Le Premier Cigare

 

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Le Premier Cigare

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1 Reynaud 2  
2 Émile Reynaud Galipaux
3 1896  
4 France, Paris  

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30/06/1897 FranceParis Émile Reynaud Le Premier Cigare 

Le Conseil assiste à la première représentation du monomime de Galipaux « le Premier cigare » et, après avoir témoigné à Mr Reynaud sa satisfaction au sujet des progrès réalisés par cette intéressante adaptation, prie Mr Jules Chéret de s'entendre avec Mr Galipaux relativement à la rémunération qu'il convient de lui accorder.


Musée Grévin, Conseil d'Administration, 30 juin 1897

 

Cela ne date pas d'hier, ni d'avant-hier...
pour retrouver le premier que j'ai tourné,
il faut que je remonte
(la tête m'en tourne )  
à plus d'un quart de siècle en arrière.
J'étais bien jeune alors, si jeune que j'étais encore potache...
Je veux dire que j'étais grimé en potache, vêtu d'une belle redingote d'uniforme et coiffé d'un képi
crânement incliné sur l'oreille. 
Cela se passait dans l'atelier d'un photographe de la rue de Londres; 
mais, chose curieuse au lieu de me dire:
"Ne bougez plus !
on m'avait dit:
"Bougez tant que vous voudrez !"
D'habitude, je n'avais pas besoin de ce conseil, mais un photographe me faisant cette recommandation c'était tout à fait nouveau pour moi, 
et je crois bien qu'en novembre 1896, 
ça n'était pas arrivé  encore à beaucoup de mes confrères en art dramatique.
Je suis donc entré en scène d'un air vainqueur et brandissant un cigare de luxe.
J'ai allumé ce cigare, en ai tiré des bouffées impressionnantes puis j'ai mimé les impressions fâcheuses qu'il produisait peu à peu sur moi :
 m'affaissant par degrés, pâlissant, blêmissant, titubant, me reprenant par effort de volonté,
tirant d'énormes bouffées coup sur coup, puis renonçant à continuer
et passant par toutes les phases de l'abrutissement le plus pénible, jusqu'à ce qu'enfin, 
au moment psychologique,  ou plutôt physiologique , où allaient se déclencher les catastrophes finales, je disparaissais dans la coulisse.
Pendant cette pantomime, un appareil, dont je ne voyais que la boite de cuivre et l'objectif,
était placé à quelques mètres devant moi, et un monsieur grave tournait régulièrement
une manivelle d'une main automatique : c'était Émile Reynaud et son photoscénographe.
Quelques temps après, on m'applaudissait au Musée Grévin sur l'écran des Pantomimes. Lumineuses.
J'apparaissais vivant, frappant de vérité, en couleurs, 
(c'est même une des rares occasions où mes amis ont pu me voir des couleurs) avec toutes mes attitudes et mes moindres jeux de physionomie.
Et pendant de longs soirs, j'ai répété ainsi la scène du Premier Cigare des centaines de fois, sans m'en porter plus mal; quel coeur il faut que j'aie!
Il serait vraiment dommage de laisser passer inaperçu ce petit fait historique, à un moment où tout le monde se préoccupe de l'origine du cinéma, et je suis heureux , en le relatant, de contribuer à mettre en lumière le mérite d'un inventeur qui fût en la matière un des grands artisans de la première heure..."


Galipaux, Souvenirs. 

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