annuaire du commerce, figure Mme L. Malhéné-Vallouy, nièce d'Henri Vallouy, qui, au 11 de la rue du Moulin-de-Beurre (14e), tient un commerce de travaux photographiques, montages à sec, positifs sur verre en couleurs.

Sources

"Le Cinématographe Pathé en Chine. Emile Vallouy. Agent général à Shanghai", Phono-ciné-gazette, p. 372-374.

Commission de Recherche Historique, Débuts du cinéma. Les souvenirs de Georges Hatot. Cinémathèque française. lundi 15 mars 1948.

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